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 Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre

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MessageSujet: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyMer 13 Jan 2016 - 10:56

Nuit noire et tourments, entre le 8 et 9 mars 1997.


Les festivités de la veille continuaient à pétrir sa conscience de doutes et de désagréments, comparable à quelques poisons persistants autant que peu délicats ; inondant son esprit d'informations particulièrement difficiles à séparer les unes des autres ; s'accrochant aux éléments envisagés du bout des lèvres sans être vraiment formulés – trop dangereux. Trop aisément identifiable par leurs camarades. Par leurs observateurs.

Et encore, si ces considérations étaient les seules choses à envisager, assurément qu'il ne serait pas en train de se maudire. De serrer les poings en silence. De trahir l'hésitation et le manque d'assurance que tous attendaient ordinairement de sa part.

La réalité sordide de leur monde,  et toutes les horreurs s'y déroulant depuis plusieurs mois, le poussait progressivement à changer. À se heurter brutalement à la déchéance presque inévitable du carcan doré et mourant dans lequel il était né vingt ans plus tôt. À appréhender avec angoisse ce que le Maître escomptait obtenir de ses doigts ; de sa magie.

Et le sang séché sur le parvis de Sainte-Mangouste autant que les corps désarticulés d'un orphelinat moldu, ne faisaient que confirmer la voie terrible et morbide qu'il avait emprunté pour offrir un répit temporaire aux siens.

Le désintérêt puis la bassesse innommable d'une française – l'ombre d'une grimace se profila alors sur son visage – tout en s'avérant être des détails douloureux, n'en restaient pas moins négligeables par rapport à tous les autres. Par ailleurs, le jeune homme persistait à croire en la faveur du temps et de son office ; il finirait bien par adoucir les maux de sa chair et de son cœur. À l'évidence, une telle souffrance ne pouvait espérer survivre au tarissement de sa source.

Rowan craignait davantage la colère ; la fureur ; la rage qui attendaient patiemment l'heure promise pour embraser son sang. Et le corrompre.

En s'extirpant de la salle d'eau, l'ancien Serpentard se passa une main nerveuse sur le front, tant il était anxieux, et piqué dans sa quiétude par la nécessité de mettre les choses au clair. Non pas qu'il souhaitait ardemment convertir son colocataire aux sombres idéaux du Seigneur des Ténèbres – lui-même ne s'y reconnaissant guère ; en dépit de la propagande menée par les aurors et les partisans de Dumbledore, visant à promouvoir l'extermination de tous les disciples de Voldemort sans distinctions – mais parce que l’ambiguïté de la situation s'y prêtait. L'urgence de sa position, aussi. Tout comme le cas du dénommé 'Anton Costello'.

Bercé par cet impératif cinglant, pénible et éreintant, il alla s'asseoir sur les étoffes soigneusement pliées de son lit. Les mains croisées. L'air las.

Les petits sursauts d'un pan de couverture à la hauteur d'une étrange et minuscule créature, ne parvinrent même pas à le distraire. Ce soir, à son grand regret, les cartes allaient tomber. D'un côté comme de l'autre.
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Clemens Neubach
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyJeu 14 Jan 2016 - 12:46

Le banquet avait fait naître autant de nouvelles questions qu’il n’avait apporté de réponses. Toute cette mascarade si bien orchestrée avait un air trop parfait pour le quotidien de Haveirson, maintenu dans une droite ligne par une main de fer dans un gant d’acier. Le Comte ne leur avait laissé aucune largesse autre que le confort du strict nécessaire. Cela, il le leur avait certes offert dans le luxe, mais sans jamais leur laisser dessiner le désir d’une voie autre. Même le panneau des doléances n’étaient qu’un délicat mensonge destiné à ce qu’ils se gardent de la moindre demande. Clemens ne voulait simplement pas croire que le directeur avait accédé si facilement à leur curiosité brûlante, alors que des mois durant, il n’avait donné suite positive à aucunes de leurs revendications.

Poussant un long soupir de lassitude, l’étudiant arriva en haut des escaliers exigus qui menaient à la salle commune de Sinistros. Après un court échange avec Quinlan, l’Allemand avait décidé de rejoindre sa chambre pour évoquer les mêmes inquiétudes avec Rowan. Il ne doutait pas que son colocataire veillerait encore, ou du moins qu’il se montrerait prompt à la discussion dès le lendemain. Il était trop fin, trop habitué à ces démonstrations d’apparat pour ne pas en avoir remarqué les défauts. Pire encore, il en avait sûrement tiré des conclusions qui avaient échappé à Clemens et son compagnon. Il était difficile de trouver le sommeil quand on se sentait si troublé par un maître qui se voulait à la fois dominateur et bienveillant.

Le regard brillant de fatigue après une journée en tous points éreintantes, l’Allemand poussa la porte de sa chambre, tombant sans surprise sur la silhouette de son colocataire. Assis sur son lit, Rowan semblait pensif, les yeux perdus vers une cible qu’il ne pouvait déterminer d’où il était.

— Bonsoir vieux frère. Drôle de soirée, hmm ?

Clemens contourna l’empire bien organisé de son meilleur ami pour s’enfoncer vers la partie de la chambre, proche de la fenêtre, où régnait un désordre aux allures d’intimité abandonnée. Sa seule concession était de respecter la limite tacite dessinée entre leurs deux lits, et que ses affaires ne dépassaient jamais. Outre les quelques objets animés qui échappaient périodiquement à son contrôle et filaient se camoufler dans les chaussures ou sous l’oreiller de Rowan. Ses yeux bleus coururent sur ses affaires à la recherche d’un cintre, par respect pour le splendide costume prêté par Quinlan. L’étudiant ne se préoccupait certes guère de ses propres frusques, cela ne l’empêchait pas de prendre grand soin des vêtements qui lui étaient prêtés par le flamboyant médicomage.

Sa proie trouvée, il la jeta négligemment sur son lit avant de revenir s’appuyer à la structure du baldaquin. Ses yeux bleus tombèrent alors pour la première fois sur le visage de son meilleur ami, marqué par la fatigue et, semblait-il, de brutales délibérations internes. Troublé, mais silencieux, Clemens commença de déboutonner son veston, prenant soin de manipuler avec délicatesse les fragiles boutons ornementaux afin de n’en abîmer aucun. Il interrogeait Rowan du regard, trop absorbé par l’inquiétude qu’une telle attitude chez son meilleur ami éveillait en lui, qu’il ne remarqua même pas le remous des draps.
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyVen 15 Jan 2016 - 1:00

Toute sa vie, il s’était échiné à masquer la réalité de son jeu. À détourner le regard de ses camarades vers des détails nonchalants et futiles. D’une banalité à toute épreuve – et dans lesquels, pourtant, ils s’étaient tous laissés tomber avec un entrain singulier. Une innocence indécente. Comparable à celle de l’Abraxan rencontrée quelques jours auparavant ; l’ingénuité d’un être si prompte à la bonté et à la confiance, qu’elle en oubliait que tous n’en faisait pas le même usage.

Et que lui, tout particulièrement, la maniait selon sa convenance. La nécessité de la situation ; les enjeux ; les risques encourus. Pour autant, il n’avait jamais employé le mensonge comme une fin en soi – quoi qu’il se savait capable de le faire – mais davantage comme un vecteur. Un moyen aisé et prometteur, tant les gens se montraient sensibles à une voix infaillible plutôt qu’à la véracité des termes usités. Une facilité déconcertante. Assurément risible.

Pourtant, à force de dissimuler les cartes les plus précieuses de son existence, Rowan se retrouvait désormais face à une impasse terrible. Celle qui ne lui pardonnerait jamais un comportement de la sorte. Non pas en ce qu’il se révélait peu moral – un tel indicateur à l’aube du vingt-et-unième siècle était négligeable – ni en ce qu’il impliquait des forces imprécises – encore qu’il pourrait avoir de désagréables découvertes ici bas – plutôt en l’essence même de son manquement : l’absence de transparence. De juste retour des choses.

En dépit de tous les sacrifices que ses amis s’efforçaient de mener, il n’avait pas été honnête avec eux. Pas plus digne de confiance. L’excuse d’un impératif supérieur, d’une volonté inaltérable de sombrer seul – et de s’y perdre jusqu’à la mort – ne tiendrait pas les premiers coups portés à son encontre. Il le savait.

Cela le terrifiait diablement.

Au bout d’un long moment, pendant lequel l’esprit de Rowan s’était étiré et tordu en de sombres inquiétudes, son colocataire se présenta à leur chambrée. Les iris scintillants d’un épuisement prononcé ; loin d’être au bout de ses surprises.

À l’interrogation coutumière de son ami – depuis quand n’avaient-ils pas passé une soirée ordinaire ? – il jugea opportun de maintenir ses lèvres closes. Silencieuses. Concentrées sur le chemin à suivre pour aborder une thématique épineuse. Troublante. Mortelle à bien des égards. Un seul faux pas pouvait lui coûter beaucoup ; et présentement, il craignait avec douleur la possibilité toute tracée qui se tissait entre eux. Sournoise. Le perdre.

Et tout ce que cela impliquait.

Tandis que l’Allemand se séparait soigneusement de quelques étoffes, la quiétude de leur intimité devint oppressante. Écrasante. « Clemens. » Nommer le destinataire de sa repentance, même avec une voix aux accents tremblants, était la première étape censée de sa réflexion. La première mise au pied du mur, également. Il ne pouvait plus s’y dérober ; à moins de fuir. « En toute franchise, notre soirée instructive auprès du Comte...  N’est pas la seule chose qui me tracasse. Et ce, même si nous allons forcément l’évoquer par la suite. » Si tenté est que le destin leur accorde une suite.

Maintenant, il restait à savoir comment aborder la désopilante réalité de son affiliation. Les partisans du Seigneur des Ténèbres avaient mauvaise presse – et plus souvent pour des raisons justifiées que des torts avérés. Approcher ce détail – loin d’être insignifiant compte tenu de la haine brûlante et viscérale renvoyée par la Française lors de l’aveu – n’était pas une affaire aisée. Quel que soit l’embranchement à emprunter, il serait trop brutal ; trop violent pour ne pas provoquer un cataclysme dans leurs appartements. « Je... »

Quoi ? Que pouvait-il avancer comme argument ? Les justifications ne tenaient pas entre-elles. « Clemens, bon sang. » D’un mouvement vif, l’ancien Serpentard s’était levé. « Je suis dans une situation particulièrement instable et inconfortable depuis des mois. Et il ne s’agit pas seulement d’évoquer Anna. » La prononciation de ce prénom le raidit de haut en bas. La chair et l’esprit paralysés brièvement par une détresse excessive.

Il voulut quérir du soutien chez son ami mais s’en abstint de justesse. Mieux valait prévoir le pire scénario – et la douleur d’une rencontre fortuite avec la tête d’un lit. « Je pensais être capable d’encaisser les déconvenues et de tourner les choses en ma faveur pour vous préserver... Seulement, j’ai échoué. J’ai lamentablement échoué, Clemens. »

Une main nerveuse vint cueillir son front. « Je me suis fourvoyé comme je ne l’ai jamais fait auparavant. Comme je ne l’avais jamais fait de toute ma vie. » Les battements de son cœur s’accélérèrent – autant que la frayeur ; la rancœur : le désespoir. « Jouer contre l’aristocratie était dans mes cordes. J’en connaissais les codes et les limites. » Il se pinça violemment les lèvres, dans le même temps que sa contenance guindée se fissurait. « J’ai été apte à m’en sortir parce que j’avais suffisamment conscience de ce dans quoi je me lançais. »

Le sceau de la félonie lui brûlait la peau. « Ce n’est plus le cas désormais. »

Aux derniers mots avancés, toute la tension précédemment accumulée sembla s’estomper. Disparaître. Cédant sa place à la lassitude. Celle qui poussait Rowan à s’asseoir de nouveau sur la bordure de son matelas. Une sorte de résignation malvenue peinte sur le visage. « Si je n’avais que ma propre mort sur la conscience, toutes ces histoires seraient beaucoup plus simples à régler. » Le nœud du problème résidait définitivement en ce point : la survie des siens en échange de sa propre damnation. Un prix à payer qui ne cessait jamais de croître.

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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptySam 16 Jan 2016 - 18:02

Le silence s’installa entre eux, insidieux, tout aussi troublant qu’il n’était habituel. Clemens connaissait les longs temps de réflexion de Rowan, pour qui chaque mot devait être précisément choisi, souligné d’une intonation parfaite et gracieuse. Ses tribulations mentales n’importaient que peu dans cet état de fait, car l’apparat comptait bien plus que la détente. Son colocataire n’en était pas moins sincère derrière son attitude maniérée. L’Allemand le savait et s’y était fait avec le temps, bien qu’accepter tant de grâce lui avait été parfois difficile. Certaines discussions s’étiraient en turbulences nébuleuses pendant lesquelles aucun des deux amis ne comprenaient plus le langage de l’autre. La patience était ainsi une valeur indispensable pour qui voulait faire partie de l’entourage du noble Rowan Westminbrook.

Il continua de se défaire de ces vêtements si élégants mais si peu confortables, les installant avec soin sur le cintre, dans un geste si mesuré qu’il aurait pu rappeler les habitudes de son ami. La fraîcheur s’empara immédiatement de son torse nu, et il frissonna à l’instant exact où Rowan prononçait son nom. La coïncidence n’était que due au hasard, mais la parfaite correspondance de la sensation et la voix grave de son ami finirent de le convaincre que la soirée ne se terminerait pas sur une note légère. Clemens enfila un pull de grosse laine, déformé par les années afin de se préserver des assauts physiques, seuls qu’il allait pouvoir contenir. Véritablement inquiet à présent par l’entame de la conversation, l’étudiant s’assit en tailleur sur son propre lit, faisant face à cet ami si cher sur lequel il avait toujours pu compter. Les bras croisés et sans nulle trace d’espièglerie sur le visage, il écouta.

La fatigue rompait ses membres, son esprit était émoussé par un banquet trop riches en nouvelles interrogations. La disparition brutale du Comte après son éclat de colère avait fragilisé ses nombreuses théories. Ses certitudes avaient été réinstallées sur le plateau de jeu, enrichies de nouveaux embranchements et de nouvelles combinaisons. Ce jeu-là n’aurait bientôt plus rien d’excitant, même pour lui qui ne se lassait jamais de mystères. Les mots de Rowan flottaient en parallèle de ses réflexions, si opportunes qu’il peinait à comprendre le but véritable de son ami. Il avait dit ne pas vouloir parler du Comte, pourtant ses troubles paraissaient si liés aux troublants événements de Haveirson.

J’ai échoué.

Clemens releva un regard plein de questionnements, se passant ensuite une main sur le visage. Ils allaient probablement échouer dans leur lutte contre le maître des lieux, car ils se trouvaient déjà depuis longtemps sous son joug, probablement déjà manipulés sans s’en rendre compte encore. Mais il n’aurait définitivement pas évoqué au passé leur échec à venir, car les portes ouvertes étaient encore nombreuses. Il croisa les bras contre son torse, comme pour se préserver du flot de paroles dessinés par une voix d’outre-tombe. La tirade lancinante de son meilleur ami le blessait pour une raison qu’il peinait à appréhender. L’Allemand mettait un point d’honneur à ne pas laisser ses amis sombrer, quitte à se sacrifier lui-même pour leur propre bien. Il n’était ni courageux, ni altruiste, mais son inconscient avait juré une fidélité sauvage et brutale à ces quelques visages plus chers que sa propre vie. Il se serait jetté dans toutes les batailles, sans même en connaître les tenants et aboutissants. Comme il avait juré de surveiller et de protéger Daphné Greengrass là où Rowan ne pouvait étendre son ombre protectrice, sans avoir la moindre idée des turpitudes aristocratiques dont elle était victime. Leur bien-être avait été prioritaire, mais tout cela semblait ne pas avoir suffit.

— Rien que ta propre mort ?

Il fronça les sourcils, brusqués par l’incompréhension et l’impression de se trouver à mille lieues de son meilleur ami. Comme si l’ancien Serpentard qui se trouvait devant lui, affaissé sur son lit, n’était qu’une illusion. Le temps d’une seconde, Clemens hésita à tendre la main, persuadé que ses doigts ne traverseraient qu’une ombre un peu diffuse qui se dissoudrait alors pour confirmer que toute cette mascarade n’était qu’un mauvais rêve. Il roula des épaules pour chasser le mauvais pressentiment qui courait le long de son échine.

— De quoi parles-tu, Rowan ? Je ne comprends pas.

Si ce n’était ni le Comte, ni Anna, ni les troubles de ce mariage arrangé qui avaient fini par le briser… Alors qu’était-ce ? L’ombre menaçante du Baiser de St-Jean vint flotter devant ses yeux, mais il n’osa pas poser la question. Rowan était un homme de parole. Or, il avait promis.
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyDim 17 Jan 2016 - 12:53

Entre eux, la quiétude fréquente et sécurisante de leur contiguïté savait se parer des saveurs délicates de l’amitié ; de la compréhension de leurs états éreintés et fragilisés sans avoir besoin de s’astreindre aux mots. Ni à aucun vecteur linguistique qui soit. Il en était ainsi la plupart du temps, par la force de l’habitude et la cohésion de leurs pensées. Un regard éloquent suffisait à transmettre bien plus dans les émotions et l’urgence qu’une voix.

Pourtant, en cet infime instant de la nuit, haut lieu du basculement des dates, des ascensions et des dissensions ; le silence semblait davantage s’enfoncer dans une effervescence anxieuse que dans une ataraxie bienvenue. Il se révélait même imprégné d’effroi et de détresse. Pétri d’un besoin impérieux, dépassant de loin tous les autres.

Car la vérité – sa repentance et sa chute – résidait précisément en ce point. Rowan était tiraillé par la nécessité, presque scabreuse, de se défaire du marasme ambiant et oppressant. D’extirper avec une précision édifiante toutes les cartes de son jeu ; et de les plaquer violemment au sol, tel que l’on se défait d’une pioche malencontreuse et perfide. Sous le regard inquiet, bordé d’appréhension, de son meilleur ami.

Le poids des secondes s’affirmait davantage sur les épaules de l’ancien Serpentard alors qu’il s’échinait à aborder le problème. Sans être capable de se montrer assez clair pour que ce soit limpide – crispé dans une attitude sibylline qui le desservait assurément – ni assez rassurant pour inviter des auspices positives à sa tirade. L’ombre d’une menace écrasante perçait néanmoins dans ses propos – tout du moins, il espérait que ce soit le cas. Comment pouvait-il aborder autrement l’existence d’un Maître malingre et lugubre, dont le sinistre pouvoir avait marqué son épiderme avec un sceau immonde ? Annonciateur de mort ?

Lorsque la tension cessa enfin de l’étreindre – jugeant avec une lassitude défaitiste de la fin irrémédiable des choses – le jeune homme s’arrêta d’évoluer dans une fièvre troublante et lancinante. Celle qui, par l’aigreur d’un chaos absolu et dissident, avait commencé à ronger son armature. Déchirant les pans de sa contenance ; non pas par la tristesse comme ce fût le cas par le passé, mais par une colère sourde et contenue. S’intensifiant à chaque contrariété tel qu’un volcan se gorge de lave... Dans l’attente d’une explosion.

De l’apocalypse, plus précisément.

En s’asseyant de nouveau sur les étoffes de son lit, vivement épuisé, Rowan porta ses iris pâles vers leurs jumelles. Interrogatrices. « Je pense sincèrement que ma propre mort serait un détail infiniment plus simple à gérer... Si d’autres existences n’en dépendaient pas. » Sa voix s’était élevée avec précaution, muselée par la douceur d’une constatation morbide ; un brin tragique. Le sacrifice ne l’effrayait pas – quoi qu’il préférait plutôt vivre que mourir si on le lui offrait en un choix sans conséquences fâcheuses – dans la mesure où il lui permettait de sauver ses proches.

Une légère secousse s’anima dans sa gorge ; y déployant un rire maussade et vidé d’espérance. Un souvenir lointain venait de percer sa conscience délaissée par la lumière du monde. ‘Tu changeras.’ Soufflé dans un murmure divinatoire par le Choixpeau, le jour de son arrivée à Poudlard et de sa répartition à Serpentard. ‘Tu changeras.’ Une certitude lâchée contre son esprit tel un coup de fouet ; permettant au doute d’y prendre racine et de s’interroger alors sur l’inévitable : En quoi ? ‘Tu changeras.’ Un tourment effroyable qu’il avait tenté en vain de fuir et d’esquiver. ‘Tu changeras.’ Parce qu’il avait vraiment changé.

Et que le Choixpeau, paré de sa toute puissance céleste, avait su déceler une lueur réelle dans les tréfonds de son âme.

L’égayement finit par s’estomper : encombrant et déplacé. « Je constate seulement que, en l’état des choses, je n’ai plus qu’une demi-vie. » Un avenir déchiré par les promesses et les actes insensés d’un désespoir latent. Par une loyauté qui filait de ses doigts auprès de ceux qui en avaient le plus besoin. Jusqu’à trahir son propre sang au profit d’une sœur qui ne l’était pas par la chair. Mais par le cœur.

L’Amour en filigrane derrière chacune de ses décisions. Toujours.

Les traits de Rowan se laissèrent gagner une énième fois par l’usure et la lassitude, alors qu’il venait quérir la solidité du sol. Et qu’il s’autorisait à appuyer son dos contre le matelas de son colocataire. Plus proche qu’il ne l’aurait dû – il le savait – de cet ami tant apprécié. « Te souviens-tu de l’enseignement de messire Wenlock, en janvier ? » Il déposa sa tête contre les draps tout en s’offrant le loisir de fermer les yeux. De s’échapper, brièvement, de la réalité. « À un moment, il a été troublé par une force que nous soupçonnons être extérieure. » En lien avec le Comte. « Ses lèvres ont répété trois fois une phrase très précise. » Ses paupières cessèrent de couvrir ses iris. « La magie noire est interdite à Haveirson. » Ces dernières se plantèrent dans celles de Clemens. « Depuis le début du mois de janvier, je travaille l’occlumancie avec Rupert. J’avais l’espoir fou de pouvoir fermer, ainsi, mon esprit à toute intrusion... »

Quelque chose trembla dans sa gorge. « … Et de survivre à celui qui voit au-delà des mots. »
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyLun 18 Jan 2016 - 20:22

Depuis quelques temps, sa confiance en Rowan lui posait un problème insoluble par essence. L’étrange Serpentard lui avait longtemps inspiré le mépris dont il gratifiait tous les proches de Heath. Le jeune Clemens ne discernait aucune différence entre tous ces sang-purs aristocrates, ou prétendant l’être, persuadé qu’ils étaient tous des êtres suffisants et obtus, prompts à faire souffrir autrui pour la réussite de leurs propres desseins. Il lui avait fallu cinq longues années pour comprendre ses torts et découvrir les nombreuses facettes de celui qui n’avait été que le Westminbrook. Peu à peu, à force de partage et d’écoute, son affection pour le jeune homme avait grandi et s’était mué en une confiance silencieuse. Au sortir de Poudlard, l’Allemand était fier de pouvoir donner à Rowan le titre d’ami.

Ce soir, il l’avait salué par le nom du frère qu’il n’avait jamais eu. En tant que fils unique, la présence inébranlable de son colocataire, lui avait offert le statut d’un être si important qu’ils auraient pu se sentir liés par le sang. Clemens en avait parfois l’impression, tant leur compréhension flottait, légère, bercée par le flot de leurs regards. Il n’avait jamais remis en doute le moindre de ses mots, ni de ses promesses, convaincu que Rowan ne lui cachait rien sinon ce qu’il n’avait guère besoin de savoir. Chacun préservait son jardin secret, et tout comme l’aristocrate ne le mêlait pas aux turbulences de son mode aux codes troubles, Clemens ne l’avait jamais présenté avec ses terribles succubes. Ils gardaient leur part d’ombre, se dévouant pourtant une confiance aveugle que rien ne semblait pouvoir entacher.

Force était néanmoins de constater qu’il existait encore des non-dits que le respect ne pouvait souffrir. Une amitié aussi forte avait ceci de retors qu’elle ne tolérait rapidement plus ni mensonge, ni mystères d’importance, et si la part d’intimité préservée devait venir troubler le quotidien de l’être cher, il n’était plus aucune excuse pour ne pas s’épancher. L’Allemand ne parvenait pas vraiment à déterminer s’il était en état de reprocher quoique ce soit à Rowan, tant chaque révélation s’était accompagnée d’une promesse encore plus fervente que la précédente. Leur proximité récemment partagée, ces sanglots qu’il ressentait encore vibrer contre son torse, l’avait tatoué de l’intime conviction que jamais il ne pourrait se détourner.

Et cela lui faisait peur, car le trouble de son meilleur ami les faisaient avancer sur un chemin si embrumé, si hésitant, que Clemens ne savait plus si c’était un monde où vivaient encore les certitudes. Rowan pouvait peiner pour trouver les mots désignant ses effervescences, mais sa roideur ne cédait pas sous la conviction que l’heure était venue de parler. À chaque mot, chaque seconde, l’étudiant le pensait cependant capable de se dérober et de renoncer à lui confier ce qu’il avait sur le cœur. Il l’avait certes déjà fait une fois par le passé, douté avec tant de violence qu’il avait cru faire naître le courroux chez l’Allemand, alors que celui-ci n’avait pu qu’éclater de rire. Clemens souhaitait ardemment le retour d’une situation semblable, mais l’approche de son ami remettait en cause cette hypothèse désespérée.

Aucun mot ne s’élevait avec suffisamment d’ardeur dans son esprit pour parvenir à franchir ses lèvres, alors il glissa une main mal assurée sur l’épaule de son ami. Il voulait lui marquer son affection et sa présence, mais craignait que les trémolos de sa voix ne marque sa fatigue et son inquiétude. La soirée avait été trop longue, trop lourde, et l’Allemand sentait la façade de ses résistances se craqueler peu à peu. Il n’était pas aussi doué pour l’apparat que l’ancien Serpentard, et s’il ne s’en inquiétait guère d’ordinaire, il se serait haï, en cet instant présent, de laisser ses faiblesses exploser entre eux. Pas alors qu’il devait être le roc sur lequel on voulait s’affermir.

La confession ne l’étonna qu’un peu. Il ne connaissait pas à Rowan un intérêt pour une telle matière, mais il n’y avait jamais donné matière à réflexion. La démarche était somme toute logique et judicieuse pour qui s’élançait dans le chemin difficile de la diplomatie, et l’effort du physique froid et parfait se continuait naturellement dans le maintien d’un esprit tout aussi contrôlé. L’aveu donnait par ailleurs réponse à d’autres interrogations qu’il avait repoussé en dehors de ses priorités, car si l’étrange attitude de Rupert Wenlock-Larkin l’avait choqué pendant le cours, elle ne l’atteignait plus guère, une fois l’amphithéâtre quitté.

— C’est… un risque, en effet. Mais vu ton choix d’études, c’est un risque qu’il est probablement nécessaire de prendre. Peut-être pourriez-vous simplement travailler à l’extérieur de l’académie ? Être capable de magie noire ne fait pas de vous des coupables au sein de ces murs… Tant que vous ne l’y utilisez pas, bien sur.

Son regard bleu azur cueillit les prunelles de son compagnon, un sourire naquit même sur son visage avant de s’éteindre sur la conclusion. Le danger était certain, le Comte avait déjà fait montre de ses talents de sadique avec ses réactions disproportionnées aux provocations les plus mineures. Clemens comprenait l’inquiétude de Rowan, surtout pour un homme qui ne s’était jamais dressé avec vigueur et sauvagerie contre l’autorité, comme l’Allemand avait l’habitude de le faire. Il serra l’épaule de son meilleur ami, les traits à nouveau encourageants.

— Tu penses que le Comte pourrait utiliser de tels talents afin de surveiller Haveirson ? Cela expliquerait bien des choses… Mais je ne pense pas que tu dois dévier de ta voie pour autant, Rowan. Magie noire ne signifie pas forcément exactions létales et si tu penses devoir te munir de cette arme, alors… Le Comte n’est jamais qu’un pion sur un immense échiquier, je ne pense pas qu’il ait suffisamment de pouvoir pour remettre cet apprentissage en question. Il ne dispose d’aucunes preuves pour t’accuser, de toute façon.

Soulagé, Clemens se laissa tomber sur son matelas, la respiration un peu trop rapide trahissant la tension qui s’échappait de ses membres. Rowan pouvait être si théâtral pour lever des secrets qui, au fond, entre deux amis, n’avaient guère d’importance.
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyLun 18 Jan 2016 - 22:58

Pour toute réponse à l'amertume profonde et pernicieuse qui l'habitait, l'ancien Serpentard eut droit à un rapprochement ostensible de son camarade. Un contact dans tout ce qu'il possédait de plus réel et de plus vrai, avec le poids soudain et mordant de la culpabilité sur les épaules. Ces dernières s'affaissèrent légèrement sous le coup, ne sachant plus à quelle tension se vouer ; la lassitude défaite d'une certitude impitoyable ; la velléité éclatante d'une peur gorgée de rancœur.

Puisque aux yeux de la terre et du ciel, il était le seul responsable de sa déchéance. Le seul individu déraisonné et contestable à devoir endosser en silence les multiples rôles que tous lui priaient de jouer pour eux. Tout en respectant scrupuleusement une règle d'or tacite et particulièrement rigoureuse : ne jamais faiblir. Ne jamais trahir. Aller au bout des choses quitte à ce qu'il se prive d'âme et de conscience pour mener à bien sa mission.

De tels devoirs finissaient alors par s'emmêler, se joindre et s'opposer. Le poussant vers des retranchements obscures, regrettables et sordides. Parfois, il se laissait bercer par quelques interrogations : et si, pour ne pas rompre l'équilibre précaire de son existence, il avait préféré sacrifier sa mère ? Et si, pour éviter de perdre la petite Française – une douleur poignante lui vrilla le cœur à cette pensée – il avait refoulé la supplique de Daphné vers sa propre damnation ? Tant de suppositions, tant d'appréhensions ; car un choix impliquait forcément des dégâts collatéraux. Jusqu'ici, avec force et détermination, il était miraculeusement parvenu à préserver ses pairs.

Presque. Astoria avait échappé – malencontreusement – à l'équation presque parfaite de ses ambitions sommes toutes altruistes. Pleines d'une abnégation houleuse et détestable ; elle ne s’apparentait en rien aux grands traits de Serpentard. Pas plus que l'empathie, mordante, qui bourdonnait dans ses entrailles en permanence. Au point de le mener, au sein d'une virée nocturne irresponsable, à prendre sous son aile une ingénue délicate. Une innocente qu'il se refusait à voir payer le lourd tribut de la naïveté.

Au bout d'un long moment, prenant le temps d'analyser la chute à venir, Rowan vint glisser ses doigts libres auprès de ceux de son meilleur ami. Ce geste était dangereux – même interdit compte tenu de ce qu'il s'échinait à avouer – et fragile à la fois ; trahissant toute l'ambivalence de ce qu'il ressentait d'affliction et de désespoir. Une sensation redoublée devant les allégations de son colocataire, loin de se douter des ténèbres cernant les extrémités de son épiderme.

Pourtant, ces caresses volatiles et tendres qui échappaient à son contrôle, témoignaient également de toute autre chose ; du besoin irrépressible de profiter des dernières secondes de paix. De marquer, au creux de sa chair, cet effleurement doux et affectueux. Permettant à leur intimité fraternelle de s'imprimer au fond de lui ; telle qu'aurait été la dernière image de sa vie. Offerte au seul être qu'il savait proche et loyal à l'excès, dans les temps ou il avait été un homme et non pas un monstre. Dans les temps où le visage d'Anna n'imposait que rage et souffrance ; et celui de Clemens tout le reste.

Sachant l'ataraxie révolue, l'ancien Serpentard se mordit les lèvres et se redressa, les iris troublées par l'éloignement de leurs propres perceptions. « Clemens, je... Mon tourment ne tient en rien aux humeurs et aux directives du Comte. » Il s'efforça de briser le contact visuel qu'ils entretenaient ; pourtant incapable de s'y résoudre dans les faits. Pas plus que de séparer leurs mains. Il préférait  davantage lui céder ce droit, lorsque le rejet deviendrait imminent. « Malgré tout ce que nous pouvons en converser, ce n'est guère de lui que je me protège. »

Avec une lenteur irréelle et brûlante, ses yeux parvinrent enfin à s'esquiver de leurs jumeaux, pour descendre progressivement vers la raideur nouvelle de son bras gauche.

« À dire vrai, ce n'est pas à lui que j'ai vendu les miettes de mon âme. » Désormais, ses propos ne s'affirmaient plus qu'en des murmures lents et effrayés ; ceux que l'on pourrait entendre dans la bouche d'un condamné à mort ; où bien d'un enfant qui croit l'être à la suite d'un cauchemars épouvantable. « Des miettes ou des débris, peu importe, il n'en restera bientôt plus rien de toute façon. »

Une dernière fois, ses doigts fins et pâles se crispèrent contre la peau de son meilleur ami ; une dernière fois, il s'autorisa à ce rapprochement doucereux. « Quel que soit celui qui me portera le coup fatal, la liste de mes opposants est trop longue pour que je puisse espérer sortir de cette voie indemne. » Une pression tremblante d'un amour blessé et d'une confession ignoble. L'un et l'autre ne parvenant guère à se distinguer. « Les représentants de l'ordre de ce monde ne daigneront jamais accepter mon écart. Pas plus que les ténèbres me pardonneront d'être incapable de baigner mes doigts dans un sang innocent. »
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyMar 19 Jan 2016 - 9:22

Le geste, intime et réconfortant, vint en quelque sorte sceller la promesse de leur amitié sans failles. Le contact n’était pas pour eux un sous-entendu ambigu, car les codes et les limites de la société n’avaient pas court entre Clemens et Rowan. Ils avaient développé leur propre équilibre, leurs propres conventions, dont la douceur rassurant leur rappelait qu’ils avaient besoin l’un de l’autre. L’Allemand ne rechigna pas à se soumettre à cette caresse, qu’il ne partageait sinon qu’avec le compagnon d’une autre intimité, mais avec qui les significations n’avaient aucune commune mesure. Pour un homme d’ordinaire si libre et indépendant, la contrainte de cette prison de chair se muait en un étau de grâce.

Sa méfiance s’en était allée, soufflée par la confiance qu’il ne voulait laisser ébranler, et par la réponse toute faite et crédible que ses suppositions avaient fait naître. Le frisson qui courrait le long de son échine s’était mué en une chaleur fraternelle, car l’étudiant était rattrapé par la fatigue et ne souhaitait plus que s’apaiser dans le calme d’une discussion légère. Leurs rendez-vous nocturnes étaient rapidement devenus une habitude, tant la lueur des étoiles semblaient être l’instant le plus propice à la sublimation de leurs deux esprits. Clemens les appréciait au-delà des lassitudes de la fatigue, et n’aurait pour rien au monde laissé le sommeil les lui dérober. Pourtant, il goûtait ces soirs où, tous deux perclus par leurs journées, il s’abandonnaient à une conversation si discrète dans la pénombre qu’ils finissaient à s’y perdre, entre les limbes du conscient et de l’inconscient.

Il lâcha un soupir, bercé le temps d’une seconde par la quiétude retrouvée, avant que Rowan ne brise à nouveau le silence. Entendre son prénom le fit frémir, car les proches, étrangement, ne se nomment jamais. On s’adresse d’un regard, on joue sur les intonations, mais le nom équivaut à un appel menaçant et pressant, dont l’utilisation doit être réservée aux circonstances les plus dramatiques. Les soupçons qu’il s’était échiné à détricoter depuis son retour au donjon revinrent brutalement enserrer son cœur, grandissant un peu plus à chacun des nouveaux détails livrés par l’ami le plus cher. Sa main brûlait, hérissée par ce contact qui se faisait soudainement sentir comme un viol, les doigts fins semblaient s’imprimer dans sa chair pour l’empêcher de se dégager.

Clemens aurait pu briser le contact d’un geste sec, mais ces prunelles céruléennes, si farouchement accrochées aux siennes, firent céder toute velléité de résistance. Il appelait à l’aide afin de se soustraire à une menace dont l’Allemand ne parvenait à discerner les traits, trop convaincu par la bonté inébranlable de Rowan pour concevoir le piège dans lequel il s’était volontairement jeté. L’ancien Serpentard ne craignait ni les aristocrates, ni le Comte, alors quelle était cette ombre si terrible qu’il la craignait au point de ne pouvoir la nommer ? L’incompréhension flottait si densément dans son regard que Clemens sentait sa brûlure dans ses iris. Son ami esquiva alors leur échange, bercé — était-ce par la honte ou le déshonneur ? — et annonça l’ampleur de sa trahison.


Il resta stoïque, choqué par la compréhension qui grandissait peu à peu dans son esprit. Il n’était guère de circonstances, dans le monde des sorciers, où on pouvait vendre son âme à un démon nommé. Les moldus, inconscients de leur chance, avait érigé cette tournure en un phrasé idiomatique, dont l’importance faisait simplement sourire par rhétorique. Les sorciers n’avaient pas le luxe d’employer les mots à cet escient, avec légèreté et même humour parfois, car l’homme, s’il l’était encore, à qui on vendait son âme flottait éperdument au-dessus d’eux, menace de mort que l’on semblait ne pas pouvoir tuer. Sa disparition n’avait été qu’éphémère, et ils avaient assisté à la renaissance de sa puissance. Ou partiellement, du moins.

Une nuit de flammes lui revint en mémoire, lors de cette nuit de joie où Rowan, Isolde et lui s’étaient égayés d’un match brillant lors de la Coupe du Monde de Quidditch. Ils ne dormaient pas encore quand les cris avaient retentis, de peur et d’incompréhension, les poussant eux aussi au dehors pour quérir la raison de toute cette agitation. Les silhouettes qu’aucun d’eux n’avaient vu dans leur vie, mais qu’ils avaient reconnus aisément pour en avoir si souvent entendu les récits, ne se trouvaient qu’à quelques dizaines de mètres. Noires et diaphanes, presque hallucinantes d’une grâce terrible. La Mort avait toujours fasciné les hommes, et cette nuit-là, Clemens avait un peu mieux compris pourquoi. Ils avaient fuit à l’unisson, dans un mouvement unique et salvateur pour lequel ils n’avaient pas eu besoin de se concerter. Tous proies d’un même prédateur.

Les mots de son colocataires s’unirent à l’image d’un symbole immonde et méprisé, apothéose terrible d’une soirée dont il aurait préféré ne pas se souvenir. Vendu aux ténèbres par l’âme et par le sang, Rowan était devenu le prédateur dont ils avaient toujours, ensemble, voulu se prémunir. Clemens rompit leur intimité avec dédain, peinant à contrôler la rage sourde qui naissait dans son cœur à l’instar du dégoût que lui inspirait soudainement leur proximité. Il peinait à croire cependant, à accepter le sous-entendu même que l’ancien Serpentard ait cédé à ce maître qu’il avait pourtant toujours récusé. Il s’était voulu différent. S’était prétendu différent. Comment aimer une née-moldue douce et innocente, quand on baignait dans ces eaux insalubres de haine et de trahison ?

L’Allemand s’étira sans un mot, enserrant le poignet gauche de son interlocuteur d’une poigne froide et sans douceur. Il devait voir, nécessitait la confirmation de ce crime devant ses yeux, afin de pouvoir accepter son existence. De tout son cœur et de toute sa chair, Clemens aurait défendu Rowan contre de telles accusations, jusqu’à le suivre aux fonds des Enfers pour le protéger de détracteurs mensongers. Pourtant, lorsque d’un geste brusque il eût dévoilé la peau blanchâtre de son jusqu’alors ami, le symbole honteux se dessina sous ses yeux. Le serpent ondulait sur la peau diaphane, enserrant un crâne presque moqueur. Le temps lui paraissait s’écouler avec une lenteur infinie, son regard bleu posé sur la Marque, personnification extrême de la naïveté dont il avait fait preuve.

Si Rowan n’était pas digne de confiance, qui l’était ?

— Comment as-tu pu faire ça !?

Sa voix n’était rien qu’un souffle de haine, murmure brûlant et glacial, porté au delà de ses lèvres par un cœur outré et blessé à mort. Clemens laissa retomber le bras avec mépris et hauteur, sans prendre néanmoins la peine de repousser le pauvre homme déjà au sol. Il s’était affaissé seul, terrassé par sa propre faiblesse, sans doute. L’Allemand quitta le refuge chaud et confortable de son baldaquin, se saisissant de sa baguette dans le mouvement pour se dresser au devant de la créature à laquelle il ne voulait même plus donner de nom. Ses traits étaient déformés par la rage et la douleur de s’être fait jouer par une des rares personnes à laquelle il aurait tout donné. À qui il avait juré d’être une aide indéfectible. À jamais.

— Donne moi une bonne raison. Une seule de me laisser t’écouter te justifier.

Il ferma les yeux. Sa main tremblait légèrement sur le bois de sa baguette, catalyseur terrible de sa fureur, dernière accroche aussi à un monde qui se voulait irrémédiablement immatériel. Tout cela ne pouvait décidément être réel.

— Je t’ai promis secours et fidélité, donné plus que mon amitié pour te nommer frère et le penser. Je t’ai ouvert la porte de mon secret le plus précieux, préservé des regards extérieurs pendant plus de vingt ans.

Ses paupières se dérobèrent, dévoilant un regard douloureux et brillant. Sa poigne pourtant raffermit la menace qu’il dirigeait vers son colocataire.

— Une seule bonne raison de croire que tu n’es pas que perfidie et mensonge.

Une larme roula le long de son visage, témoin des lacérations de son for intérieur, de la haine qu’il éprouvait, si étrange et si inhabituelle pour lui-même et pour le frère qui se trouvait à ses pieds. Clemens n’avait guère de ressemblances avec l’aristocratie, sauf peut-être l’honneur qu’il fallait préserver avec grâce et ferveur. Et laver dans le sang, lorsque son sceau en était rompu.
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyMar 19 Jan 2016 - 11:16

La rupture avait été brutale et douloureuse, sans un mot ni une expression de plus que celle du dégoût. Comparable à quelques miasmes sirupeux, tenaces et réels ; qui se refusaient à disparaître sous la lumière vacillante d’une éternité de félonie. Pourtant, lorsque la compréhension se fit enfin maître de l’esprit de son colocataire, Rowan eut davantage l’impression d’être libéré d’un poids silencieux plutôt que de la persistance d’une inquiétude lancinante.

En dépit de toute la colère déversée à chaud contre son épiderme, et de la violence fébrile de leurs mouvements, l’ancien Serpentard éprouvait un certain réconfort à ne plus devoir esquisser des bribes de mensonge. La dureté de la trahison vécue par son meilleur ami lui faisait, en vérité, beaucoup plus de mal que le reste ; son empathie scabreuse s’imprégnant de chaque ondée de peine et de haine mêlées.

Quant à son propre corps, à la fois tendu et esseulé, il préféra l’occulter de sa conscience lasse et abîmée. Les données physiques n’avaient que peu d’intérêt dans l’instant présent, d’autant plus qu’elles étaient porteuses d’un manque naissant au creux de sa poitrine ; un vide qui se formait, moqueur, et qui ne semblait pas vouloir se résorber.

Tel était le prix à payer. Il l’avait toujours su. Encore plus aujourd’hui que n’importe quelle autre date révolue de son existence.

Les yeux désormais perdus dans le vague, pointant sur un néant trouble et guère identifiable, Rowan se prêtait de bonne grâce à la fureur grandissante de son camarade. Il ne résistait pas à la menace proférée à son encontre ; à dire vrai, il s’efforçait de n’opposer aucune barrière tangible entre la rage avérée et les fortifications malheureuses de sa chair. Car, en toute connaissance des risques, il s’était irrémédiablement refusé à se battre.

Quitte à devoir expirer d’une quelconque façon que ce soit, il préférait ironiquement que ce soit dans l’amour plutôt que dans la guerre. De ce fait, affronter Clemens, au risque de le blesser par inadvertance, ne l’intéressait guère. Mieux valait le laisser s’enhardir et s’échauffer, tout en lui permettant d’asséner plusieurs coups de ses lèvres et de sa baguette. Les dégâts seraient innombrables, évidemment ; mais jamais il ne s’autoriserait à lui faire du mal.

Chose étrange s’il en est, maintenant que le parallèle se tissait durablement entre cette nuit de mars et une autre de décembre ; de tous, le jeune aristocrate avait été le seul à accepter ses proches dans leur intégralité. À aucun moment, il avait esquissé un regret ni un jugement sur leurs activités et leurs déchéances. De tous, il avait été le seul à se moquer des affiliations sordides et pernicieuses, s’offrant le loisir d’aimer sans distinctions ses proches.

C’était sûrement ce détail, infime et risible, qui le perdait en ces heures sombres du monde.

Aux attaques verbales successives, il était resté silencieux et inerte. Pendant un long moment, il avait même hésité à se fermer définitivement ; tel que l’on claque la porte d’une prison pour ne plus en sortir. Les débris de son âme se seraient sans doute réfugiés dans un vase clos, maussade et quiet, dans l’attente du jugement suprême et de la froideur des murs d’Azkaban. Il l’avait envisagé plus d’une fois ; le cœur battant une chamade inquiète et douloureuse, sans ne rien pouvoir faire que d’attendre l’écoulement des secondes infinies. Jusqu’à ce qu’il finisse vraiment par s’éteindre de lui-même. Et qu’il n’en reste rien.

Pas même un dernier éclat de vie.

L’ancien Serpentard se montra sensible à l’effritement progressif de son environnement, sans parvenir, néanmoins, à mener ses iris auprès de leurs jumelles. Une seule bonne raison. Pas une de plus. Pas une de moins. Or, pourquoi devrait-il s’échiner à se justifier ? Les Ténèbres étaient de ces choses insolubles et fugaces, que tous condamnaient sans distinctions. Par principe. Par idéologie. Par raison. Il n’avait rien de concret à donner en échange ; si ce n’est de briser d’autres secrets. D’autres protections.

Son regard se leva vers le plafond de leur chambre, s’y perdant un court moment. Toute son existence était construite sur ce modèle : des énigmes qui n’en finissaient jamais.

Pourtant, il lui fallait concéder une réponse. « Pour ma mère. » Et elle s’arracha à lui comme l’on extorque un aveu au coupable.
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyJeu 21 Jan 2016 - 23:38

Durant ses périodes les plus sombres, Clemens s’étaient de nombreuses fois imaginé l’apocalypse. Elle s’était montrée retorse et variable, teintée de sang et de larmes, souvent de solitude, et parfois de crimes. Allongé dans son lit d’hôpital, réduit à moins qu’un homme, mais trop matériel encore pour se délecter d’une vie d’ectoplasme, il avait souhaité se détruire. Peu importait alors, qu’il n’y soit pas parvenu par l’inadvertance d’un accident. Il aurait souhaité pouvoir se lever et mettre fin à cette douleur constante qui faisait de son monde une brume cotonneuse où il finissait par ne plus rien ressentir. Si ce n’était une haine viscérale et profonde ne trouvant ni maître, ni cible contre laquelle il aurait pu la déchaîner, mais qui lacérait violemment son esprit enfermé.

Il avait songé à la noyade, à la chute dans le vide à la rencontre de ces êtres de l’air qui avaient refusé de le prendre la première fois. Il aurait pu s’ouvrir les veines ou se pendre, peut-être même se procurer une arme pour se fusiller dans la pénombre d’une ruelle londonienne. Oublié des siens, convaincus par le mensonge de sa rééducation à l’étranger, il aurait pu quitter ce monde après n’y avoir laissé que le souvenir du jeune homme arrogant et trop peu chanceux pour éviter les écueils dans lesquels son propre caractère l’avait précipité. Rien ne lui avait semblé suffisamment violent pour satisfaire à son besoin de vengeance contre un univers si injuste pour avoir choisi comme victime une étoile montante. Il avait brillé, certes, mais comme une étoile filante, rapide et fugace dans le ciel, dont on se réjouissait un court instant de la présence avant de l’oublier, si aisément, une fois sa lueur dissolue.

Clemens avait longtemps été brutal et amer, plongeant dans le vice et le jeu pour oublier ses rêves et ses échecs. Il s’était noyé dans cette réalité parallèle dont la douceur mensongère l’avait accueillie avec chaleur, l’autorisant à changer de nom et de visage à chaque soir. Il n’était plus nécessaire d’être quelqu’un, tant l’action définissait la perception. Chaque nouvelle journée correspondait à une nouvelle vie, sans passé, ni futur, éphémère comme chaque être vivant, damné à mourir pour avoir eu la fureur de vivre. Il avait détesté sa faiblesse. Rejetant avec violence la morale pour ne plus entendre les appels à la raison de sa conscience, seule entité restée intacte de la chute, il n’avait dû son salut qu’à deux personnes. Rowan et Isolde. Deux amis si chers et pourtant si vulnérables, dont la foi n’avait jamais failli.

Sous leurs yeux attentifs, il s’était senti renaître. L’Allemand avait renoué avec le bonheur d’une vie sans heurt et sans obligations, dans laquelle il pouvait simplement se laisser couler. Devenu l’étudiant indolent et joueur dont la réputation avait traversé l’académie telle une traînée de poudre, il n’avait plus, depuis lors, subit les assauts de ces pensées morbides. Érigé en héraut démoniaque, il se trouvait à présent, menaçant de vengeance et de mort, l’ami à genoux, qui lorsque lui-même avait été prostré, n’avait pas hésité à se baisser à ses côtés pour l’aider à se relever.

Sa vision se brouillait dans les larmes de rage et de déception, l’incompréhension lui vrillait le cœur. La nausée s’emparait de son torse, dégoût créé par les mangemorts, seule vermine dont on aurait pu justifier l’extermination. L’Allée des Embrumes dansait à la frontière des perceptions, à quelques encablures seulement du Cloud Atlas, de cette ruelle où il avait un matin songé à se donner la mort. Ses poches vides avaient représenté la limite de sa damnation, quand l’homme encapuchonné avait refusé le pari de cet homme à la voix implorante et malade, aux traits blanchis par la fatigue, témoins d’un corps tiré à aux confins d’un enfer d’oubli. Seule l’adrénaline et le vice l’avait tenu en vie.

Et ce soir, meurtrière de toute confiance, sa conscience rappelait à son bon souvenir les exactions terribles des compagnons du traître, les corps mutilés et sans vie dont la description maculait les brèves. La communauté sorcière s’y jetait comme des chiens vers leur pâtée, avides de leur nouveau lôt d’exagérations et de tortures. Soulagés de ne pas retrouver leurs noms gravé sur le parchemin, feindre l’empathie pour son prochain devenait plus facile, car à chaque souffrance du voisin on se souvenait à quel point on était encore vivant. Clemens exécrait ces publications, se maudissait de rester inerte. Chaque jour, il prenait alors la résolution de changer demain, mais restait désespérément immobile.

Entre Rowan et lui, la baguette tremblotait toujours plus. Quelques étincelles pleuraient parfois en dehors du bois de sapin patiné. Leur couleur variait dans un spectre de bleu, semblant parfois verdâtres dans la pénombre, sans que sa vision brouillée ne puisse avec certitude le juger. Le silence s’étirait vers une éternité à laquelle l’étudiant se savait incapable de supporter. Il voulait comprendre avant de juger. Sa morale, encore si faible, aurait exécuté le traître à ses pieds s’il n’avait pas arboré les traits si familiers et tant aimés de Rowan Westminbrook. La lueur déterminée, si familière, s’était éteinte dans ces prunelles céruléennes dont il connaissait chaque variation. L’abandon se lisait dans la lassitude, alors que dans un murmure tombait la réponse tant attendue. Lourde, entêtante.

Sans surprise.

L’amour en était la cause. L’amour pour cet homme d’ordinaire si froid, mais passionné à sa manière, pour qui aucune action n’était acceptable si elle n’avait pas le bien d’autrui pour but et conséquence. Rowan, qui avait passé son adolescence à épauler discrètement une sorcière prometteuse mais transparente, jusqu’à se satisfaire dans l’ombre de voir s’épanouir cette fleur qui n’avait de lui nulle conscience. Clemens abandonna toute idée de menace, sentant ses épaules s’affaisser, il laissa son bras retomber le long de son corps. Le long de sa cuisse glissèrent, lourdes et paresseuses, deux étoiles d’un vert brillant.


Il ne pouvait détacher les yeux de Rowan. Il ne savait plus que faire, comment agir pour que la situation soit juste, comment détruire cette confiance qu’il avait offert sans détours à un ami dont il n’avait jamais douté. Pouvait-il seulement admettre qu’il soit, par amour, un assassin et un criminel ? Existait-il un monde dans lequel ces deux paradigmes pouvaient se réunir sans heurts et sans douleurs, afin de justifier l’acte le plus innommable de leur monde ? Comment Rowan pouvait-il, sous le couvert de l’amour, embrasser la cause du seul Homme à cracher sur ses vertus pour répandre la suprématie dans la noirceur ?

Un grognement de frustration, rauque et animal, rompit sa gorge et le silence. Les sentiments contraires qui faisaient rage entre son esprit et son cœur semblaient chercher à s’arracher hors de son corps pour livrer ce combat qu’il se refusait à entamer. L’Allemand n’était rien de moins qu’un combattant, excellent sorcier par talent plus que par vocation, il ne se servait de son don que pour satisfaire une curiosité dévorante et déraisonnée. Il n’avait jamais eu qu’une seule mort sur la conscience, dont le simple souvenir rongeait encore ses songes les plus pénibles. Rien de tout cela n’était avéré, pourtant.

— Pourquoi ? Comment peux-tu être le seul homme assez fou sur cette Terre pour rentrer dans ses rangs par amour ? On dit que c’est la seule chose qu’il craint. Et toi, tu viens t’en faire une arme placée sous ses ordres. Qu’espères-tu atteindre ?

Sa voix était saccadée et sèche, hésitante ou passionnée selon les mots, comme si les idées ne s’imposaient à lui qu’au moment de les exprimer, trop tard pour être enchaînées les unes aux autres. Clemens roulait des yeux, le regard perdu loin au-delà de celui dont il avait cru connaître le cœur et qui à présent, le faisait douter de tout, à commencer par lui-même. Incapable de se détourner, ou même de reculer, la main toujours crispée sur la promesse de menace représentée par sa baguette, il s’étonnait de poser même les questions. De se tromper dans une rhétorique de justifications, alors qu’au fond, nul n’était avocat plus terrible que lui pour devenir le juge accusateur d’une descente aux enfers
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyVen 22 Jan 2016 - 16:17

Petit à petit, les iris pâles et éreintées de l’ancien Serpentard s’étaient perdues vers les hauteurs de leur chambrée. La toile de fond – davantage une peinture uniforme et beige en réalité – s’étendait au-dessus d’eux tel un drap immaculé porté auprès d’un corps malade ; peut-être mourant ; peut-être déjà mort. À dire vrai, maintenant qu’il prenait conscience pour la première fois de ce détail, il ne lui semblait pas impossible que tout ce qui évoluait autour d’eux était davantage éthéré que consistant.

Que tous avaient été des chairs meurtries recouvertes d’un voile mortuaire.

Ce blanc laiteux, aux accents ocres, le fascinait d’autant plus qu’il lui donnait l’impression d’accéder à une lueur soutenue et chaleureuse. Celle qui, depuis quelques minutes, avait déserté les yeux de son meilleur ami. Des reflets désormais comparables à un froid brûlant ; une fournaise de glace ; alternant la lave et la neige jusqu’à s’embraser l’esprit d’une fumée opaque. Instable. Gorgée d’illusions, de murmures et de tremblements.

La quiétude passagère – et terriblement menteuse – qui s’était établie entre eux vacilla : leurs souffles respectifs venaient la troubler avec une rudesse exempte de manière et de tempérance. Qu’importe, après tout ? Le plafond lui offrait de bonne grâce un maigre répit. Éclairant en lui ce qu’il pensait définitivement éteint sous le poids des erreurs. Des renoncements. De l’intrigante abnégation qui vrillait ses membres lorsqu’un des siens venait quérir son soutien.

Au bout d’un long moment, les lèvres toujours écorchées par la réponse qu’il avait dû concéder, une sensation singulière s’anima au creux de son ventre. Elle était vive et lancinante ; de celles que l’on ressent plus pour autrui que pour nous même. Et cela l’obligea à quitter son repaire ivoirin faussement étoilé pour un autre, tâché de larmes et de fureur. Mille fois secoués par des émois contraires et ambivalents.

Les éclats céruléens abandonnèrent progressivement les sommets cotonneux pour glisser vers la silhouette familière de son camarade. La rage irrépressible et suintante qui se dégageait de ce dernier, s’étiolait diablement dans leur environnement ; semblant gagner en tension au fil des secondes avalées par la nuit. Venant percuter son enveloppe charnelle en une discordance hargneuse, tant lui-même, pourtant porteur d’un sceau félon et maléfique, se refusait à plonger ses doigts dans la haine.

Alors, les traits ancrés dans une lassitude criante – qualifiée par sa propre voix de ‘demi-vie’ –  le jeune aristocrate avait cédé à la lourdeur de ses paupières. Plongé ainsi dans les ténèbres, à la fois familiers et détestables, sa chair s’était stabilisée sous la crainte et la contrainte. La menace persistait au-dehors ; toutefois elle n’avait rien de comparable à la souffrance vécue par l’Allemand.  En vérité, la douleur d’un corps tant aimé le broyait davantage que le reste, surtout quand les tressautements d’un tel épiderme se muaient en des grondements féroces. Vainqueurs et vaincus à la fois. Sans y trouver la force de rompre la corde ; pas plus que la volonté et le courage de l’enserrer.

Un lien à peine retenu par un fil chancelant et à bout de force.

Toute cette rancœur, enflammée et animale, Rowan parvint presque à la reconnaître. Parfois, au détour d’un souvenir brisé ou d’un regard trop équivoque, il se trouvait en effet sensible à la forme gutturale d’un tel mal aliéné. La colère ; la rage ; le désespoir. Des ondées puissantes et impitoyables. Si aisément lacérées, en une fabuleuse ironie, par des sentiments plus nobles. Toujours cet amour au coin du cœur.

Et l’amour, justement, commença à engourdir son sang et sa chair. Une effluve rassurante, prompte à perpétuer la lutte indécise ; ou plutôt à la reprendre. Ses yeux s’ouvrirent sur l’obscurité de leur proximité et la violence saccadée des paroles menées à son encontre. Quelque chose d’indistinct hurlait et suppliait en lui ; si la situation n’avait pas été à deux doigts de tordre leur existence, nul doute qu’il se serait approché pour cerner son compagnon de ses bras. Parce qu’il en avait toujours été ainsi entre eux, tout du moins, une fois que leurs consciences avaient dépassé les barrières adolescentes. Parce qu’il savait que ce genre de geste pouvait faire tout basculer. Parce qu’il ne voulait définitivement pas se battre.

Ses iris s’immobilisèrent enfin sur leurs jumelles. Et, face à la tempête implacable qui se levait autour d’eux, l’ancien Serpentard préféra s’adonner à la tendresse. Il était un monstre pour beaucoup de choses – mais jamais contre les siens. « Je... Elle est... Différente. » Chaque mot formulé lui brûlait la langue. Déchirait son âme. « Mon père le savait, et... »

Soudainement, ce fût comme s’il avait été giflé. Hébété et la gorge sèche, les larmes commencèrent à perler au coin de ses yeux. « Il... Il l’a... » La vérité le foudroyait pour la première fois, de toute sa magnificence. De toute son horreur. « Vendue. » Au sadisme bourdonnant de Christopher. Un hoquet de terreur lui échappa ; renvoyé avec brutalité dans cette entrevue pleine de heurts et de promesses ensanglantées. Un souvenir qu’il avait esquivé et refoulé au plus profond de ses pensées. « … Ils ont... Menacé. Et je pensais... Parvenir à la protéger. »

Les émotions se tordaient dans sa tête ; autant que les sentiments et l’explosion peu discrète de la réalité des choses. « Elle est... Elle ne mérite pas ça. » Depuis toujours, il avait cherché des excuses à son géniteur. En vain.

C’était lui, l’origine de leur chute. Armé d’idées surannées et d’espoirs bornés ; d’une jalousie décrépite ; d’une envie somme toute tournée vers la destruction. Et Rowan, en héritier discipliné, avait fermé les yeux sur les méfaits de son aîné coupable. « Tu sais... Elle... Ils l’appellent... » Il se prit la tête entre les mains, cherchant à retirer le souffle carné du mangemort contre sa gorge ; et son sourire concupiscent lorsque ses lèvres s’étaient invités au creux de son oreille. « … Traîtresse à son sang. » Il étouffait.

Une idole déchue.
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Clemens Neubach
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptyMar 26 Jan 2016 - 11:41

Il était incapable de détourner les yeux. Il se noyait dans le bleu céruléen de ce regard tant aimé, qui avait flotté sur tous ses secrets. Rowan savait presque tout de lui et ne l’avait jamais jugé, acceptant chaque nouvelle révélation, chaque frasque de l’Allemand comme une nouvelle pierre ajoutée au ciment de leur amitié. Il ne doutait, ni ne questionnait, guidé par l’honneur de ceux pour qui l’échelle de valeurs se séparait un peu de la morale. Comme si elle n’était parfois qu’une justification secondaire pour expliquer un acte si noble qu’il n’était plus compréhensible par le commun des mortels.

Clemens tentait de faire taire son esprit en ébullition pour se concentrer sur les mots que son meilleur ami s’arrachait difficilement. Il voulait comprendre avant de juger, mais n’était pas certain d’en être capable : sa rage avait explosé sous le choc de la révélation, mais il sentait la douleur de la trahison se répandre dans son torse comme le venin insidieux d’une calomnie. Ses premiers assauts semblent bénins, laissent encore croire à sa victime qu’elle pourra se défaire de son influence avant qu’il ne soit définitivement trop tard. Les doutes sont accrochés partout, telle une tumeur maligne qu’il est impossible de combattre. Les fronts sont trop multiples pour des forces restées trop maigres et le masque de tempérance se brise dans une douleur furieuse.

La confidence faisait écho à sa propre histoire. Une mère différente emprisonnée dans un carcan qui n’était pas l’écrin dans lequel elle voulait passer sa vie. Le récit d’une femme trop forte pour se laisser influencer par des simagrées aristocratiques. L’Allemand se laissa aller contre l’armature du lit à baldaquin, écrasé de fatigue et de lassitude. Il ne parvenait plus vraiment à discerner les émotions qui tourbillonnaient en lui, sans pour autant savoir quand toute retenue se briserait. Il essayait de rendre cohérentes les pièces de ce puzzle impersonnel.

Leurs mères portaient le sceau d’une seule et même calomnie, pour avoir fait l’erreur de se détourner de leurs familles. Pour avoir fait leurs propres choix. Laura Neubach n’en était devenue que plus indépendante, enseignant à son fils que cette insulte faisait d’eux des êtres riches et complexes. Il avait érigé la honte en fierté pour résister aux coups de butoir répétés de familles qui ne voyaient en eux que des subalternes souillés. Jamais il n’aurait pensé que Rowan et lui étaient, encore une fois, si semblables. Il poussa un profond soupir, incapable de trouver les mots pour rassurer ou pour pardonner. Sa mère était elle aussi menacée, pourtant, il ne portait pas la Marque au bras gauche. Lequel des deux avait donc fait une erreur ?

— Ainsi, tu prends les couleurs de ceux qui martyrisent, de ceux qui ont contribué à infliger cette peine à ta mère, pour la protéger ?


Ses mots avaient claqués une nouvelle fois, chargé de plus d’agressivité qu’il ne l’aurait souhaité, mais son regard s’était durci. Risk and Reward. Combien avant lui avaient pris le parti de détruire la communauté pour ne sauvegarder qu’un seul être, uniquement parce que celui-ci était cher à leurs yeux ? Rowan partageait peut-être peu avec les héritiers de Salazar, mais il ne dérogeait pas à la règle primaire. Il préservait les apparences et ne cédait ses douceurs qu’à son entourage. Nul ne devait savoir, nul ne devait comprendre, car au fond, il préférait toujours agir seul. Pour le plus grand bien.

Il secoua doucement la tête, amer et révolté, convaincu qu’il aurait porté sa force contre n’importe quel partisan des Ténèbres posté devant lui, si seulement il ne s’était pas agit de son meilleur ami. L’affection rendait toute décision morale plus difficile. Il voulait se battre, combattre et pardonner à la fois, ne se sentait pourtant qu’attiré par la fuite loin de l’infamie et de la honte. D’un geste sec, il pointa à nouveau sa baguette sur Rowan pour l’inciter au mouvement.

— Mets ton manteau, on sort.

Loin des yeux et des oreilles de cette académie, loin des ingérences de leurs amis et compagnons. C’était une affaire qu’ils devaient régler seuls. Entre frères.
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MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre   Marée haute pour nos bassesses - dans la chambre EmptySam 6 Fév 2016 - 9:54

Les doigts fermement appuyés contre la rigidité pâle de son front, l'ancien Serpentard s'échinait à démanteler consciencieusement les traits bourrus du dénommé Christopher. Le souvenir à peine tangible, éthéré au possible sous la détresse avisée et précautionneuse de son esprit, s'efforçait pourtant de flotter aussi bien au creux de sa chair qu'en dehors. Cette mémoire sordide, noyée dans une promesse terrible et terrifiante, se cramponnait à ses pensées éteintes et vivement paniquées.

Il avait beau être installé en plein cœur des appartements de Sinistros, sous la protection somme toute partiale de messire le Comte, le souffle assassin de son aîné se refusait à abandonner sa proximité. Et, en dépit de toute la concentration qu'il se savait capable de déployer, Rowan ne parvenait pas à chasser l'image carnassière de son bourreau.

Accompagnée, au loin, par le portrait d'un père tourmenté et puni. D'un acte parricide sans l'être. De la fin de l'illusion notoire dans laquelle il évoluait depuis plusieurs années. La perte de la dernière donnée sensée ; respectée au plus haut point ; aveuglée par l'obéissance et l'amour.

Pouvait-il encore croire que son géniteur n'avait été qu'un homme ? Avec ses bons et ses mauvais choix ? Une victime de l'Histoire ? Un exploité du plus grand bien ; au cœur même de la banalité affligeante du mal ?

Et lui-même, n'était-il pas à inculper d'une façon similaire ? À rompre pour sa félonie ? À briser pour ses jeux dont l'ultime esquive s'était révélée une chute ?

Les doigts du jeune homme se crispèrent auprès de son épiderme et de sa chevelure. Toutes ces choses se trouvaient dépossédées de leurs sens. De leurs logiques. Il n'en restait plus que la survie – payée au prix fort – et l'instinct – pas foncièrement très raisonné. Des vecteurs d'animalité ; de bestialité ; d'urgence. Ses mains affirmèrent leur appui alors que des larmes imprécises fuyaient ses joues livides.

Soudainement, quelque chose se craquela. La colère, contenue depuis des semaines, vint embraser la douleur et chasser les mots licencieux du mangemort gonflé de supériorité. Cette ébullition fulminante et impromptue le déstabilisa dans sa retraite forcée, au pied du lit de son meilleur ami. Son sang eut ainsi l'ignoble impression de se teinter d'un courroux imminent, quoi que sans cible potentielle. Et l'agressivité effervescente qui coulait présentement dans ses veines, l'empêcha de pleinement entendre les propos accusateurs de l'Allemand.

L'ancien Serpentard en devinait pourtant le sens – toujours une charge gorgée de réprobation, de fureur et de dégoût. Une attaque frontale qui exacerbait sa propre ardeur ; se devinant de moins en moins apte à tolérer les écarts et les injustices menées à son encontre sous le couvert de la lumière. Parce que, à son sens, le problème ne résidait-il pas en ce point précis ? La bichromie du monde. Des jugements. Des valeurs. Pour tous, son existence avait toujours était considérée comme fautive ; ombrageuse ; maléfique.

À cet instant précis, il éprouva une envie irrépressible de tordre la gorge à de tels concepts. Les membres brusquement tendus sous l'irradiation oppressante d'une violence difficile à maîtriser. Mesurer. Cerner. L'âme épuisée de devoir toujours accepter les réquisitoires sans s'en révolter. Ni chercher à se défendre d'une quelconque manière. Pourtant, en levant son regard vers Clemens, une vive langueur tempéra son emportement.

La seconde suivante, l'ordre tombait tel un couperet. On sort. « Bien. » Malgré le semblant d'apaisement, sa voix s'était faite sifflement plus que murmure. Notamment car la colère se faisait glace plutôt que feu chez lui. Persistante derrière les entrelacs de sa contenance. Même fragmentée en une multitude d'éclats.

Du coin de l’œil, Rowan jaugea la présence de sa baguette sur le bord de son propre lit.  Il ne la prendrait pas, de peur de se laisser tenter par la rage impérieuse de sa chair. De se corrompre à la violence et aux regrets. De blesser son camarade par folie ou inadvertance. Des potentialités qu'il se savait incapable de se pardonner.

Avec lenteur – se sachant pertinemment sous le joug d'une férule bien moins prompte au recul que son esprit alambiqué – il récupéra sa cape d'hiver et l'enfila. « Je te suis. » Le risque était diablement inconsidéré. Il ne pouvait guère le nier. Pas plus que son enveloppe charnelle, dont les iris se laissaient gagner par des perles salées éparses. Tristesse et rancœur mêlées.
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