[Flashback] Invasion de sombre obscur

Sujet: [Flashback] Invasion de sombre obscur Ven 20 Nov 2015 - 20:27

"painful insanity"

Mara & Me

Nul besoin d’exister, il n’y a aucune solution à l’amertume. On a beau se shooter à la morphine pour oublier les douleurs de cet univers, on ne peut rester aussi silencieux que les planètes qui gravitent autour de l’astre de lumière. Douce agonie que sont leurs vies. Pendant ce temps là, le soleil, lui, est tellement égoïste qu’il laisse le reste du système solaire se noyer dans l’immense vide que sont les ténèbres. Tout comme le cœur meurtri de Skyler. Enveloppé d’obscurité, le Poufsouffle n’arrivait plus à respirer. Crise d’angoisse. Encore.

Repoussant cette décrépitude qui l’étouffait, il parvint à se calmer à la vue de l’un des arbres à la lisière de la forêt interdite. Symbole d’une promesse éternelle. Parce que le chêne attire la foudre et pourtant reste debout, il symbolise la Force et la Prospérité. Certains diront la Majesté. Choix plus que judicieux donc, pour y graver les initiales d’un premier amour.

Mais Skyler le fixait sans le regarder, comme si ses yeux livides apercevaient un monde alternatif, transparent et envoutant. Son visage affichait une tristesse infinie difficilement masquée par sa joie perdue. C’était comme si sa peau s’effritait, son allégresse passée tombant en morceaux tandis que son vrai visage, d’une pâleur semblable à la mort, apparaissait en dessous. Il était en train de changer. Depuis plusieurs mois déjà. Mais maintenant qu’il était retourné à Poudlard, il sortait de son cocon.

Solitude et paranoïa seraient son quotidien, dorénavant. Il souhaitait simplement qu’on mette un terme à sa douloureuse existence. Déjà qu’en temps normal, il avait du mal à dormir… Un insomniaque doublé d’un somnambule. L’anxiété, il connaissait. A force de subir les maltraitances de ses parents depuis tout petit, il avait développé des tics. Toujours il jetait un sort sur la porte de sa douche, pour empêcher quiconque d’entrer. Jamais il n’allait aux toilettes quand il n’y avait personne. Il ne pouvait s’endormir qu’une fois tout le monde assoupi, dans sa chambre. Claustrophobe, il risquait d’avoir des crises de panique à chaque fois qu’il se sentait enfermé. De même s’il se retrouvait dans un endroit où la pénombre était vraiment envahissante.

Mais cet été venait de briser les limites de sa tolérance. M. et Mme Thanatos l’avaient rendu fou. Il n’était plus que l’ombre de lui-même. Les coups de fouet dans son dos venaient à peine de cicatriser et pourtant il n’arrivait toujours pas à s’adosser contre un mur. Le sol de toute façon c’est mieux. La fraicheur du mois d’octobre créait une fine brume devant l’extrémité de son corps recroquevillé qu’était sa bouche. Perdu de corps et d’esprit, il stagnait dehors, attendant qu’un froid glacial vienne s’emparer de son enveloppe corporelle. Il avait mal. Très mal. Mais il ne savait plus ou.

Ses lèvres avaient beau s’entrouvrir, aucun son ne venait hurler sa peine. Seuls les tremblements de sa peau frissonnante transmettaient son silencieux message… Quand les brûlures de notre passé rencontrent la torpeur des steppes gelées d’une mort tant attendue, il n’y a plus de futur pour le mirage de notre présent.

* Si seulement mon père et ma mère n’avaient jamais existé, j’aurais pu savourer le paisible néant que serait ma vie *

Sujet: Re: [Flashback] Invasion de sombre obscur Mar 24 Nov 2015 - 3:37

Une autre nuit infinie dans la course du Temps. Ses yeux n’avaient pas dormi, son esprit ne s’était pas fermé. Son corps avait rejeté l’état de veille nocturne. Pourtant, c’était logique. Y avait que lorsque le monde était éteint qu’elle se sentait exister. Véritablement, et authentiquement. De manière irréfléchie et naturelle. Plus besoin de prétendre pour être, quand tout le monde se complaisait dans le sommeil. La magie n’existait plus durant cette poignée d’heures noires. Mara était Mara. Sorcière allergique à sa nature. Jamais elle n’avait été autant en phase avec elle-même que complètement seule. S’isoler pour être. Mais cette nuit, y avait quelque chose de différent. Chaque inspiration-expiration faisait mal, ça pesait sur ses poumons. Manque d’air et doute incessant. Son Ciel s’était assombri. Morne, drainé de sa beauté azuréenne. Son Ciel était parti. Inconscient et prisonnier entre quatre murs blancs. Skyler, reviens...

Cinq minutes. Ses yeux n’étaient que mer de sel. Ses hoquets compulsifs firent râler quelques Aigles endormies dans le dortoir. Draps tirés sur son visage rougit par la tristesse. Les souvenirs s’imposaient en flash blancs. Aveuglante nostalgie. Fallait qu’elle se concentre pour plus se laisser envahir. Avoir le contrôle. Maîtriser le cœur, y avait plus débile comme ambition ? Sûrement, ouais. Genre apprivoiser un Nundu, une connerie dans le genre, ou t’en sors forcément abîmé. Ou mort. Mais là, il s’agissait pas que d’elle ; ce serait trop égoïste. Skyler, son Skyler avait tout balancé. L’Irlandaise savait bien avant tout le monde, bien avant tout ça. Les choses avaient pris une tournure normale, quand on y pense. Sauf que ça lui plaisait pas du tout. Son petit cœur avait pris sacrément cher. Son Ciel n’avait plus brillé pour elle, il était resté muet. Point de pluie, de nuages, ou de soleil incandescent. Rien que le vide d’un muet muselé. Rien que le vide. Silence radio et point à la ligne.

La Grande Salle était bondée, comme d’hab. Les rires fusaient, des voix dominaient de temps en temps. Le parfait brouhaha constant d’un matin à Poudlard. La petite blonde alla s’asseoir en bout de table, esseulée sciemment. Elle aimait tendre l’oreille sur les discussions matinales des autres. Rumeurs éparses au petit déjeuner. Sauf qu’elle s’attendait pas à ce qui venait de tomber dans son tympan curieux. Yeux ronds, sa fourchette chuta avec fracas dans son assiette. Des regards hagards la toisaient, interloqués. Pétrifiée dans sa surprise, elle planta là ses œufs brouillés et son jus de citrouille. Rien à foutre du repas le plus important de la journée. Rien à foutre d’arriver en retard en cours. Rien à foutre de rien. Skyler serait revenu. Là, dans le château. Ils l’auraient laissé sortir de l’hôpital. C’était trop beau, c’était trop inespéré. Détour en trombe par la salle commune des Blaireaux. Ciel absent. Tilt dans son esprit chamboulé. Mara fit volte-face, ses jambes la portaient aussi vite que possible. Elle savait où aller.

Le froid mordit avidement son visage une fois dehors. Elle grelotta vite fait, changement de température brutal. Elle s’en foutait pas mal de choper la crève. Elle se sentait pousser des ailes entre les omoplates pour rejoindre son Skyler. Ange terrestre. Son souffle se détachait en buée dans l’espace. Sa gorge lui faisait foutrement mal. Comme un brasier recouvert de neige à chaque fois qu’il se ranimait. Une douleur sourde, mais vive dans la poitrine. Peut-être aiguisée par l’appréhension. Ca y est, une boule de plomb dans l’estomac. Mara était du genre à trop penser, à trop imaginer. A trop flipper et angoisser, on n'était plus rien. Malgré tout, son allure n’avait pas diminuée. Fallait qu’elle en ai le cœur net. Heaven is a place on Earth, is that true ?

Devant, se dressait l’interdite Forêt Interdite. Lugubre et saisissante. Le souffle court et le cœur lourd, ses yeux se baissèrent sur un arbre. Un chêne en particulier, signé de leurs initiales d’amoureux idiots. Coup de théâtre en pleine face. Sous l’arbre dépouillé par l’hiver, une silhouette assise par terre. Une main invisible enserra sa gorge tandis que ses yeux se noyaient. Elle déglutit une, deux, trois fois. Impossible de se débarrasser de cette sensation d’étouffement. Fébrile, la blonde s’avança avec précaution vers un Skyler statique, qui lui tournait le dos. Est-ce-qu’il était bien là ? Ca semblait si inconcevable. C’était comme si il revenait d’entre les morts. Un retour qu’elle pensait jamais vivre. Un soulagement autant qu’une crainte. Et si... Stop. Avance. Sans le regarder, elle vint se planter devant lui. Son Ciel. Réellement. Lui, Elle, Ici. Les larmes roulèrent en silence sur ses joues, sa lèvre trembla pour balbutier :

« - Sky… »

Sujet: Re: [Flashback] Invasion de sombre obscur Sam 28 Nov 2015 - 15:25

"the twilight of forgiveness"

Mara & Me

Un son. Si lointain et pourtant si proche. Comme un appel de détresse au dessus de la surface de l’eau. Mais le ciel coule, il n’entend pas bien. La main tendue vers l’aurore boréale qui se reflète sur le plafond aquatique, il tente de s’en emparer, comme un fou oserait tenir la Lune dans sa main. Impossible. Mais justement, il est fou.

Fou de toi. Fou d’elle. Fou d’amour. Fou de désespoir. Qu’elle était cette chaleur qui l’envahissait ? On aurait dit une agréable brûlure. Qui lui carbonisait les entrailles. Naissance d’un incendie qui ravage tout sur son passage. Eveil d’une sensation oubliée, séquestrée. C’est par l’épreuve du feu qu’on réalise la puissance du ressenti. Et pas n’importe quel ressenti. Celui du partage, celui du lien indestructible… celui de l’impossible qui devient réalité. Et ce constat donnait des ailes à sa conscience jusqu’à ce qu’il sorte la tête de l’eau. Pour finalement apercevoir cette présence qui lui tendait une main invisible.

C’est par ses larmes qu’elle l’avait sorti de son martyr. Comme si le noyer avec sa tristesse était préférable à une asphyxie ténébreuse personnelle. Il la reconnaissait. Cette chevelure d’or étincelante ; ce charme immédiat qui envahissait l’espace tout autour pour nous encercler et nous piéger ; il n’y avait qu’une personne pour lui faire autant d’effet.

Mara.

Il ne s’attendait pas à la revoir. Elle qu’il avait complètement oublié pendant ces derniers mois. Elle qui devrait le détester pour ne pas avoir donné de nouvelles. Elle qui ne pouvait l’aider ni le comprendre. Lui qui était aveuglé par cette admirable tristesse qu’elle affichait, si pure et pleine d’amour. Son cœur saignait à sa vue, il ne pouvait la regarder en face. Regard qui fuit le sien

▬ Mon ange..

Douleur aiguë. Voix fébrile. Ce n’était pas facile de renouer avec un tel passé. Douleur émotionnelle et non physique, pour changer. Elle était présente désormais, c’était déjà énorme. Lui-même ne l’avait pas vraiment oublié. S’il était ici, c’était pour se souvenir. Nostalgie atrophiée. Parce qu’après coup, il se rendait compte qu’inconsciemment, elle avait peut être veillé sur lui en pensée, tel un ange de lumière, le forçant à protéger son intégrité pour ne pas sombrer totalement dans la folie, pour ne pas perdre son coté humain.

Pourtant, il s’était senti seul, si seul… Une solitude face à un mur gigantesque. Obstacle aussi brisé que lui. Il n’avait même pas songé à grimper dessus pour le surmonter. Le ciel était aussi gelé qu’un iceberg, sombrant petit à petit dans les abysses d’une mort mentale qui l’empoissonnait jour après jour. Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de partie submergée.

Mais maintenant, c’était différent. Elle était l’étincelle qui avait créée cette chaleur en lui. Détruire pour mieux reconstruire. Il ignorait encore si c’était mal ou bien, mais il s’était bien rendu compte qu’elle l’affectait. Sa présence l’irradiait comme un crépuscule matinal. Elle était l’aube d’une souffrance inconnue. Celle du regret. Celle de la culpabilité. Ou surtout celle de la rédemption. Skyler ignorait comment se faire pardonner. Maintenant qu’ils étaient de nouveau l’un en face de l’autre, il était également en face de ses propres péchés. Elle était tout ce qu’il avait toujours voulu, elle était tout ce qu’il lui fallait, et pourtant, il l’avait repoussé mentalement pendant tout ce temps. Comment pouvait-elle encore pleurer pour lui ? Lui qui ne lui apportait rien à part de l’inquiétude…

▬ Excuse-moi..

Dernière édition par Mara Kvelgen le Dim 13 Mar 2016 - 17:27, édité 1 fois

Mon ange. Y avait pas plus attendrissant comme surnom. Ça voulait dire tellement de chose, et rien à la fois. Un ange, ça doit protéger. Elle avait rien pu faire pour empêcher ça. Ni pour le soulager. Rien du tout, juste le regarder lui déballer son passé purulent. Et se nourrir, se gaver de cette misère humaine. De toute façon, qu'est-ce-qu'elle pouvait faire ? A part piquer un Retourneur de Temps et inverser le cours des choses. Non, c'était complètement con comme idée. Si ça se trouve, ils se seraient jamais rencontrés. Le Ciel n'aurait jamais attiré l'attention de la blonde s'il n'avait pas inondé son cœur. Et ils étaient là, à se contempler, à se chercher. Sans se trouver encore totalement.

Mon ange. Ces deux petits mots résonnaient en écho dans son crâne. C'était assourdissant. Et ça grandissait, inexorablement dans sa tête et dans son dos. Elle sentait là, entre ses omoplates, les articulations déchirer sa chair. Intrusion du Bien, pour l'exorcisme du Mal. Diablement dérangeant, en fait. Le sang battait à ses tempes, gonflées par l'émotion. Une grosse émotion. Ça grouillait dans ses veines, comme des vers affamées. Implorant comme un martyr, Skyler la regardait, tremblant. Achève-moi ou sauve-moi. Le corps de Mara était tendu, raide comme la Mort. Ses bras voulaient le couver, le posséder. A moi enfin et pour toujours. Mais son esprit refusait de communiquer l'ordre à ses membres. Non, c'était trop facile.

Excuse-moi. Ses larmes qui lui brouillaient la vue avaient séché. Les sillons pour cadavres, creusés sur ses joues rougies. Tristesse s'était évaporée, épuisée. Rongée jusqu'à l'os et pompée jusqu'à la moelle. Y avait autre chose qui germait dans ses entrailles. Un truc bouillonnant et intense, comme une potion qu'on aurait trop fait chauffer. Muette comme une carpe la Mara, elle essayait de ravaler sa colère. Ça laissait un affreux goût amer. Un goût de foutu foutage de gueule. Non, là, fallait que ça explose. Sinon, c'était elle qui risquait d'exploser.

« - Excuse-moi ? C'est tout, t'as rien trouvé d'mieux ? Son visage se perdit vers l'éther. Au secours. T'as eu des mois pour réfléchir à ce que t'allais me dire, et c'est tout ? Mais... Mais putain... Trois pas sur la droite, une main à son visage, les mots s'étranglaient dans sa gorge. Brusque volte face. Putain t'as pas idée... T'as pas idée, non. Je crevais d'inquiétude, tous les jours je me demandais si t'allais réapparaître ! Et là je... T'es là... Nouvelle crise de larmes, névrosées. T'as tout abandonné pour fuir. Pas un mot, pas une nouvelle depuis ton départ. T'aurais pu te faire bouffer par une bestiole dans la Forêt Interdite que ça aurait été pareil... L'arrête du nez entre ses doigts, elle bidouillait tous les boutons de sa machine interne pour faire redescendre la pression. Murmure à peine audible. T'avais pas le droit... Haussement du volume vocal. Tu pouvais pas me faire ça, à moi ! J'aurais tout tenté pour te soutenir, parce que putain, je t'... je... »

Les yeux fous, le souffle court, elle s'effondra à quelques mètres de lui. Un pantin désarticulé auquel on aurait coupé les fils en pleine action. Ça l'avait complètement vidée. La rage avait vampirisé toute son énergie, en un battement d'ailes de papillon. Oh elle lui en voulait, c'était certain. Plus que ça, elle se sentait trahie. Trahie dans ce qu'elle pensait représenter ; un ange. Trahie dans ses sentiments mêmes ; son ange. Ses ailes pourrissaient dans son dos. Mara s'était fait trop de mal en pensant à lui tous les jours. Ça faisait du bien là où ça faisait mal. Maintenant, c'était à lui d'aspirer le poison de sa plaie béante. A lui de devenir le sauveur, et elle la sauvée.

"the twilight of forgiveness"

Mara & Me

La voir souffrir sachant qu’il en était la cause était le pire spectacle qu’un homme puisse subir. Et pire que ça encore, c’est qu’il ne pouvait rien y changer, le mal était déjà fait. C’était les conséquences de ses actes. De son absence d’action. Mais il avait une excuse, il avait souffert le martyr. Chacun son tour, apparemment. Sentir le regard accusateur de ses bras tendus vers lui sans bouger, ça le tuait, elle voulait l’aider mais elle ne le pouvait pas. Comment aurait-elle pu ? Il venait de l’abandonner pendant des mois ! Ignorant sa promesse de la rendre heureuse et de ne jamais se séparer. Et il était là, assis dans cette pose malheureuse qui le rendait honteux maintenant. Comment pouvait-il être si égoïste ? Ce départ n’était pas de sa faute mais tout de même… Il n’avait pas d’excuses.

Soudain, l’orage. Tempête de rage qui se déferlait contre lui. Et le plus surprenant, c’était qu’il trouvait cela rafraichissant. Elle avait le droit d’être en colère contre lui et il le comprenait complètement. Seulement, il aurait voulu que ce soit plus violent que ça. Pour pouvoir expier ses crimes. Mais elle se défoulait sur lui d’une manière plus agressive qu’avec des cris et des injures. Elle lui flanquait une magnifique claque avec rien de plus que la vérité. Rien ne blessait autant que la vérité. Et des larmes.

A la voir pleurer ainsi pendant son blâme, son cœur fut aspiré par le trou béant de sa culpabilité qui se formait en lui. La douleur d’avoir blessé cette âme innocente et si précieuse à ses yeux lui fit perdre la vue dans un flot de larmes. Il restait immobile, subissant en silence sa peine amplement méritée, mais il ne pouvait retenir sa peine de s’écouler le long de ses joues. Il fallait qu’il fasse face à cette scène douloureuse. Par respect pour sa petite amie. Qu’il aurait dû rassurer. Qu’il aurait dû contacter. Alors il la regardait, sans oser croiser son regard de peur que son âme s’effrite en morceaux. Il écoutait attentivement ce qu’elle ressentait. Parce que cela faisait incroyablement longtemps qu’il n’en avait pas eu l’occasion… Et maintenant, il avait bien l’intention que ça ne se reproduise plus.

Puis le coup final, l’arrêt subit de sa déclaration d’amour, de l’expression de cet immense amour blessé, pour la voir finalement s’écrouler à genoux, comme sans vie, muette. Cette vision d’horreur lui flanqua une seconde claque qu’il ressentit comme si on voulait de le gifler pour de vrai, sa tête se détourna de Mara suite à cela, accusant le coup. « Tu as eu des mois pour réfléchir à ce que tu allais dire », hein ? Pas vraiment, il n’a eu que des pensées furtives en sa faveur, envoyées par son inconscient pour qu’il ait suffisamment de quoi tenir, pour que sa santé mentale puisse conserver un semblant d’intégrité. Mais il avait honte de constater qu’autrement, il n’avait pensé qu’à lui, à son grand nombril et à sa souffrance. Parce qu’il n’y avait que lui qui comptait, n’est-ce pas ? La preuve que non. Comment pouvait-il ignorer le fait qu’avec l’amour, on partage tout, y compris la douleur et la souffrance ? Etait-ce parce qu’ils ne sortaient ensemble que depuis quelques mois ? Pourtant, il avait bien senti qu’elle n’était pas n’importe qui. Qu’elle était la bonne ! Elle était son ange de lumière, celle qui illuminait la noirceur de son âme et qui le ramenait vers le commun des mortels !!

Et justement, à fréquenter trop souvent les lieux obscurs, on se retrouve perdu au milieu d’eux, sans savoir quoi faire. Il était perdu tout ce temps et grâce à elle, il savait maintenant où il voulait aller. Dans ses bras. S’agenouillant maladroitement, il se précipita vers elle et la pris dans ses bras avec la ferme intention de ne plus jamais la quitter !!

▬ Excuse-moi mon amour… Je n’ai aucune excuse. J’aurais dû te parler, j’aurais dû chercher à te voir plus tôt… Mais j’étais perdu, je luttais contre plus fort que moi. Je ne sais même pas si j’ai vraiment survécu… Il y a encore quelques minutes, j’ignorais qui j’étais. Mais grâce à toi, j’y vois plus clair ! …Me pardonneras-tu un jour ? Mara, je t’aime.

Dit-il avant d’attraper son visage avec la force du désespoir, pour enfin l’embrasser. Une larme roula le long de sa joue pour annoncer le retour de ses sentiments, enfouis en lui pendant son épreuve de douleur.

▬ Tout est de ma faute… Je ne sais pas quoi faire pour me faire pardonner, rien ne le peut…

Quelques minutes paraissant une vie entière. Ces courts instants où le monde semble s'écrouler, imperturbable. Malgré les cris, les larmes, les prières, la douleur. Malgré tout. C'était la toute première fois qu'elle expérimentait ce sentiment. Ce déchirement interne et violent. Un truc tellement sentimental que ça en devient physiquement douloureux, vous voyez l'genre ? Ces révélations qui vous attrapent les boyaux... Putain, ça ferait presque chialer. Voilà, c'était ça son état actuel ; sanglots et tout le tremblement. Elle avait l'air encore plus négligée que d'habitude. Échevelée, à bout de souffle, échouée par terre. Un ange exclu du Paradis, atterrissant dans la réalité de la vie. L'Amour, dure réalité pour une gamine de 13ans.

D'un geste nerveux, elle essora ses yeux trempés dans son t-shirt. Toujours aucune réaction de l'autre côté. Est-ce-qu'il avait capté ce qu'elle avait voulu dire, au moins ? Plus elle y repensait, plus le moment se troublait. C'était comme si elle avait vécu la scène de loin. Elle avait regardé Mara bis se heurter, se débattre, puis s'avouer vaincue. Le fauve dans l'arène, contre une poignée de gladiateurs. Pour le coup, le fauve donnait sa langue au chat. Fallait juste qu'elle se calme. Qu'elle arrête de cogiter. Tout passer au peigne fin, ça faisait que la faire tourner dans une boucle. Ça servait à rien de ressasser, c'était fait. Tant pis, tant mieux.

Soudain, le froid céda à la chaleur. Vous savez, l'Amour qui sait vous envelopper entièrement. Apaisement jusqu'à l'âme, d'une seule étreinte. Sans s'en rendre compte, la blonde avait fermé ses paupières. Son corps s'était décrispé, progressivement. Elle l'avait entendu sans vraiment écouter. Ça comptait pas, les mots. Mais la façon dont il s'était agrippé à elle. Mais sa voix qui a tremblé. Mais sa douleur, à lui aussi ; ça, ça comptait. Craintive, elle n'osait plus bouger. A peine respirer. Que cet instant soit éternel, qu'il panse mes plaies et aspire l'ombre. Comme si c'était si facile, jeune fille ! Jeune abrutie, même.

Baiser ultime. Un moment unique, et toutes les conneries qu'on a pu dire sur le premier amour. Ah, si seulement elle avait su. Kvelgen se serait jamais sacrifiée comme ça pour quelqu'un, si elle avait su où ça la mènerait. Bref, ça c'est un autre sujet tout aussi tristement triste. Là, c'était la béatitude. Pure, sans parasites indésirables. Un Ciel sans nuage, la promesse de l'espoir. Soyons fous. Soyons plus réalistes ; l'Aigle n'oublierait jamais ce moment enchanteur et débordant de niaiserie. Ce souvenir, ce sera rien de plus qu'un raccourci à toute la souffrance endurée. Aux heures d'inquiétudes, de torture mentale et de remise en question. De culpabilité, et tant d'autres choses déplaisantes. Mais ça, Mara elle en a aucune idée. Bah non, ce serait un peu trop facile.

Ses lèvres se détachèrent doucement. Elle revenait à elle, laissait de côté son introspection maladive. Ses iris scrutaient le visage de Skyler Thanatos. L'espace d'une seconde, elle eut envie de se jeter sur lui. De lui faire du mal. De le détruire. De se venger pour se purger. Un instinct presque animal dans un besoin de justice démesuré. Personne avait le droit de lui faire du mal. Elle s'était déjà trop laissée faire... C'était finit, plus jamais. Immobile, elle gardait un regard transperçant. De part en part. Sinueuse, ses lèvres vinrent trouver l'oreille du brun.

« T'avise pas de me refaire ça... »

Murmure froid et déroutant dans le feu de l'action. Mâchoires serrées, muscles tendus. La Bête à travers l'Homme, violente et individuelle. Un mouvement lent de recul, et elle lui souriait. Son sourire disait sa joie pendant que ses yeux scellaient la menace, impassibles. C'était pas son style de pardonner deux fois. Non, décidément, Mara était pas bien miséricordieuse. Avis à ceux qui voudraient faire le test ; à vos risques et périls. Surtout à vos périls, mes agneaux. Fébrilement, elle se releva dans le vent de la matinée d'hiver. Grandie et presque guérie. Vivante, à nouveau. Tout était fixe autour d'eux, plongé dans un mutisme assourdissant. Le temps de cette petite crise, la jeune fille avait oublié le reste du monde. Y avait eu qu'elle, qu'eux, perdus pour se réunir. Doucement, elle lui tendit sa main pour le remettre debout. Au sens figuré et littéral. Ensemble, c'est tout.

Fin du RP