-21%
Le deal à ne pas rater :
LEGO® Icons 10329 Les Plantes Miniatures, Collection Botanique
39.59 € 49.99 €
Voir le deal

 

 Marée haute pour nos bassesses

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Clemens Neubach
Clemens Neubach
Sorcier
Tell me who you are...
Rang Modératrice

Date d'inscription : 24/02/2007
Parchemins : 2515
Points d'activité : 206
Avatar : Aaron Taylor-Johnson
Crédits : White-Rabbit, Rowan
Multicomptes : Pippa Funnell
Âge : 21 ans
Métier : Serveur au Parker's Coffee
Situation financière :
  • ★★★☆☆


Fiche de duelliste
Seuils de réussite: 34 - 44 - 54
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyDim 14 Fév 2016 - 18:33

Spoiler:


Le regard glacé et ambigü, Clemens avait laissé son ordre tomber dans l’espèce de torpeur qui régnait entre eux. Presque curieux de savoir si Rowan allait suivre son commandement sans rébellion ou si l’émotion insidieuse qu’il voyait brûler derrière sa chair d’albâtre allait enfin se soulever contre les débris de leur amitié. Finalement, la main tremblante, il rangea sa baguette dans sa manche alors que son meilleur ami se relevait sans chercher à quérir le moindre moyen de se défendre. Un rictus sardonique sur le visage, l’Allemand eut envie d’éclater de rire. Il ne savait même pas vraiment de quoi l’ancien Serpentard était capable.

Il enfila lui aussi un manteau avant de se détourner pour quitter Sinistros. Rowan le suivrait, guidé par son honneur et le besoin que cette histoire se termine, mais se retourner pour le surveiller était au dessus de ses forces. Il ne voulait rien laisser paraître de sa fureur ou de sa peine aux regards extérieurs, alors il descendit les escaliers à longues enjambées, traversa la salle commune d’un pas guidé par la colère, n’adressant à ceux qui osaient l’interpeller qu’une ignorance impolie. Que les deux hommes s’étaient disputés ne faisait pas de doute, mais nul n’avait besoin de savoir pourquoi. Le secret, ce secret, n’appartenait qu’à eux. Clemens se considérait pour ces quelques minutes maître du devenir de Rowan. Si quelqu’un devait dévoiler un courroux, alors il ne laisserait les mains de personne d’autre que lui-même sa tâcher de sang.

Rendu hésitant par cette émotion ambivalente, il ne s’en détourna pas moins de son chemin. Son seul but était l’extérieur de l’académie, pressé par le besoin de trouver une scène muette et anonyme pour jouer la fin de leur tragédie. Il ne voulait ni public, ni témoins, aucun intervenant d’aucune sorte alors qu’il s’attachait à combattre douceur et fureur tant envers lui-même qu’envers Rowan. Clemens se serait arraché les cheveux de comprendre si bien ces motivations alors qu’il ne pouvait se résoudre à reconnaître leur validité. Sans vraiment guider ses pas, l’étudiant traversa Avalon sans accorder de regard à ce village qui lui était devenu si cher, semaine après semaine. Il ne revint vraiment à lui que lorsque ses pieds s’enfoncèrent dans le sable glacé de cette fin d’hiver. Loin devant lui s’étendait la mer, sauvage et déchaînée par les vents nocturnes. Le sel lui piquait les lèvres, d’une amertume qui n’était néanmoins pas due à l’air marin.

Pour la première fois depuis plusieurs dizaines de minutes, Clemens se tourna enfin vers son compagnon d’infortune. Il le sonda d’un regard moins brutal qu’auparavant, mais toujours élusif, déchiré entre des réflexions contraires. Pour la première fois depuis des années, il ne parvenait pas à deviner les remous qui agitaient l’âme de l’ancien Serpentard, pour autant qu’il ait jamais été capable de bien les interpréter, cependant. La fatale révélation remettait en cause toutes ses certitudes passées quant à leur amitié. Le silence se faisait pesant, dans cet échange de regard prolongé, mais l’Allemand ne trouva pas la force de pousser les mots au-delà de ses lèvres. Il reprit sa marche, face à la mer et à l’indéfinie perpétuité qui se révélait devant eux, rendue floue et intrigante par la pénombre.

Il ne s’arrêta que lorsque la marée montante vint caresser l’ourlet de son pantalon. Les embruns n’avaient jamais constitué de réconfort pour lui, si ce n’était à travers le murmure qu’ils faisaient flotter dans le vent. Pourtant, cette nuit-là, la rancœur semblait y trouver un terrain parfait pour constituer un théâtre de hasards et d’aveux, dans un décor où naissance et destruction pourrait chacun se faire renommer d’éternité. Clemens ancra son regard à ces prunelles jumelles qu’il connaissait si bien, mais ne parvenait pas à reconnaître.

— Quel est ton plan à présent, hein ? Tuer le Seigneur des Ténèbres de tes mains nues ? Laisser son pouvoir s’étendre tandis que tu t’égosilles simplement à préserver ta famille ?

L’Allemand se passa les mains dans les cheveux, dissimulant un instant son visage dans la fraîcheur délicate de ses paumes. Il s’en voulait de s’en prendre ainsi à l’homme sur lequel il avait toujours su pouvoir compter, mais ne trouvait d’autre échappatoire à la volonté fébrile de ses mains, pressées contre ses traits dans un but de contrôle, de frapper et de détruire. Il ne savait comment faire exulter ses rages sans causer de dommages irréversibles. Son regard repparut entre ses doigts.

— Comment suis-je supposé te faire confiance à nouveau ?

Il s’approcha de Rowan, posant une main hésitante sur le col de son meilleur ami, écrasant l’étoffe entre ses doigts, le souffle de l’aristocrate plus proche de sa peau qu’il ne l’avait jamais été.

— J’aimerais encore te nommer frère, mais que cela ferait-il de moi ?
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Tell me who you are...
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyLun 15 Fév 2016 - 16:00

D'un dernier regard, le cœur et l'esprit empêtrés dans une mélasse innommable, le jeune aristocrate avait métaphoriquement caressé sa férule d'orme. Un bois gorgé de dignité, bien plus que lui en ces instants sombres et tendus. La chair traversée par une rage contenue de justesse par l'affection d'un ami ; d'un frère qu'il se refusait obstinément à combattre. Une part de lui-même qui échappait toujours à l'obscurité, presque fébrile de se soustraire ainsi au regard des Ténèbres personnifiés.

En quittant le confort de leur chambrée, il avait eu la singulière impression que sa baguette bourdonnait d'effroi. Secouée par un trouble soucieux et lointain, accentué par l'éloignement insensé de son possesseur autrefois si avisé. Or, au creux des instants présents, la logique se défiait littéralement de leurs existences. De leurs réflexions.

À dire vrai, Rowan avait plutôt l'impression d'être déchiré entre un instinct précautionneux – celui de la survie – et la folie grondante d'une agitation grandissante. La colère. Superbe et grandiloquente ; un écho toujours plus exacerbé et tangible par l'insistance des sanctions menées à son encontre. Trop bien né. Trop pur. Trop engagé. Une haine jetée à son visage sous le couvert de grands mots et de puissantes organisations ; celles engendrées par la lumière. Vraisemblablement. Qui d'autre ?

Coupable par nature. Par naissance. Il l'était aussi, maintenant, par choix. Amer. Obligatoire. Une décision néanmoins portée au-devant de sa vie ; empreinte d'espérance et de naïveté, quelque part, en se croyant apte à jouer contre le temps et le Seigneur des ombres. Tel qu'il avait joué et retourné sans encombre l'aristocratie ? Non. On ne vainquait pas ainsi les mangemorts et leur seul vrai maître.

Le bras entaché à jamais par la saillie du mal ; persistante et sifflante.

Sans un bruit, si ce n'est le souffle nécessaire à leur transport, il avait porté ses pas derrière ceux de l'Allemand. Ne prêtant que peu d'intérêt aux bordures du château puis du village d'Avalon. Seul l'arrêt de son camarade le poussa à quitter la retraite qu'il s'efforçait de maintenir, depuis qu'ils avaient quitté leur appartements. Face au déchaînement de la mer ; de l'océan ? Le détail n'avait que peur d'importance, tant les mouvements éternels déchiraient l'air d'un feulement continu.

D'un appel à la violence primaire ; sauvage ; bestial.

Le regard de Clemens vint quérir le sien une énième fois, ainsi que les interrogations successives. Bordées d'accusations silencieuses – tout du moins, il le percevait de cette manière tant la réponse à fournir lui paraissait impossible à cerner. Inexistante. « Je ne sais pas. » La vérité ; nue, frissonnante et déplaisante. Répétitive. « Je ne sais vraiment pas. » Un aveu formulé à voix haute, entre eux. Dans l'étreinte du vent. La froideur de la nuit. L'humidité du ressac perpétuel.

Et leur proximité accrue par la tension et la méfiance. Avec un soupçon de rancœur, brûlante et impérieuse. Autant chez l'un que l'autre.

Une rage bourdonnante ; blessée par les trahisons et les exactions guidées par la foi indéfectible autant que surannée de quelques groupuscules décriés. Par la fin de la présomption d'innocence. Par les invectives fouettant chaque jours son épiderme pour des faits qu'il se refusait lui-même de tolérer. Quoi qu'il n'avait pas vraiment eu le courage de les contester auprès des principaux intéressés. Un entrelacs de grondements, de coups et d'injures à peine prononcées.

À la question suivante, le jeune aristocrate éprouva une cruelle poussée d'aigreur. Tordant ses entrailles d'irritation et d'impatience ; s'animant tel un serpent irascible derrière les fragments de sa contenance. Des brisures teintées d’ocre et de carmin par les émotions éprouvées par sa conscience. La fureur. La mélancolie. L'impuissance. Et l'amour. Exaspéré.

« Est-ce que tu en as seulement l'envie ? » Encore une fois, sa voix s'était faite sifflement. Quoi que plus basse et hâtive ; d'une froideur qui lui piquait la gorge.

Devenue subitement rationnelle, lorsqu'une main incertaine vint pénétrer sa proximité. S'attacher à son col ; et le broyer. Comparable à une menace sourde et avérée. Pleine d'une respiration fébrile et attentive, face à tout ce qui pouvait se briser entre eux. « Je ne déciderai pas à ta place, Clemens. » Rowan avait articulé, les dents serrées et le souffle nerveux. Comment ne pas l'être ?

À la pression qu'il craignait se porter contre sa gorge, pourtant, il joignit ses propres doigts. Ils s'insinuèrent auprès de ceux de son camarade, et serrèrent aussi bien la chair que l'étoffe. Dans un étau de fer et de velours qu'il se refusa à lâcher.
Revenir en haut Aller en bas
Clemens Neubach
Clemens Neubach
Sorcier
Tell me who you are...
Rang Modératrice

Date d'inscription : 24/02/2007
Parchemins : 2515
Points d'activité : 206
Avatar : Aaron Taylor-Johnson
Crédits : White-Rabbit, Rowan
Multicomptes : Pippa Funnell
Âge : 21 ans
Métier : Serveur au Parker's Coffee
Situation financière :
  • ★★★☆☆


Fiche de duelliste
Seuils de réussite: 34 - 44 - 54
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyDim 28 Fév 2016 - 21:18

Il n’aurait su décrire le sentiment qui heurtait brutalement son cœur à chacun de ses battements. Toujours plus puissant, toujours plus animal, il vibrait à ses oreilles tels les tambours de guerre d’une armée en campagne. Le pas des chevaux de combat frappait le sol à l’unisson, renforçant cette langueur martiale du désir sourd de partir loin des conventions et des obligations. Clemens les avaient toujours haïes pour ce qu’elles poussaient les hommes à faire, en vertu d’un honneur suranné ou de valeurs qui n’étaient véritables que sur papier. Les philosophes avaient eu beau couvrir des rouleaux entiers de parchemin avec leurs lignes de conduite enchanteresses et inébranlables, la vie d’un être de chair et de sang ne pouvait jamais se résumer avec la calligraphique simplicité d’une description à la plume.

Le regard brûlant, planté au fond de celui de Rowan, comme s’il espérait pouvoir se perdre dans son âme, pour trouver la réponse aux questions qui hurlaient dans la sienne, il se sentit faillir devant les hésitations de son ami. Tous deux doutaient de la conduite à tenir et des futurs qui s’offraient à eux ; innombrables et intangibles. Certains parmi eux étaient probablement sanglants et durs, tandis que d’autres n’étaient qu’une idylle printanière dans laquelle la fuite offrait aux lâches le bonheur dont la méconnaissance berçait les idiots. Entre ces deux extrêmes se trouvaient le chemin, semé d’embûches et d’ornières qu’ils allaient devoir emprunter, ensemble ou l’un contre l’autre, mais jamais vraiment séparé. Ami ou ennemi étaient des concepts que l’on tenait à opposer alors que outre pour le meurtrier, il partageait la même définition fondamentale et intrinsèque : être compagnon de vie.

Rowan ne savait pas. Il n’avait pas les réponses aux questions qui brûlaient les lèvres de l’Allemand sans qu’il n’osât toutes les poser, de peur d’en entendre les réponses. Terrassé par l’envie et la haine, la douleur et la confiance, il sentait la morsure de sa rage flancher, alors que les prunelles céruléennes ne cherchaient à se dérober à son examen péremptoire. Il ne savait plus, qui de l’aristocrate ou du traître à son sang était le moins noble de l’histoire, car s’il n’avait jamais trahi, il n’avait jamais combattu. Autour de lui se déchirait les chairs et les familles afin de défendre une utopie que nul ne vivrait jamais, mais dans l’espoir simple et pourtant grandiloquent d’offrir à sa descendance un monde un peu plus féerique que celui dans lequel on avait soi-même eu le malheur de grandir.

Le sifflement de l’ancien Serpentard le saisit à la gorge, courut le long de son échine tel un coup de fouet glacé, le remémorant soudainement qu’il avait face à lui non une proie, mais un prédateur. L’animal choisissait de tempérer son comportement afin d’endurer son sort, mais cela ne signifiait guère qu’il avait rendu les armes pour se laisser défaire. Sa main se crispa un peu plus sur l’étoffe chaude et vaporeuse, alors qu’il baissait les yeux en secouant doucement la tête, un rire amer faisant frémir ses lèvres. À leurs pieds, le sable s’était perdu dans une étendue noire et glaciale, sans que, étrangement, la morsure de la mer ne semble pénétrer son corps pour signaler à son cœur qu’un autre danger quémandait sa place en leur monde.

— C’est ça qui me terrifie, Rowan.

Il releva la tête, étrangement rassuré par la prise sur sa propre main. Il sentait les déferlantes de craintes et de regrets se jeter avec plus de force encore sur la retenue de ses valeurs, les détails en lesquels il avait cru croire, des années durant. Il posa sa main encore libre dans la nuque de son colocataire, sourd aux embruns qui sifflaient avec plus de force autour d’eux, annihilés par le bouillonnement de rage et de malheur qui occupait tous ses sens.

— Je ne sais pas ce que, de toi ou de mes valeurs, je suis le plus à même à trahir. L’un et l’autre font de moi un renégat, et jamais je n’aurais cru pouvoir pactiser avec les Ténèbres, mais…

L’Allemand ferma les yeux, un sourire ambivalent sur les lèvres.

— Tous mes choix ont toujours été voués à protéger ma famille, à préserver le secret dans lequel ils s’épanouissent. C’est en vertu du sang que je t’ai promis de me réconcilier avec Heath. Qui serai-je à présent, pour te reprocher de faire de même ?
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Tell me who you are...
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyDim 28 Fév 2016 - 23:25

HRP:


Autour d’eux, le monde cessa progressivement d’évoluer. De se distinguer. Perdant sous le coup du vent marin ses formes ciselées, et les quelques nuances nécessaires à un tableau de clair-obscure. Il n’en restait plus que des ombres. Celles qui se déchiraient et se dévoraient entre elles, telles des bêtes assoiffées d’une chair éthérée et noir. Aussi glacée et déroutante que les profondeurs de la nuit.

Une obscurité brûlant leurs yeux d’un aveuglement certain ; à moins que ce ne soit leurs esprits qui se perdaient ici bas en de superbes folies ?

Les environs s’estompaient sous un pinceau à la palette bichrome, gorgé d’une ardeur novatrice et inquiétante. Inspirée par la main d’un destin maître de toute chose, apte à se montrer architecte de ses scénarios les plus lugubres, et bienfaiteur de ses espoirs les plus inavoués. Comme s’il s’agissait de tracer les contours d’un énième conte pour enfants, dans lequel le loup et le renard étaient des hommes plutôt que des symboles.

Comme si les éclats de la colère et de l’amertume, n’étaient pas seulement représentées – métaphoriquement – par les bourrasques océaniques.

Au contraire. Tout était humanité. Bardé d’émois insondables quoi que réels ; de grondements exacerbés par les attaches ; d’incertitudes teintées de tendresse et de frayeur. Un doute sublime et oppressant, prompte à broyer la conscience de l’aristocrate face à la crainte qui menaçait de la submerger. Davantage significative que le mouvements perpétuel des vagues, et la froideur grandissante des eaux du Pays de Galles.

Le perdre.

La vérité crépitait au creux de ce seul mot. Semblable à une promesse d’horreur et d’abandon ; mais surtout d’une mise à distance intolérable. Une esquive permettant de distinguer, avec une aisance remarquable, l’Homme du monstre. Et de le condamner lui, un peu plus, aux ténèbres. À la solitude d’un devoir sordide, les doigts couverts de sang. Une potentialité qui le terrifiait, tant son empathie n’escomptait pas coopérer auprès de plans similaires. Engagée, qu’elle était, dans la dualité aux relents grisâtre de son âme.

Se faisant même l’antagoniste d’une directive impérieuse, mêlant le velours et le fer. Survivre. Coûte que coûte. Un ordre instinctif – et proprement humain.

Pourtant, l’ancien Serpentard s’échinait – présentement – à résister à ce murmure primaire. Une part de son esprit se méfiant de la proximité de l’Allemand : en ce qu’elle impliquait des coups et des bassesses qu’il se savait incapable de rendre. Et une autre se refusant à envisager le pire. Pour des raisons de cœur plutôt que de logique. Ces choses là n’en ayant que peu, à l’évidence.

Contre son col, la prise s’affermissait ; et l’instant suivant, quelques mots fuyants venaient brusquer l’espace entre eux. L’effroi.

Les doigts de Rowan se serrèrent davantage auprès de ceux de son meilleur ami. Peu lui importait, alors, la rudesse de sa propre respiration et le poids de cette emprise contre sa gorge. De tels désagréments lui apparaissaient, à dire vrai, préférables. Puisqu’ils offraient l’opportunité d’espérer, encore, une autre voie que la déchéance. Une considération renforcée par les nouvelles allégations formulées.

Pactiser avec les ténèbres. Il frissonna. Où était-ce une inquiétude liée à l’autre prise portée contre son corps ? Silencieuse et discrète, tout en se révélant suffisamment affirmée pour qu’il se trouva incapable de l’oublier ? Une menace ou un pardon ? Le sourire de Clemens eut l’audace de lui faire croire la seconde supposition. L’indulgence d’un frère.

Dans un long soupir, il vint quérir le front de son camarade avec le sien, tandis que ses iris épuisées se dérobaient également à la réalité.
Revenir en haut Aller en bas
Clemens Neubach
Clemens Neubach
Sorcier
Tell me who you are...
Rang Modératrice

Date d'inscription : 24/02/2007
Parchemins : 2515
Points d'activité : 206
Avatar : Aaron Taylor-Johnson
Crédits : White-Rabbit, Rowan
Multicomptes : Pippa Funnell
Âge : 21 ans
Métier : Serveur au Parker's Coffee
Situation financière :
  • ★★★☆☆


Fiche de duelliste
Seuils de réussite: 34 - 44 - 54
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyLun 7 Mar 2016 - 10:30

Spoiler:

Le silence de Rowan le mortifiait plus que la montée des eaux, chatouillant à présent leurs mollets d’une promesse d’abandon et de départ. C’était là une solution facile et couarde, déjà envisagée quelques temps plus tôt, dans la chambre. Se jeter dans l’ondée noire, où y abandonner l’ami traître, renégat pourtant si compréhensible, envers qui il peinait à ressentir autre chose qu’une compassion d’autant plus terrible qu’il ne parvenait à exprimer que la haine. Son sourire ne flotta qu’une seconde sur ses lèvres avant de s’évanouir alors qu’il portait son regard là-haut, vers les étoiles partiellement dissimulées derrière d’épais nuages de pluie. Ils n’étaient rien.

Ses pensées sombraient avec ses propres réflexions, incertains de la conduite à tenir maintenant qu’il avait avoué le violent débat qui rongeait ses entrailles. Il voulait haïr le noble aristocrate, altruiste dans sa trahison, sans pouvoir cependant le nommer autre chose que frère. Dans le regard brillant du meilleur ami, Clemens découvrait les craintes et l’aveu d’un échec personnel qu’il sentait retentir au fond de son cœur et de son âme. Il ne pouvait décemment reprocher à Rowan des erreurs qu’il avait lui même commis — et commettait encore — dans les ombres secrètes du seul univers qu’ils ne partageaient pas. Tous avaient leurs parts de ténèbres, bien que leurs motivations soient différentes. Les siennes avaient la défaveur d’être profondément égoïstes.

Une confrontation lointaine et brutale avec Quinlan lui revint en mémoire, alors que l’ancien Serpentard resserrait encore leur proximité. Le front glacé de son frère de cœur acheva de faire virevolter ses souvenirs vers d’autres lieux, si semblables en ambiance et en importance à celui-ci. L’atmosphère doucereuse de quiétude du Cloud Atlas, le regard inquiet de son amant, et les confessions qui flottaient presque physiquement entre eux. L’image fondit dans une autre lumière lugubre mais menaçante cette fois, brutalement troublée par la tendresse et la passion d’une voix si familière dissimulée par un capuchon si étranger. Même Freya, douce et innocente entre toutes avait sombré dans un vice justifié par une passion débordante.

L’Allemand ferma les yeux et soupira profondément, incapable de trouver les mots aptes à troubler le silence adamantin, craignait étrangement que la violence de sa réaction ne trouve jamais de pardon chez Rowan. Où était la trahison, vraiment ? Chez celui qui parlait, ou celui qui préférait à tout jamais préserver ses secrets afin de faire valoir une face forte et sans écueils ? Clemens avait tant souhaité présenter cette personnalité droite et dont nul ne voulait vraiment douter, accueillant avec joie cette apparence de confiance, si rassurante. Sans se départir de leur étreinte rageuse, presque animale, il laissa un autre aveu couler au-delà de ses lèvres, d’une voix légèrement tremblante. Amère. Rauque.

— Je… Je t’en veux d’avoir eu le courage d’agir. De prendre un chemin certes trouble, mais de l’assumer autant que faire se peut. Peut-être suis-je simplement jaloux de ta droiture, Rowan.

Il fit une courte pause, laissant échapper un rire sans joie.

— Tu sais, tant qu’on en est aux aveux… Je ne suis jamais rentré en Allemagne, après avoir quitté l’hôpital. J’ai menti à tout le monde, et je me suis terré comme un animal blessé sur le Chemin de Traverse. J’ai écumé l’Allée des Embrumes jour et nuit pour dénicher les meilleures salles de jeux, pour parier sur des duels illégaux où on se malmène pour de l’argent, face à un public encapuchonné, qui se nourrit de la douleur des autres. J’ai eu l’impression que l’adrénaline faisait de moi quelqu’un de vivant. Quelqu’un au contrôle.

Les yeux fermés, la confidence provoquait une détente étrange à laquelle il ne se serait pas attendu. Son corps se relâchait peu à peu, ses mains se décrispaient de la peau de son meilleur ami, tandis que les barrières enfin explosées permettaient à la honte de s’écouler avec la lenteur d’une mélasse noire et puante.

— Je suis arrivé à Haveirson dans un sursaut de fierté, croyant que je pourrais m’en sortir et que tout cela n’était qu’une excuse. Un passe-temps durant ma rééducation. J’ai tenu le coup, un moment, quelques semaines. Le temps de la nouveauté, de la découverte de l’académie. La vérité, c’est que j’y retourne depuis des mois à présent. Alors toutes choses comparées, destruction pour destruction, risques pour risques, je suis probablement la dernière personne à pouvoir sainement te reprocher d’agir comme tu l’as fait.

Clemens rouvrit les yeux, cherchant à quérir les prunelles céruléennes qu’il avait lâché pour, semblait-il, une éternité. Ils n’étaient certes pas sur un pied d’égalité, non, les situations étaient par bien des points trop différentes. Mais la puissance de son amitié pour Rowan avait fini par adoucir la rage explosive que la découverte avait suscité en lui. Et la honte, toujours plus brûlante, d’être celui qui, passivement, attend que les choses se passent, espérant silencieusement qu’elle ne le toucherait pas, venait heurter avec plus de force ses certitudes d’être un homme bon. Car au fond, il n’était jamais qu’un lâche.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Tell me who you are...
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyMer 16 Mar 2016 - 20:50

La valse éternelle des eaux, lente et glacée, lui parvenait d’une façon déconcertante. Discordante. Lointaine, presque. Alors que la chair de leurs jambes était léchée régulièrement par le va-et-vient des vagues ; aussi cadencé que les frayeurs pitoyables de son cœur. Celui qui se tordait silencieusement sous les coups répétés et les aigreurs de son meilleur ami. Sans toutefois se décider à fuir, tant il restait bordé par l’amour et l’espoir.

Des étendards puissants. Immuables.

Certes, la rage contenue persistait insidieusement dans son sang. Mais elle s’irritait des revers du monde et de la société plutôt que des doutes d’un frère respecté. Légitimé à ses yeux, par le temps, l’amitié et la loyauté. Un dévouement capable de s’extirper de l’étiquette et de la morale. Apte à dissimuler les horreurs d’une nuit derrière un drap lisse et immaculé, si jamais Clemens venait à fauter.

À dire vrai, qu’importe les exactions de l’Allemand, il se savait capable de tout supporter. De tout pardonner. Par attachement. Par tendresse. Par humanité. Une faiblesse d’âme aussi large et profonde qu’un océan ; tel celui qui venait taquiner leurs étoffes froissées par l’agitation nocturne.

La bien-pensance n’avait aucune place là-dedans. Ni maintenant, ni jamais.

Front contre front, en silence, Rowan écouta attentivement la respiration de son camarade. Il y avait là quelque chose de précieux et de fragile ; une réalité éphémère, menacée par tout le reste. Une singularité qu’il n’escomptait pas perdre, quel qu’en soit le prix à payer. Quitte à ce que se soit son propre sang. Après tout, en se vendant aux ténèbres pour préserver les siens, n’était-ce pas ce qu’il avait fait ?

Les doigts toujours serrés auprès de ceux de son ami – preuve discrète qu’il se refusait à l’abandonner – il prêta l’oreille aux mots qui suivirent. Des poignards ciselés. Incisifs. Plantés ça et là contre sa poitrine ; toutefois il n’en laissa rien paraître. Si ce n’est quelques tremblements, pareils à des échos tordus de ceux qu’il percevait dans la voix de Clemens.

Entre eux, sous le couvert de murmures discontinus et éthérés, la haine se mêlait à l’amour. La rage à la compassion.

Un étau terrible. Douloureux. À la fois sauvage – par les émois sirupeux et violents, brutalement générés – et mélancolique. Définitivement humain. « Je comprends. » Il articula, le souffle rendu court par la pression exercée contre sa gorge ; un rappel perpétuel de la méfiance qu’il se devait de conserver. Toutefois balayée par le premier aveu de sa bouche. Il acceptait la rancœur. La jalousie. Tout. Quel qu’en soit le nom maudit.

Au rire amer succéda alors des allégations bardées d’une culpabilité grandissante. Des confidences aux enjeux troubles ; à la méconnaissance cruelle. Concevable, pourtant. Petit à petit. Au fil des mots employés. Des épaules affaissées sous le poids de la vérité. D’un souffle retrouvé par la faiblesse des membres de son frère. Celui qui, plus que quiconque, méritait cette appellation. « Clemens. »

L’ancien Serpentard se recula précautionneusement, les yeux se dérobant dans le même temps à l’office de Morphée. « Tu sais... » Ses doigts, désormais libres, se portèrent aux joues de son meilleur ami. Avec prudence et douceur. « … Quoi que tu aies fait, cela ne change rien pour moi. » D’un geste lent et définitivement tendre, il porta ses lèvres au front de l’Allemand. Et l’embrassa ; tel que le ferait un parent. Sans en chercher de retour, ni une quelconque gratitude. Seulement offrir la seule chose qu’il se savait prêt à donner jusqu’à en mourir.

Une vague exaspérée et éreintée le frôla ; piquée d’amour, aussi. « Je me fous de tout ça, Clemens. » Puis, avec délicatesse, l’attirer à ses bras et l’étreindre. Le serrer contre son propre corps. Joue contre joue. « Parce que je t’aime. »
Revenir en haut Aller en bas
Clemens Neubach
Clemens Neubach
Sorcier
Tell me who you are...
Rang Modératrice

Date d'inscription : 24/02/2007
Parchemins : 2515
Points d'activité : 206
Avatar : Aaron Taylor-Johnson
Crédits : White-Rabbit, Rowan
Multicomptes : Pippa Funnell
Âge : 21 ans
Métier : Serveur au Parker's Coffee
Situation financière :
  • ★★★☆☆


Fiche de duelliste
Seuils de réussite: 34 - 44 - 54
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyDim 20 Mar 2016 - 20:53

Pourquoi il avait si soudainement, si spontanément décidé d’amener Rowan à la plage, il n’aurait su le dire. Peut-être y avait-il eu une motivation particulière au moment de quitter la salle commune, une réflexion ou un plan sous-jacent qu’il aurait décidé de mettre en branle à la lumière de la lune. Cette vérité-là lui avait néanmoins échappé, pour autant qu’elle ait existé un jour, et probablement ne la trouverait-il plus jamais. À cette seconde si particulière où l’écume battait leurs jambes, où ils ne portaient plus guère attention à leurs corps transis, il se réjouissait d’avoir posé un choix à ce point solennel. La scène qui se déroulait là, sans témoins, n’existeraient jamais que pour eux, diamant révéré dans un écrin de chair qu’ils ne partageraient sûrement jamais vraiment, mais qu’ils posséderaient tout de même, richesse inébranlable qui reliaient deux frères de cœur.

Les confessions brûlantes et honteuses paraissaient ainsi moins lourdes de sens dans ce contexte si particulier, qui semblait être né pour les accueillir, les recevoir et les chérir. Après l’aveu qu’il avait lui-même si mal accueilli, reconnaître ses propres fautes paraissait presque puéril, mais Clemens y tenait plus qu’à ses propres yeux, afin de sceller à tout jamais une confiance qui serait à présent inébranlable. Pour la première fois de sa vie de sorcier, l’Allemand n’avait plus de secret pour personne, et s’il avait du parier — étonnement, il ne l’avait jamais fait — sur la personne qui porterait ces mots de valeur, il n’aurait peut-être pas parié sur son frère de cœur. Isolde aurait paru être un choix raisonné, car ils s’étaient toujours tout dit, ou presque, et Clemens ne doutait pas que jamais elle ne lui tournerait le dos. Peut-être était-ce là même toute la valeur de leur amitié ; sans vraiment tout connaître l’un de l’autre, sans crainte des secrets qui voguaient encore au delà de leur relation, ils s’offraient une confiance éternelle et sans partage. Les erreurs n’avaient pas d’importance lorsque le regard était dépourvu de tout jugement. Il n’en allait pas de même pour Rowan, en qui l’Allemand avait toujours voulu croire, sans être jamais vraiment sur qu’il pourrait un jour percer la carapace adamantine qui préservait l’aristocrate des atteintes extérieures. Même aujourd’hui, pouvait-il vraiment se targuer de connaître l’aîné des Westminbrook ?

Avait-ce vraiment de l’importance ?

Rowan l’acceptait plein et entier, avec ses vices et ses erreurs, ses sautes d’humeur et sa chambre dérangée. Si différents et pourtant si proches, ils se tenaient enlacés dans une mer enragée dans laquelle ils auraient pu paraître comme deux monstres marins sortis des ondes pour lancer sur la Terre leur cavalcade apocalyptique. Deux frères qui se juraient un amour fidèle et intègre pour traverser le monde sans qu’aucune trahison ne soit assez forte pour faire céder un partenaire que les conventions sociales ne permettaient pas vraiment de nommer. Clemens ferma les yeux, troublé par cette acceptation si dénuée de limites qu’il n’en aurait même pas rêvé, persuadé que son ami aurait posé au moins une parole pour l’intimer de changer de voie, de devenir quelqu’un d’autre et de réfuter sa part d’ombre.

Il frémit sous le baiser, surpris mais pas dérangé par ce geste qui lui donnait l’impression d’être un chevalier renégat, accepté enfin dans la suite d’un généreux prince. Sa faute semblait soudainement enfantine, presque ridicule à côté des hauts faits que son ami avait recherché. Car, bien qu’on put en critiquer la mise en œuvre, les intentions n’étaient rien d’autres que nobles et louables. Quiconque connaissait Rowan en conviendrait. Il aurait du en convenir, le comprendre, avant de se livrer aux doutes et à la haine. Clemens rouvrit les yeux sous le coup de l’étonnement, lorsque Rowan prononça ce qui s’approchait le plus d’un juron, dans sa bouche élégante et à l’expression raffinée. L’Allemand se permit même un nouveau sourire, amusé pour la première fois depuis ce qui semblait être une éternité.

— Parfois, je me demande où tu caches un tel cœur Rowan. Et comment tu as appris à le dissimuler si bien derrière une façade qui ne semble rien ressentir.

Sa voix tressautait d’accents légèrement rieurs, plus plaisants que ses tonalités amères et résolument germaniques, agressives même, qui avaient jusque là claqué dans le vent. Le regret laissait place au synonyme de toute fin ; un nouveau départ sur des bases à la fois plus dangereuses et plus solides de leur amitié précédente. De camarades d’école, ils étaient devenus colocataires, avant de se muer en frères de cœur qu’aucune déchirure ne semblait plus pouvoir séparer un jour. Ils étaient unis dans l’aveu et le sacrifice, de ceux qu’on se promet dans une nuit noire à la faveur de la lune.

— Plus jamais je ne douterai de toi, je t’en fais la promesse.

Sans rechigner à l’étreinte, les bras à présent enserrés contre le corps frêle et pourtant si puissant de son meilleur ami, Clemens sentit ses forces renaître. Le chemin, si obscur et embroussaillé qui l’avait laissé dans le désarroi lors des confidences s’était soudainement ouvert devant son regard déterminé, comme si, plongé dans la nuit qui les entourait, une dryade fantomatique lui avait montré la voie. Dans un murmure ferme et sans tremblements, il souffla à l’oreille de Rowan.

— Je te suivrai tel ton ombre s’il le faut, pour ne pas te laisser seul face à ces écueils. Même si pour cela, je dois t’accompagner jusqu’au plus profond des Ténèbres sans être sur de pouvoir en revenir.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Tell me who you are...
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyJeu 24 Mar 2016 - 15:43

Un tel cœur. Les mots portés vers son attention vacillante parvinrent à lui soutirer l’ombre d’un sourire. Éreinté. Fragile. Assurément aimant pour ce frère qu’il craignait de perdre plus que tout au monde, tant sa présence à ses côtés lui semblait être un équilibre indispensable à conserver. Peu importe les travers que sa chair pouvait bien contenir ; à dire vrai, lui même n’était pas exempt de fautes à l’égard de son entourage. À l’encontre du monde.

Il vivait seulement avec, tel que l’on tolère une gangrène fallacieuse. Préférant se concentrer, à l’évidence, sur ce qu’il pouvait faire de concret afin de préserver son cercle intime. Restreint. Aux membres aussi précieux que des gemmes étincelantes et coûteuses. Pour lesquels son sang s’échinerait à couler de bonne grâce sur le pavé. Un sacrifice mille fois plus raisonnable, à son sens biaisé, que tout le reste.

« Je suis incapable de te répondre, je ne le sais pas moi-même. » Une empathie brûlante comme une flamme, apte à échapper à la magnificence glacée des ténèbres. Ou, tout du moins, à en éclairer les pans rendus obscures par la lassitude et le désespoir. Abandonnés par la douceur bienfaitrice de la lumière, capturée égoïstement par ceux qui en revêtaient les couleurs consacrées. « Je crois, seulement... Que cela a toujours été là. » Une empathie tissée au fil des ans par l’amour d’une mère, puis celui de ses proches. Une puissance vigilante et extatique, toutefois aisément embrasée par des inquiétudes brutales. Soudaines. Grandiloquentes.

Générées par les affres de l’univers.

« Quelque part, en moi. » Une empathie dissimulée par les facettes alambiquées d’un jeu sulfureux et mortel : celui de l’aristocratie. Voiler les faiblesses. Enjôler les esprits innocents. Paraître ; manipuler ; trahir. Les largesses du cœur ne constituaient rien de moins qu’une faille à exploiter. À pervertir par les enjeux colossaux d’une dynastie sur le déclin, tuée par le poids écrasant de ses dogmes surannés et arbitraires.

À terme, ils étaient tous condamnés à s’éteindre, car les fondations de leurs lignages reposaient sur un leurre. Un mensonge aux racines profondément engoncées dans le sol. La supposée pureté du sang n’existait pas. Pas plus que les dieux. Il s’agissait uniquement de faux-semblants, proférés autrefois par d’éminents patriarches au sang rutilant ; présentant leur perception erronée comme une vérité inaliénable. Sottises.

L’apaisement progressivement perceptible dans la voix de son meilleur ami, parvint à tempérer la vague éreintée et épuisée qui s’était précédemment manifestée à sa chair. La tension accumulée par les frayeurs et les coups portés à son cœur, cessa de croître ; elle se stabilisa précautionneusement en lui tandis qu’il affermissait son étreinte sur le corps de Clemens. Qu’il le tenait plus fermement que jamais.

En silence, sa conscience éprouvée considéra les allégations formulées contre son oreille. Promesse. Ténèbres. Qu’importe. Ils se battraient côte à côte contre la décrépitude de leur monde. Il n’y aurait pas d’abandon. De lâcheté. Ni ici, ni ailleurs.

Maintenant que la tempête semblait s’éloigner d’eux, l’ancien Serpentard prit le temps de respirer. Soulagé. Libéré d’une crainte souffreteuse et étouffante. En un lent mouvement, il extirpa l’une de ses mains de cet étau rassuré pour la déposer dans la nuque de son frère. Lui adressant une caresse fraternelle ; touché en plein cœur par le vœu suggéré. Évoqué à demi-mots. « Et je n’aurais pas assez d’une vie pour te remercier de ta tendresse à mon égard... »

Un frisson soudain percuta ses membres – encore tendus par l’affrontement auparavant mené – et le ramena définitivement à la réalité. Rowan eut alors l’insidieuse impression de découvrir pour la première fois leur environnement. La plage. Les va-et-vient de la marée montante. Le froid diablement désagréable des étoffes humides. Et leurs jambes, au reflet troublé par les eaux glacées. « … Permets-moi une remarque. » Cette fois-ci, un véritable sourire s’afficha sur ses lèvres. Laissant sous-entendre un rire franc et clair, seulement contenu par une éducation rigoureuse. « Compte tenu que nous pataugeons joyeusement dans l’océan, quelles sont nos chances de nous attirer les foudres de notre santé ? »
Revenir en haut Aller en bas
Clemens Neubach
Clemens Neubach
Sorcier
Tell me who you are...
Rang Modératrice

Date d'inscription : 24/02/2007
Parchemins : 2515
Points d'activité : 206
Avatar : Aaron Taylor-Johnson
Crédits : White-Rabbit, Rowan
Multicomptes : Pippa Funnell
Âge : 21 ans
Métier : Serveur au Parker's Coffee
Situation financière :
  • ★★★☆☆


Fiche de duelliste
Seuils de réussite: 34 - 44 - 54
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyJeu 31 Mar 2016 - 21:35

Clemens dut retenir un rire joyeux et sincère, tant sa question semblait troubler Rowan. Une interrogation presque banale pourtant, bien que terriblement intime ; où cachait-il un tel cœur ? Comment trouvait-il la force terrible et inébranlable d’aimer avec si peu de conditions, tant de hargne que ce sentiment si pur et innocent devenait pour lui, une arme ? L’Allemand ne s’intéressait en réalité pas vraiment à la réponse, plutôt impressionné et pétri de respect pour son meilleur ami, dont les motivations pouvaient sembler si floues, alors qu’elles étaient généralement si simples. Tellement, qu’elles n’apparaissaient simplement jamais comme nécessaires et suffisantes à justifier ses actes. Tel que décrit dans les contes et légendes, l’amour était plus grand qu’eux, plus grand que les Hommes, descendu sur eux pour créer leur nature intrinsèque ; côté pile d’une pièce où face était la haine. Au fond, il n’existait guère de motivations plus redoutables.

Il ne chercha pas à briser le silence. Depuis le début de leur discussion, légère et si habituelle, dans la chambre, il avait fait passer son frère de cœur par mille maux, mille accusations, à peine justifiés par la brûlure mordante de la trahison éventuelle. Il avait jugé trop vite, et le pardon offert par cette étreinte était plus doux que tous les mots qu’aurait pu prononcer Rowan. Quelque part en lui, il craignait encore que ce jeu dangereux ne se retourne contre lui, que ses révélations ne se fassent soudainement raisons de le pousser au piloris et de chercher, lui aussi, la repentance et l’explication qu’il avait exigé de son ami. Pourtant, noble dans l’âme comme toujours, Rowan ne cillait pas, se contentant d’une caresse amicale sans se laisser aller aux bassesses de l’éclat et de la virulence ; ne relevant même pas la promesse voilée. Le vœu d’allégeance.

Car, s’il y avait toujours été une chose certaine, c’est qu’il ne rejoindrait pas les rangs des mangemorts. Le secret de son sang, de sa nature et de son nom avait entouré sa vie avec une telle omniprésence depuis un temps antérieur à sa naissance que cette solution ne lui était même jamais apparue comme envisageable. La haine des moldus, la pureté du sang ou quelque soient leurs revendications ne lui avaient jamais parues providentielles, et ne le seraient sans doute jamais. Il ne jurerait pas fidélité à Voldemort — la simple pensée du nom le fit frissonner — mais s’il devait se ranger derrière le nom d’un meneur, alors celui-ci pourrait se nommer Rowan Westminbrook, et peu importait qui était son maître à lui. Les Ténèbres n’étaient jamais si noires lorsque on les chevauchaient aux côtés d’un ami de cœur.

— Je t’ai pourtant bien souvent malmené et mis en doute, tu serais en droit de m’en vouloir… Ou du moins, de ne pas chercher à me remercier de quoi que ce soit. Tu ne dois pas, d’ailleurs, que ce soit bien clair. La question ne devrait pas se poser, entre frères.


Clemens avait toujours ressenti une certaine nostalgie envers ces liens qui unissaient les membres d’une fratrie. Pourtant, durant toute son adolescence, il n’avait jamais souhaité, ou regretté, la présence d’un frère. Peut-être était-ce la tempête qui entourait ses relations avec Heath, ce qu’il avait eu de plus proche d’un frère, cousin honni pour des raisons somme toute obscures. Cette rancune l’avait enfiévré et dressé contre la notion même de fraternité, alors il s’était cherché une sœur de cœur, finalement trouvée en la personne d’Isolde. Sœur de cœur, de culture, de langue et de tant de choses encore, elle avait rompu cette solitude qu’il camouflait d’ordinaire si bien dans un groupe d’amis hétéroclite et animé, bien trop superficiel en réalité.

Jamais il n’avait recherché de frères, pour réaliser au milieu d’une nuit, de l’eau jusqu’aux cuisses, secoués de tremblements aux origines multiples, qu’il ne lui avait jamais rien manqué d’autre. Qu’importait le Quidditch, la métamorphose ou le jeu. Son sourire sincère se mua en une expression de tendresse, avant de reprendre une nuance amusée. Rowan cachait décidément aussi bien son sens de l’humour que son sens de l’amour.

— Je dirais que, compte tenu du temps passé dans la marée, on ne peut plus vraiment renverser les probabilités. Donc, tant qu’à faire…


Sa phrase mourut dans le tintement clair de sa main contre la surface de l’eau, alors qu’il éclaboussait tant Rowan que lui-même, dans un geste à la fois joueur et enfantin. Le mélodramatique de la scène fut brisé par un grand éclat de rire ; l’Allemand se surprenant de la froideur de l’eau, réalisant par la même à quel point ses jambes étaient engourdies.

— Attrape-moi si tu peux !

Soudainement enjoué, il décida d’offrir à la lune le dernier présent, le dernier aveu qui le séparait encore d’un lien de vérité inconditionnelle avec Rowan. Clemens fit mine de prendre la fuite, rompant la proximité pour se jeter vers la mer, tout en ouvrant ses bras qui le temps d’un battement de cœur, se couvrirent d’ailes pour l’emmener à la conquête du ciel. Alourdi par l’eau qui dégoulinait de sa parure bleutée, brillante sous la lune, le busard vola en un large arc-de-cercle paresseux autour de son ami serpent, huissant une seule et unique fois pour prolonger son éclat de rire.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Tell me who you are...
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses EmptyLun 11 Avr 2016 - 11:18

Les quelques regrets amenés à eux par la bouche chantante de Clemens, provoquèrent en sa chair un sentiment discordant et troublant. Certes, les incertitudes de son meilleur ami avaient blessé la dureté de ses traits et la rigidité de sa posture, mais de telles hésitations s'expliquaient amplement de façon logique étant donné leur situation. Alambiquée. Vacillante.

Désormais plus ferme que jamais.

Les douleurs finiraient, de toute façon, par s'éteindre et s'estomper par elles-mêmes. En effet. Rowan n'escomptait pas conserver en lui de telles divergences ; de tels reproches ; de tels grondements. L'amour qu'il portait à son semblable dépassait de très loin les vacuités éclatantes de la rage et de la rancœur.

En l'état, les promesses formulées successivement par leurs voix, suffisaient à effacer l'engeance sanguinolente des minutes passées. « Jamais, Clemens. » Cette vérité avait toujours été d'une limpidité grandiloquente à son regard avisé. L'ancien Serpentard était de ceux qui ne s'encombraient pas du ressentiment à l'égard d'un frère ; pas plus qu'il cherchait à esquiver le fouet d'une main tant affectionnée.

Quoi qu'il avait lutté et battu son géniteur à un jeu similaire. Obscure. Violent. Sa dévotion s'étant allouée davantage à ses sœurs qu'à un père ultimement contesté. La loyauté ardente de son cœur, propre à celle des ophidiens bardés d'héritages colossaux, savait s'arracher aux traditions et aux aînés pour soutenir ses idéaux. Ses espoirs. Ses véritables proches.

La famille – à préserver – n'était que celle que l'on choisissait en âme et conscience de nommer ainsi.

« Tu me connais, je remercie chaque jour les dieux que tu sois à mes côtés. Autant que je loue ton unique volonté de l'être. » Et il souriait, aussi, de cet air affectueux et soulagé qui caractérisait l'ataraxie après une esclandre venimeuse et cuisante. Égayé, également, par l'humour rare et précieux qui filtrait dans sa voix guindée.

Une humanité flamboyante quand elle quittait le couvert protecteur de sa nonchalance maniérée. Vive et enjouée, surtout face aux échos d'autres esprits aimants et ouverts ; une continuité somme toute cohérente de son attachement au monde et aux élus de sa tendresse. Un nombre limité de disciples adorés et protégés jusqu'au sang, de part leur aspect rutilant et définitivement trop mortel à son goût.

À sa remarque un brin malicieuse, la verve coutumière de l'Allemand répondit. De la même manière que ses doigts ; projetant de cette eau froide et claire sur leurs vêtements humides. Tandis que son camarade s’esclaffait avec force, Rowan ne put que gémir à la terrible sensation. Le visage crispé dans une expression mêlant l'engouement à la glace. Bon sang, il était frigorifié !

Pourtant, déjà, Clemens enchaînait vers des activités davantage insouciantes. Ni une, ni deux, le jeune aristocrate délaissa sa maîtrise au profit d'une course hasardeuse et d'une maladresse évidente. Et, alors qu'il tendait ses mains vers le dos de son ami, ce dernier quitta son carcan de chair humaine pour se métamorphoser en quelques créatures à plumes. Libres et grandioses.

Sous la surprise, l'ancien Serpentard ne parvint guère à maintenir son équilibre et s'étala joyeusement dans l'eau, tout en riant. Sous ce même éclat de voix, temporairement délivré des chaînes dorées de sa condition, il se redressa en un lent mouvement dégoulinant. Sa bouche se tordit d'une hilarité tonitruante, sublimée par la fascination nouvelle et enchantée qui courait dans ses pensées.
Au creux de sa conscience, il eut presque l'impression doucereuse d'entendre un sifflement approbateur et familier : sacré Clemens.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Tell me who you are...
Marée haute pour nos bassesses Empty
MessageSujet: Re: Marée haute pour nos bassesses   Marée haute pour nos bassesses Empty

Revenir en haut Aller en bas
Page 1 sur 1

MMHP :: Boîte à Souvenirs-
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser