"As old foes, we need to talk about the past, the present and the futur" ~ Eleonora

Depuis son retour à Poudlard, Eleonora profitait de son temps libre, le matin, surtout, pour redécouvrir les lieux. Elle se réveillait toujours aussi tôt, étant définitivement à classer parmi les petits dormeurs. La jeune fille avait passé ses premières années à visiter les couloirs et à discuter avec les tableaux. Après la bataille et avec le départ de tant de professeurs et d’élèves, elle avait besoin de se réapproprier les lieux et d’y retrouver ses marques. C’était instinctif chez la préfète. Elle devait, comme un animal, pister et définir les limites de son territoire. Et chaque fois qu’elle naviguait ainsi, elle terminait dans la Salle sur Demande.
C’était ici qu’elle avait appris à se défendre contre les forces des ténèbres, en compagnie de ses amis de l’AD. Elle se retrouvait dans la pièce, qui avait connu ses entrainements. Les mannequins y restaient immobiles, oubliés de leurs utilisateurs et on trouvait par terre la poussière, liée à l’attaque d’Ombrage. Malgré tout, elle s’y sentait à l’aise et à l’abri, plus que partout ailleurs.
Après quelques jours, un matin où le manque de potion se faisait plus criant, deux objets insolites se trouvaient sur le manteau de la cheminée. Un briquet et un paquet de cigarettes, on ne pouvait plus moldus. Elo passa un moment à les regarder en silence avant de hausser les épaules, de sortir une des cigarettes du paquet. Elle la fit rouler entre ses doigts fins, avant de l’allumer, en la gardant à la main. Elle observa l’extrémité rougir, avant de porter le filtre à ses lèvres et d’aspirer la fumée.
Elle toussa et toussa encore, mais continua à inspirer la nicotine et le goudron vaporisés. Après tout, la Salle sur Demande lui avait fourni un moyen de combattre son stress et si le paquet se trouvait là, c’est qu’il avait un rôle à jouer, non ?
Si le château lui offrait ce cadeau, c’était qu’il avait une place à venir dans sa vie et après tout, pourquoi pas ?

Quelques jours plus tard, Elo avait profité de la moitié du paquet, se laissant aller au plaisir de la cigarette, 3 ou 4 fois par jours. C ‘était donc en se réjouissant de pouvoir fumer l’une d’elles, qu’elle grimpait jusqu’au dernier étage de l’une des tours du château, ce matin de septembre. Elle avait été surprise de la demande de Lilianor, mais se réjouissait, que leur relation s’améliore. Cela faciliterait les vies de Molly, de Lili et la sienne et éviterait les cris et les larmes trop fréquents depuis leur arrivée à Poudlard. Elle ne s’inquiétait d’une attaque de Lili. Elle était passé à autre chose et probablement était-elle de toutes façons inoffensive, avec sa baguette bridée par le Ministère.

Elo entra dans la salle de divination, un peu avant 7 heures. Par les fenêtres drapées de voilages fins, elle devinait la nature sauvage, qui entourait le domaine de Poudlard. L’air ambiant était chargé de forts effluves d’encens et elle s’en réjouit. Il serait plus facile de masquer l’odeur du tabac. Elle s’installa sur un des grands coussins, dans la pièce, attrapa ses cigarettes et en alluma une. Elle garda un temps la fumée dans sa bouche, avant de basculer la tête en arrière et de souffler vers le plafond, loin au-dessus de sa tête. Elle se demandait s’il existait des sorts pour faire des sculptures de fumées, quand elle entendit quelqu’un monter à l’échelle.
Elle cacha discrètement sa cigarette, le temps de vérifier qu’il ne s’agissait pas d’un professeur.
Quand elle reconnut les cheveux de Lilianor, elle remit sa clope à ses lèvres et en tira une longue bouffée.
Après avoir soufflé, une nouvelle fois vers le haut, elle salua Lilianor.

Salut Lili… Tu as une tête à avoir peu dormi, de nouveau…

Elle la regarda s’installer près d’elle et répondit à ses remarques en tendant sa cigarette.

Ça ? Ça fait quelques jours seulement. Après mon arrivée ici. J’espère que ça ne te gêne pas, je suis désolée mais ça m’aide à aller bien… Mais je peux l’éteindre, également.
Elle laissa ses pensées filer, en regardant la fumée montée en volutes, depuis l’extrémité rougeoyante.
Je t’écoute…

Elo était curieuse d’entendre ce que Lilianor avait tenu à lui dire, si loin des oreilles indiscrètes.

Elo était désolée pour Lili. Elle savait que la plupart des gens avaient besoin de sommeil pour aller bien. 3 heures par nuit, c’était bien insuffisant, même pour Elo qui avait toujours été une petite dormeuse. La Serpentard devait donc être au bout du rouleau.

La Poufsouffle n’était pas forcément fière d’avoir commencé à fumer. Dans le monde moldu, les enfants apprenaient tous qu’il ne fallait pas toucher au tabac. Mais les amis de son père, marins pêcheurs, étaient nombreux une cigarette à la bouche. Ils étaient nombreux à garder la forme ainsi et à se détendre en fumant. C’était probablement ses souvenirs enfouis, qui l’avaient poussée à commencer. Les premiers jours avaient été difficiles, mais maintenant, elle appréciait de se retrouver seule pour sa pause cigarette, de pouvoir faire le point sur sa journée, en laissant la nicotine agir sur son cerveau. C’était son moment de calme et de solitude.

Les remerciements de Lilianor semblaient sincères. Elle parlait de l’été rêvé de Molly. Par effet de miroir, c’était probablement une manière de rappeler à quel point le sien avait été affreux. L’instinct protecteur d’Elo se réveilla instantanément et elle eut envie de prendre la Serpentard dans ses bras. Elle se retint cependant, craignant que Lili prenne son geste pour de la condescendance. Par Morgane, pourquoi rien ne pouvait-il être simple, avec la sœur de Molly ? Avec n’importe qui d’autre, cela aurait été de l’empathie et de la gentillesse, mais avec Lili, cela risquait de ressembler à de l’arrogance. Oh, Lilianor Zyskowski… Pourquoi ne pourrais-tu pas accepter cette amitié ?

Mais avant, euuh, je peux goûter ?

Les derniers mots de la Verte surprirent Eleonora. Elle marqua un temps d’arrêt avant de sortir une nouvelle cigarette de son paquet. Elle compta rapidement celles qui lui restaient. Six. Bien peu, il lui en faudrait d’autres rapidement, mais à qui demander ? Elève, elfe de maison, étudiants, Hazel, Salle sur Demande ?
Elo tendit quand même la tige de tabac et le briquet.
La première fois, c’est dégueulasse. La deuxième aussi. Et ça fait tousser. La troisième, c’est pas mieux. Mais bizarrement, j’ai continué. Maintenant, à toi de voir… Je ne te force pas.

Elo attendait impatiemment de savoir, pourquoi Lili lui avait donné rendez-vous. Elle remit sa cigarette entre ses lèvres, inspira longuement, puis détourna la tête pour souffler, hors du visage de la Serpentard. Elle toussa un peu.
Alors, Lili, vas-y, explique moi ce que tu attendais de moi.

Ça n’avait pas loupé. Lilianor avait toussé. Il était évident que cela allait arriver. Et elle n’avait pas trouvé sa cigarette très bonne, même si elle y trouvait un certain intérêt. Elo ne put s’empêcher de faire une moue rieuse.

Je te déconseille quand même de t’y mettre. J’assume, personnellement, mais je ne le proposerai à personne. La moldue que je suis, connaît bien trop les risques de la consommation de tabac. Tu n’imagines pas à quel point on en parle dans les écoles.

La cigarette se consuma lentement, au bout du bras d’Eleonora, tandis que Lili exposait son attente. Intriguée puis effrayée par la demande de la Serpentard, Elo ne pensait même plus à profiter du tabac. Une longue cendre s’étirait au delà du filtre. Lorsque la braise approcha trop de ses doigts, elle écrasa le mégot dans une tasse à proximité. Il faudra qu’elle pense à la nettoyer, avant de quitter les lieux. Elle imaginait la tête du troisième année, qui verrait un reste de cigarette, à sa place en classe.

Elo se demandait vraiment pourquoi elle avait été choisie, pour cette tâche. Bien sûr, pour ce qui était de surveiller ou de prendre soin de Molly, elle comprenait bien d’être choisie par Lilianor. Elle le ferait sans difficulté, comme elle l’avait toujours fait, depuis des années. Molly était son amie et elle avait été répartie à Poufsouffle. Cela avait suffit, depuis son entrée à Poudlard, pour lui causer des difficultés avec sa famille. Bien sûr, Lilianor avait toujours été là pour sa jumelle. Mais Elo avait remarqué que la Serpentard avait eu le bon rôle avec le reste de la famille et que la douce et gentille Molly était la plupart du temps, mis au second plan. L’actuelle préfète s’était investie auprès de Molly, pendant toutes ces années, pour que jamais, elle ne se sente oubliée.

Pour ce qui est de défendre et de surveiller Molly, tu sais bien que je ne l’abandonnerai pas. Jamais. Elle est la petite sœur que je n’ai jamais eu, comme Hazel est la grande sœur qui m’a manqué. Alors, compte sur moi.

Elle marqua une pause, levant une main pour intimer le silence à Lilianor. Pour ce qui était de s’attaquer à une Mangemort, elle avait besoin de poser les choses.

Tu voudrais que l’on s’attaque, juste nous deux, à ta tante ? Une Mangemort ? Attends que je récapitule tranquillement. Deux élèves de Poudlard, qui n’ont pas encore terminé leur formation initiale, devraient donc piéger une tueuse et la mettre hors d’état de nuire. Tu sais que j’ai parfois du mal avec des élèves de cette école ?

Elle secouait la tête en signe de dénégation et elle prit à deux mains, quelques mèches de cheveux, qu’elle étira nerveusement.

Lili, je suis désolée, mais je ne me sens pas capable. J’ai eu tellement peur, pendant la bataille. Et je suis encore écœurée de ce que j’y ai vu. La violence du combat me répugne de plus en plus. Je n’ai même plus envie de participer au club de duel, aujourd’hui. J’ai envie d’œuvrer pour la paix et pas de jouer à la justicière.
Et les Aurors sont là pour ça, non ?
Je vous défendrai au péril de ma vie, Molly et toi, mais je ne veux pas nous impliquer dans une mission suicide. Sois raisonnable.

Elo eut besoin de comprendre, ce que Lili attendait d’elle. C’était incompréhensible, pour la Poufsouffle.

Tu avais un plan ? Parce que là, ça me paraît bien plus dingue, que tout ce que j’avais jamais imaginé de ta part. Finalement, ce n’est pas le tabac qui te tuera, si tu continues sur cette lancée. Alors vas-y, fume autant que tu le souhaites !