Deuxième Tâche ~

Alors qu'elle ses yeux s'ouvraient, un brusque sursaut lui échappa. Elle se rendit compte qu'elle était allongée sur le sol de salle commune, ses longues mèches blondes éparpillées auprès de cette boite, qui lui semblait être si normale à peine quelques secondes auparavant ... Elle n'aurait jamais su dire pourquoi cette boite lui avait paru si spécial au premier abord, pourquoi avait-elle eu ainsi le besoin de l'ouvrir ? Cela était probablement l'un des nombreux mystères faisant partie du jeu. Un jeu auquel elle participait, un jeu dont elle espérait tirer la victoire. Mais cet étrange rêve qu'elle venait de faire, qui relevait plus de la vision, tout cela semblait avoir ébranlé ses convictions. Il ne s'agissait plus ici d'une victoire, mais de Sirius. Lui qui était peut-être la seule attache que Morgane avait encore depuis sa sortie de Poudlard. Le seul qu'elle n'ait vu disparaître avec le temps. Le savoir en danger l'inquiétait, aussi puissant puisse-t-il être. Mais elle doutait sincèrement qu'à l'occasion de ce tournoi, ses pouvoirs ne lui eurent été retirés. Si elle voulait le revoir, c'était à elle de s'en sortir.

Et pourtant, tout semblait tellement facile, tellement évident ... Ce rêve lui avait indiqué tellement clairement le chemin à suivre, le but à atteindre, qu'elle avait peine à croire que cela pouvait être aussi facile. Elle se doutait bien qu'atteindre les cachots ne se ferait certainement pas sans certains obstacles, mais ceux qu'elle avait rencontré lors de la première tâche, bien que d'une certaine complexité tout de même, s'était trouvé rapidement résolu. De toute façon, elle n'avait pas le choix. Cette tâche faisait appel à son courage, mais surtout elle avait pour but de chercher la faille chez la jeune femme, la prendre par les sentiments. Et malgré tout le sang froid dont elle essayait de faire preuve, elle ne parvenait à chasser ses images de Sirius, ce faisant torturer par un monstre dont elle ne parvenait pas à discerner les formes, la voix du sorcier déformée par la douleur qu'il se voyait infligée. Et puis, ce ton si détaché, si apaisé alors qu'il lui annonçait sa mort ... Elle savait que Sirius n'était pas quelqu'un de particulièrement émotif face à la mort, mais quelque chose ne tournait pas rond, ce n'était pas Sirius. Pas le Sirius qu'elle connaissait. Mais il comptait sur elle pour la sauver.

Se redressant de manière assez hésitante, elle chercha à tâtons autour d'elle après sa baguette. Quelque peu inquiète, elle vérifia dans sa cape et pourtant non, rien. Pas la moindre trace de sa baguette, ce petit bout de bois auquel elle devait toute sa puissance ... Sentant l'inquiétude la gagner, elle lança des regards tout autour d'elle, mais rien n'y faisait. Sa baguette semblait bel et bien s'être volatilisée. En effet, tout cela aurait été tellement facile, trop facile. La difficulté de cette épreuve résidait donc dans le fait qu'elle devrait l'effectuer sans baguette ? Toujours assise au sol, elle se prit la tête entre les mains, fermant les yeux. Le noir qui l'entourait semblait être si inextricablement profond, sans la moindre issue. A grandes inspirations, elle tenta peu à peu de reprendre son calme. Il le fallait. Parce qu'elle voulait continuer, parce qu'elle voulait gagner. Parce qu'elle voulait sauver Sirius, l'un des seuls être qui lui était cher. Au bout de quelques secondes, la réalité finit doucement par émerger dans son esprit. Affronter ce monstre seule, sans aucune arme revenait presque à du suicide. Mais elle devait y arriver, peu importe quel était le prix à payer.

Faisant disparaître dans un dernier soupir l'angoisse qui l'avait saisie à la gorge, elle se releva. Elle ne devait pas se laisser abattre par la situation. C'était ce qu'il cherchait à faire, et il ne l'aurait pas, pas elle. Elle balaya alors rapidement la salle du regard, avant de se mettre à tourner au hasard entre les tables. Elle ne sortirait pas de cette salle les mains vides. Fouillant d'un coup d'oeil le tas de petits objets qui traînaient sur les tables, les rebords d'armoires et même ce qu'il pouvait y avoir d'autre à l'intérieur, les appuis de fenêtres, tout là où un quelconque élève aurait pu laisser traîner quelque chose pouvant s'avérer utile. Enfouissant dans sa poche un couteau suisse dont l'utilité ne se ferait sans doute pas prier, un scrutoscope de poche, un canif qui ouvre toutes les serrures et quelques autres petites choses qui pourraient éventuellement s'avérer utile. Mais elle avait que tout ça ne remplacerait jamais une baguette, sa baguette. Tant pis, elle n'avait guère plus de temps. Estimant avoir fait le tour de la pièce, elle sortit d'un pas presque précipité.

Par chance, elle parvint à atteindre sans encombre aux couloirs, qui étaient d'un vide qui avait quelque chose d'angoissant. Tous les élèves étaient en cours à cette heure-ci, la laissant complètement seule avec son destin. Peu lui importait, elle n'avait besoin de l'aide de personne après tout. Elle savait qu'elle ne pouvait compter que sur elle même.
Décidant d'emprunter l'un ou l'autre passage secret de l'école, découvert au fil de ses longues rondes à l'époque où elle était toujours préfète, elle s'arrêta face à un tableau où, visiblement, un aristocrate figurait, lui lançant un regard hautain.

- Les sangs purs triompheront. Lâcha-t-elle d'une voix précipitée.

Elle trouvait le mot de passe particulièrement odieux, et pourtant devait donner un semblant de conviction dans ces paroles, sans quoi ce fichu sorcier ne voulait plus rien entendre. Et la réponse ne se fit guère attendre.

- Je refuse. Répondit-il simplement, d'une voix hautaine. Il m'est interdit de vous céder le passage chère demoiselle.

Morgane ne mit pas bien longtemps à comprendre ce que cela signifiait. S'il ne lui cédait pas le passage, ce ne serait probablement le cas d'aucun autre. Visiblement, les divers passages secrets du château avaient vu leurs accès bloqués pour les champions. Et cela ne présageait rien de bon.
Rageant, elle reprit son chemin vers les cachots. Tout semblait si paisible, elle s'attendait à chaque seconde à ce que l'un ou l'autre monstre ne lui saute dessus. C'était ce que l'on appelait communément le calme avant la tempête. La résonance de ses pas contres les murs froids du château avait presque quelque chose de lugubre. Comme si tout autour d'elle semblait figé, comme si la notion de temps avait disparu momentanément. Comme si le danger, tapis dans l'ombre, attendait patiemment un faux pas, une erreur de sa part. Et à l'angle du couloir, elle s'arrêta, les yeux figés devant elle. En effet, tout avait été tellement facile ... Elle comprenait désormais pourquoi les passages secrets étaient bloquées. Par qu'elle n'avait pas le choix. Parce qu'elle devrait y passer, irrévocablement.
Et elle irait, jusqu'au bout. Parce qu'elle se l'était promise.

Pour Sirius.

Dans un geste qui retournait plus du réflexe, elle glissa sa main dans sa poche pour prendre sa baguette, se rappelant presque aussi subitement qu'elle devrait faire sans, cette fois-ci. Alors qu'il en soit ainsi. Elle affronterait cet obstacle seule.
Devant elle se dressait un immense mur. Ou plutôt, une haie, haute d'au moins cinq mètres. Bien qu'elle pensait avoir une petite idée, elle n'était pas encore sûre de ce qu'il en était vraiment. Mais alors qu'elle avait fait quelques pas à peine au delà de cette immense arcade aux tons verts sombres, une lourde grille retomba derrière elle. Désormais, elle ne pouvait plus faire demi-tour. Elle était entrée, et elle allait devoir sortir. Hésitante tout d'abord, elle fit quelques pas dans ce qui lui semblait bel et bien être un labyrinthe. Sans aucune magie, elle ne pouvait plus compter que sur elle et son sens de l'orientation. La sortie se trouvait tout droit, du moins à vol d'oiseau. Car elle se doutait bien que ça ne pouvait pas être aussi facile. Le labyrinthe était bel et bien magique, car bien qu'installé dans le du couloir, il lui semblait une fois entrée qu'il en avait au moins six fois la largeur

Entre ces branches, l'air semblait subitement s'être refroidi et étrangement assombri. L'ambiance que dégageait ce labyrinthe n'était guère rassurante et la jeune femme tentait tant bien que mal de faire fi d'un sentiment croissant d'appréhension. Elle était sur le qui-vive, prête à chaque seconde à esquiver une quelconque offensive. Et pourtant, jusqu'à présent, elle n'avait encore rencontré aucun obstacle sur sa route. Elle se contentait d'avancer, inlassablement, dans ce qui lui semblait être la bonne direction. Et pourtant, nombreuses furent les fois où elle se retrouva face à une haie interminablement haute, dans des culs-de-sac, des chemins sans issue. Mise à rude épreuve, elle dû un instant s'arrêter, pour réfléchir, se retrouver. Ces tâches n'étaient pas seulement faites pour mettre leurs capacités magiques à l'épreuve, mais surtout pour tester leur habilité à ne se pas se perdre eux-mêmes. Or l'endroit y était particulièrement propice.

Petit à petit, les minutes passaient. Elle n'avait pas la moindre idée du temps qu'elle avait déjà passé dans ce labyrinthe, mais elle savait que le plus tôt elle sortirait serait le mieux. Elle ne savait désormais plus où elle était, où elle en était. La seule chose qui la gardait encore à la raison était ce seul et unique but : sauver Sirius. Elle leva alors les yeux au ciel, apercevant difficilement le plafond à travers la brume qui l'enveloppait. La solution lui sembla alors presque évidente ... Le labyrinthe avait beau être magique, le plafond n'en gardait pas moins ses dimensions habituelles. Elle put alors remarquer que pour l'instant, elle était parallèle au mur. Ce qui signifiait que si elle continuait tout droit, elle allait foncer dedans. Or, à sa gauche se trouvait le sentier qu'elle venait d'emprunter quelques secondes auparavant. La seule issue encore possible pour s'extirper de ce piège était de poursuivre par la droite, tout en continuant de se repérer grâce au plafond. Et elle se remit en marche.

Malgré l'aide précieuse que lui apportait le bâtiment, elle sentait le temps s'écouler, de plus en plus. Cela devait faire plus d'une heure qu'elle tournait dans ce labyrinthe qui lui semblait carrément immense. Le défi s'était révélé bien plus éprouvant qu'elle n'aurait pu l'imaginer. Car combien de fois ne s'était-elle pas retrouvée dans la forêt là où elle s’était crue perdue ? Mais l'aura magique semblait éprouver ses sens et ses réflexes au moins autant que le temps l'épuisait. De plus en plus. Mais là où son espoir semblait donner des signes de faiblesse, alors qu'elle était prête à abandonner son esprit aux influences magiques des lieux, ce long couloir se profila, devant elle. Un sourire de soulagement se dessina doucement sur les lèvres de la jeune femme. Sans hésiter une seconde de plus, elle s'engagea dans ce long couloir en courant. Elle avait perdu bien trop de temps entre ses fichus buissons ! Malheureusement elle n'en était pas sortie pour autant.

Son imposante silhouette se tenait là, face à la sortie. Alors que Morgane s'approchait, tout de même hésitante, l'immense tête se tourna vers elle. C'était la première fois qu'elle voyait un sphinx, un vrai. Plus impressionnant encore que dans les livres, la créature était faite d'un corps gigantesque de lion couleur sable, tandis que sa tête était celle d'une femme. Certes elle en avait maintes fois entendu parler, et leur réputation n'était plus à faire. Elle espérait simplement ne pas avoir à l'affronter. Car c'était bien simple ; ainsi mise, la créature bloquait délibérément la sortie. Elle se tenait là, couchée au sol, ses deux yeux en amande fixant la jeune femme d'un regard plus perçant encore que ceux qui lui avait été lancé jusqu'à ce jour. Au bout de quelques secondes, Morgane brisa le silence qui était lourdement retombé.

- Laissez-moi passer, s'il vous plaît. Demanda-t-elle d'une voix ferme.

Sa voix ne laissait rien présager du sang bouillonnant dans ses veines, qui cognait violemment à ses tempes, et pourtant. Elle savait que ce n'était pas de cette façon qu'elle sortirait du labyrinthe, mais c'était peut-être le seul moyen de savoir comment y parvenir. Au bout de quelques secondes, le sphinx se retourna vers elle. Le simple poids de son regard se posant sur les épaules de la jeune femme la fit reculer de quelques pas, bien qu'elle soutenait son regard.

- Il vous faudra d'abord résoudre cette énigme. Si la réponse est bonne, vous pourrez passer. Dans le cas contraire, je vous attaquerais, férocement. Si vous ne dites rien, alors vous pourrez repartir sans dommage dans la direction opposée.

La voix grave et rauque de l'animal surpris quelque peu la sorcière, qui laissa un bref silence s'immiscer alentour. La question ne prêtait guère à réflexion, pour sûr. Il ne lui restait plus qu'à se lancer dans l'aventure. Au final, elle n'avait rien à perdre. Parce qu'elle savait qu'il n'y avait pas d'autres issues.

- Très bien. Répondit-elle d'une voix décidée. Alors, quelle est cette énigme ?

Entraînant un nouveau mouvement de recul chez la jeune femme, le sphinx se redressa, avant de s'asseoir sur ses pattes arrières, ce qui en rajoutait un peu plus encore à sa prestance. Désormais, elle semblait particulièrement insignifiante à coté de cette créature, dont la hauteur avoisinait les deux ou trois mètres. Sa voix résonna alors à travers les hautes haies, l'attention de Morgane se braquant sur ses mots.

- D'abord, pense au premier de ce qu'il faut apprendre
Lorsque l'on ne sait rien à l'âge le plus tendre.
Ensuite, dis-moi donc ce que fait par naissance
Celui qui, au palais, à élu résidence.
Enfin, pour découvrir la dernière donnée,
Il suffit de prendre la fin de l'année.
Tu découvriras ainsi la créature immonde
Que tu n'embrasserais pour rien au monde.

Morgane ne dit mot. Elle se répétait inlassablement dans sa tête les mots qu'elle venait d'entendre. Afin de les assimiler, les comprendre et résoudre cette fameuse énigme. Le premier de ce qu'il faut apprendre, à l'age le plus tendre ... Une des premières choses que l'on apprend aux enfants, c'est l'alphabet. Le premier en était sans doute la première lettre, le A ... À retenir pour la suite
Ce que fait celui qui réside au palais. C’est un roi qui vit dans un palais. Ce qu'il fait par naissance ... Il gouverne, il dirige, il règne ... Il valait mieux ne pas y perdre trop de temps et passer à la suite.
Prendre la fin d'une année ... Décembre ? Beaucoup trop long. Noël ? Etrange ... A moins que ce ne soit un jeu de mot, fort probable. Elle se souvenait de l'époque où, avec sa soeur, elles passaient leur temps à se lancer des charades et énigmes en tout genre. Par expérience, elle savait qu'il ne fallait pas tout prendre au pied de la lettre. Du moins, pas au premier sens pensé. La fin de l'année ... Peut-être n'était-ce que la dernière syllabe. Ce qui jusqu'à présent donnait quelque chose que de plutôt approximatif. En tout cas, elle savait au moins une chose : elle cherchait le nom d'une créature
A-gouverne-née ... Ca ne voulait absolument rien dire. A-dirige-née ? Non plus, de toute façon. A-règne-née ? Le mot en lui même ne voulait pas dire grand chose. Ou peut-être n'était-ce que la dernière lettre. Dans ce cas cela donnait A-règne-ée. Evidemment ! Araignée ! S'il y avait bien une créature qu'elle ne voudrait embrasser pour tous les gallions du monde, c'était bien ça.
Cependant, elle hésita encore quelque seconde. Bien que la réponse ne fut on ne peut plus sûre dans son esprit, il y avait au fond d'elle une certaine appréhension de devoir affronter le sphinx en cas de mauvaise réponse. Car ce n'était pas avec les petits objets qui traînaient dans ses poches qu'elle s'en sortirait. Mais c'était le seul moyen qu'elle possédait pour sortir de ce fichu labyrinthe. Prenant une profonde inspiration, elle releva la tête.

- La réponse est une araignée. Déclara-t-elle sans laisser paraître la moindre hésitation.

La seconde qui s'écoula alors lui parut presque interminable. Sans même savoir pourquoi, elle était désormais presque persuadée que ce n'était pas la bonne réponse. Le mouvement que le sphinx amorça lui paru être une offensive. Mais la créature se contenta de se lever et de s'étirer. Et le verdict tomba.

- Tu as trouvé, tu peux passer.

Et dans une gracieuse révérence, la créature lui céda le passage. Un soupir échappa à la jeune femme, tandis qu'elle passait à coté des pattes massives qui venait de lui dégager le chemin. Elle espérait désormais ne plus croiser trop d'obstacle sur son chemin. Beaucoup trop de temps s'était écoulé depuis ce rêve qu'elle avait fait et l'instant présent, alors qu'elle courait à en perdre haleine à travers les couloirs.
Pourvu qu'il ne soit pas trop tard.

Peu à peu, son souffle se faisait court. Et pourtant elle refusait de ralentir son rythme effréné à travers les couloirs. Elle s'y vu malheureusement contrainte au bout d'une longue course. A bout de souffle, elle se laissa aller contre le mur, essayant de recouvrer un rythme respiratoire plus ou moins normal. Il fallait qu'elle profite de ce moment de répit pour se remettre les idées au clair. Son face à face avec le sphinx venait de brusquement la ramener à la réalité. Elle avait sentit sa faiblesse face à une créature aussi imposante, sa vulnérabilité sans sa baguette. Seule et sans magie, ce n'étaient pas les quelques babioles qu'elle avait en poche qui allaient l'aider face à un montre probablement bien plus redoutable encore que ce sphinx. Elle avait besoin d'une arme, elle avait besoin d'aide. Et elle trouverait, peu importe les minces délais qui lui restaient encore. Elle savait malgré toute sa fierté qu'elle n'était pas de taille à affronter un monstre au corps à corps, pas seule. Relevant la tête, elle s'élança à nouveau dans le couloir.

Une étrange lamentation résonnait au loin, dans ce couloir qu'elle empruntait pour aller jusqu'au cachot. Intriguée, elle eut cependant vite fait de reconnaître les gémissements de Mimi Geignarde. Elle l’avait complètement oubliée, celle-là ... Elle allait devoir à nouveau trouver une excuse pour pouvoir échapper à passer un moment avec Mimi dans les toilettes. Et elle ne pouvait guère faire autrement, c'était le seul couloir possible et surtout le chemin le plus court pour se rendre aux cachots. Tant pis, il faudrait bien qu'elle affronte le fantôme. D'ailleurs, avec un peu de chance ... Un sourire se dessina sur ses lèvres. Certes elle allait perdre du temps, mais au moins, elle ne serait pas en reste face au monstre qui détenait Sirius. Parce qu'il était hors de question de compromettre la vie du sorcier par son incapacité et sa faiblesse. Et l'aide dont elle avait besoin, elle venait peut-être de la trouver. Se remettant à marcher d'un pas rapide, elle bifurqua en poussant à la volée la porte des toilettes. Elle put alors apercevoir la silhouette translucide de Mimi, se lamentant, face à la fenêtre.

- Mimi ? Demanda-t-elle d'une voix qu'elle voulait la plus posée possible.

La réaction ne se fit pas plus attendre, tandis que l'intéressée se retournait vers elle, ses traits fantomatiques tirés dans une expression de colère.

- Quoi encore ! Qu'est-ce que tu fiche ici ! Cria-t-elle.

Sa voix résonna entre les murs de la pièce toute entière. Alors que le dernier écho disparaissait, Mimi, qui venait de quitter sa fenêtre pour foncer droit sur cette personne qui osait venir troubler le calme de ses toilettes, changea soudainement d'expression. Visiblement, elle venait de reconnaître Morgane, avec qui elle avait parlé quelques heures plus tôt.

- Mimi, qu'est-ce qui ne vas pas ? Je t'ai entendu pleurer, je me suis dit que quelque chose n'allait pas.

Elle se remit alors à sangloter, tandis qu'elle venait se poser sur l'évier face à Morgane. D'un hochement de tête, elle désigna un livre qui traînait, nonchalamment ouvert sur le sol humide, les vieilles pages racornies s'imbibant progressivement de l'eau qui gisait par terre. Sans même encore avoir entendu ce qu'elle avait à dire, la jeune femme avait comme l'impression que Mimi venait une fois de plus être victime d'une agression. Enfin, le mot était un peu fort ...

- J'étais tranquillement en train de repenser à tout ce que tu m'avais dit, commença-t-elle le visage un instant rayonnant avant de soudainement s'assombrir, quand j'ai entendu du bruit. J'ai compris que quelqu'un venait d'entrer. J'ai voulu leur dire de ficher le camp, mais il ont commencer à se moquer de moi ... Et puis il m'ont jeté ce livre à la figure en me disant que je ferais mieux de lire au lieu de pleurer tout le temps.

Et à nouveau, ces sanglots particulièrement aigus typique de Mimi. Aussi insupportable soit-elle, il fallait bien reconnaître qu'elle avait une façon toute particulière de parler, avec une expression démesurée pour tout ce qu'elle racontait. Comme si elle changeait d'humeur selon les mots qu’elle prononçait. Morgane regarda la silhouette qui flottait à présent à nouveau à hauteur de la fenêtre, avec une expression offusquée. Comme si l'on venait de dire du mal à sa meilleure amie, aussi faux cela pouvait-il être. Elle s'approcha alors du livre et y jeta un bref regard, avant de le pousser dans sa poche. La reliure en cuire était particulièrement épaisse, et les pages sur lesquelles le livre était retombé ouvert au sol étaient aussi chiffonnées que détrempées.

- Et tu sais qui à fait ça, Mimi ? J'irais lui remettre son livre en main propre, par mes bons soins ...

Evidemment, elle n'irait probablement jamais. Elle se contentait de jouer la comédie pour pouvoir avoir de Mimi ce qu'elle attendait. Et jusqu'à présent, l'âme de la jeune fille semblait être suffisamment attendrie par le fait d'avoir une alliée pour ne pas se rendre compte de la supercherie.

- Ils étaient à trois. Deux filles et un garçon, mais je ne les connais pas. Je crois qu'ils étaient à serpentard, mais je ne suis pas sûre. Répondit-elle d'une voix aigue et basse à la fois.

Désormais, toutes deux se faisaient face. A serpentard ? Quelle heureuse coïncidence, elle n'aurait pas pu rêver mieux. Ca lui rendait la tâche encore plus simple qu'elle ne l'aurait pensé. Attirer Mimi dans les cachots allait être un jeu d'enfant.

- Ca te dit qu'on aille les chercher ensemble ? J'ai ma petite idée de l'endroit où d'odieux serpentard peuvent traîner, à l'heure qu'il est. Parce que je doute qu'ils soient vraiment en cours ... Tu me suis ?

Elle sembla hésiter un moment. Mais Morgane lui laissa le temps de jauger l'idée. Elle savait que si elle insistait, elle risquait de rater son coup. Et son silence finit par payer, Mimi s'approcha d'elle avant de lui lancer un regard vindicatif.

- Je viens avec toi. Je vais leur mettre une raclée ! Lança-t-elle d'une voix dont l'intonation allait crescendo.

Et sans prononcer un mot de plus, Morgane poussa à nouveau les portes des toilettes. Mais cette fois-ci, elle n'était plus seule.

Elle ne pouvait désormais plus se permettre de courir à un rythme impossible à travers les couloirs du château. Elle préférait éviter de se retrouver dans une position d'esquive délicate à cause de questions indiscrètes que Mimi pourrait lui poser si elle précipitait le rythme. Après tout, nul besoin de courir pour retrouver trois élèves dans les cachots. Et le seul mot d'ordre était d'éviter que le fantôme ne comprenne que Morgane se servait d'elle. Il aurait été bien dommage qu'elle vienne à perdre sa seule alliée, dont la naïveté l'aveuglait. Une chance que Mimi n'ait pas des masses d'ami, ça avait été si facile de l'attirer dans ses filets… Elles poursuivaient donc leur chemin, côte à côte. La simple idée que Mimi avait temporairement quitté ses toilettes était déjà étrange en elle même, mais la voir ainsi se promener dans les couloirs avec quelqu'un, ça ne l'était qu'un peu plus. Visiblement, le désir de vengeance de Mimi semblait avoir pris le dessus, suffisamment pour la déraciner de son lieu de mort. Et aucune d’elle ne disait mot. Morgane marchait d'un pas actif dans le silence le plus complet, la silhouette fantomatique flottant auprès d'elle, dans un léger chantonnement. A croire qu'elle redécouvrait le château au bout de tant d’années séquestrées dans ses toilettes.

Ni l'une, ni l'autre, ne vit rien arriver. Ce ne fut que lorsque Morgane sentit le sol glisser sous ses pieds qu'elle réalisa que quelque chose d'anormal se produisait. Sans même pouvoir faire quoique ce soit et malgré avoir tant bien que mal tenté de se rattraper, elle sentit ses pieds glisser en avant, l'équilibre lui manquant. Elle se retrouva au sol, allongée sur le dos, sans avoir eu le temps d'enregistrer la scène. Elle était en bien mauvaise posture. Si une créature quelconque venait à l'attaquer, elle n'avait plus qu'a espérer que Mimi ne reste pas à rien faire ou s'enfuie. Les yeux braqués au plafond, elle vit alors une ombre malheureusement familière passer. Elle se redressa tant bien que mal, sentant une douleur lui lancer dans le dos, sur lequel elle était brutalement retombée.

- Peeves ! Viens ici tout de suite ! Tonna-t-elle dans le couloir.

Cet idiot venait de lui faire une belle peur. Elle qui s'était crue en proie à une créature mise en place pour le tournoi ... Où alors peut-être était-il là pour compliquer la tâche de Morgane. En tout cas sur ce coup là, il ne l'avait pas ratée.

- Notre Ministre de la Magie
S'est pris les pieds dans l'tapis
Elle est tombée comme une gourde
Et elle crie comme une sourde !

Caqueta Peeves sur un air de chanson populaire. Par Merlin, elle allait le massacrer ce fichu esprit frappeur ! A présent relevée, s'était au tour de Mimi de faire entendre ses gémissements, se mêlant aux railleries lancées par Peeves. Le mélange entre les cris suraigus de Mimi et les piaillements moqueurs de Peeves, c'était simplement abominable.

- SILENCE ! Hurla la jeune femme suffisamment fort afin de couvrir leur boucan.

Visiblement, tous deux furent suffisamment surpris pour soudainement se taire, se retournant vers Morgane. Elle profita de ce silence qu'elle savait bref pour faire en sorte de calme le jeu.

- Peeves je te préviens que si tu n’arrêtes pas immédiatement, je te promets le pire moment de ta vie avec le Baron Sanglant. Je me suis bien faite comprendre ?

La menace sembla prendre tout son effet soudainement. Peut-être était-ce à cause de sa voix particulièrement grave et sévère. En tout cas, l'évocation de sanction par le Baron semblait avoir calmé Peeves suffisamment pour qu'il arrête ses incessantes railleries.
Une idée la frappa presque soudainement. Après tout, elle avait bien réussi à s'attirer les faveurs de Mimi par la persuasion, peut-être arriverait-elle à en faire autant auprès de cet esprit frappeur ? Du moins, ça valait le coup de tenter, elle n'avait quand même rien à perdre.

- Bien, j'ai l'impression que je me suis faite comprendre. J'ai un marché à te proposer. Je veux que tu viennes avec nous, pour nous aider. Commença-t-elle, avant d'être interrompue par une voix aigue.

- Non ! Je ne veux pas que Peeves vienne avec nous ! Il se moque de moi et ...

- Mimi, s'il te plait. L'interrompit Morgane. Tu tiens à retrouver les élèves qui t'ont jeté ce livre à la figure ? Répondit-elle en sortant de sa poche le livre, avant d'à nouveau se retourner vers l'esprit frappeur. Donc, tu nous accompagnes. Et en échange, une fois qu'on sera arrivés dans les cachots, tu auras le droit de lancer tout ce que tu veux et ennuyer de toutes les manières possibles les êtres auxquels nous rendons visite. Interdiction, évidemment, de t'en prendre à moi ou à Mimi.

Le simple fait qu'il ne lui ait rien lancé à la tête et à fortiori qu'il l'ait laissée parler jusqu'au bout semblait clairement indiqué qu'il était intéressé par l'idée ... Pouvoir chercher misère à volonté sans les moindres représailles, que demander de plus pour un esprit frappeur ? Au bout de quelques secondes où étonnamment il semblait réfléchir, un sourire malicieux se dessina sur son visage. Morgane remit alors dans sa poche le livre, avant que Peeves ne lui réponde.

- Je pourrais lui faire tout ce que je veux ? Absolument tout ? Demanda-t-il à Morgane, qui répondit d'un hochement de tête. Alors je viens avec vous ! Lança-t-il avant de ricaner.

- Parfait, alors allons-y. Répondit-elle pour conclure la discussion.

Elle fit alors demi-tour et se remit en marche, avant que Mimi n'ait eu le temps de l'interrompre avec une nouvelle objection. Elle n'avait pas envie de passer son temps à argumenter autrement qu'en touchant à son envie de se venger. Mais malgré un visage ferme, elle n'en était pas moins satisfaite pour la cause. Car désormais, elle n'était plus seule. Et elle n'avait plus seulement l'aide d'une, mais de deux personnes. Ou du moins, de deux âmes. Car même si Mimi était totalement immatérielle, Peeves avait l'avantage de pouvoir saisir à pleine main des objets, qu'il passait son temps à lancer sur les élèves. Et aucun d'eux ne pouvaient mourir, ce qui faisait d'eux des alliés de taille. Décidément, elle finissait par s'étonner elle même.

Et ils continuèrent leur chemin, Morgane devant régulièrement jouer au gendarme afin de calmer les deux esprits. Elle dû rappeler Peeves à l'ordre par ses menaces au Baron Sanglant maintes fois, mais globalement, ils étaient tous deux coopératifs, malgré une entente très approximative. Elle eut également besoin de hausser le ton alors que Peeves ne pouvait se retenir de faire une remarque désobligeante sur les lunettes de Mimi, qui éclata en sanglot. Ce qui les attendait dans le hall sembla cependant les calmer tout les deux et les tensions retombèrent pendant un instant, probablement était-ce dû à la surprise. Devant eux, chaque pavé du hall s'était vu orné d'un dessin différent, incrusté en relief dans la pierre. Après avoir regardé brièvement, elle en distingua trois : un oeil, une araignée, une flamme. Tous ces symboles étaient dispersés sur les différentes dalles du hall, alors que d'autres restaient vides. Intriguée, elle ne savait pas vraiment comment s'y prendre, ni que faire.

Elle lança un regard aux deux esprits, avant de se lancer. Mieux valait commencer par un pavé dénué de tout dessin. Mais à peine avait-elle posé son pied dessus que le pavé sembla tomber dans le vide, ne laissant qu’un trou béant. Elle fit un brusque mouvement de recul, se retrouvant à nouveau sur la dernière marche de l'escalier. Elle resta quelques secondes immobiles, à juger du regard les dessins. Il ne lui restait plus qu’à essayer. Sans savoir à quoi s'attendre, elle posa son pied sur une dalle sur laquelle se trouvait le dessin des flammes. La réaction ne se fit pas attendre, et d'immenses flammes jaillirent des jointures entourant la dalle. Malgré un réflexe qui la fit basculer en arrière sur les marches, le bas de sa cape s'enflamma. Immédiatement elle l'ôta de ses épaules, avant de la jeter au sol et de la piétiner afin d'éteindre les flammes. Il ne restait plus du coin embrasé que quelques fils de tissus consumés. Par chance, elle n'avait subi aucun dégât. Elle inspira profondément, s’asseyant sur l’une des marches. Il devait sûrement y avoir une logique, pour savoir quels pavés lui permettraient d'arriver de l'autre coté ... Elle avait probablement raté quelque chose. Elle posa son regard sur la gravure de l'araignée, repassant en tête les évènements jusqu'à présent. Peeves, Mimi, le sphinx, l'énigme, le labyrinthe, la boite... Mais oui, l'énigme, l'araignée ! Elle se redressa, ignorant désormais le bruit que pouvaient bien faire les deux esprits auquel elle s'était désormais habituée, et posa son pied sur la dalle où une araignée était dessinée. Elle retint son souffle, attendant qu'une araignée surgisse et lui saute dessus. Mais il ne se passa absolument rien. Dans un mince sourire, elle posa le second pied. Comprenant qu’elle ne risquait rien, elle sauta sur un deuxième pavé ornée d’une araignée. Et, dalle après dalle, elle se fraya un chemin jusqu'à l'autre bout du hall, lui donnant accès aux escaliers des cachots.

Peeves et Mimi volèrent au dessus des pavés du hall pour la rejoindre, Morgane ignorant les questions de plus en plus poussées du fantôme. Elle se contentait de marcher droit devant elle, tout en sachant que les seules raisons pour lesquelles ses deux alliés restaient à ses cotés étaient purement personnelles. C'était par ce bout là qu'elle les tenait. Et elle ne les lâcherait pas.
A présent, ils s'enfonçaient de plus en plus dans les cachots, l'ambiance s'en faisant ressentir.
Elle le savait, ils n'étaient plus bien loin ...

Devant elle s'étendait cet interminable dédale. Et pourtant, elle savait où elle devait aller. Ce long couloir dans lequel elle avait couru aux côtés de Sirius, qui la mènerait à cette porte, à lui. Malgré un désir de vaincre plus fort que jamais, cette sensation qui lui retournait les entrailles, elle avait du mal à faire abstraction de cette ambiance, lugubre, glauque. Le sol humide faisait résonner le moindre de ses pas contre les murs à l'aspect visqueux faits de briques froides, sur lesquels s'était déposé avec le temps et l'humidité de la mousse. La seule lumière provenait de quelques malheureuses torches dans un état pour ainsi dire précaire, s'allumant sur leur passage. Cette faible lueur, suffisante toutefois pour voir où elle mettait les pieds, faisait danser d’inquiétants reflets sur les heaumes des armures qui s'alignaient le long du couloir. Quelques fois, on pouvait entendre le bruit vif et rapide de l'un ou l'autre rat fuyant la soudaine luminosité, allant se réfugier dans l'un ou l'autre trou, creusé par le temps dans les plinthes.

Autant Peeves semblait ne pas prêter la moindre attention à l'ambiance qui s'alourdissait un peu plus à chaque pas, autant Mimi semblait presque regretter l'idée de vouloir se venger. Mais elle ne disait rien, ce qui paraissait presque étonnant. Morgane ne s'en plaignait pas et continuait d'avancer comme si tout était parfaitement normal, comme si elle ne savait rien de ce qui allait leur arriver. De toute façon, elle ne savait rien, si ce n'était le fait qu'ils allaient se retrouver face à un monstre. Et qu'elle n'était pourvue de l'aide que de quelques petits objets et deux fantômes dont l'allégeance n'était pas sans faille ... Bientôt, la porte par laquelle Sirius était entré se profila, encore lointaine. Malgré de vains efforts pour conserver un air le plus naturel possible, elle avait sentit ses muscles se raidir à l'approche d'un verdict auquel elle ne pouvait échapper. Pas à pas, la silhouette sombre se faisait de plus en plus imposante. Jusqu'au moment où elle se retrouva face à cette lourde porte de bois massif noir. Sans même vraiment y penser, elle saisit l'épée de l'armure la plus proche, l'empoignant fermement.

- Pourquoi tu prend ca ? Demanda Mimi, aussi inquiète qu'intriguée.

- Pour l'impression. Répondit simplement Morgane.

Elle n'avait jamais manié la lame jusqu'à aujourd'hui. Mais si elle voulait que cette arme l'aide plus que de l'encombrer, il allait falloir qu'elle apprenne, et vite. Mais elle ne mettait pas en doute son instinct de survie.
Prenant une profonde inspiration, sentant toute l'angoisse qu'elle avait tant bien que mal refoulée la saisir à la gorge, elle poussa brusquement la porte. Elle n'avait pas voulu se donner le droit d'hésiter, ni laisser la moindre chance à sa peur de prendre le dessus. Ce qu'elle vit alors lui coupa le souffle. Jamais elle n'avait vu quelque chose de comparable. Les quatre coins de la pièce étaient occupés par des armures lourdement équipées, et seuls quelques flambeaux fournissaient un peu de clarté à l'endroit, un sur chaque pan de mur. Mais elle n'y prêta aucune attention, son regard braqué sur cet horrible chose. D'une hauteur de plusieurs mètres, l'araignée géante occupait la plus grande partie de l'endroit. Horrifiée, plantée comme un légume alors que la porte venait de lourdement se refermer dans son dos, Morgane ne sortit de sa torpeur que lorsqu'elle vit arriver droit sur elle l'une des pattes de l'araignée, de la dimension d'une poutre. Elle se jeta précipitamment sur le coté, esquivant de peu l'attaque. Le hurlement aigu qui s'ensuivit fit alors comprendre à Morgane qu'il s'agissait de Mimi, et à en juger par l'intensité décroissante, elle fuyait. Mais Peeves lui, était toujours là, apparemment aussi pétrifié que l'était Morgane quelques instants auparavant. Désormais, le combat était engagé. Il ne lui restait plus qu'à le gagner.

A peine eut-elle le temps de se relever, qu'elle vit arriver les deux mandibules de l'animal sur elle. La jeune femme lança sa lame dans un assaut sur cette pince immense qui se rapprochait à une vitesse fulgurante, sans même y laisser la moindre égratignure. De plus, l'épée était bien plus lourde qu'elle ne l'avait cru. Les mandibules de l'araignée s'enfoncèrent dans le mur, à l'endroit précis où la tête de Morgane, qui venait de s'abaisser en voyant l'offensive arriver, s'était trouvée la seconde qui précédait. Dans un bond sur le coté, elle s'éloigna dans l'espoir de prendre suffisamment de recul pour reprendre l'offensive. Faisant face à la créature, ce fut cette fois-ci dans l'une de ses pattes qu'elle donna un coup de lame. Elle avait à peine réussi à lui faire une entaille, un mince filet de sang s'en échappant.

- PEEVES ! Hurla-t-elle à l'adresse de l'esprit frappeur, flottant toujours près de l'entrée, amorphe. Aide moi ! Balance lui tout ce qui te tombe sous la main !

Il sembla soudain se réveiller, réalisant ce qu'il se passait. Il regarda un instant autour de lui, avant d'arracher à l'une des armures son heaume, pour le balancer avec force sur la tête de l'araignée. Morgane profita de la diversion pour courir, attrapant l'un des flambeaux accrochés au mur. Dans le fracas des objets métalliques provenant des armures que Peeves lançait à tout va dans le but d'atteindre la bête, celle-ci fonça à nouveau sur Morgane, ses mandibules en avant. Dans un réflexe, Morgane brandit son épée. Les deux crochets se refermèrent violemment et dans un bruit métallique, la lame se brisa. Se souvenant soudain de l'épaisse reliure de cuir qu'elle gardait dans sa poche, elle s'en servit comme bouclier à l'attaque de l'acromentula. Malheureusement, celle-ci n'eut pas beaucoup de mal à transformer le livre en morceaux de papier, l'épaisse couverture réduite à bien peu de chose. De surcroît, les vaines tentatives de la jeune femme semblaient énerver de plus en plus l'animal. Reculant de quelques pas, elle brandit le flambeau qu'elle avait arraché du mur et le tendit devant elle. Elle en fut presque heureuse de constater le mouvement de recul qu'eut l'araignée. Elle n'aimait pas le feu, et Morgane allait essayer d'en tirer avantage. La torche toujours en avant, Morgane recula précautionneusement jusqu'à l'armure la plus proche, ôtant l'épée qu'elle portait de son fourreau. Elle donna un nouveau coup de lame cette fois-ci sur la tête du monstre, ne parvenant une fois de plus qu'à faire jaillir un peu de sang, sans occasionner de dégât plus grave.

- Peeves, jette lui du feu ! Lança-t-elle à l'esprit, sans vraiment se rendre compte de l'incohérence de ses mots.

Elle attrapa alors quelques pages de ce qui fut un jour un livre, mettant le coin du papier dans les flammes, avant l'envoyer entre les mandibules de l'animal, qui recula plus vivement encore, cette fois. Le regard que lui lança l'araignée, bien que particulièrement écoeurant et horrible fit comprendre à la jeune femme que visiblement, elle n'était pas enchantée de se faire attaquer à l'heure du dîner. Ses yeux qui la fixaient ainsi lui donnèrent une soudaine inspiration. Les yeux, évidemment ... Elle profita du léger répit que lui offrait le feu pour sortir de sa poche le canif qu'elle avait récupéré dans la salle commune, faisant sortir le couteau qui s'y logeait. Par chance, il s'agissait d'un canif magique, la lame se révélant être plus grande que ne le laissait penser l'objet. Viser fut particulièrement difficile, mais elle tenta l'exploit et lança le couteau vers les yeux de l'araignée. Avec un peu de chance, elle toucherait son but, elle avait six chances d'atteindre un oeil ... Au moment ou dans un bruit particulièrement délicat elle comprit qu'elle venait de toucher sa cible, la jeune femme vit Peeves lancer sur le dos de l'animal l'une des trois torches restantes. Elle allait finir par bien l'aimer finalement, cet esprit frappeur. Bien que quelques poils prirent feu sur le dos de l'araignée, cela sembla lui faire plus de peur que de mal. Du moins, ce n'était sans doute rien comparé à la souffrance de l'oeil que Morgane avait crevé. Assaillie à la fois par les objets que Peeves pouvait lui balancer et les assauts à la lame répétés de Morgane, l'araignée lança ses deux pattes avant en l'air, dans l'espoir d'en finir avec ses ennemis. Voyant l'immense masse dangereusement faire mine de lui retomber dessus, la jeune femme brandit dans un réflexe son épée. La bête ne put faire autrement et s'empala dessus. Sa tentative d'esquive en se relevant fut bien vaine, et l'épée fut arrachée des mains de Morgane, restant plantée sous le corps de l'animal. La seconde qui suivit, elle vit l'immense corps retomber, lourdement sur le ventre, enfonçant plus encore l'épée, la faisant simplement disparaître sous elle. Le flambeau à la main, la jeune femme resta un instant sur le qui-vive, dans l'éventualité où la bête reviendrait à l'attaque. Mais non, elle l'avait bel et bien tuée. Elle avait réussi, elle avait vaincu ...

Le combat désormais achevé, Morgane réalisa que tous ses membres tremblaient, son corps en proie à de véritables soubresauts. Elle était en train de lentement réaliser ce qu'il venait de lui arriver que son regard tomba sur ce tas inerte dans un coin de la pièce. Sirius ... Oh non, pas ça. Elle se précipita vers son corps, laissant retomber le flambeau au sol, avant de se tomber agenouillée à coté de la silhouette de Sirius. Son corps était couvert d'une substance fileuse et collante. Visiblement, il s'agissait du fil de l'araignée, qui avait commencé à l'envelopper pour en faire son repas. Morgane tenta tant bien que mal de libérer le sorcier de ses liens, mais le fil collait si bien qu'elle eut du mal à en retirer ses mains. Il lui fallait quelque chose pour découper ça et libérer Sirius. Brillant à la maigre lueur des flambeaux, le regard de Morgane tomba sur le couteau, toujours planté dans l'oeil de l'acromentula. Elle n'avait pas le choix à vrai dire ... Dans un regard dégoûté, elle ôta le couteau du globe de l'araignée, essuyant vaguement la lame sur sa cape, réprimant un haut-le-coeur. Elle ne pouvait pas se permettre de prendre une épée, ça aurait été risquer de le blesser. Non sans une certaine difficulté, elle parvint à libérer le corps de Sirius, toujours inconscient. Elle tenta doucement de le relever, avant de lancer un regard à Peeves.

- Viens m'aider à le sortir de la, s'il te plait.

Pour la première fois de sa vie sans doute, Peeves obéit sans se faire prier, et attrapa l'autre bras du sorcier, l'amenant tant bien que mal avec Morgane vers la porte. En temps normal, elle aurait probablement été capable de le sortir seul, mais son combat avec l'acromentula l'avait particulièrement épuisée. La porte qui s'était scellée quelques minutes auparavant semblait s'être rouverte suite à sa victoire. Probablement était-ce la condition pour pouvoir sortir, gagner. Et dans un dernier effort, Morgane parvint à s'extirper de la pièce, accompagnée de Peeves et Sirius.
Une fois de plus, cette énigme posée dans le labyrinthe prenait tout son sens ... Sans même s'en être doutée, il s'agissait d'un indice dissimulé dans l'épreuve. Tout lui semblait tellement évident à présent, qu'elle s'en serait presque voulue de ne pas avoir fait le rapprochement, l'idée de monstre aurait dû l'aider. Car au fond rien n'était laissé au hasard.
Mais elle avait réussi, elle avait gagné. Et elle l'avait sauvé.