Entre deux passages secrets

Un silence des plus parfaits régnait dans le château endormie. Quelques chouettes & autres hiboux hululaient de temps à autre, réveillant quelques élèves sagement et confortablement allongés dans leur lit. Ce soir là, une jeune fille ne dormait pas. Ses grands yeux bleu électrique grands ouverts, ses longs cheveux noirs encadrant un visage parfait, elle était sur le qui-vive. Elle venait de ressortir du bureau de Slug, & tenait entre ses mains une petite fiole cuivrée & rouillée. Elle marchait à pas rapides mais suffisament souples pour qu'ils restent silencieux. Ses longs cheveux allaient & venaient sur son visage, entraînés dans son dos par son allure. Elle portait une longue robe noire parfaitement neutre où brillait le blason de Serpentard. Elle songea en son for intérieur qu'il serait bientôt temps de faire reprendre à ses yeux la couleur factice qu'elle s'était donnée lorsqu'elle était revenue à Poudlard, il y a deux semaines de cela. Deux semaines encore avant cela, Shin, une jeune femme de 19 ans, avait encaissé un sortilège particulièrement puissant qui lui avait redonné l'apparence de ses 14 ans. Depuis, elle avait effectué quelques modifications corporelles sur elle même, notamment sur la couleur de ses yeux.

Shin s'arrêta. Un bruit avait attiré son attention. Elle se retourna, sur le qui-vive, prête à voir débarquer le concierge, Monsieur Corneille, d'un instant à l'autre.
"Il manquait plus que ça..."
Souffla t'elle en soupirant discrètement. Elle avisa un peu plus loin un passage secret & s'y engouffra. Mais son bras rencontra une étrange matière, quelque chose de chaud, quelque chose de vivant. Réprimant un sursaut, elle se retourna avec une souplesse particulière & ouvrit de grands yeux, ses prunelles bleu électriques brillant d'une lueur particulière. Elle tomba nez à nez avec un jeune homme de sa maison, un premier de la classe de 6ème année & fronça discrètement les sourcils.
"Alors comme ça on est pas dans son lit?"
Souffla t'elle à mi-voix.
Cette fois-ci, une ombre carrèment malsaine passa dans ses yeux tandis qu'elle fronçait un peu plus les sourcils.

Etrange atmosphère que celle qui régnait dans le château cette nuit là... La lune était invisible, cachée par quelques sombres nuages, et pas un souffle de vent ne venait faire bruisser les brins d'herbes entre eux, où simplement s'amusait à frapper une branche contre les nombreuses fenêtres de la bâtisse. Mais si tel avait été le cas, Tom ne l'aurait pas entendu. A plusieurs mètres de profondeur, coincé bien en dessous de sa salle commune, le préfet à la réputation fumeuse avait passé la grande partie de sa journée libre à travailler sur un projet qui lui était personnel.

Il avait emprunté quelques grimoires à la réserve de la bibliothèque, en tant que préfet et et idole des professeurs, il en avait le droit, et avait arduement travailler sur un sujet particulièrement sombre, dont il n'avait découvert que trop peu de détail à son gout. Cependant, loin de se décourager car ce n'était pas dans ses manières, il était quand même descendu dans les cachots les plus profonds de Poudlard, dans cette petite pièce qu'il avait déniché lors de sa deuxième année. Depuis qu'il avait du rennoncer à ses manipulations reptiliennes de l'année passée, il s'ennuyait souvent, ses devoirs ne l'occupant guère et ses camarades théoriques l'énervant au plus haut point. Ainsi, il utilisait les voûtes caverneuses et inconnues à des desseins mystèrieusement sombres.

Il était donc très tard quand il ferma la porte de bois brute derrière lui. Il s'était fabriqué une clé passe-partout, et il verrouilla la porte qui, malgré son vieil âge, ne fit pas un seul bruit, Tom y avait veillé lui même. Il était persuadé que personne ne viendrait furter dans les parages, et que se retrouver nez à nez avec un membre du personnel de Poudlard serait incongrue dans ce contexte, il se savait en sécurité, mais ne faisait aucun bruit : il s'agissait de sa manière naturelle pour avancer. Silencieux, ombre parmi les ombre, il remonta avec vitesse dans les étages et, au moment où il se dirigeait enfin vers sa salle commune, une pensée lui traversa l'esprit : il se souvint brusquement d'un petit livre qu'il avait lu près de trois ans auparavant. Un livret d'apparence anodine, mais qui contenait un détail qu'il avait cherché toute la journée. L'excitation qui le prenait quand il savait qu'il allait enfin avancer chassa de ses yeux toute marque de fatigue. Prit d'une énergie nouvelle, il s'élança rapidement au rez-de-chaussé. Il s'apprêtait à s'envoler dans le Grand Escalier quand un claquement régulier lui dressa l'oreille. Des pas. quelqu'un approchait.

Il n'avait aucun prétexte pour se retrouver ici à cette heure, et une sanction, si légère fut elle, l'aurait gravement blessé dans son amour propre, le simple fait d'avoir été pris et sermonné le répugnait. Tom ne supportait pas qu'on lui dicte son comportement, bien qu'il aima faire appliquer les règlements aux autres élèves. Il y avait pourtant pire. S'il se faisait prendre à courir dans les couloirs dans le milieu de la nuit, il était certain que cette information remonterait aux oreille du vieux Dumbledore, qui se ferait une joix de resserer le mors. Ce vieillard sénil était la seule entrave qui le paralysait dans tous ses plans : déjà, l'année précédente, il l'avait immédiatement soupçonné, lui, élève modèle ! Bien sur, il avait eu raison, et c'était précisemment pour cela que Tom se méfiait de lui.

Consciencieux, le Serpentard se plaqua dans une alcôve. Il se sentit tomber de l'autre coté. C'était un passage secret. Il se releva rapidement, agil comme un chat et sentit soudainement un silhouette se glisser contre lui et se blottir sur son torse. Des cheveux, noirs dans la nuit mais assez pour l'être tout le temps, lui fouettèrent le visage. Une jeune fille. Il était bien plus grand qu'elle, et pourtant, ce n'était pas une de ses cractéristiques principales. Enervé d'avoir été surpris par une simple élève, car c'en était une pour se cacher à l'écoute de pas, il lui attrapa le poignet et la tira loin de lui. Elle lui jeta un regard sournois. Une serpentard. Elle persifla. Des mots inutiles. Tom tira sur la main qu'il emprisonné de ses doigts fins mais puissants.

Et toi ?

Inconsciemment, il bomba le torse et un éclat de lumière fit briller son badge de préfet. Dans l'agitation que ses machinations de la journée avait créé, il en avait oublié de se changer. Cette fille se moquait de lui. C'était un tort des plus atroce pour une simple mortelle. Irrité, ses yeux brillèrent.

"Encore des élèves en dehors de leur lit...Mais ils vont finir par me rendre fou."
Shin recula instictivement & écarta le jeune homme de sa trajectoire d'un mouvement ample du bras. Elle se plaqua contre la partie la plus sombre du passage secret & sortit sa baguette magique. Elle sentit les pas du concierge se faire plus proches et la lueur de ses yeux s'intensifia. Lorsque le concierge passa enfin une tête dans le passage secret, un sortilège rouge vif le frappa de plein fouet. Il avait soudainement perdu toute trace de mémoire... Shin se concentra en plissant un petit peu plus les yeux afin de remodeler cette dernière à sa convenance. Le concierge pivota sur ses talons, soudainement persuadé qu'il avait un rendez-vous imminent à l'orée de la fôret interdite. Shin n'éclata pas de rire & ne soupira pas non plus. Elle n'avait plus aucune trace de la délicieuse insouciance de ses "réelles" années passées à Poudlard. Son regard remonta jusqu'à celui du jeune homme également présent. Elle en avait, presque, fini par oublier sa présence. Son regard n'avait rien de froid, ni de désagréable. Il était simplement observateur, jusqu'au fameux degré où cela rends mal à l'aise à force d'insistance. Mais Shin baissa les yeux à nouveau, cela ne l'intéressait pas outre mesure. Elle s'avança vers la sortie du passage & passa une tête dans le couloir. Se retournant brièvement, sa voix calme & posées s'éleva en un très léger murmure:

"Il faut croire que non."
Elle darda son regard sur celui du jeune homme une nouvelle fois & sentit un très léger frisson la parcourir. Il y avait quelque chose en lui de malsain. Quelque chose qui venait contrecarrer avec son visage d'ange.
"J'imagine que tu ne me répondras pas mais tant pis, je n'ai rien à perdre. Tu étais où?"
Sa voix n'exprimait aucun réel intêret, cependant, elle restait aux aguets, redoutant une nouvelle venue. Elle avait déjà été obligée d'utiliser des sortilèges relativement basiques mais qui n'avaient rien d'un niveau de 4ème année devant ce jeune homme parfaitement inconnu, elle n'aurait pas aimé avoir à le refaire. Shin ne voulait pas se faire remarquer. Tout du moins tant qu'elle n'aurait pas retrouvé son corps originel. En attendant...Il ne fallait pas qu'elle sorte de la masse, & il fallait bien avouer que c'était chose difficile pour elle.

La fille qu'il avait face à lui était quelque peu étonnante. En abrégeant les pensées et l'argumentation qui l'avait mené à cette conclusion, Tom était persuadé qu'elle n'était tout simplement pas une fille. Elle était trop mature et sure d'elle. Il y avait donc quelque chose qu'il ne comprenait pas. Un arrière gout de frustration vint lui brûler la langue : il n'aimait pas ça... il n'aimait pas qu'on se moque de lui, or il était évident que c'était ce qui finirait par arriver. Le préfet fit quelque pas en arrière, s'enfonçant dans la ténèbres, et la force maléfique et puissante qui ne le quittait pas l'envellopa de ses grands bras aériens. Il se sentait mieux ainsi. Rien ne pourrait lui arriver si il avait la puissance de ce qu'il ignorait encore être son aïeul, Salazar Serpentard.

Il regarda la fille, il ne savait pas comment l'appelait autrement, pour cause, elle ne lui avait pas dit son nom. D'une force qu'elle ne laissait pas soupçonner, elle retira facilement son poignet si fin des doigts angéliques de Jedusor, et se blottit contre le mur, la baguette prête, sortie de sa poche avec fluidité. Tom crut un instant qu'elle allait l'attaquer, mais c'est alors qu'il entendit les bruits de pas dehors, ceux du concierge. Elle en arriverait facilement à bout : elle avait la surprise de son coté. Cependant, plus pour sa sécurité à lui que la sienne, Tom plongea sa main dans sa poche et entortilla ses doigts autour de manche fin. Il était prêt. Sa baguette en main, le Mal dans son dos, rien ne lui faisait peur. Il se savait invincible.

La fille envoya un brusque éclair dans la poitrine du pauvre surveillant, et modifia sa mémoire d'un simple plissement des yeux. En tant que préfet, Tom aurait du agir, faire quelque chose, mais il n'avait aucunement envie de se mêler à ce genre d'histoire, surtout qu'il aurait lui aussi été pris. Finalement, l'autre élève se retourna enfin vers lui.

D'où venait il ? Comme si cela la regardait ! Si elle faisait la conversation pour s'excuser de l'avoir découvert, c'est qu'elle était malgré tout stupide. Tom se renfrogna, et son visage fut traversé de malveillance. Il se ressaisit, car il savait que, pour réussir, la surprise devait être de son côté. Il afficha donc l'un de ses plus beaux sourires, et le charisme de ses traits se mit en oeuvre. Ses mots, sussurés d'une voix douce et mélodieuse, une voix de ténor, coulait lentement dans l'air adipeux du passage secret.

Non... Je ne te répondrai pas... La curiosité des femmes leur est souvent fatale... pourquoi mettrai-je ta vie en danger ?

Si Tom avait hâte de retourner dans son lit, il lui fallait prendre du repos pour mieux réfléchir le lendemant, il savait aussi que, cette fille ne manquerait pas d'essayer de le manipuler. Il devait attaquer avant.

Shin plissa très légèrement les sourcils. Elle darda un regard perçant sur le jeune « premier ». A quoi jouait il? Il était vrai que Shin, durant toute sa scolarité à Poudlard, avait fréquenté suffisamment la gente masculine pour savoir qu'elle était une proie convoitée pour tout Serpentard voulant se faire une réputation parmi ses compères, ou même ceux d'autres maisons un brin provocateur. Mais en l'occurrence, Shin avait aujourd'hui l'apparence d'une jeune fille de 14 ans & elle avait la nette impression que ces répliques toutes faîtes lancées par le jeune homme avaient quelque chose de rodées. Un habitué? Une moue amusée apparut très finement sur le bout de ses lèvres. Elle répliqua alors d'un ton posé, mais suffisamment bas pour n'être entendu que de lui:

« Mais tout dépends du type de curiosité & de la façon dont elle est assouvie n'est ce pas? »
Elle recula contre le mur & s'y appuya nonchalamment, perdant ses prunelles bleu électrique dans le vide. Elle les releva quelques instants après & poursuivit d'une voix lente:
« Mais certainement que tu as passé toute ta soirée & plus encore dans la bibliothèque comme tout bon premier de la classe, pas vrai....? »
Son regard se fit éloquent. Elle poursuivit:
« Ou peut-être que les apparences sont trompeuses. On dit souvent que ce sont les personnes à l'apparence la plus lisse dont il faut se méfier. »
Lorsque Shin tenait ses propos, elle n'y accordait pas une très grande importance. Son esprit complexe était bien trop occupé à résoudre des problèmes personnels & assouvir les désirs qui lui restaient qu'à s'occuper des faits & gestes d'un banal jeune homme admiré par les professeurs & adulé par les élèves. Néanmoins, pour son interlocuteur, des paroles qui paraîtraient pour banales pouvaient avoir leur petit effet.

Cette jeune fille lui paressait bien sure d'elle. Un peu trop, même, pour n'être qu'une très normale élève de quatrième année. Même chez des serpentards à l'apparence moins fragile, Tom faisait toujours un drôle d'effet, et encore plus chez les fillettes qui se croyaient supèrieurs. Habituellement, elles se sentaient soudainement écrasées par un pouvoir qu'elles n'avaient jamais effleuré seulement. Or, celle qu'il avait devant les yeux n'étaient pas comme ça. Il suffisait à Tom de contempler son regard bleu qui le fixait, imperturbable, pour y voir la maturité et le vécu qui y reflétait. Il devait être sur ses gardes sans pour autant le laisser paraitre. Il prit donc la même posture que son interlocutrice, s'appuyant nonchalament sur le rebord d'une voute basse. Il espérait qu'aucune araignée n'aurait l'idée de grimper sur son épaule, cela aurait le don de l'énerver. Il avait horreur des araignées, bien qu'il ne rechigna pas à les voir ou les toucher. Elles étaient trop laides pour mériter ses paumes blanches. La fille, cependant, avait quelque chose de fascinant, un peu comme une grosse arachnide tapie, et Tom se demanda si elle frapperait à l'instar des petites bêtes : sournoisement.

Elle parlait comme si elle savait. Comme si elle avait déjà vécu ce genre de situation. Elle parlait comme si elle savait qu'elle pouvait l'écraser. Et Tom n'aimait pas ça. Non. Il ne se laisserait pas faire. Il n'avait même pas besoin de penser à une quelconque résistance consciente : sa langue se mit en mouvement presque seule, dévoilant un passage de ses pensées. Tom n'était pas particulièrement pour ou contre le sexisme. Il était en revanche persuadée que certains défauts s'apparentaient plus facilement à certains genres. Les règles qui l'avaient établies mentalement ne s'appliquaient pas à lui, bien sur, il était trop exceptionnel pour se plier aux ordres de la nature.

Non. La curiosité est toujours utilisée à mauvais escient. Surtout par la gente féminine.

Il sourit lentement. Sourire douceâtre et amère, comme une fleur séchée. Il ne supportait pas qu'une petite fouineuse, aussi facinante fut elle, vienne fourer son nez dans ses affaires. Il essayait d'être aimable, de le faire comprendre, mais si elle insistait, il devrait couper court au jeu. Se faire traiter d'intello n'était pas vraiment non plus dans ses plans, mais cette réplique puéril ne l'atteignit pas: tous ceux qui partageaient ses classes savaient qu'il n'avait rien de l'élève modèle. Par cette remarque, Tom fut sure qu'elle ne pratiquait pas la Legilimencie. C'était déjà ça. De plus, elle exprimer ses pensées tout haut. A moins que ce ne fut quelques techniques pour le pousser dans ses retranchements. Le préfet théoriquement studieux entra dans sa manipulation. Son sourire s'élargit et aurait presque pu apparaitre comme sympathique si l'ombre de ses yeux ne croissaient pas.

Tu as raison. Méfie toi de moi.

Tom se savait beau. Il n'avait même pas besoin d'écouter les rumeurs autour de lui pour s'en rendre compte. Le regard de nombreuses glousseuses de toutes maisons le lui montrait chaque fois qu'il entrait dans une salle. Mais de là à le croire "lisse"... Que voulait dire une telle expression ? Avait il une tête d'ange au point de paraitre... "lisse" ? sans défaut ? Cette pensée le fit ricaner. Un monstre angélique. C'était pour le moins... amusant... L'écho de son sourire se perdit dans le souterrain de vieilles pierres, lugubre, sinistre.

"Il est amusant de constater à quel point chacun des défauts du genre humain sont spécifiquement plus adaptés à la gente féminine. Il l'est encore plus de savoir qu'une femme seule trouvera toujours le moyen de s'en sortir, contrairement à un homme qui a perpétuellement besoin d'assistance."
En prononçant ses mots, Shin ne pouvait deviner à quel point elle avait faux sur toute la ligne, tout du moins en ce qui concernait Tom. Sa mère était morte parce qu'elle n'avait su vivre seule, & il deviendrait plus tard un l'un des hommes les plus solitaires et indépendants de son temps. La jeune fille poursuivit, son regard perdu dans le vide, absente:
"Voila des propos tout à fait féministes, des propos bateaux comme on en trouve à la pelle, opposés à une réplique tu m'avoueras relativement pathétique, quant au sexe que peut avoir un défaut."
Shin sourit, on aurait pu dire qu'elle affichait un air joyeux si la lueur de ses yeux ne brillait pas d'un accès particulièrement malsain une fois encore, de quoi dérouter n'importe qui, de quoi effrayer même n'importe qui.
"Me méfier de toi? Tu sais combien de fois j'ai entendu cette phrase?"
Elle éclata alors d'un rire qui n'avait rien de sincère ni de moqueur tout à fait.
"Cette remarque est de toute façon inutile, tu apprendras que je ne fais de toute façon confiance à personne. Mais me méfier de toi à l'excès serait te donner une forme de pouvoir. Sais tu, monsieur le préfet, que la peur est le plus grand pouvoir que l'on puisse exercer sur une personne?"
Pendant que la jeune fille formulait ses remarques, ses yeux brillaient. Ils brillaient d’une aura particulière, comme si elle avait eut une foi toute particulière en ses paroles, comme si elle les avait expérimenté.

Il se faisait régulièrement la remarque : il était très intéressant de voir les tyrades amusantes que pouvaient sortir une personne atteinte d'angoisse, d'anxiété, ou tout du moins d'un quelconque malaise. Devant cette fille à l'apparence tellement sure d'elle, Tom ne put retenir un sourire. Il le savait, les discours trop longs ennoncés en improvisation tel que celui ci marquaient au mieux un sens théatral particulièrement bien affuté, au pire un manque cruel de certitude au sujet du futur proche de la discussion : en effet, on avait plus facilement tendance à montrer les dents qu'à attaquer. Et le préfet théoriquement sage qu'il était avait depuis longtemps découvert ce genre de réaction humaine. Pourtant, il avait vu la serpy attaquait le concierge avec une attaque qui n'était pas du tout de son niveau. Le trouvait elle plus dangereux ?

Tom parvint à se contenir et s'empêcha de sourire durant la pâle défensive de son interlocutrice. Il était risible de la voir monter sur ses grands chevaux à la moindre remarque légèrement sexiste, de la pousser dans des retranchements dans lesquelles elle ne voulait pas aller. S'en rendrait elle compte ? Tom se demanda pourquoi ce dialogue avait pris cette tournure étrange : un échange de remarques cruelles et ridiculement puérils, alors qu'ils auraient tout aussi bien pu rentrer dans leur salle commune en discutant de leur cours du lendemain. Mais le serpentard ne se voyait nullement bavardait avec qui que ce soit, bien que l'acharnement de la jeune fille la rendait sympathique à ses yeux.

Ne faire confiance à personne ? Le dire n'était il pas une façon de lui ouvrir son coeur, de lui montrer la façon dont elle voyait les choses ? La colère, ou le mépris, l'emportait sur sa raison, et elle allait bientôt commencer à lui raconter sa vie. Tom devait agir, car il savait que les adolescentes étaient des sources de bavardes intarissables. Cependant, ce qu'elle baragouinait était intéressant. La façon dont brillaient ses yeux l'étaient encore plus. Il y avait là quelque chose de maléfique, un savoir auquel Tom n'avait pas encore eu accès. Il repensa à ce que lui avait dit sa directrice de maison, et se demanda s'il pourrait se servir d'elle pour son premier... pour son projet actuel. Peut être aspirerait il ainsi tout ce dont il avait besoin de savoir ?

Il décida de couper court à la magnifique énnonciation de la serpentard en profitant de sa question rhétorique. Il répondit sèchement, mais le velour de sa voix donna un coté mélodieux à ses mots :

Oh oui... Tu n'imagines même pas à quel point la peur a d'emprise sur le monde...

Il soupira et fit mine de s'en aller. Il ne voulait pas battre en retraite, mais ne tenait pas non plus à tourner en rond toute la nuit dans ce passage.

"C'est répètitif tout ça..."
Le regard de Shin filtra les prunelles du jeune homme qui se voulaient totalement neutre. Elle sourit, pour la première fois.
"L'ambiance est assez glauque, il serait dommage que tu ailles croire que je suis une dépressive en puissance qui assassine des gens à tout va, hein?"
Cette fois Shin éclata franchement de rire. Mais son rire n'avait toujours rien de joyeux. En réalité, certes, Shin n'était pas dépressive, mais pour la seconde partie de sa phrase, elle ne pouvait pas exactement plaider non-coupable. Son premier "meurtre", avait été celui de son grand amour. Le seul homme qu'elle ai jamais véritablement aimé. Elle était dorénavent merveilleusement imunisée contre ce faible sentiment qu'était celui de la "culpabilité". Shin n'appréçiait pas la situation. Elle ne s'était pas vraiment dévoilée, à proprement parler, dotée d'une personalité assez complexe, on ne pouvait prévoir aucune de ses réactions. Non, ce qui la dérangeait était que ce préfèt pédant aux allures de "grand mystèrieux" l'avait vu lancer ses sortilèges au concierge. Mais inutile comme il l'avait été, il n'avait rien fait pour lui éviter d'avoir à faire ça et Shin ne pouvait se permettre de se laisser prendre avec la fiole qu'elle portait sur elle. Elle se dégagea du passage secret et s'avança à pas lents dans le couloir. Regardant vivement autour d'elle, elle se retourna une dernière fois vers Tom.
"Encore une question que tu n'aimerais pas, tu comptes faire quoi, rentrer avec moi ou rester encore?"
Elle souriait, d'un sourire amusé. Il était mignon ce petit préfet qui se donnnait des allures de grand méchant.