Entre chien et loup (PV mangemorts et partisans)

Dwight avait envoyé un bon paquet de hiboux cette semaine, tous en direction de ses nouveaux "contacts", qui semblaient cependant relativement réduits à Poudlard. Sans même parler d'Haveirson. Mais le message qu'il avait à leur communiquer était important, et les partisans du seigneur des Ténèbres devaient également travailler à une meilleure cohésion de groupe, sans quoi ils n'atteindraient jamais leur but final et ultime : créer un monde sûr, heureux et parfait, où personne n'aurait plus jamais à souffrir.

Ceux qui se donnaient des rendez-vous en pleine nuit étaient des imbéciles. Le fait de partir à minuit et de rentrer à deux heures du matin augmentait les chances de se faire prendre, parce qu'on se promenait dans les couloirs de l'école des sorciers à une heure où c'était doublement illégal ; le mieux était incontestablement de se donner rendez-vous en fin de nuit, à cinq heures du matin, comme Dwight venait de le faire. À une telle heure, les préfets qui faisaient leur ronde étaient épuisés par la nuit et avaient déjà commencé à relâcher leur vigilance, et si les élèves réfractaires revenaient à l'école vers sept heures, eh bien ma foi, ils n'auraient qu'à se fondre dans la masse d'élèves prenant leur petit-déjeuner, et ne feraient rien de répréhensible.

Maintenant, il n'y avait plus qu'à espérer qu'ils viendraient, aussi nombreux que possible. En les attendant, Dwight s'assit dans un vieux fauteuil défoncé, qu'il raccommoda d'un coup de baguette, avant d'oeuvrer à tenter de rendre la pièce plus chaleureuse et accueillante pour les élèves qui arriveraient probablement endormis : une peau d'ours qu'il déploya devant la cheminée où il fit ronronner un bon feu, des vieilles tapisseries ancestrales au mur pour freiner les courants d'air, ainsi qu'un bon fût de bierraubeurre qu'il avait acheté la veille au soir.

Il attendit, un vague sourire aux lèvres, tout en sirotant pensivement un verre de vin d'ortie.

La missive, qu'il avait reçu au cours des dernières heures de la journée, ne cessait pas de l'intriguer. Et de lui revenir en tête. Inlassablement. Semblable à une promesse engageante et récréative, qu'il lui semblait attendre amèrement depuis trop longtemps.

Pour distraire son attente, Yvain avait décidé de partager quelques jeux de cartes avec ses camarades de chambre. Bon perdant, il encaissait les défaites avec un air hilare, très loin de l'implacable fonctionnement de son esprit. En participant à ces amusements, il s'attachait également l'estime de ses colocataires. Toujours utile. Et payant.

Lorsque ces derniers s'endormirent, le Serpentard veilla sur son lit tout du long de la nuit. Le regard rivé vers la porte, dans une posture feignant le sommeil, il ressemblait davantage à une sculpture d’airain alerte qu'à un sage élève bercé par l'inertie nocturne. La comparaison manqua de le faire éclater de rire.

A l'heure dite, le septième année quitta les draps de son lit, s'équipa dans le plus grand silence puis s'extirpa de la salle commune des verts et argents. D'un pas véloce, il se faufila dans les couloirs de Poudlard avec précaution, évitant ici et là quelques sentinelles exténuées par les heures de garde. Il suivit ensuite le chemin menant au passage du Saule Cogneur. Non sans mal, il s'y glissa et évita de finir aplati par l'arbre persécuteur.

Avec un sourire jovial à toute épreuve, il s'introduit dans la pièce aux atours inhabituellement conviviaux. Il le remarqua sans s'en formaliser, saluant ensuite l’initiateur de la réunion sans plus de formalité avant de se diriger vers la silhouette d'Aylin. Yvain se posa paisiblement contre le dos du fauteuil de sa complice, ses doigts venant effleurer l'épaule de cette dernière en guise de salutation.

A voix basse, il lui souffla quelques mots avec sympathie. Il cherchait à s’enquérir de son état et de son trajet, qu'il espérait vivement sans encombre. En la présence de la jeune fille, il se sentait plus fort et assuré, et elle le lui rendait diablement bien !

Peu après qu'il soit arrivé, Aylin Demestos, suivie d'Yvain Gallant firent leur entrée. Dwight leur sourit chaleureusement, et d'un coup de baguette, leur servit une chope de bierraubeurre. Pendant qu'ils attendaient que d'éventuelles autres personnes arrivent, l'Abraxans en profita pour leur demander mine de rien comment se passait leurs cours, ainsi qu'échanger diverses politesses pour détendre l'atmosphère et la rendre plus conviviale, ce tout en les observant. Il ne connaissait pas Aylin plus que ça, mais il était curieux d'en apprendre davantage sur la jeune femme, c'était certain. Quant à Yvain, il semblait plus sophistiqué que son père, mais certains traits du visage et postures étaient incontestablement similaires. Non sans un sourire amusé, il se rappela les paroles qu'avaient eues son mentor à son intention quand le sujet d'Yvain avait été abordé : "Fais-lui du mal ou trahis-le et tu mourras de mes mains." Mais il avait bien vite rassuré le père : après tout, les Gallant étaient des serviteurs particulièrement dévoués du Seigneur des Ténèbres, et aussi longtemps qu'ils le resteraient, le jeune homme se ferait un devoir de garantir la sécurité et le bien-être du fils.

ils attendirent en bavassant tranquillement de tout et de rien pendant une dizaine de minutes, puis, quand il estima qu'ils avaient perdu assez de temps à patienter pour des individus qui ne pointeraient peut-être pas même le bout de leur baguette, Dwight se leva de son fauteuil, toujours souriant et cordial.

- Bien. Encore une fois, je suis désolé de vous avoir fait venir à une heure aussi indue, mais soyez certains que si nous travaillons efficacement, très prochainement ces réunions improvisées et dans des conditions pour le moins fantasques ne seront plus qu'un vague sujet de plaisanteries entre nous. Mais vous savez ce pourquoi je vous ai convoqués, à n'en pas douter !

Les yeux étincelants, il les fixa tous deux et joignit ses deux mains, réfléchissant :

- Il y a un... non, voyons, plusieurs problèmes à cette réunion. Pouvez-vous me dire lesquels ?

Il leur sourit, amusé, bien qu'un léger pli entre ses sourcils vint contrarier la bonhommie de son visage lunaire. Apparemment, monsieur Malefoy se permettait de douter de sa loyauté envers leur Maître, mais monsieur Malefoy chicanait à venir aux séances qui Lui étaient dédiées... bien bien, il se pencherait sur ce problème plus tard. En attendant, tester les compétences d'observation de leurs sympathisants étaient une excellente façon de juger ce qu'ils valaient sur le plan stratégique.

"- Cependant si je peux me permettre, la lumière du feu de la cheminée pourrait bien compromettre cette réunion secrète en signalant notre présence."
- Une remarque tout à fait pertinente ma chère Aylin, acquiesca-t-il avec un hôchement de tête appréciateur. Toutefois... (il sortit sa baguette et, avec un mouvement souple, fit apparaître une bulle de la taille d'un souaffle où se reflétait l'image de la cabane hurlante depuis l'extérieur, apparemment vide de toute forme de vie. Il eut un léger sourire)... le Seigneur des Ténèbres tient trop à ses amis pour leur envoyer un fou qui les mettrait en danger.

Il fit quelques pas les mains croisées derrière le dos. Il devait continuer. Tant pis pour juger de leur acuité cérébrale ce soir; le message à faire passer était trop urgent. il y avait un inconvénient à convoquer des personnes à cinq heures du matin: le temps. À sept heures, Dwight devait s'assurer qu'ils rejoindraient le château en toute discrétion pour se mêler aux élèves allant prendre leur petit-déjeuner. Il n'y avait aucune minute à perdre d'ici là.

- Voici les trois problèmes majeurs de cette réunion (ce disant, il brandit son poing devant son visage, levant un nouveau doigt à chaque fois qu'il énumérait une nouvelle difficulté). Premièrement, et le plus évident: vous n'êtes que deux. Ce qui signifie que soit les autres élèves sont des pleutres, soit notre Maître est extrêmement impopulaire dans cette école. Je ne vous cacherai pas la triste vérité: il en va de même, j'en ai bien peur, à Haveirson. Nos rangs sont bien plus faibles que nos ennemis semblent le penser.

Il marqua une pause pour leur laisser le temps de digérer cette information. Il reviendrait aux solutions par la suite.

- Deuxièmement: vous êtes des Serpentard. Vous n'êtes pas idiots, et savez naturellement qu'il y a un lourd préjugé contre votre maison en fait de partisans du Lord. Cette suspicion à votre encontre vous met doublement en danger. Il nous faudra régler ce "léger" détail au plus vite.

Pensivement, il se resservit un verre de vin d'ortie, dans lequel il trempa le bout des lèvres, avant de reprendre:

- Enfin, troisième problème: vous êtes tous âgés. Des sixièmes années, m'avez-vous dit. Cela fait de vous des sorciers aguerris et talentueux, je n'ai aucun doute là-dessus, mais Dumbledore et Potter de leur côté n'ont aucun scrupule à se tourner également vers les plus jeunes, ce qui leur donne un net avantage.

Il s'assit et leur sourit paisiblement.

- Venons-en désormais aux bonnes nouvelles: notre Lord a pensé à tous ces légers contretemps, et a prévu des réponses à cela. Reprenons les problèmes point par point. En ce qui concerne votre nombre, votre âge, ou votre maison, il n'y a en réalité qu'une seule et même réponse: il faut recruter. Naturellement, il faut cacher à Potter et sa clique que nous sommes en situation difficile, mais je suis d'avis qu'il faut révéler le soutien que vous apportez à lord Voldemort. Montrez vos visages. Soyez affables, tolérants, souriants, soucieux du bien-être des autres, sans distinction de la maison ou de l'origine. Faites en sorte que votre image soit le contraire parfait de toutes les âneries détestables que peut raconter la presse sur notre Maître.

Il reprit une gorgée de vin, satisfait de constater qu'ils ne l'interrompaient pas dans son discours. Il allait de soi qu'ils étaient intelligents, et comprenaient l'importance d'en venir aux faits au plus vite, sans perdre un moment.

- Ne vous limitez surtout pas en termes de maison, nos partisans doivent venir de partout. Essayez surtout Poufsouffle, ce sont ceux contre lesquels les préjugés sont les moins forts. Ne vous limitez surtout pas aux étudiants les plus âgés. Les plus jeunes peuvent être plus prompts à la bévue je vous l'accorde, mais ils sont également beaucoup plus influençables, et ce sont dans leurs jeunes années que leurs opinions sur le monde se forment. Si vous laissez passer votre chance avec, soyez sûrs de les retrouver à se battre contre vous dans quelques années. Enfin...

Il sortit de nulle part les gros titres de la Gazette du Sorcier: "La police magique continue de rechercher activement le sorcier Méphisto Phélès, aussi connu sous l'appellation "le Sacrifié"":

- Cet homme est déjà en passe de devenir l'ennemi public numéro un. Faites en sorte qu'il le soit pour de bon. Certains élèves à Poudlard sont de nobles lignées, et quelques uns ont même vécu des perturbations dans leurs familles à cause des Moldus. Trouvez ces personnes, et montrez-leur qu'en rejoignant nos rangs, elles se protègent de cette menace. Face à cette peur ambiante, notre Maître doit apparaître comme la solution à nos problèmes, un havre de paix où nous serons tous protégés et où nous pourrons vivre en harmonie, loin des Moldus.

Tout en ayant l'air le plus détendu du monde, Yvain scrutait les moindres recoins de la vieille bâtisse, dans laquelle ils se trouvaient en cette fin de nuit. La cabane hurlante lui semblait être un bon choix, bien qu'il se méfiait de la possible mésaventure de quelques curieux en d'autres heures. En cet instant précis, tout était plutôt quiète.

Le Serpentard se frotta distraitement les mains alors que son regard glissait progressivement vers Dwight. Le rouquin étrange et innovateur, envoyé par le maître. Tout en continuant de le fixer, il accueillit avec une satisfaction ostensible la chope de bierraubeurre. Bonne idée. De quoi passer le temps en attendant quelques retardataires... Qui ne vinrent pas.

L'absence du fils Malefoy, le bien aimé – cette seule dénomination lui tira un sourire moqueur – était un détail flagrant qu'il nota dans un coin de son esprit. Il se concentra ensuite sur les propos de l'initiateur de la réunion. Des problèmes ? Plusieurs évidences lui caressèrent l'esprit. Leur nombre, faible et insipide, contrairement aux malheureux partisans de Potter. La défection de quelques grands noms. Le marasme des lieux, en écho avec l'actuel parti soutenant Voldemort.

Toutefois, le jeune homme laissa sa compagne de toujours prendre la parole et exprimer sa perception des choses. Elle apportait une idée que lui-même n'avait pas envisagé, et il remercia ses aïeux d'avoir croisé la route d'une fille si vive d'esprit... Et plus observatrice que lui. Un vague sentiment d'affection le berça comme une antique mélopée, avenante et rassurante, qui le rendait plus doux qu'a l'accoutumée. Aylin parvenait à faire résonner ce genre de choses en lui. Comme Margaret.

Avant qu'il ne puisse effacer cette dernière faiblesse de ses pensées, Dwight reprit la parole et avança le plan qu'ils allaient devoir suivre. Silencieux et penché en avant, au-dessus de son amie, Yvain fronça légèrement les sourcils en écoutant les directives. Recruter. Autant que possible. L'idée lui plaisait.

Par contre, se dévoiler à la face de tous comme partisan... Il bloqua et cligna des yeux. Cela mettrait certainement son père en danger. Et la famille de Aylin aussi. Les idées étaient bonnes, mais pas pour eux, Serpentards si facilement attaquables. Ils devaient s'appuyer sur leur mission principale : corrompre des élèves à leur cause. Se servir d'eux comme propagandistes bienheureux et chaleureux. Il se trouvait bien plus doué à tirer les ficelles dans l'ombre.

A voir comment mettre ceci en place avec sa partenaire de magie noire. Appâter quelques Sang-Purs terrifiés par ladite nouvelle menace, séduire de jeunes effarouchées sensibles au bien commun... Il jubilait à ces quelques idées.

Un petit rire dans la voix, Yvain s'adressa à Dwight. « Ce Phélès tombe vraiment bien pour nous. Ce sera plus facile d'appréhender de nouveaux partisans... » Ils allaient pouvoir enfin s'amuser.

Une chance ? Autant la saisir.

« Ce Phélès tombe vraiment bien pour nous. Ce sera plus facile d'appréhender de nouveaux partisans... »
- Je ne te le fais pas dire mon cher Yvain, acquiesça-t-il avec un sourire appréciateur à son égard. C'est une chance si belle que nous ne pouvons pas nous permettre de la laisser passer.

Il se frotta les paupières de son pouce et index, pensivement, puis rouvrit les yeux tandis que ses yeux bleu guède allaient de l'un à l'autre dans une expression indéchiffrable.

- La communauté magique nous critique et se méfie de nous. Compréhensible, puisqu'en avançant masqués, nous nous refusons au partage de nos émotions. Qui pourrait faire confiance à une absence de chair, de sourire? Pour nous rejoindre, les sorciers doivent se reconnaître en nous, voir un idéal à suivre. Je ne vous cache pas qu'il se pourrait que je vous rappelle très vite. Au prochain enlèvement commis par le Sacrifié, nous devons être les premiers à agir; ainsi, nous prouverons à notre monde que nous ne nous contentons pas de paroles vaines leur assurant protection et sécurité. Nous le faisons.

Il sourit.

- Que dites-vous de tout cela?