Voir les vagues sous la neige

24/02/2007

HRP ::

14h59.

Clemens était arrivé un peu en avance sur la digue, il ne voulait pas faire attendre Luuna. Depuis presque dix minutes déjà, il était immobile face à la mer, le regard plongé dans les vagues. Ils étaient chanceux. Bien que le mois de décembre soit déjà bien avancé, la météo était relativement clémente. La neige, tombée sans discontinuer toute la matinée s’était enfin arrêtée et le vent était calme. Du moins, si on tenait compte du fait que leur rendez-vous était fixé sur le front de mer. L’étudiant se réjouissait de revoir son amie de longue date, avec qui il n’avait pas passé un moment en tête à tête depuis trop longtemps. Mais en même temps, il appréhendait la rencontre. Sa dernière conversation avec Luuna avait remué de vieux souvenirs et réveillé une avalanche de sentiments qu’il avait cru disparus. Il avait eu besoin de plusieurs semaines pour comprendre qu’ils l’étaient effectivement et que l’émotion ressentie face à la jeune femme n’avait été qu’un écho de son adolescence.

Maintenant, il espérait que la situation serait pareille pour elle.

Bien enveloppé dans son trench coat et son écharpe — et sans avoir oublié ses gants, cette fois — il essayait de faire le tri dans sa tête. Malgré l’amitié et la confiance qui les liaient, Clemens ne pouvait pas prétendre n’avoir aucun secret pour sa camarade. Il appréciait sa douceur et sa spontanéité, mais il y avait tant de détails sur lui-même qu’il n’oserait pas lui confier. Même en ce qui concernait son voyage, il n’arrivait toujours pas à déterminer ce qu’il lui raconterait si elle en arrivait à l’interroger sur son absence. Autant qu’il puisse s’en souvenir, il n’avait même jamais évoqué sa famille en sa présence. C’était typique de ses relations du temps de Poudlard, pour qui il s’était construit un personnage sans passé, presque sans existence en dehors de l’école. Néanmoins, il se lassait de ce mensonge par omission… Tanpis. Il improviserait.

Déjà, une silhouette s’approchait de lui, descendant le sentier qui menait du centre d’Avalon à la digue. Soudainement souriant et l’esprit léger, l’Allemand l’observa un instant sans bouger, avant de lever la main pour la saluer d’un signe. A quoi bon se prendre tant la tête ? Il ne respectait jamais ses propres plans, de toute façon. Passer un bon moment avec une amie, c’était tout ce qui lui importait.

28/05/2005

Il était bientôt 15h00. De bon matin Miss Greenleaf c'était levée de bonne heure plutôt qu'à trainasser dans le fond de son lit. Enfin... levée vers 10h30 ce n'était pas non plus l'Aurore... A quoi bon d'avoir un week end si on en profitait pas un minimum ? Ok ! Elle avait trainassé dans son lit comme tout le monde ! Lanalia sa colocataire, quant à elle, dormait encore. C'était sans un bruit que la jeune fille fila hors de la chambre pour prendre son petit déjeuner. Ainsi fait, elle prit le temps de rejoindre les écuries et de faire une petite promenade dans les bois pendant une bonne heure. Depuis quelques temps elle prenait plaisir à monter à cheval, à défaut de s'entrainer avec ses coéquipiers de Quidditch, déjà presque tous absents pour cause de préparation des fêtes de Noël.

De retour de sa randonnée, elle se dépêcha de rejoindre le réfectoire et Lanalia pour déjeuner. 14H30 arriva vite. Dans une énergie insoupçonnée elle se précipita dans sa chambre pour se changer et attraper veste, écharpe et sac à main. En deux trois mouvements, elle sortit d'Haveirson et entama le sentier pour rejoindre le bord de mer. Le vent tomba peu à peu, mais un air frais et étonnement sec étaient bien présent. La Sinistros enfouit d'avantage son visage dans son écharpe en cachemire terriblement douce, les mains cachaient dans les fond de ses poches de sa veste en peau si douillette, rien de mieux!

Au bout de quelques minutes à peine, elle reconnut au loin son vieil ami. Son cœur se mit à palpiter précipitamment. Pour quelle raison ? Elle était ravie de le revoir, cela faisait un bon mois qu'ils ne s'étaient pas revu, mais pour elle s'était comme s'ils ne s'étaient pas vu depuis une éternité! Luuna n'avait osé l'écrire et elle ignorait totalement où il était parti... il avait prétexté un voyage urgent, sans pour autant s'étaler sur le sujet. Elle n'avait pas insisté, elle estimait que chacun avait le droit à son jardin secret.

Quelques mètres le séparaient de lui maintenant. Clemens se retourna et lui adressa un tendre sourire. Son cœur loupa une palpitation, et un sourire franc s'afficha sur le doux visage de Luuna. Le froid avait déjà rougit ses joues, elle n'avait pas à se justifier. Et se justifier de quoi d'ailleurs ?

« Clemens... » dit elle doucement tout en continuant son approche.

Elle enfuit de nouveau dans son écharpe son petit nez, comme gênée de le voir de si prés. Plus que deux pas les séparaient, Luuna arriva enfin à sa hauteur. Elle sortit ses mains de ses poches pour empoigner ses bras, se hissa sur la pointe des pieds et l'embrassa sur la joue. Le contact fut doux mais pas trop long. La jeune femme se laissa retomber sur le sol enneigé sur ses deux pieds et lui adressa son plus beau sourire, franc et lumineux. Elle tenait toujours ses bras, comme pour s'assurer qu'il était bien là, devant elle.

« J'attendais ton retour avec impatience tu sais... » dit elle simplement.

Luuna ne le quittait pas des yeux. Elle ne savait pas quoi dire d'autre. Elle était ravie d'être face à lui et à la fois surexcitée, comme une enfant. En même temps elle n'avait pas énormément de nouveautés dans sa vie à lui raconter, néanmoins elle ne savait pas par quel bout commencer. Devait elle lui demander pourquoi il était parti si longuement ? Serait ce indélicat ? Une vilaine curiosité ? Autant lui laisser le "plaisir" de lui raconter par lui même... Le silence s'installa, elle attendait une réaction de sa part, ne brusquons pas leurs retrouvailles.

24/02/2007

Comme il s’en était douté, cette silhouette qui descendait du village était bel et bien Luuna. La jeune femme apparaissait aussi sympathique que d’habitude, les joues rosies par le froid et les yeux brillants, elle affichait cette mine qui donnait simplement envie d’être ami avec elle. Le sourire de Clemens ne fit que s’élargir. La voir le mettait invariablement de bonne humeur. Le salut le surprit un peu, mais il ne fit rien pour la repousser. Même si ils étaient amis depuis de longues années, ils avaient toujours du s’interdire toute forme de proximité et d’affection lorsqu’ils étaient encore à Poudlard. Maintenant qu’ils se retrouvaient à l’académie, ils apprenaient tous deux comment se comporter spontanément avec un ami proche. C’était certes paradoxal, mais l’Allemand ne pouvait pas dire que ça le dérangeait. Au contraire, il préférait clairement cette façon de faire.

“Bonjour Luuna ”

L’étudiant se pencha un peu et serra son amie contre lui, comme il était normal de le faire pour un ami, dans sa culture natale. Il était content de la revoir après tant de temps, même si cela signifiait également qu’ils devraient encore une fois se remettre au diapason l’un de l’autre. Cependant, il ne se serait pas douté que Luuna avait été tellement impatiente de le retrouver. Après tout, aucun des deux n’avait fait un effort particulier pour renouer des liens plus étroits après leurs retrouvailles. Enfin… Il avait quitté Haveirson peu après la fête d’anniversaire de son amie. Ceci expliquait peut-être cela.

Toujours souriant, Clemens la prit légèrement par le bras pour l’entraîner avec lui, alors qu’il entamait la promenade le long de la digue.

“Je suis désolé de t’avoir manqué, j’aurais du te prévenir, toi aussi. Je suis parti très vite et n’ait laissé qu’une note à Rowan…”

Dans ses courriers à Isolde et Rowan, il leur avait certes demandé de tenir leurs amis proches au courant de ses pérégrinations. Luuna avait sans doute perçu quelques informations au travers des rumeurs ou de conversations perdues au milieu d’un couloir. Néanmoins, personne n’avait semblé juger digne de la rassurer. Clemens n’avait pas jugé necessaire de le préciser dans ses lettres, mais de toute évidence, aucun de ses deux meilleurs amis ne les pensaient assez proches. Et ce n’était pas entièrement faux. Certains détails évoqués par écrit feraient mieux d’y rester, d’autant que Luuna ne savait absolument rien de sa famille. Raconter son voyage lui semblait soudainement bien difficile. Par conséquent, il décida de démarrer sur un sujet plus léger.

“ Comment vas-tu ? Les cours ont l’air de te prendre beaucoup de temps, j’imagine que tu aimes toujours autant ton cursus qu’en début d’année ?”

Même en marchant, il ne pouvait s’empêcher de détourner constamment le regard vers elle. Ses grands yeux avaient le mérite de chasser ses doutes et de le rassénérer, de lui donner l’impression qu’ils discutaient en toute confiance. Mais à chaque fois que son regard se détournait à nouvau vers la mer, toutes les implications de chaque sujet de conversation lui revenait en mémoire. Il espérait que son amie se lancerait dans une explication passionnée de ce qu’elle avait appris ces derniers mois, afin de lui donner un peu plus de temps. Et puis… Elle travaillait avec des dragons tout de même ! Clemens était d’un naturel trop curieux pour devoir se forcer à lui dire “Raconte!”.

28/05/2005

Luuna retomba sur ses pieds tout sourire. Clemens était tout aussi rayonnant qu’elle et la serra contre lui, affectueux comme il avait tendance à l’être. Malgré leur timidité, ils tentaient depuis leurs retrouvailles d’être un peu plus proches et naturels qu’à Poudlard. On ne pouvait pas dire qu’à Poudlard ils n’étaient pas proches, bien au contraire ils étaient assez complices mais avec une certaine retenue… l’un ou l’autre n’était jamais libre et les jalousies de leur moitié n’aidaient guère à leur « rapprochement ». Mais depuis septembre, Luuna s’était étonnée à vouloir à tout prix retrouver sa complicité d’antan avec Clemens. Voir peut être plus, mais ça elle ne se l’avouait que dans ses rêves… elle le pensait mais n’osé l’imaginer… de la retenue, de la timidité, et peut être même le fait qu’un échec de plus lui faisait peur.

Clemens la serra donc contre elle et la salua avec la même chaleur qu’elle. Son sourire toujours affiché, il l’entraina avec elle par le bras pour faire quelques pas près du bord de mer. Sans un mot elle le suivit et l’écouta avec attention. Apparemment, son départ a été précipité. Tout juste son ami et colloc’ était au courant. Luuna ne pouvait pas lui en vouloir. Bien au contraire. Il lui était arrivé la même chose une fois ou deux… elle ignorait les raisons de son départ, mais elle pouvait comprendre que certes urgences n’attendaient pas ! Elle haussa des épaules en guise de réponse.

« Non je comprends. J’ai tenté de t’envoyer un hibou mais il m’est revenu sans réponse. J’espérai juste qu’il ne t’arriverait rien. Et comme Rowan ne m’a rien dit, j’ai supposé que c’était moins grave que je pouvais l’imaginer. Alors j’ai attendu ton retour avec patience. » finit elle avec un petit sourire.

Il était vrai qu’elle avait tenté de lui envoyer un courrier, pour être certaine que tout allait bien pour lui. Mais le retour de son hibou avec sa lettre, elle comprit qu’il devait être en « voyage » ou en expédition forcé. Elle n’avait pas insisté auprès de Rowan ou d’Isolde, pensant que c’était peut être déplacé de sa part de leur demander… D’ailleurs Clemens changea de sujet, il la questionna sur ses cours, si elle se portait bien. Luuna lui adressa un regard entendu en secouant doucement la tête.

« Oui. Je n’ai pas choisis le cursus le plus facile, je dois bien l’avouer. Mais j’essaye de m’accrocher, ça me passionne toujours autant. On verra bien où cela me mène, au pire je bifurquerai sur une autre voie si nécessaire… Et toi ? Tu as déjà entamé ton stage à Poudlard, avec McGonagall ? Avant ton voyage ? Ou tu commences tout juste ? »

Luuna resserra son étreinte, car elle manqua de glisser sur une petite plaque de glace. Elle se redressa genre l’air de rien et observa l’horizon. Le temps et la plage étaient magnifiques ! Cette étendue de neige ne faisait qu’un avec l’océan. Un moment de sérénité dans ce monde de brute. Une belle pause à ses longues journées enfermées à étudier comme une forcenée. Surtout en si belle compagnie, elle ne pouvait se le cacher ni le nier ! Par Merlin s’il savait… Luuna tenta tant bien que mal à rester à l’aise et le plus naturelle possible, mais elle ne pouvait pas se jurer qu’elle tiendrait bien longtemps…

24/02/2007

Ce n’était pas étonnant que la lettre ne lui soit pas arrivée. Pendant un moment, ses propres parents n’avaient aucune idée de où il se trouvait… Alors un hibou aurait été très chanceux de tomber sur lui par hasard. Clemens songea qu’après sa première semaine au Danemark, il avait même craint de s’être perdu lui-même, tant il avait perdu tout lien avec sa réalité habituelle et ce qu’il poursuivait exactement. Involontairement, il laissa échapper un sourire qu’il contredit immédiatement avec un nouveau sourire. Il ne voulait pas inquiéter Luuna.

“Oui, ce n’était qu’un voyage un peu urgent, mais rien de grave. J’ai gardé contact avec Rowan et Isolde quand je pouvais mettre la main sur un hibou. Tu aurais pu aller leur demander des nouvelles, ils auraient au moins pu te dire que j’allais bien et quand j’allais rentrer.”

Il exerça une pression amicale sur son bras. Au fond, il savait que ça n’aurait rien changé, car aucun de ses deux amis proches n’auraient révelé le fond de ses lettres sans son autorisation… et si il lui était arrivé quelque chose de grave, alors ils se seraient spontanément chargés de mettre Luuna au courant. Néanmoins, il ne pouvait s’empêcher de se sentir un peu mal de l’avoir laissée dans le silence et l’incertitude. Elle s’était inquiétée pour lui, et ça avait été injuste de sa part de ne pas y penser. Au moins, il devrait pouvoir se rattraper un peu avec cette balade qu’ils s’étaient promis depuis longtemps déjà. Comment souvent avec son amie, le silence ne dura pas longtemps. Elle ne se fit pas prier pour parler de ses études et malgré la fatigue qui perçait un peu dans sa voix, il ne put manquer sa détermination.

“La passion, c’est tout ce dont on a besoin pour réussir ! On sent moins l’épuisement et on supporte mieux les épreuves. Je suis sur que tu feras une soigneuse de dragons fantastique.”

Le Sinistros ne connaissait pas du tout cette voie, ni les qualités exactes qu’elle nécessitait. Cependant, il avait joué au Quidditch contre Luuna pendant des années et malgré toute la superficialité qu’on prêtait à ce sport, il avait appris que son adrénaline et sa difficulté en faisait un excellent miroir pour juger des caractères. Si la jeune femme était aussi déterminée qu’elle voulait bien le faire paraître, il ne doutait pas qu’elle réussirait dans son métier.

“Oui, j’ai eu l’occasion d’enseigner sous sa coupe quelques fois avant de partir. Elle m’a même donné le feu vert pour une espèce d’expériences. Ca s’appelait les ateliers de métamorphose, et le but était d’amener les élèves à percevoir la métamorphose dans leur quotidien plutôt que comme une matière ennuyante et difficile… Bon, ça n’a pas été un grand succès, je pense que je leur en ai demandé trop dès le début. Mais j’ai animé un cours de rattrapage où j’ai eu quelques élèves très motivées, le bilan n’est donc pas si mauvais.”

Son visage s’était illuminé alors qu’il parlait. Les ateliers n’étaient pas un échec complet, et grâce aux retours de Minerva et les échanges de courriers avec Anna, il avait pu cerner les raisons de ce résultat en demi-teinte. Clemens n’avait pas d’autre idée révolutionnaire pour la fin du semestre, mais assister son ancienne professeur pendant les classes avait tout de même quelque chose d’enthousiasmant.

“J’aime mon cursus évidemment, et Haveirson est très propice aux recherches personnelles. Je dois avouer que je n’ai pas l’occasion de m’ennuyer, ce qui est déjà un exploit en soi. D’ailleurs, Megan et Isolde font elles-aussi un stage à Poudlard, je ne sais pas si tu le savais ? C’est sympa de se retrouver avec des amis au château, mais en étant soudainement plus vieux et avec de l’autorité. Tu imagines si à 17 ans, on avait pu aller boire un coup à Pré-Au-Lard après le dernier cours de la journée ?”

Il rit pour lui-même. A l’époque de Poudlard déjà, il était connu pour être un élève exigeant aux humeurs changeantes et dont l’intérêt pouvait être très limité dès que l’apprentissage se détachait du challenge.