Retrouvailles... inattendues (PV L. Waldorf)

Dimanche. Je m'étais levé de très bonne heure ce matin. J'avais décidé de passer ma matinée à Pré-au-Lard, un petit village que j'avais déjà visité du temps de Poudlard mais dans lequel je n'étais que très rarement retourné. Pourtant, j'avais gardé en mémoire le célèbre bar des trois balais. Beaucoup de jeunes gens qui étaient étudiants à Poudlard et qui participaient à la sortie dans ce village se promettaient de revenir dès que possible afin de goûter une bierraubeurre. Bien sûr, je n'avais pas attendu aujourd'hui pour venir déguster une bière magique mais je devais avouer que j'étais tombé sous le charme de ce bar. Mais depuis ma sortie de Pourdlard, je n'étais que très peu sorti.

J'avais donc décidé de me préparer à sortir, prenant une douche bien chaude et m'habillant en conséquence. Le temps était particulièrement triste, le ciel gris et bas, donnant l'impression que la pluie pouvait tomber à tout moment. De plus, un vent froid excessivement désagréable soufflait sur la région. Personnellement le froid ne me gênait pas, bien au contraire. Je préférais cela à une forte chaleur qui nous rendait poisseux et faisait que certaines personnes sentaient vraiment mauvais. Une fois prêt, je me rendis rapidement à Pré-au-Lard et j'entrais dans le petiot bar. Malgré l'heure assez matinale, quelques personnes étaient déjà présentes. Des habitués, certainement. Et pourquoi me rendre dans un bar dès le matin me demanderez-vous... Je n'étais pourtant pas un pilier de bar, et encore moins un alcoolique si dépendant à ma bierraubeurre qu'il m'en fallait une au réveil. Non. Je voulais juste me retrouver dans un endroit chaleureux et assez atypique afin d'écrire quelques piges. Eh oui, quoi de mieux qu'un bar pour suivre les actualités. Les gens parlaient de tout et de rien, et pour qui savait garder une oreille attentive, une table bien située pour être plus utile qu'un bureau. Je sortis donc un petit carnet ainsi qu'une plume d'oie. Je n'étais pas un amateur de la plume à papotes, et il fallait avouer que je souhaitais rester inaperçu.

Je commandais simplement une boisson chaude et une part de gâteau à la citrouille, et j'attrapais une gazette, attendant qu'une histoire digne de mon intérêt se présente à moi. Le nez dans ma lecture, je ne vis pas la porte du bar s'ouvrir laissant apparaître une jeune femme que je ne connaissais que trop bien et que je ne m'attendais certainement pas à revoir un jour...

Dormir chez ma mère m'avait fait le plus grand bien ! Maïa avait d'ailleurs insisté pour dormir avec moi et je n'avais su lui dire non. Cela faisait cinq jours qu'elle ne me voyait que deux heures par jour et elle avait besoin d'être rassurée. J'avais donc passé une superbe nuit, ma fille blottie dans mes bras. Ce matin, en me réveillant, je laissais la petite au lit, descendant dire bonjour à ma mère. Nous parlâmes pendant une bonne heure et je décidais d'aller faire un tour à pré-au-lard en entendant le réveil de Maïa. Cela faisait des années que je n'avais pas bu leur jus de fruits vitaminés et je me souvenais que j'en étais folle à l'époque de Poudlard.

J'enfilais donc un jean de couleur noir et un top émeraude, que je réhaussais d'une veste grise. Je mis des petites bottines et je partis sous le froid d'octobre. Finalement, un bon chocolat chaud me fera du bien aussi. Nous ne sommes pas encore en hiver mais je sens tout de même le vent frais me caresser la joue.

C'est frigorifiée que je passais la porte des trois balais. Le serveur était toujours le même et c'est avec un grand sourire que je m'avançais vers lui, commandant:

"Bonjour ! Vous faites encore le jus spécial trois balais sans alcool ? Et un bon cacao aux trois baies s'il vous plait !"

Je n'avais pas du tout vu qu'à quelques mètres de moi se trouvait le père de mon enfant ...

J'étais donc plongé dans la Gazette... Si, vous savez, ce journal qui se dit sérieux alors que la plupart des articles ne sont que racoleurs, avec des gros titres attirants mais des contenus ennuyeux à mourir... Mais que voulez-vous. Aujourd'hui, le sensationnel et les peoples, il n'y a que ça de vrai, n'est-ce pas ? Je trouvais cela vraiment dommage que la presse d'aujourd'hui s'intéresse davantage à ses ventes plutôt qu'à la qualité de sa ligne éditoriale, mais il fallait vivre avec son temps et les gens semblaient s'intéresser bien plus à des choses futiles qu'au véritables problèmes de la société et du monde magique en général... Cela me désespérait quelque peu...

Puis soudain alors que je lisais la rubrique sport qui s'attardait sur le début de la saison de quidditch, je fus tiré de ma lecture par une voix. Il ne s'agissait pas de quelque chose qui avait attisé ma curiosité de journaliste, une information intéressante que j'aurais su glaner au détour d'une discussion à laquelle je ne participais même pas. Non, c'était simplement une voix, cette voix, qui m'avait subitement interloqué. Une voix douce, pleine de gentillesse. Une voix que je ne connaissais que trop bien. Mais une voix que je n'avais plus entendu depuis des années. Cette voix, j'étais plus qu'étonné de l'entendre à nouveau, surtout ici. Mais je ne pensais pas pouvoir me tromper. Et puis, la commande ne pouvait être que la sienne. Outre la violette, je savais qu'elle raffolait de la spécialité maison en ce qui concernait les boissons non alcoolisées.

Je me décidais donc à relever la tête, non sans une certaine appréhension... Et là, ce fut la confirmation. Lyra... Mademoiselle Lyra Waldorf se tenait là, près du bar, à quelques pas de moi. Je n'en revenais pas. Celle qui m'avait laissé seul il y a bien longtemps maintenant attendait sa commande comme si de rien n'était. Elle ne m'avait sûrement pas vu... Ou peut-être préférait-elle m'éviter ? Je devais bien avouer que j'étais très perplexe quant à sa présence ici. Enfin, par "ici", je n'entend pas aux trois balais, mais ici en Angleterre. La rumeur la disait partie à Beaubâton. Si cela était vrai ? Je l'ignorais. Comme aurais-je pu le savoir ? J'en ai pourtant envoyé des hiboux, mais jamais un seul retour. Et puis, c'était tout-de-même elle qui était partie du jour au lendemain, sans un mot, sans une explication... Alors, effectivement, en cet instant, je ne savais pas vraiment ce que j'étais censé faire.

Puisque c'était elle qui était partie, je décidais que c'était à elle de revenir si elle le voulait. Mais il fallait pour cela que je lui fasse savoir que j'étais là. J'osais effectivement croire qu'en entrant dans le bar, elle ne m'avait simplement pas vu. La connaissant, et si elle n'avait pas changée, si elle ne voulait pas me croiser mais qu'elle m'avait vu, elle serait simplement ressortie rapidement du bar, sans se montrer. Bref, j'avais mille questions qui me traversaient l'esprit. Vous vous doutez bien de quels genres de questions je veux parler. Et puis, je ne savais même pas si j'étais content de la voir. J'avais eu le coeur en miettes et j'avais eu tellement de mal à me remettre de son départ... Mais ce qui était certain, c'était qu'elle était toujours aussi belle...

J'appelais discrètement le serveur. Arrivé face à moi, je lui demandais de mettre la note de la jeune femme sur mon compte. Il ne me demanda même pas de qui je parlais car il s'agissait en vérité du même serveur qui travaillait ici alors que nous étions à Poudlard et il nous avait donc régulièrement servit. Je m'étonnais même qu'il n'ait pas signalé ma présence à miss Waldorf...

Je n'avais plus qu'à attendre qu'il lui annonce que je prenais le paiement à mon compte et qu'ainsi, elle cherche à savoir qui se permettait un tel geste. A moins que, cette fois, le serveur lui indique carrément ma présence. Je fis mine de reprendre ma lecture en attendant sa réaction...

J'avais hâte de retrouver les goûts de mon enfance ... Je me souvenais être venu maintes fois ici, à l'époque de Poudlard. Isolde, Clemens ... Jan aussi ... Oui, nous avions vraiment vécu de bons moments dans ce bar où nous n'avions pas le droit de prendre des boissons alcoolisés, mais où certains essayaient toujours de tromper le barman. A ces souvenirs, je ne pus m'empêcher de sourire, alors que j'attendais ma commande. J'avais pris place au bar et je m'étais assise sur le tabouret-haut, attrapant au passage une gazette du sorcier. Je n'aimais pas beaucoup ce tissu de mensonge, bien plus adepte du chicaneur mais je ne le voyais pas sur le bar. Je tournais les pages, restant indécise devant certains scoops qui soit n'en étaient pas, soit semblaient vraiment ... faux.

Lorsque le barman revint avec ma commande, je sortis ma bourse afin de régler les frais. Je fus étonnée lorsqu'il me répondit que c'était offert par un vieil ami. Je crus d'abord qu'il s'agissait de lui mais il me fit un signe de la tête dans la direction d'un homme brun. Je me penchais légèrement, pour observer ladite personne ... NOn ... Etait-ce possible ? Le hasard ? La magie ... Que pouvais-je faire ? Je n'allais pas l'ignorer. Savait-il quelque chose ? J'avais voulu lui écrire mais ma tante interceptait toutes mes lettres, je ne l'avais appris que trop tard ... Je posais donc nerveusement ma gazette, et, d'un pas peu assuré, mes consommations à la main, je m'approchais de Jan.

"Jan ?"

Je savais bien que c'était lui ...

Je ne pouvais m'empêcher de garder un oeil sur la jeune femme, attendant avec beaucoup d'appréhension sa réaction lorsqu'elle s'apercevrait que c'était moi qui payais ses consommations. Etrangement, je n'osais l'affronter directement et je préférais faire semblant de garder le nez dans mon journal plutôt que d'aller la voir. En cet instant, je devais bien avouer que je m'étonnais moi-même car je n'étais pas du genre à me défiler habituellement. Au contraire, j'avais même cette fâcheuse tendance à me mettre dans des situations délicates car je fonçais tête la première puis réfléchissais après coup, même si il était vrai que je m'étais assagi...

Je constatais donc que le serveur indiqua à Lyra que j'étais le gentlemen payeur puisqu'il fit un mouvement de tête afin de me désigner. Je ne levais pas le nez du torchon et attendais qu'elle vienne vers moi, me demandant si elle le ferait, bien que je n'en doutais pas. J'avais bien remarqué sa surprise en me voyant et qu'elle était fort mal à l'aise en s'approchant, elle qui était pourtant toujours si sûre d'elle. Lorsqu'elle fut assez proche de moi, je l'entendis prononcer mon prénom... Sous forme de question, comme pour s'assurer que c'était vraiment moi. Je relevais donc doucement le nez vers la belle, posant la gazette sur la table.

Pour ma part je n'étais plus mal à l'aise à ce moment là... Non, je ressentais plutôt une certaine colère depuis que je l'avais entendu prononcer mon prénom de cette façon. Elle semblait presque étonnée de me voir. Mais que devrais-je dire ? Etait-ce moi qui était parti sans un mot ? Etait-ce moi qui n'avait plus donné signe de vie à l'homme que je disais aimer ? Mais la colère resta intérieure. J'osais croire qu'elle aurait une bonne excuse à me donner. Le plus calmement du monde, je déclarais donc, en la regardant dans les yeux.

- Bonjour Lyra...

Puis, lui désignant la chaise qui me faisait face, j'ajoutais...

- La place est libre si tu n'as pas autre chose à faire.

J'étais à la fois le plus heureux des hommes de la retrouver, et pourtant, je ressentais tant de déception. Finalement, ce n'était pas des excuses que j'attendais. Je n'en avais que faire. Non, j'attendais surtout une explication. Me la donnerait-elle ? Et l'accepterais-je ? Là étaient les vraies questions... J'imaginais miss Waldorf bien assez intelligente pour imaginer mon état...

- Je ne m'attendais pas à te revoir un jour...

Je fis place nette devant moi, poussant mes affaires, le journal ainsi que la tasse vidée de son contenu sur le côté et repoussant la part de gâteau qui ne me faisait vraiment plus envie vers le milieu de la table.

Imaginais-je que le jeune homme serait là à mon retour ? A vrai dire, je l'ignorais totalement. Notre relation avait été très fusionnelle jusqu'à notre 7ème année. Lorsque j'étais tombée enceinte, tout avait basculé, et nous avions été séparés à notre insu. Mon père voulait que j'avorte, ma mère était contre et voulait que j'accouche sous X et je fus envoyée en France, où je finissais mes études à Beaubâtons, enceinte jusqu'aux yeux. J'avais réussi à m'enfuir avec ma fille, jusqu'en Autriche, dans un endroit conseillé par ma meilleure amie. Ma tante avait cru pouvoir me cacher qu'elle interceptait mes lettres. Je l'avais hélas découvert trop tard, et un an après, je n'osais pas renvoyer de nouveau d'hiboux au jeune homme, persuadé que ce dernier m'avait oublié.

Mais il était là ... Et je ne pouvais faire comme si je ne l'avais pas vu. De toute façon, je n'en avais pas l'intention. N'avais-je pas rêvé de ce moment durant ces quatre ans ? Si ... Cela ne fait aucun doute. Mais le temps avait passé et avec ça, je m'étais renfermée, me rendant compte que la plupart des hommes était des salops. Mais Jan n'était pas de ceux-là ... J'étais donc allée vers lui et je m'installais en face, alors qu'il me le proposais. J'étais tendue ... Mais on ne pouvait m'en vouloir.

"A vrai dire, je ne pensais pas revenir non plus ..."

J'avais énormément souffert de notre séparation et j'avais honte, même si tout cela n'était pas de ma faute. Mon père m'avait rapidement envoyé en France, durant les vacances de Jan.

"La mort de mon père m'a permis de revenir ici ... Je suis contente de te revoir Jan, malgré ce que tu peux penser."

La tension était palpable, et j'avais du mal à regarder le jeune homme dans les yeux.

La jeune femme s'était donc avancée vers moi. Cela m'avait quelque peu rassuré. Je la sentais particulièrement tendue, mais au moins, elle ne m'avait pas évité. Cela m'aurait beaucoup étonné de Lyra mais qui sait ? Peut-être que les gens changent avec le temps... J'étais de ceux qui pensaient que non, car le naturel revient toujours mais je n'en avais pas la certitude. Après tout, j'ignorais ce qu'elle avait vécu durant sa longue absence.

Tandis que la demoiselle s'installait face à moi, sur la chaise vide que je lui avait présenté, elle ne tarda pas à me répondre. Elle ne pensais donc pas revenir. Voilà qui était plutôt étrange comme réponse. Son retour était-il désiré ? Je n'allait pas tarder à le savoir puisqu'elle ajouta rapidement que sa présence ici était due au décès de son père. Ou plutôt que la mort de son père lui avait permis de revenir. Je m'étonnais et cela devait se lire sur mon visage... Son père n'était-il pourtant pas fier que sa fille sorte avec "un jeune homme de bonne famille" comme il aimait à le répéter, d'après ce que m'avait dit Lyra ? Etait-ce lui qui avait précipité son départ ? Et si oui, pourquoi ? J'imaginais qu'il avait du trouver un meilleur travail de l'autre côté de la Manche...

Elle me signala aussi qu'elle était heureuse de me revoir malgré ce que je pouvais penser. Elle n'avait pourtant pas le pouvoir de légilimencie. Comment pouvait-elle prétendre savoir ce que j'imaginais. D'autant que cela était totalement faux, et c'était bien ce que j'allais lui expliquer...

- Tu sais, je ne pense rien là... J'ai tant de questions en tête, que je préfère ne rien imaginer... J'ai eu bien assez de temps pour m'imaginer mille et une histoires...

Oh non, je ne voulais pas la culpabiliser. Au vu de l'histoire que nous avions vécu, j'avais osé croire que son départ avait été forcé. Mais ce que je ne comprenais pas, c'était surtout pourquoi elle ne m'avait jamais donné de nouvelles. Pourquoi avoir couper les ponts ainsi ? J'aurais pu descendre en France, et elle revenir de temps en temps... Et même pas un hibou ! Pas une réponse à tous ceux que je lui avais fait parvenir... Je remarquais vite que la jeune femme fuyait mon regard, alors que de mon côté, je ne pouvais m'empêcher de la fixer. Il fallait que je me calme. Elle connaissait mon tempérament, mais elle savait aussi que l'attrister ou la décevoir étaient bien les derniers de mes souhaits. C'est avec un regard qui se fit plus tendre que je lui annonçais...

- Je suis désolé pour ton père... Et tu te trompes. Je suis heureux de te voir...

Oui, en plus, elle n'avait pas changé. Bien sûr, elle était bien plus femme aujourd'hui, mais elle avait gardé ce petit visage qui me faisait craqué, et cette douceur... Je ne voulais pas non plus l'accabler avec mes questions. Je savais garder beaucoup de choses pour moi. Pour certains, c'était un défaut, pour d'autres, une qualité. Ce qui était certain, c'était que cela permettait d'éviter certaines tensions inutiles. Et je sentais la demoiselle bien assez stressée pour ne pas, en plus, en rajouter. Plutôt que d'évoquer le passé, je préférais donc parler du futur. Elle aurait bien le temps de s'expliquer plus tard, si elle en avait envie, et surtout, si elle comptait rester.

- Et aujourd'hui alors... Qu'est-ce que tu deviens ? Toujours passionnée par les livres ?