Charybde, Scylla et Poêles à Frire [Premier post Anna]

Il était devenu rare de voir le professeur Fitzsimmons en dehors de ses cours ou de l’infirmerie ces derniers temps, à croire qu’il se terrait dans son appartement, se noyant dans ses recherches… ou autre chose. Pour ceux qui fréquentaient assidûment le Dark Night, il y était passé une ou deux fois mais n’était jamais resté bien longtemps. Quelque chose clochait.

Pourtant, quand on le croisait dans le couloir, tout avait l’air d’aller normalement. Il ne paraissait pas spécialement fatigué ou au bord des nerfs, juste… normal. C’était peut-être ça le cœur du problème. Il manquait ce côté joueur et flamboyant qu’on lui connaissait, cette affirmation de son caractère pas toujours facile : depuis quelques temps, le guérisseur paraissait effacé.

On aurait presque pu passer à côté de lui sans le remarquer ce jour-là, si ce n’est pour l’énorme paquet qu’il portait dans les bras et sa démarche malhabile dans les escaliers d’Haveirson. Habillé d’un jean et d’un t-shirt col V tout simple, il avait passé une robe de sorcier rouge foncé pour se protéger du courants d’air. Seulement, ne voyant pas vraiment où il mettait les pieds avec cette grosse boîte enveloppée de papier kraft qu’il venait de récupérer à la volière, il loupa une marche, trébucha et finit par dévaler l’escalier jusqu’au prochain palier. Il avait à peine étouffé un cri de surprise.

— Merde !

Se relevant comme si de rien n’était mais l’air un peu hagard, il ramassa la boîte un peu endommagée et s’assura que ce qui avait à l’intérieur n’avait pas été altéré dans la chute. Sans l’ouvrir. Il devait sûrement penser qu’il avait des dons de voyance. Il n’avait pas remarqué qu’il n’était pas aussi seul qu’il l’aurait cru de prime abord. Tout n’allait pas pour le mieux dans le meilleur des mondes, et voilà qu’en allant chercher son colis, il trébuche et se casse la gueule… Vie de merde. Ce qui l’exaspérait le plus, c’est qu’il devrait passer chez Neal après ça, histoire de vérifier si tout allait bien. Ça pouvait être pire.

Et effectivement, ça pouvait. En se relevant, Quinlan croisa le regard d'une étudiante avec qui il avait pu avoir le plaisir de s'entretenir, Anna Delflandre. Il lui jeta un regard sombre où on lisait clairement sa contrariété : de toutes les personnes qui auraient pu assisté à sa maladresse, c'était elle que le hasard avait choisie. Il n'avait pas un bon souvenir de cette jeune femme, qui malgré des intentions louables, s'était montrée des plus impolies avec lui. C'était du moins comme ça qu'il l'avait vécu. Sans doute ne manquerait-elle pas de poser ses questions gênantes : après tout, c'était une journaliste, et il fallait bien que quelqu'un pose les questions qui fâchent. La vie privée et les sentiments de l'interviewé étaient, quant à eux, bien secondaires.

— Mademoiselle Delflandre.

C'était un drôle de salut qu'il lui envoya, à mi-chemin de la menace. Quinlan était méfiant et trouvait son attitude froide et cassante tout à fait justifiée. Il avait eu une vie particulièrement compliquée ces derniers jours sans qu'on vienne lui claquer une fouine gratte-papier dans les pattes.

Anna grimpait les marches la menant à la volière, elle devait poster deux lettres ce jour-là. L'une à sa mère, l'autre était pour une personne plus spéciale. Elle ne savait même pas si elle enverrait finalement la deuxième, elle hésitait encore. Elle n'était plus très loin d'arriver, le piaillement incessant des oiseaux lui parvenait déjà aux oreilles, lorsqu'elle aperçu une personne qui ne lui était pas inconnue qui redescendait après avoir récupéré un colis visiblement assez volumineux pour lui cacher partiellement la vue de ses pieds, assez en tout cas pour lui faire louper une marche et qu'il en dégringole une partie.

- M.Fitzsimmons ! S'écria-t-elle dans un moment de stupeur.

Il parut se relever sans trop de mal et ne sembla pas s'apercevoir de sa présence, pourtant manifestée par son cri, jusqu'à s'être assuré que son paquet n'ait pas été endommagé par la chute qu'il venait de faire. Ce ne fût que suite à cela qu'il la dévisagea froidement avant de prononcer son nom dans une salutation se contentant de la politesse minimum.

Anna ne se formalisa pas de si peu, plus inquiète pour lui pour l'instant que préoccupée par ce qu'il pouvait bien penser d'elle ou lui dire.

- Professeur, vous allez bien? Vous ne vous êtes pas fait mal? Attendez je dois avoir quelque chose au cas où...

En même temps qu'elle disait cela elle se rapprochait précipitament de lui, souhaitant s'assurer qu'il n'était pas blessé. Soudain elle se freina dans son élan. La jeune femme hésita quelques instants avant de finalement choisir de refouler ses doutes, ce n'était pas le moment d'hésiter. S'il avait mal M.Fitzsimmons en aurait peut être besoin, ne pas le faire pour une simple histoire de moldus était passablement ridicule. Elle aviserait s'occuperait du reste plus tard. Elle chercha frénétiquement le tube dans le fond son sac. Cela prit un certain temps avant qu'elle ne déniche l'objet dans tout le fatras qu'elle avait à l'intérieur de ce dernier.

- De l'arnica, lui dit-elle en le lui tendant, si jamais vous avez besoin. Vous devez connaître. Ce n'est pas grand chose, mais c'est assez efficace contre les bleus lorsqu'on se cogne. J'en ai toujours dans mes affaires au cas où.

Elle venait de rompre encore une fois la promesse qu'elle s'était faite. La jeune française n'arrivait décidément pas à tenir sa langue sur ses origines, malgré toute sa bonne vlolonté, son naturel finissait toujours par la rattraper. Le Professeur Fitzsimmons l'avait mise en garde lors de leur premier échange, il avait bien raison sur ce point, pourtant elle ne pouvait s'empêcher de toujours laisser filer des indices qui ne laissaient aucun doute sur d'où elle venait. Anna avait beaucoup de mal à cacher une chose dont elle était en réalité plutôt fière et qu'elle ne voulait pas révéler par sécurité non par réelle envie.

Cette fois-ci elle se mettait une fois encore en danger, mais en plus pour aider quelqu'un qui ne l'appréciait visiblement pas plus que ça. Néanmoins elle était incapable de rester loin de quelqu'un qui pourrait avoir besoin d'aide, et ce à n'importe quel prix.

S’étant relevé rapidement, le professeur semblait plus préoccupé par le paquet qu’il tenait dans les bras que par son état physique. Il avait à peine entendu le cri d’Anna, et ne la remarqua que lorsqu’elle lui demanda s’il avait mal. La bonne blague. Quinn réprima un petit sourire sans joie et secoua la tête.

— Non non, ça va…

Mais elle était déjà à sortir quelque chose de son sac, dont le guérisseur était sûr que ça ne le soignerait pas complètement. Il doutait de pouvoir être réellement guéri, en fait. Cependant, il était trop las pour l’en empêcher, et la regarda faire avec un air blasé. Il s’assura simplement qu’elle ne le touche pas en levant une main préventive.

Elle lui tendit alors un tube d’arnica, une plante bien connue des moldus, et de lui-même bien sûr. Il se moqua gentiment d’elle en riant, refusant dans le même temps son offre.

— C’est un très bon réflexe que vous avez là, Mademoiselle Delflandre, mais…

Pouvait-il lui dire ? Le devait-il ? Il hésita un long moment, son visage redevenant tout à fait sérieux. Il soupira. Il avait besoin d’aide sur ce coup, et pas seulement pour porter un foutu colis. D’ailleurs, maintenant qu’il le regardait de plus près, il s’aperçut qu’il avait failli laisser une lettre sur le palier supérieur. Elle était tombée quand il avait trébuché et il pesta contre lui-même de ne pas l’avoir remarqué plus tôt. Il alla la chercher, la rangeant dans la manche de sa robe de sorcier. Ce faisant, il continuait à réfléchir. Devait-il prendre ce risque ? Il n’en avait aucune envie mais il avait trop à perdre s’il ne le faisait pas.

— Nous ne sommes pas partis sur de bonnes bases je sais, mais je pense que vous pouvez garder un secret. Je ne suis pas une bonne source de scoops de toute façon. Auriez-vous le temps de m’accompagner dans mes appartements ? J’aurais besoin de votre aide, en effet, et comme vous semblez prompte à me l’offrir…

L’ombre de la honte de devoir dépendre de quelqu’un d’autre passa sur son visage, et il soupira à voix basse.

— La vérité est que j’ignore si j’ai mal. Est-ce que je saigne quelque part ?

Il tendit les bras et tourna sur lui-même, histoire qu’Anna puisse regarder s’il n’avait pas de plaies évidentes. Lui ? Avoir mal… Il aimerait bien.

Charybde, Scylla et Poêles à Frire [Premier post Anna] Invoca10

Célestin Xi Ressel - Invocateur

- Hein ? J’étais censé recevoir un colis ? demanda-je à mon invocation d’eau, gêné d’avoir oublié un détail important parmi toutes la foule de choses auxquelles je devais penser.

Effectivement, je m’étais rappelé que mon frère Angérico voulait m’envoyer un colis de bienvenue en Angleterre, heureux de pouvoir passer du temps avec moi dans les jours à venir. Je m’étais dit que j’allais sûrement garder ses gamins alors que monsieur devait certainement vagabonder à des enquêtes criminelles et à d’autres aventures mystérieuses.
Quoiqu’il en soit, je savais qu’il y avait une volière pour la réception de colis et de parchemins à Haveirson. Bon, ça devait sûrement être une invitation à aller au restaurant et revoir mes neveux et ma nièce, et je pouvais bien faire cet effort pour les gamins de mon frère, surtout que je leurs avait déjà acheté des présents venant de France, à savoir de fringues, des friandises, des jouets et aussi des talismans magiques chinois fait maison !

Parmi la montagne de travail et toute la paperasse dont je n’avais aucune envie de m’occuper, je décidai de prendre une petite pause et d’aller chercher mon fameux colis, toujours accompagné de mon sceptre. Et puis en plus, après le bruit que font toutes mes invocations, il fallait dire que ça ne m’aidait pas à me concentrer. Il fallait que je leur trouve un endroit pour jouer ou un autre dérivatif dans le genre.

Mais un peu au loin, j’entendis un cri de désespoir qui rappelle quelque chose que l'on est censé expulser de notre corps tous les jours, un bruit d’un homme qui tombe des escaliers, le son d’une douce voix qui connaissait apparemment l’homme qui s’était crouté par terre, inquiète de voir la victime sûrement par terre en train de souffrir le martyr. Et ma première réaction ? … Continuer paisiblement la marche, sans me presser, en faisant attention que le sol ne glissait pas.

Alors le nom c’était … monsieur … Fitzsimmons ? Je m’étais imaginé qu’il y avait non loin de la volière un professeur et une étudiante, mais de ce que j’avais entendu, ils n’avaient pas l’air heureux d’être ensemble dans la même pièce … Enfin, le même escalier plutôt.

Et … une fois arrivé, je vis une étudiante qui semblait observer de loin le corps de l’homme assis par terre, qui m’a semblé franchement en pleine forme, même après avoir chuté dans les escaliers. J’avais pas forcément envie de les déranger plus que ça, mais comme ils me gênaient le passage et que les couloirs n’étaient pas super grands, il fallait bien que je sorte quelque chose de poli, pas des « Dégagez de mon chemin bandes de pervers » ou des « Cassez-vous de là, sinon je vous fris comme des vulgaires crevettes ». Remarque : j’avais déjà sorti ces phrases-là à des orques récemment.

- Bonjour … Hum … J’espère que je ne vous dérange pas ? Questionnai-je poliment, histoire de paraitre sympa aux yeux de tous.

… En voyant leurs têtes, j’étais persuadé que ma plante ambulante n’allait pas faire son apparition. Comment son radar à couples marche ?

Le professeur la rassura sur son état en refusant du même coup l'aide qu'elle souhaitait lui apporter. Au moins le fit-il de manière moins abrupte que lors de leur dernière rencontre. Lorsqu'il se précipita pour récupérer une lettre tombée elle eut l'impression qu'il était trop prompt à la ramasser, visiblement mal-à-l'aise qu'on puisse la trouver. Anna ne dit rien, elle avait compris que M.Fitzsimmons ne souhaitait pas partager ses secrets et surtout pas avec elle. Grand bien lui fasse, elle avait d'autres chats à fouetter que celui-ci. En tout cas s'il s'était fait mal ce n'était pas de manière inquiétante vu les mouvements qu'il venait de faire.

Là où il l'étonna en revanche c'est quand il retourna sa veste lui demandant non seulement son aide mais lui proposant du même coup d'aller dans son appartement pour ça, pour quelqu'un qui ne voulait rien partager avec elle c'était une sacré proposition. Elle resta interdite. Bêtement elle s'entendit répondre sans la moindre hésitation :

- Oui, oui bien sûr, voulez-vous que je porte quelque chose? Je ne suis pas intéressée par les scoop, malgré ce qu'on peut penser, vous savez? Laissez-moi regarder si vous saignez... Tournez-vous.... Je ne vois rien comme ça, mais avec votre robe ce n'est pas évident.

Les pants de son ensemble le couvraient presque entièrement si bien qu'il aurait pu se blesser sans qu'elle le voit tout de suite. Rien ne s'était déchiré dans la chut visiblement, c'était déjà ça. Tandis qu'elle était là à observer M.Fitzsimmons sous toutes les coutures, une voix s'éleva derrière elle. Elle se retourna vers celle-ci et se retrouva nez-à-nez avec un asiatique au regard flemmatique. Question bizarre qu'il venait de poser. Pourquoi les déranger?

- Euh... non. Allez-y.

Elle s'écarta pour le laisser passer sans vraiment comprendre ce qu'il sous-entendait au juste. Peut-être était-ce une manière de leur faire savoir qu'ils étaient au milieu de son chemin et que ça le dérangeait. Ne remarquait-il pas que la situation n'était pas celle de deux passants se croisant et s'étant arrêté pour discuter? Il avait l'air de s'en moquer éperdument, ou alors il n'était pas très observateur

.

HRP:

Il avait l’impression diffuse qu’il faisait une énorme erreur en demandant son aide à cette étudiante qu’il n’appréciait même pas, mais sur le coup, il s’était senti trop coincé pour faire autrement. Il avait peut-être quelque chose de cassé ou de fêlé et il n’avait aucun moyen de le savoir avec certitude. Tous les miroirs de son appartement ne le sauveraient peut-être pas…

Mais déjà Anna acceptait et lui demandait si elle pouvait porter quelque chose. C’était vraiment gentil de sa part, mais il préférait garder la main sur le colis qu’il était venu récupérer à la volière. Il secoua la tête, et la laissa regarder, même si elle remarqua à juste titre que ce ne serait sûrement pas très utile s’il gardait ses vêtements. Ah. Oui.

Pris de court, il allait enchaîner en lui demandant de le suivre, mais c’est le moment que choisit un autre professeur pour débarquer. Le couloir était un espace public, et ils étaient en train de l’obstruer… pour quoi ? Se tournant vers le Pr. Ressel, Quinlan le salua silencieusement. Il laissa Anna répondre, avant d’ajouter :

— Non, de toute façon, j’ai une urgence… Excusez-moi.

Ce qui était vrai, considérant l’expéditeur de la lettre qu’il avait failli oublier dans les escaliers. Ramassant son colis, Quinlan passa devant Célestin et Anna, et disparut dans l’escalier.

Cette fois il arriva chez lui sans encombres. Il soupira, se flagellant mentalement à l’idée de ce qu’il avait failli faire… Il posa le colis sur la table, et alla s’effondrer dans le canapé pour ouvrir et lire la lettre de Clemens. Aurait-il eu mal que ces quelques mots auraient chassé toute douleur. Un petit sourire sur les lèvres, il s’assit à son bureau pour lui répondre immédiatement, cachant du mieux qu’il le pouvait le trouble qu’il ressentait face à une invitation à se retrouver dehors. En soi, ça ne le gênait pas, mais c’était… Inattendu. Il allait devoir s’y habituer.

Il n’alla pas l’envoyer tout de suite, cela dit : il n’avait pas envie de recroiser qui que ce soit aujourd’hui. À la place, il se livra à un tout nouveau rituel qui le fatiguait déjà. Il se dénuda entre deux miroirs, et pendant d’interminables minutes il s’observa. Il aurait bien voulu le faire par narcissisme, mais même pas. Il passa ses mains à certains endroits, notamment ceux qui avaient été atteints quand il était tombé dans les escaliers, et vérifia du mieux qu’il le pouvait s’il n’y avait pas un hématome suspect qui se formait. Ce serait con de mourir d’une hémorragie interne sans même s’en rendre compte, non ? Puis, de sa baguette il jeta un sort silencieux pour être en mesure de voir si aucun os n’avait été brisé ou fêlé. Ça pouvait paraître simple, mais pas quand vous le faites sur vous-mêmes : il y a toujours des endroits inaccessibles, des choses invisibles.

Apparemment, tout allait bien. Quinlan rangea sa baguette d’aubépine et se rhabilla avant de passer machinalement une main dans ses cheveux. Une main qui ressortit rougie. Maugréant un juron, il tâta son crâne à la recherche de la plaie, qui n’avait pas l’air bien grande ou profonde. Pas assez pour que ça pisse le sang, c’était déjà ça. Il la nettoya et y appuya un coton avant de retourner dans le salon.

Le colis. Tant qu’il était susceptible de foutre du sang partout, il refusait de l’ouvrir. Il attendit donc d’autres longues minutes avant de se risquer à déchirer le papier kraft et découvrir…

— C’est pas la bonne couleur…

Il haussa un sourcil, et prit la lettre que son père avait laissé par-dessus la tenue rouge — alors qu’il avait expressément demandé un ensemble blanc et bleu. Rapidement, son regard s’éclaira : Papa Fitzsimmons avait joint à la commande de son fils un petit cadeau. Qui valait au moins le prix de la commande… Quinlan en était touché et en dépliant les vêtements, il ne put qu’être émerveillé. Son père s’était dépassé.

Mais ce n’était pas le plus important : ce qu’il y avait en dessous, ce qui brillait déjà de reflets azur, ce qui promettait d’être encore plus beau que ce que Quinn avait déjà sorti du papier de soie. Cette fois, le professeur ne put s’empêcher de lâcher un autre juron et de sentir une larme d’émotion frapper aux portes de ses yeux. C’était… sublime.

Tellement que Quinlan se demanda s’il avait bien fait de changer d’avis. Alors qu’il avait déjà envoyé sa demande et ses gallions à son père, Quinn s’était soudainement ravisé, se disant que finalement, c’était peut-être un peu trop superficiel comme cadeau. Après tout, ce n’était que des fringues… Rien qui ne lui rende vraiment justice. Un deuxième cadeau ne tarderait pas à arriver et celui-ci irait sûrement prendre la poussière dans un coin de son armoire. Même s’ils étaient presque taillés pareil, Quinlan ne se voyait pas porter cette tenue. Son esprit lui balança quelques raisons stupides et qui ne tenaient pas debout, jusqu’à ce qu’il se rende à l’évidence : il ne pouvait pas porter cette tenue tout simplement parce qu’elle n’était pas à lui.

Les montagnes russes de ses émotions continuèrent alors qu’il rangeait sa tenue — la rouge — dans son armoire et remisa le paquet avec l’autre tenue sur une des plus hautes étagères de son salon. Venait maintenant le temps de répondre à son cher père qui s’était manifestement cassé le cul pour pas grand-chose.

Quinlan a écrit:

Papa,

J’ai bien reçu ton colis. Comme toujours, tu as fait un travail remarquable. Je ne m’attendais pas à ce que tu me confectionnes une tenue, mais je l’adore. Si tu as d’autres idées dans le genre, n’hésite pas à te servir de moi comme mannequin ! J’ai d’ailleurs hâte de rentrer pour voir tes nouveaux modèles !

À ce propos, je ne te l’ai pas dit pour ne pas t’inquiéter, mais ma robe préférée, la vert et argent, s’est fait éclaboussée de sang (pas le mien, je te rassure) et je ne pense pas pouvoir la ravoir. Je te l’amènerai à Noël, tu jugeras par toi-même.

Quant à ce C.N., j’évite de trop en parler. S’avancer est un peu risqué… Je ne sais pas du tout comment tout ça va évoluer. Je ne sais pas s’il accepterait une invitation à la maison ni même si ça lui ferait plaisir. C’est compliqué. Comme toujours avec moi.

Je peux seulement te dire qu’il a les cheveux châtains et la peau un peu bronzée. J’ai aussi très bien choisi le coloris de la cape : c’est le même bleu que ses yeux. Je n’ai pas failli cette fois, même si c’est gentil à toi de me renvoyer à mes échecs.

Son prénom est Clemens, il est Allemand. Pour le reste, vous verrez directement avec lui. Je l’espère.

Merci pour ta rapidité, et pour votre soutien à toi et Maman.

Je vous adore,

Queenie.

PS : Si par le plus grand des hasards miraculeux Clemens met un pied à la maison, ne m’appelle pas comme ça, ok ? J’ai une réputation à entretenir !

Finalement, il n’avait pas pu s’empêcher de lâcher quelques infos, tout en occultant le fait que ce fameux C.N. n’allait sûrement jamais savoir que Quinlan avait eu comme premier — et minable — réflexe de vouloir le rhabiller.

Célestin Xi Ressel - Invocateur

- Heu .. Bon merci … répondis-je à l’étudiante, à priori légèrement gênée par la situation,

Fuyant comme un voleur, évitant les conflits et le contact, je vis l’homme se relever et prendre son colis, avant de nous passer devant comme s’il avait commis un crime. Me voilà bien avancé dans ma quête pour vérifier comment allait mon oiseau et si j’avais effectivement reçu un joli coli, blasé de constaté que les habitants du château ont des réactions … étranges, plus la plupart.

Il m’avait l’air un peu vieux pour être un étudiant, ça devait être un professeur mais de quelle matière ? Vu sa tête, j’aurais dit un truc lugubre genre … maître des potions ou magie noir ! Haha !

Bon, il était temps de monter pour vérifier si mon hibou m’avait gardé un joli paquet pour ma personne.

- Vous êtes une étudiante de l’académie d’Haveirson, je suppose ? questionnai-je, histoire de rester poli et d’entamer une conversation.

Anna ne comprit pas ce qui se passa réellement, mais elle vit filer le Professeur Fitzsimmons plus vite que Grumpy lorsqu'il savait que ses croquettes l'attendaient. Elle tenta de l'arrêter mais n'eut pas le temps de finir sa phrase :

- Monsieur, vous ne vouliez pas que je ....

C'était déjà trop tard, il était déjà trop loin pour l'entendre. Son regard resta fixé un moment dans l'escalier descendant vers le dernier endroit où il avait été possible de voir l'enseignant avant que les marches tournent et ne le fassent disparaître. Songeuse elle s'inquiéta et espéra qu'il allait effectivement aussi bien qu'il l'avait assuré au début de leur échange. Décidément il était insaisissable.

Elle n'eut pas le loisir de continuer son cheminement interne que l'asiatique interrompit ses réflexions en lui posant une question. Elle secoua légèrement la tête et se retourna vers lui avant de lui répondre tout en reprenant sa montée.

- Oui, je suis étudiante en journalisme. Et vous? Que faîtes-vous à Haveirson?

Anna avait délibérément posé sa question de cette façon. Sa précédente mésaventure avec le cadet Fitzsimmons lui avait servi de leçon. Désormais elle ne voulait jurer de rien et préférait s'assurer à qui elle avait à faire avant de trop s'avancer.

Célestin Xi Ressel - Invocateur

Brisons la glace, comme le disait les vieux sages. Il fallait que j’en profite pour faire connaissance avec un maximum de personnes qui pourrait me renseigner sur mon éventuel employeur et sur la possibilité de trouver un bunker assez résistant aux Avada Kadavra.
Une future journaliste ? Je pensais qu’elle faisait des études plus en médicomagie ou quelque chose dans ce goûts-là, elle n’avait pas l’air d’être une genre de fouinarde ou une aventurière du dimanche.

- Je suis un nouveau professeur, en invocation d’esprits. Répondis-je à l’étudiante. C’est une toute nouvelle matière et … Je me demande si c’est intéressant comme cours pour de jeunes étudiant.

Nous avions commencé notre marche vers la partie principale de la volière, entendant les cris des oiseaux et des piaillements innocents. Hah ! … J’avais une soudaine envie de me faire un bon poulet roti, mais ça, c’était que moi. Il y avait tout de sorte d’oiseaux de milles couleurs, des grands, des petits, des gros, des marrant, des trisounets … Je ne connaissais pas encore celui qui allait me servir de …

… What ? Mon père m’a carrément envoyé un aigle en guise de messager ?! Mais il était malade ma parole ! Qui envoie des animaux pareils en messager ? Je voulais bien comprendre qu’il soit riche comme pas possible, mais c’était légèrement abusé. Surtout qu’il faisait un peu peur à tout le monde … Bon il avait un colis pour moi, c’était tout ce qui comptait … j’imaginais ?

- Je pense qu’il faut que j’explique le sens des normes à l’expéditeur, commentais-je en prenant mon colis.

… Hoh Cool ! En dirait une cargaison d’ingrédient d’alchimie.

- Tout est toujours intéressant, c’est l’orateur ou le public qui l’est parfois moins. Je suis sûre que votre matière doit être passionnante.

Anna se félicita de sa nouvelle prudence acquise par l’expérience. Vu son jeune âge elle aurait parfaitement pu le prendre pour un étudiant. Ce qu’elle ne manqua pas de relever par une petite pirouette.

- Vous avez l’air très jeune aussi, si cela vous intéresse vous, pourquoi cela ne nous intéresserait-il pas ? Notre différence ne doit pas être si grande.

Ils pénétrèrent enfin dans la volière. Tandis qu’Anna se dirigeait vers les hiboux postaux et en choisissaient deux un peu au hasard, son interlocuteur se fendit d’un commentaire à la vue du colis qu’il venait visiblement de recevoir. Effectivement on avait trouvé de bon goût de lui envoyer un aigle qui, au goût de la jeune fille, se trouvait être assez clinquants et voyeur. Pour sa part elle choisit une petite chouette au pelage doré qu’elle trouva plutôt jolie et un plus grand et plus costaud qui pourrait facilement supporter le voyage plus long qu’elle allait lui faire faire. La présence de l’homme à ses côtés eut au moins pour effet de ne pas la faire réfléchir plus longtemps à l’envoie de sa lettre. Il aurait trouvé bizarre qu’elle reste à tergiverser devant le petit rapace, son enveloppe à la main. Dans un mouvement déterminé elle lança donc ce dernier. Puis elle ne lança le second.

Puis, pour ne pas regretter son geste elle se tourna vers le jeune professeur et prit congé.

- Effectivement, un aigle parait peut être un peu démesuré pour envoyer un colis. Je suis désolée mais je dois vous laisser. Heureuse d’avoir fait votre connaissance, nous nous croiserons peut être à l’un de vos cours, bien que je crains ne pas avoir vu votre matière dans mon planning. Je viendrais peut-être faire un tour en auditeur libre si mon emploi du temps me le permet. Je suis curieuse de voir de quoi il s’agit exactement, je ne crois pas en avoir jamais entendu parler.

Puis elle quitta rapidement la pièce. Non pas qu’elle souhaitait quitter si brusquement la conversation, mais elle avait peur de regretter son geste. Maintenant que sa missive était envoyée, il n’était plus temps de la regretter. Elle espéra que Rowan comprendrait un peu ce qu’elle avait voulu lui dire et qu’il ne lui en voudrait pas trop de préférer l’écrit plutôt que la parole.