(Libre) Le Bienvenu

Après des vacances de Noël décidément trop courtes, Quinlan et Clemens étaient revenus à Haveirson. Le guérisseur avait à peine déposé ses affaires dans ses appartements qu’il devait descendre à l’infirmerie pour y tenir sa permanence. Vivement qu’il se trouve un stagiaire digne de ce nom, quelqu’un qui pourrait lui permettre de souffler un peu. Travailler beaucoup n’avait jamais gêné Quinn, sauf quand il avait l’impression d’avoir mieux à faire. Se balader dans un jardin enneigé, regarder des films, passer du temps dans ses recherches, ça aussi c’était important ! Non ?

Il avait donc laissé sa valise et Le Docteur — son chat — chez lui, et avait dévalé les escaliers de la Tour Céleste jusqu’à arriver au rez-de-chaussée. Il devait encore passer par une série de couloirs et le hall d’entrée avant de pouvoir rejoindre le cloître où se trouvait l’infirmerie. En passant il s’arrêta devant le panneau d’affichage où il avait laissé le parchemin parlant de l’atelier de parole. Effectivement, Isolde n’avait pas menti ! C’était rempli de messages, de questions plus ou moins légitimes et…

Troll a écrit:

Aura-t-on de la pratique en fin du cours? Si oui, pourra-t-on choisir son ou sa partenaire?

Oui bon, il y avait toujours un plaisantin pour dire une connerie. Il se demandait si Clemens avait osé… Avant de chasser cette idée de son esprit. Mieux valait ne pas penser à qui avait écrit ces messages. Ils étaient tous anonymes, et il y avait une raison à cela. Quinlan n’avait pas l’intention de tourner les interrogations des étudiants en énigme personnelle, même si c’était tentant de parier sur certains. Tiens. Se ferait-il lui aussi séduire par le démon du jeu…? Avec un sourire sans joie, il récupéra les premiers messages qu’il confina dans un de ses carnets de travail.

En reprenant sa route, il ne fit pas attention à la personne en face de lui, trop concentré sur les questions qu’il venait de découvrir.

— Oh ! Pardon !

Il ne connaissait pas l’étudiant qu’il venait de percuter, mais ça n’avait rien d’étrange : il y avait beaucoup de monde à Haveirson, et Quinlan n’était pas connu pour sa mémoire des noms ou des visages. L’homme en face de lui était plutôt pas mal, mais Quinn écarta bien rapidement cette pensée. Il avait fait une promesse.

— Pas de mal ? Au pire, passez à l’infirmerie, je vais prendre ma permanence.

Avec un grand sourire, Quinlan se présenta alors, tendant une main amicale à l’étudiant inconnu.

— Pr. Fitzsimmons, guérisseur.

Évidemment, il ignorait qu’il avait en face de lui un autre de ses spécialistes.

Citation :

— Pr. Fitzsimmons, guérisseur.

C’était une semi-plaisanterie : Quinlan espérait bien que ce petit accroc n’était pas suffisant pour envoyer l’étudiant directement à l’infirmerie, et pour être tout à fait franc, Quinn espérait ne jamais le croiser là-bas. Il préférait voir les étudiants en bonne santé plutôt qu’alités en attente de ses soins. Et puis, pendant ce temps-là, lui pouvait réfléchir à ses recherches et être basiquement payé à rien foutre.

— Tant mieux alors !

C’est seulement à ce moment que Quinlan remarqua les valises du jeune homme et la lettre qu’il tenait dans ses mains. Il venait sûrement tout juste d’arriver à Haveirson… Le pauvre, le château était un labyrinthe pour ceux qui le connaissaient mal. Et même encore pour ceux qui le connaissaient ! Quinlan n’avait vraiment pas envie qu’il tombe dans les sous-sols démoniaques de l’Académie, alors peut-être qu’il pourrait quelque chose pour lui ?

D’autant plus qu’il était un de ses spécialistes ! En entendant la nouvelle, le visage de Quinn se fendit d’un large sourire sincère.

— Ooooh excellent ! Un futur médicomage ! Tu viens d’arriver ? Perdu, peut-être ?

Non seulement Quinlan n’avait pas spécialement envie de commencer à travailler, mais en plus il était trop heureux d’être tombé sur un nouvel étudiant — un de ses étudiants en plus — qui avait l’air d’avoir besoin d’aide. Il n’allait pas le laisser en plan, voyons !

— Tu es dans quelle confrérie ?

Bien sûr, il ne pourrait pas l’accompagner à l’intérieur de la confrérie en elle-même, mais il pourrait le guider jusqu’à la porte. Après, Antoine… Anthony… Bref, peu importe pourrait trouver quelqu’un d’autre pour l’aider à prendre ses marques au château.

Ainsi l’étudiant venait à peine d’arriver. Plutôt inhabituel, mais pas forcément étonnant. L’Académie venait à peine d’ouvrir, et tous ceux qui la fréquentaient désormais, étudiants ou professeurs, avaient fait totalement autre chose avant d’y atterrir. Avoir du retard sur une première année n’était pas spécialement surprenant si Anthony n’avait pas pu ou voulu se libérer de son éventuel emploi précédent. Et en plus, il n’aurait pas beaucoup de choses à rattraper : les bases de la médicomagie n’avaient rien de bien sorcier, pour peu qu’on était travailleur.

— Je te ferais parvenir les cours du premier semestre, alors, pour que tu puisses rattraper.

Quinlan était donc prêt à aider le jeune homme, pour peu qu’il connaisse sa confrérie, bien sûr. Il était donc chez les Abraxans… Le guérisseur se gratta un moment la barbe en regardant les couloirs, et finit par montrer l’un d’eux.

— Aile Est, c’est par là. L’architecture n’est pas évidente mais on s’y fait.

Haveirson était un casse-tête comparable à Poudlard, mais comme tout, on s’y habituait et plus vite qu’on ne le pensait. Quinlan se mit en route, lançant un regard à Antoine derrière lui pour qu’il le suive.

— Et tu faisais quoi avant de venir ici ? T’as été à Poudlard ?

Il fallait bien faire la conversation, même si c’était seulement pour quelques minutes. Après tout, ils étaient amenés à se revoir, ne serait-ce que pour les cours et la thèse d’Antioche, s’il comptait en faire une. Et c’était sans compter qu’il pouvait aussi postuler au poste vacant de stagiaire à l’infirmerie.

C’était un remerciement bien feutré que celui d’Antoine, et Quinlan comprenait tout à fait : personne n’avait envie d’entendre parler de cours à rattraper alors qu’on n’avait même pas encore pu poser sa valise ! Il esquissa un sourire, et guida l’étudiant jusque dans un des couloirs tout près.

Voulant faire la conversation, il lui demanda s’il avait suivi ses études à Poudlard. Un Serpentard ? Intéressant ! Quinn ne put s’empêcher de sourire.

— Moi aussi je sors de Serpentard. J’aimerais dire que c’était différent à mon époque, mais vu la situation actuelle… Non, ça ne l’était pas.

Quinlan n’avait que quelques années de moins que James Potter et sa bande. Être un Serpentard à cette époque avait été plus lourd à porter que n’importe quoi d’autres. Ses propres penchants personnels, en pleines années 70s avaient un peu fait écran de fumée… mais son frère restait Poufsouffle. Pour le reste de l’école, c’était bizarre.

— Mon frère enseigne aussi ici. Neal. Moi c’est Quinlan. Ce serait dommage que tu nous confondes. Il est botaniste.

Ils marchaient tranquillement, la valise d’Antonin flottant près d’eux. Ce dernier, se montrant lui aussi curieux, demanda qui était l’infirmière de l’Académie. Infirmière. Au féminin. Quinlan haussa un sourcil, et lui répondit avec un sourire :

— Je peux mettre des talons, une robe moulante et rien en dessous si tu veux… C’est moi le guérisseur d’Haveirson ! Je suppose que le Comte n’avait pas dans l’idée d’embaucher un infirmier à temps plein, donc j’enseigne et le reste du temps je suis dans mon bureau de l’infirmerie. Ça ne me laisse pas beaucoup de temps pour mes recherches personnelles, cela dit.

Et pour le reste, aussi.

— Je crois qu’il y a un poste de stagiaire disponible à l’Académie, d’ailleurs. Et au pire, les stages ne sont pas difficiles à trouver à Ste Mangouste. J’y ai travaillé, je peux facilement trouver des postes à mes étudiants.

Surtout vu leur nombre ridicule… Enfin, Quinlan allait peut-être enfin pouvoir aborder des thèmes un peu plus complexes, réservés vraiment aux spécialistes. Les cours libres, c’était intéressant et il ne regrettait pour rien au monde d’en avoir donné, mais on était en janvier, et ses premières années allaient finir par désespérer de n’avoir rien de bien croustillant à se mettre sous la dent.

Hmpf, bah justement. Si Quinlan était le professeur le plus important du cursus d’Antoine, il pouvait bien faire un effort non ? Ok d’accord, l’humour du guérisseur n’était pas toujours au goût de tout le monde, mais il avait demandé une fois et on l’avait rassuré en lui disant que non, il n’avait pas un humour si merdique que ça. Et puis, cette blague avait aussi eu pour objectif de faire diversion. Quinn ne le montrait pas, mais avoir directement mis le mot ‘infirmier’ au féminin l’avait contrarié.

Enfin, le vrai sujet de conversation, c’était le stage qu’Antolin pourrait se trouver, à l’infirmerie de l’Académie, ou à défaut, à Londres. En cela, il prouvait plutôt qu’il était prêt à faire jouer ses relations pour aider ses étudiants, une chose des plus normales en contrepartie de l’exigence qui le caractérisait en tant que professeur et guérisseur. Certains en avaient déjà fait les frais : Quinlan pouvait parfois se montrer sévère, avec comme première justification que son métier et celui de ses étudiants ne laissait aucune place à l’erreur.

Quant aux relations d’Anthony, Quinn ne pouvait pas deviner qu’il connaissait lui aussi des médicomages qui pourraient lui trouver un stage. D’autres étudiants n’avaient pas cette chance, et dans le doute, il valait mieux partir du principe que l’étudiant serait totalement dépendant de son prof à ce niveau-là. Quinlan n’irait jamais demander à un jeune sans réseau et sans relations de se débrouiller pour son stage. Mais ça, Anton ne le savait pas non plus.

Tout comme le nombre d’étudiants en médicomagie. Quinlan réfléchit un instant.

— Non, vous n’êtes pas nombreux. Ça me permet de mieux suivre les étudiants, tu me diras. D’ailleurs, il faudra qu’on se voie quand tu seras bien installé, pour ton sujet de thèse. Si tu veux en faire une.

Il y avait bien peu d’étudiants qui y renonçaient, tout simplement parce que le statut de guérisseur n’était accessible qu’avec ce précieux sésame. Mais Antoine aurait tout le temps d’y réfléchir alors qu’il prenait ses marques dans le château.

Ah. Enfin ! Ils entraient dans l’aile est. La confrérie Abraxan n’était plus très loin !

HRP:

Spoiler:

— Envoyez moi un hibou un peu avant, juste histoire de fixer un rendez-vous.

Quinlan n’avait pas un emploi du temps de ministre, mais il avait son bureau à l’infirmerie — qu’il espérait bien partager avec un stagiaire du coup — ses appartements où il travaillait le mieux et son bureau de professeur qu’il utilisait pour corriger les examens et recevoir les étudiants. Autant dire qu’il n’y passait que très rarement, et que si Anton débarquait à l’improviste, il risquait de le trouver désespérément vide.

Ils croisèrent un groupe d’étudiants, dont Quinn reconnut certaines têtes. Quelques unes avaient fini dans ses filets, avant qu’il ne rencontre un certain Sinistros et qu’il ne lui promette de ne plus flirter avec les étudiants. Remarquez, il avait la drôle impression qu’il était prêt à y aller mollo sur les aventures, peu importe leur nature. Voire à tout arrêter. Quinlan ne savait pas trop mais… Sa prochaine sortie au Panic! avec Rupert scellera peut-être son destin.
Quinlan Connall Fitzsimmons, fidèle. N’importe quoi.

Il fut sorti de ses pensées par Anton qui lui demanda d’une voix un peu rude s’ils étaient encore loin. Hmpf. Entre ça, ses préjugés sur le genre du personnel médical et sa non-réceptivité à ses vannes, Quinlan se demandait s’il allait apprécier cet étudiant. Au pire, il n’aimait pas Megan, ça ne l’empêchait pas de lui apprendre des trucs.

— Non… On y est en fait.

La porte de la confrérie Abraxan était juste là, en face d’eux.

— Je ne peux pas aller plus loin, mais je suis sûr que tu trouveras quelqu’un pour te guider dans le château, pour les cours et pour les repas. Un conseil, évite juste les sous-sols.

Avec un sourire, Quinlan s’éloigna pour reprendre le chemin de l’infirmerie. Il espérait vraiment qu’Anton l’écouterait pour les sous-sols. Il n’avait pas envie de voir un autre étudiant se faire traumatiser par ce sadique de Comte. Il se demandait comme Megan et Clemens allaient à ce propos, d’ailleurs. Ce château allait les rendre cinglés.