Un rendez-vous attendu, un moral dans les chaussettes

Jeremiah avait attendu ce rendez-vous toute la semaine. En effet, aujourd’hui il allait enfin revoir Alycia. Mais son moral n'était pas au rendez-vous, lui.

Cela faisait dix jours depuis leur première et unique vraie rencontre au bord du lac. Pourquoi « vraie » ? Parce que durant la Saint-Valentin, on ne pouvait pas vraiment compter ça comme une rencontre. Alycia avait surgi dans les moments au Jeremiah avait été en difficulté avant de s’éclipser aussi vite qu’elle était venue. Mais cela avait montré au Gryffondor que la vert et argent ressentait quelque chose. Sinon, pourquoi s’être montré si affectueuse devant tout le monde ?

Ce fut d’ailleurs cette pensée qui avait convaincu Jeremiah de se montrer si audacieux dans sa lettre. Et c’est ainsi, que livre sur le lit, il s’était préparé pour ce rendez-vous. Cheveux en l’air avec un effet coiffé-décoiffé, jeans rentré dans ses bottes noires, pull en laine blanc, bonnet en laine blanc et caban noir s’arrêtant à la taille. C’est ainsi qu’il sortit de la salle commune pour rejoindre la volière.

La volière. Un lieu discret, mais qui offrait une vue imprenable sur l’enceinte du château et le paysage se dessinant au loin. Un lieu romantique malgré le bruit incessant des volatiles. Un lieu parfait pour un rendez-vous caché, selon Jeremiah.

Après avoir gravi les dernières marches, il se permit d’ouvrir son caban, mais en le gardant tout de même sur ses épaules. Son manteau était récent, et il sentait encore le neuf. L’ancien, après être tombé dans la boue quand il avait tenté de rattraper Alycia, était irrécupérable. Et il ne tenait pas à ce que son grand-père en rachète un nouveau. Il ne voulait pas recevoir une nouvelle lettre incendiaire sur les dépenses, l’argent, et tout ce qui s’en rapproche.

En avance, Jeremiah décida de s’occuper un peu de sa chouette. Après avoir enfilé un avant-bras et un gant à gauche, tous les deux en cuir, il tendit le bras en direction de sa chouette. Il la caressa, elle tenta de le mordre. Un amour vache, mais un amour tout de même. Il mit le bras dehors, et donna une petite impulsion pour que sa chouette s’envole. Il la regarda décrire des cercles, heureuse et libre. Et Jeremiah se mit alors à l’envier.

Lui aussi, voulait pouvoir s’envoler librement, sans se soucier de demain. Sans se soucier des filles. Sans se soucier de son secret, qu’il partageait désormais en partie avec Aldabella. Et cette dernière ne le savait pas, mais elle avait réveillé quelque chose en lui. Il avait fini par prendre conscience que ce n’était pas qu’une simple curiosité. Pas après plus de six ans. Et il espérait que personne d’autre n’avait été présent à la bibliothèque lorsqu’il avait élevé la voix. Si c’était le cas, et vu les propos qu’il avait tenu, le rouge et or savait qu’il allait bientôt avoir un retour.

La dernière fois qu'il avait osé sourire, cela avait été à la Saint-Valentin, bien obligé par tout les mésaventures qui lui était arrivé le même soir. Mais depuis, son secret le hantait et il en était effrayé. Et si ce dernier était entrain de le faire plonger dans les strates obscurs de son âme ?

Perdu dans ses pensées il ne souriait pas et son regard scrutait l’horizon enneigé. Sa main droite jouait avec son piercing à la lèvre, geste inconscient qu’il ne faisait que rarement. Ce dernier trahissait son angoisse, sa peur. Ce geste était un symbole qu’il réfléchissait profondément. C’était d’ailleurs la raison pour laquelle Jeremiah n’entendit pas les bruits de pas écrasant la neige des escaliers…

HRP:

21/11/2015

Quand je me suis réveillée ce matin, j'avais les cheveux dressés sur la tête, le visage blême et fatigué. Mes yeux rougis par la peur, j'avais regardé par la fenêtre, la neige ne cessait de tomber et pourtant sur sa pale blancheur, dans ma tête j'y voyais des flaques de sang aussi poisseuses que foncées. Je voyais le ciel obscurcit, les ténèbres enveloppaient mon corps, mon cœur... Je ne ressentais rien. Je n'étais ni heureuse ni malheureuse... Je subissais, j'avançais, j'essayais de vivre. Il était là, drapé de noir, se retournant pour m'observer de ses yeux froids... Le Seigneur des Ténèbres a retroussé ses lèvres dans un sourire immonde qui me fit un tel honneur que je me suis inclinée... Il a levé sa baguette... Un éclat vert, le son sinistre du sort de la mort. Et je me suis réveillée en sursaut, respirant fortement. Tout le monde dormait et quand j'ai regardé à la neige, je les revoyais ces flaques... Je revoyais le regard noir de mon Seigneur avant de mourir, fière.

Les frissons ne m'ont pas quittée de la journée. J'avais une sale tête, et pourtant, je devais me rendre à un rendez-vous plus tard le soir. Je n'ai rien mangé au petit-déjeuner, rien au déjeuner... J'étais distraite en cours. J'avais l'impression d'être un zombie, vêtue de noir... Comme le Seigneur.
Comment pouvais-je être fière de donner ma vie ? Alors que je m'aime plus que je n'aimerai quiconque. Ce cauchemar me hante toute la journée, même en faisant mes devoirs je me rends compte que je ne suis pas concentrée.
Je décide de retourner dans ma chambre pour décider quoi faire pour retrouver lucidité et vivacité. Devrais-je en parler à un professeur ? Non, jamais. Ils sauront que je suis partisane, que je cautionne le pouvoir du Seigneur des Ténèbres. Rah, c'est tellement frustrant de n'avoir personne à qui parler. Drago, peut-être ? Je n'en étais pas sûre. Je ne savais pas qui appréciait l'idéologie de mon Seigneur. Je me tairai, je n'ai pas le choix.

En revenant dans ma chambre, je retrouve la lettre que m'avait envoyée Jeremiah. C'est vrai, c'est ce soir. Quelle heure est-il ? Je n'ai pas beaucoup de temps, et la nuit plonge déjà dans le ciel immense. Masquant les étoiles de ses épais nuages bleus foncés.
Je soupire, je ne l'ai pas revu depuis la St Valentin où je ne faisais que des apparitions éclaires pour éviter d'avoir à me montrer en public. Il se doute que je ne veux rien à voir avec lui, que les conventions sociales sont plus qu'importantes pour moi... Mais il tenait mon livre en otage. Ce livre que je tiens de mon père... J'espère qu'il n'avait pas lu le nom inscrit sur la première page : « Dimitri McWood » … Qui ignorait qui il était. L'inventeur fou ayant trouvé la mort dans une explosion, ayant failli tuer sa fille... Rendue veuve une moldue. Brr.

Je me revêts d'un jean slim noir, d'une chemise verte anis et d'un gilet beige. Je mets mes bottines bordeaux, mon manteau long noir avec mes moufles couleur crème avant de faire le tour de mon cou avec l'écharpe de ma maison. Je me regarde dans le miroir en pied de notre chambre... J'ai toujours des cernes sous les yeux à peine maquillés. Mes cheveux sont rebelles aussi aujourd'hui. J'ai l'air malade tellement ma couleur de peau est cadavérique.
Soit. Il faut y aller.
Je plis la lettre de Jeremiah dans ma poche et je traverse la salle commune où le silence régnait, seul les bruits de plume sur le papier persistait à faire un fond sonore.
J'ouvre la porte et je me faufile délicatement comme une ombre sur les murs, jusqu'à la volière. Il fait terriblement froid et je dois grimper encore et encore ces marches interminables.
Je manque de tomber à plusieurs reprises, je ne me voyais pas tout refaire. La baguette fourrée dans ma poche, je m'agrippe aux pierres du mieux que je peux, râlant à chaque pas.

« Je n'en peux plus ! Quelle idée sordide ! »

Arrivée en haut, je lance un regard courroucé aux escaliers, leur en voulant de m'avoir fait passer l'épreuve de trop. Je suis fatiguée, je veux juste retrouver mon lit... Mais si je dors, si je le revois... Je ne m'en sortirai pas. Ça me ferait du bien de voir Jeremiah, soit pour passer mon angoisse, soit pour me calmer enfin. Qu'importe ce que cette rencontre allait engendrer, elle ne serait pas pire que la rencontre de mon rêve cauchemardesque.

Dire qu'il y a quelques jours avant, je retrouvais Anton sous la neige. C'est un tel paradoxe, de les trouver tous les deux. Mon cœur bat toujours aussi fort quand j'arrive dans la volière. Je le vois l'air pensif, la tête en l'air. Qu'est-ce qu'il fait... Il n'a même pas pris du thé ou ne serait-ce quelques gâteaux... Mon ventre réagit à ma pensée, grondant et résonnant dans la volière. Je me fige, les yeux écarquillés. Puis je fronce les sourcils pointant un doigt accusateur sur Jeremiah.

« Si tu te moques, je te tue. »

Dit avec raideur mais surtout lassitude. Je n'en peux plus, je suis trop fatiguée. Je me laisse tomber sur les genoux et je pose les mains sur mon visage avant de laisser les larmes jaillirent sur mes joues. Je n'en peux plus de ce stress permanent, je n'aurais jamais du lever le nez de mes bouquins, jamais.

C’était d’ailleurs la raison pour laquelle Jeremiah n’entendit pas les bruits de pas écrasant la neige des escaliers, ni le râlement d’Alycia. Il ne remarqua pas non plus que son rendez-vous avait finit par arriver en haut. Il ne fut tiré de ses pensées que par le ton raide de la Serpentarde. Il tourna simplement la tête, regardant les pieds de l’arrivante.

Jeremiah leva la tête doucement, le bras gauche toujours habillé de cuir et sa main droite jouant avec son piercing. Bien que l’air totalement fatigué, Alycia était d’une beauté éblouissante. Il repensa alors à leur première rencontre, à la saint-valentin. Chassant un peu ses pensées noires, il esquissa un début de sourire, mais qui disparut quand il vit le doigt accusateur. Il se renferma à nouveau.

Ce n’était visiblement pas la peine d’insister. Alycia ne voulait rien, ou du moins elle était trop bornée aux yeux de Jeremiah pour vouloir quelque chose. Même pas un bonjour, juste une menace. Le rouge et or abaissa la tête, et se dirigea vers la Serpentarde sans la regarder. Il ne voulait pas vraiment faire ça, mais il allait juste lui redonner le livre et partir, pour s’isoler. Oui c’est ça, s’isoler. C’était la meilleure chose qu’il pouvait faire.

Alors qu’il arrivait à sa hauteur, la jeune fille fit une chose étonnante. Elle s’écroula. Et se laissa aller. Des larmes roulèrent sur ses joues, et cette vision chassèrent toutes les pensées du jeune homme. Pourquoi est-ce qu’elle pleurait ? Qui avait osé la mettre dans cet état ? Il ne le savait pas, mais si jamais il finissait par le découvrir, la personne allait en subir les conséquences. Car Jeremiah le savait, il ressentait quelque chose de profond pour Alycia.

Il se plaça alors en face d’elle, et se mit accroupi. Ne pensant à rien d’autre qu’aux malheurs de la Serpentarde, les faisant même passer avant les siens, il la prit dans ses bras et donna son torse comme appui pour la tête. Puis, d’une main qui se voulait apaisante, il caressa les cheveux d’Alycia.

- Je suis là Alycia, tout va bien. Calme-toi.

Il regarda la jeune fille. Son regard était empli de compassion et d’amour. Il voulait et se devait d’être là pour elle.

21/11/2015

Le malheur qui me submerge me mange autant que m'enveloppent les pensées ténébreuses. Je me sens noyer dans une noirceur inconnue. Je m'étouffe. J'ai besoin d'air... Je suis déjà dehors. Pourquoi j'étouffe alors ? Quand j'ouvre doucement les yeux pour comprendre pourquoi je ne respire pas correctement, je me rends compte que des bras m'entourent et que j'ai le visage écrasé contre son torse. Je ne sais pas pourquoi je me sens soudainement rassurée... Parce qu'il est l'équilibre entre la vie et la mort ?
Contre tout attente, même la mienne, je l'enlace à mon tour, continuant de pleurer dans ses bras alors que mes genoux gelaient. Je le serre fort contre moi, tentant de prendre ce que je peux lui voler pour aller mieux. C'est si facile, c'est si doux... Rien de plus qu'un contact humain qui vous offre réconfort et amour.

La main dans mes cheveux fait cesser mes pleurs, je me laisse bercer par ces caresses qui m'apaisent, m'amènent loin de ce cauchemar, de mes doutes...
Je sais qu'il est là, j'ai envie de lui dire que sinon je ne serai pas venue. Mais je sais que mon ton sera sec, cassant. Alors je préfère me taire, lui offrir ce que j'ai de gentillesse... Mon silence. Je m'abandonne dans ses bras, encore. Comme la première fois, comme cette fois où il m'a fait tant d'effet. Ce n'était pas rien, en réalité. Ce n'était pas juste un feeling, il y avait bien un aimant entre nous. C'est très perturbant. Je ne saurais dire si c'est une bonne chose ou non.
Puis Anton, Drago... Quand y en a plus et bah y en a encore. Ça me prend les tripes, ça me prend la tête... Je prie pour que ça s'arrête, mais ça persiste. Je n'ai pas le choix, je dois assumer... Je dois dire que mon cœur appartient à quelqu'un, que mon esprit appartient à l'autre et que ma loyauté est pour encore un autre... Non, c'est trop le bazar. Je ne peux pas émettre ce genre de bêtises.
Puis c'est le Seigneur des Ténèbres qui me bouffe... Du moins, pour cette nuit.

Je pousse un peu Jeremiah pour qu'il s'assied sur le sol pour que je puisse me coller un peu plus à lui. C'est étrange comme je fais cela de manière très instinctive, féline... Je m'assois sur ses genoux, mes jambes de part et d'autre de ses hanches et j'enfouis mon visage dans le creux de son cou.
Laissez-moi apprécier, laissez-moi m'évader.. Arrêtez de me faire réfléchir.
Je ferme les yeux, et je pourrai très bien m'endormir dans cette position.

« Ne me laisse pas, s'il-te-plaît. J'ai... Quelque chose m'empêche de vivre depuis ce matin. »

J'ai dit que je n'en parlerais pas, mais je peux du moins lui confier que mon cœur est en proie à une peur indescriptible, que le sommeil va me fuir pendant plusieurs jours et que mon ventre se nouera chaque fois qu'un plat apparaîtra sous mon nez. Je dois me confier un tant soit peu pour avancer... Pour y voir clair. Je m'agrippe à son cou comme je m'agripperai à une branche avant de faire un plongeon dans le néant.
Jeremiah que je veux de loin, Jeremiah que je fuis... Je suis toute à lui, malheureusement.
La douceur et la candeur de Jeremiah manque à Anton, la compréhension et la compassion de Jeremiah manque à Drago... Finalement, ce que je déteste chez les Gryffondors, j'en ai besoin maintenant.

Le souffle de la jeune fille sembla se calmer. Doucement, mais surement. Elle avait même accepté son étreinte, et mieux, elle sera Jeremiah dans ses bras. Ce geste, Jeremiah l’avait espéré. La sensation de bien-être au contact de la Serpentarde lui avait manqué. Il continua le mouvement de sa main dans les cheveux jusqu’à ce qu’elle ait arrêté de pleurer et l’avait poussé en arrière.

Pas par dégout ou pour le repousser, mais pour être plus proche. Les fesses par terre, il fut agréablement surpris de voir Alycia se mettre assis sur lui. Il en rougit même. Il était heureux de ce contact, heureux de l’étreinte qui lui était offerte. Il venait de s’échapper à ses problèmes, qui reviendrait après. Mais pour l’instant, sa priorité numéro un était son amour.
Amour. Quand il pensait à la Serpentarde, et malgré tout, c’était ce mot-là qui lui venait en tête. Il n’était pas amoureux, pas encore. Mais à chaque contact, les sentiments de Jeremiah évoluaient. Aussi, quand elle enfouit sa tête dans son cou, le rouge et or se mit à rougir. Un magnifique rouge vermeil, qui représentait surement la chaleur qu’il ressentait.

- Je ne te laisserais pas Alycia, je tiens à toi. Dis-moi ce qui te tracasse.

Une promesse. Jeremiah venait de promettre à Alycia qu’il ne partira pas, qu’il sera toujours là pour elle. Sa main, toujours dans ses cheveux, se voulait toujours apaisante, reposante. Il se força à sourire pour qu'elle se sente heureuse. Il se força de paraître heureux pour qu'elle aille mieux.

Le rouge et or ne savait pas vraiment quoi faire dans ce genre de situation, aussi il décida simplement d’être là et d’écouter. Ils auraient tout le temps de parler de la Saint-Valentin passé et de ses propres problèmes plus tard.

21/11/2015

Je ne bouge pas, en fait, je ne réagis presque plus. Je pourrai me faire passer pour morte, tellement mon corps se détend. J'espère presque être dans mon lit, à serrer mon oreiller fort contre moi. Heureusement que demain c'est samedi, je pourrai dormir un peu plus longtemps, si rien ne vient perturber à nouveau mes rêves. C'était comme reculer dans un bassin rempli de serpents... J'ignorais s'ils allaient me mordre avec leurs croc acérés.
Je repense à mon chat qui se baladait dans la salle commune avec d'autres chats. Il n'était d'aucune aide, il ne ressentait pas mon mal être. J'avais le feeling qu'avec les animaux mystiques, et pas avec les non-magiques. C'est triste.

Ce qui me réveille un peu, c'est le piaillement des chouettes et leurs coups d'aile dans les airs qui fouettent doucement l'air, gracieusement. Plus gracieuse que je ne pouvais l'être actuellement.
Je me redresse doucement, quittant l'enveloppe chaleureuse de son cou pour me redresser un peu, restant assise sur ses cuisses. Je prends dans ma poche, un mouchoir et je me mouche doucement, essuyant mon nez, puis en le pliant, je m'essuie les yeux et les joues. C'était fatiguant de pleurer, plus que l'on ne pouvait le croire. Ça demandait des efforts.
Le masque de froideur étant tombé, je vais me donner le temps qu'il faut avant de l'enfiler à nouveau. Trop de déception en très peu de temps.
Ce rêve me prenait la tête plus qu'autre chose. J'avais encore mal au ventre rien qu'en y repensant. Et me trouver si près de Jeremiah ne calmait mon cœur qui est si malmené.
Néanmoins, je trouve la force de lui répondre.

« J'ai fait un cauchemar cette nuit, j'ai rêvé que l'on me tuait... Et j'ai aimé ça, dans mon rêve, j'étais prête à me laisser mourir. C'était un bain de sang, il y en avait partout... Et j'étais démunie d'émotions... Je trouvais ça presque normal, même. C'était perturbant... Tellement réaliste. »

Je sens mon menton trembler mais je me retiens de pleurer à nouveau. J'aimerais lui dire la guerre que j'ai déclenché entre Anton et moi, cette obsédante pensée que j'avais pour lui mais je me retiens aussi. Un problème à la fois. C'est déjà amplement suffisant. Puis en regardant Jeremiah dans les yeux, ces yeux si clairs qui appellent l'amour... Je me laisse aller à un moment de désespoir. Ô Merlin, soyez béni de vivre loin de cette génération faite de doutes. Ce soir, Jeremiah sera le seul à exister, loin de la vie scolaire, loin de l'animation du château... Nous sommes entourés par un brouillard invisible, emprisonnés dans le silence par la neige et dissimulés de la vue des autres par la nuit.
Mes lèvres effleurent celles de Jeremiah mais une voix dans ma tête me demande d'arrêter de jouer. Je veux juste être touchée par le sentiment d'être aimée... Juste une fois.
Laissez-moi...

« Je ne veux pas mourir. »

Je le chuchote si doucement que je sens mon souffle caresser les lèvres de Jeremiah. J'ai l'impression d'être retournée sous l'arbre, en proie à un désir incontrôlable. Ai-je bien fait de venir ?

Jeremiah souriait bêtement. Alycia avait failli s’endormir dans les bras. Et ça, pour un signe, s’en était un sacré. Après tout, cela voulait bien dire qu’elle était bien en sa présence, qu’elle avait réussi à la sortir de son angoisse. Et elle le montrait. Ses muscles étaient plus détendus. Sa respiration était revenue à la normale. Il le sentait sur son coup.

Puis elle recula. Jeremiah eut peur d’un retour au lac, qu’elle parte sans raison. Mais non, elle resta là, assise sur ses genoux. Elle se moucha telle une princesse et elle lui répondit. Quelle drôle de réflexion d’ailleurs. « Je ne veux pas mourir ».

- Personne ne le veut...

Oups, sa pensée avait franchi sa bouche. Comme un murmure. Il enchaina rapidement, mais comme si rien ne s’était produit, afin de masquer son erreur. Mais la proximité de leur lèvre rend cela mission impossible

- Alycia, ce n’était qu’un rêve. Qui peut bien te vouloir du mal ? À toi ? C’est impossible. Et puis même si quelqu’un le veut, même si c’est Tu-Sais-Qui, j’irais lui botter les fesses jusque dans ses toilettes. Je serais là, et si tu veux de moi, je te protégerais.

Jeremiah avait parlé d’une voix calme et sereine. Il se voulait rassurant et drôle. Il voulait qu’Alycia soit heureuse. Et, au nom de Merlin, il voulait l’embrasser. Sa main caressant la joue de la jeune fille en témoignait. Mais sa raison l’en empêcha.

Premièrement, il ne voulait pas la perdre de nouveau. Il avait appris de ses erreurs du lac, et il n’allait pas les recommencer. Pas si facilement. Il devait réussir à abaisser les barrières sociales dans la tête de la jeune fille. Et c’était en bon chemin. Mais, deuxièmement, même s’il arrivait à les abaisser, est-ce qu’il pourrait la rendre heureuse ? Impossible. Pas avec les ténèbres qui ronge son esprit. Il se perdit dans ses pensées Quelques secondes. Mais suffisamment pour laisser le temps à ses yeux de divaguer. Suffisamment pour que son sourire disparaisse.

Puis Jeremiah se ressaisit. Il ne devait pas y penser, pas maintenant, pas à coté d’Alycia. Il devait se montrer fort, se montrer capable d’être présent pour elle. Il se mit alors à sourire à nouveau, et croisa ses yeux. Il louchait presque, tellement leur visage était proche.

- Tu m’as manqué. Je suis content de te revoir, Alycia.

Il insista sur le prénom. Preuve que c’était elle qu’il voulait vraiment, et personne d’autre. Il voulait l’embrasser, mais pourtant il ne fit aucun geste de rapprochement.

21/11/2015

Je le regarde en écarquillant les yeux doucement. Pourquoi me parle-t-il du Seigneur des Ténèbres ? Pourquoi lui et pas un autre mangemort ou un sorcier de notre niveau... Pourquoi justement le Seigneur des Ténèbres. Je suis si proche de ses lèvres que je m'en veux de ne pas y poser les miennes pour le faire taire. On ne botte pas les fesses au Seigneur des Ténèbres, par Merlin, il est fou allié. Que faire pour qu'il se taise. La panique me submerge à nouveau et je suis obligée de réagir. Si je ne réagis pas, j'ai peur qu'il apparaisse comme dans mon rêve et que le faisceau lumineux vert ne s'abatte sur nous... Stupide idée, certes, qu'aurait-il bien à faire de deux étudiants parlant du Seigneur. Mais la peur me prend les tripes.
Je pose une main sur la bouche de Jeremiah et je le regarde avec sévérité.

« Ne parle pas du Seigneur des Ténèbres, malheureux. Jamais tu ne pourras lui botter le train... S'il décidait de me tuer, que compterais-tu faire ? L'affronter ? Ne sois pas sot, crois-tu que je veuille ta mort ? »

Je chuchote comme si mes mots étaient une trahison à mes idéologies. Je suis persuadée que ce que je dis enfreint mon code de bonne conduite. Je ne dois parler à personne de mon appartenance aux Ténèbres ni même de ma volonté à rejoindre les rangs du Seigneur des Ténèbres. Personne ne le saura. Personne, pas même Jeremiah.
Je retire doucement ma main de sa bouche en lui lançant une grimace de « j'espère que tu m'as comprise » puis je retourne me fourrer dans le creux de son cou pour m'y plonger, m'y noyer... m'y oublier encore.
Je suis tellement accablé de remords. J'en ai trop dit. Je ne le pense pas assez réceptif pour comprendre, mais j'ai peur qu'il ne me fasse une leçon ou pire m'en veuille, m'abandonne ici... Les ténèbres continuant de m'entourer de leurs bras noirs pour arracher ce qu'il me reste de compassion, d'amour... Le pouvoir. Le pouvoir m'attire plus que ne peut m'attirer l'amour...

Alors autant détourner la conversation, tout en restant dans le creux de son cou, je laisse échapper mon haleine chaude qui lui court sur la nuque.

« Pourquoi m'as-tu demandée de venir ici, ce soir, Jeremiah ? »

Le cœur battant, je connaissais la réponse. Il allait sûrement faire comme Anton, me jeter. Se rappeler qu'il était là uniquement pour me rendre mon bouquin et partir. Mais je l'agrippe si fort que même s'il souhaitait s'en aller, il ne pourrait pas. Je veux continuer à m'enfuir, je suis si bien dans ses bras... Laissez-moi en profiter encore un peu. Un tout petit peu.
Je veux oublier les projets futurs qui me mettront dans une situation dangereuse, précaire... Loin des sentiments et de l'amour. Loin du reste du monde... Loin de lui.
Je dépose un léger baiser dans son cou avant de m'y laisser à nouveau bercer, les yeux fermés, loin de ce monde divisé. Loin des ténèbres et de la lumière qui se disputent mon cœur.

Jeremiah avait l’impression d’avoir touché un point sensible. Le Seigneur des Ténèbres. Pas Tu-Sais-Qui, ou Celui-Dont-On-Ne-Dois-Pas-Prononcer-Le-Nom. Cette appellation, et Jeremiah l’avait lu dans plusieurs ouvrages, était utilisé majoritairement par ses partisans. Et Jeremiah en eut un frisson. Comment une jeune fille froide, mais si douce, comme Alycia pouvait en faire partie ? Lui qui était quasiment un né-moldu eut peur. Puis il réfléchit. Non, ce n’était pas possible. Et puis, Il ne voudrait pas d’un collégien dans ses rangs. Cette pensée remplaçant alors sa dernière, et il sourit de sa propre bêtise.

Il se concentra un peu plus sur les paroles d’Alycia. Alors comme ça, elle ne voulait pas sa mort. Elle tenait à lui, en quelque sorte.

- Alors si tu ne veux pas ma mort, ne meurs pas. Reste en vie, avec moi.

Le rouge et or se rendit compta alors qu’ils étaient au bord du drame Shakespearien. Mais ça ne le gênait pas, et il voulait rester éternellement comme ça. Tous les deux, dans la tour blanche transperçant la neige, avec comme seul ennemi le froid. Le temps, comme les conventions sociales, avait été abandonné durant la montée des escaliers. Seuls restaient Jeremiah et Alycia, deux adolescents inévitablement attirés l’un par l’autre. Il se félicita intérieurement du choix du lieu de rendez-vous. Il était heureux. Le manège de la jeune fille avec sa main le rendit fou. Il voulait l’embrasser, et il ne résisterait pas longtemps, il n’y parviendrait pas. Son cœur était plus fort que sa raison, son impulsivité que sa logique. Comme toujours. Jeremiah était un homme d’action plus que de réflexion.

Alors qu’il allait franchir le pas, qu’il se sentait prêt à voler ne serait-ce qu’un baiser à la Serpentarde, cette dernière replongea dans son cou. Les lèvres de cette dernière inaccessible, il fut bien obliger de contenir son envie. Un peu plus longtemps.

- Je suis venue ici pour te voir. Je n’ai pas arrêté de penser à toi depuis le lac, tu sais . Alors que dans les couloirs l’on ne fait que se croiser, ici on a le temps de se parler. De se côtoyer. D’être ensemble.

Puis il se rappela de sa lettre, du ton qu’il avait utilisé dedans. Il se souvint également de la pointe de menace qu’il avait utilisé, le livre en otage. Il s’empourpra. Ses joues devinrent plus chaudes.

- Je suis désolé pour la lettre, mais je voulais être sûr que tu viennes. Ton livre, il est là-bas. Tu peux le prendre et partir si tu le veux, mais sache que je n’aurais de cesse de te retrouver, de te parler. Et même si cela me fait passer pour un aliéné. Car je pense qu’après le bal de la Saint-Valentin, je ne peux pas empirer mon cas.

Il montra alors le livre par terre, sur un lit de plumes. Il l’avait laissé tomber lorsque la Serpentarde l’avait poussé. Mais mis à part son bras qui s’était levé, il ne bougea pas. Et puis, il serra de nouveau Alycia dans ses bras. Il ne voulait pas qu’elle parte, maintenant qu’il la tenait, il n’allait pas la laisser partir de si tôt.

- Et toi Alycia, pourquoi es-tu venue ?

Un murmure, une voix sensuelle. Jeremiah la voulait, et il voyait bien qu’elle n’était pas indifférente envers lui. Il posa alors ses lèvres sur ses cheveux, seule partie accessible vu la position dans laquelle ils étaient. Il colla ensuite sa joue à l’endroit du baiser, et sourit. Le souffle chaud du serpent dans son cou rendait le lion heureux.

21/11/2015

Il a l'art de rendre gênante une situation. Je suis si bien dans ses bras, si bien acceptée que j'aimerais qu'il arrête avec ses doutes. Qu'il agisse et qu'il se taise... Qu'il agisse, d'accord, mais qu'est-ce que je veux exactement ? Je l'écoute toujours distraitement, repensant à samedi dernier avec Anton... Les baisers échangés, le secret. Puis à la discussion avec Harmony concernant Drago... Ça faisait un peu trop de garçons autour de moi d'un coup. Ils avaient tous quelque chose à m'apporter... En fait, ça ne me poserait pas de problème de me faire tuer par le Seigneur des Ténèbres, il m'éloignerait de toutes ces méandres amoureuses qui me prenaient la tête plus qu'autre chose... Jeremiah ne fait que réveiller mes doutes, il va me faire fuir à force de trop causer et d'être si … fébrile. C'est le mot. J'aime bien son côté naïf et gentil, mais qu'est-ce que je déteste son indécision, sa peur d'affronter les choses... Courageux, oui, mais pas pour tout.

Je tourne lentement la tête vers mon livre qui dort doucement sur le sol dans un lit de plume... Comme s'il l'avait fait exprès, alors que je sens bien qu'il l'a fait tomber le bougre. Une édition limitée tenue de mon père. Il mériterait que ce soit moi qui lui botte les fesses.
La St Valentin, ce bazar, on aurait qu'un troll des montagnes avaient décapités la plupart des élèves au vu de l'état dans lequel ils étaient rentrés. J'aurais pu rentrer aussi dans cette atmosphère sombre et triste, mais Mara m'avait sortie de ma torpeur et j'avais passé une agréable fin de soirée. D'ailleurs, il faudrait que je la revois, elle m'a intriguée et je l'aime déjà par son côté discret et direct.
Pour Jeremiah, la soirée avait été toute autre à l'entendre... C'est vrai qu'avec la claque plus le sort du punch, il n'avait pas eu véritablement de chance. Et à part venir chaque fois qu'une idiotie lui tombait dessus, je le fuyais. Parce que je ne veux pas sympathiser avec un Gryffondor... Je ne peux pas. Je ne suis pas permise. C'est loyaux serviteur de Dumbledore et son armée ridicule... Aucun pouvoir, que de l'amour, aucune force... qu'un Saint Potter.

Puis la voix de Jeremiah me réveille doucement, je me redresse alors pour le regarder une fois qu'il m'a embrassé le cuir chevelu. Gardant mes mains sur ses épaules. Un éclair d'espièglerie dans le regard, le sourire en coin moqueur.

« Pour récupérer mon livre. »

En même temps, c'était la demande faite sur le courrier. J'ai ton livre, viens le récupérer. J'y tiens beaucoup à ce livre... Bizarrement, pourtant, je n'y avais pas du tout pensé depuis que j'étais arrivée à la volière. Mon attention n'est que sur Jeremiah, c'est un comble, n'est-il pas ? Je voudrais tellement le haïr, faire comme Anton, lui dire qu'il n'est rien pour moi... Je ne sais pas comment faisait mon amoureux secret pour être si froid et sûr de lui... Jeremiah, je n'arrive pas à l'envoyer paitre ailleurs. J'ai besoin de lui, de sa naïveté qui me rappelle que je ne suis pas encore un monstre sans sentiments...
Je lui caresse doucement la joue du bout des doigts, dont j'ai enlevé la moufle préalablement, ne pouvant m'empêcher de faire une comparaison avec Anton. Il était plus jeune, moins viril... Plus doux. Je détaille un peu son visage, passant de son front à son nez, de son nez à ses lèvres... de ses lèvres à ses yeux. J'aimerais tellement m'y plonger, ça me semble si facile... Si normal.
Oublions un instant Anton, Drago...
Ça, ça aussi, ça pouvait rester secret. N'est-ce pas ? Ne me tuerai-je pas à avoir trop de secrets ?

« Et je suis venue parce que, à moi aussi, tu manques. »

Quand le regard d’Alycia se tourna vers le livre, Jeremiah cru que cette rencontre allait se terminer, que la Serpentarde allait se lever, le prendre et partir. Il eut alors, à sa grande surprise, un soupir de déception. Peut-être était-il trop gentil, peut-être devait-il se montrer moins avenant, plus fermé.
Mais pour sa plus grande joie, elle resta assise sur ses cuisses, son seul mouvement fut de relever la tête, et pour la première fois depuis leur rencontre, elle avait l’air un minimum heureuse, elle avait l’air de vouloir s’amuser. Il ne répondit pas, lui-même enivré par cette sensation de bonheur. Qui se multiplia par un nombre inimaginable quand elle continua sa phrase. Alors comme ça, il lui avait manqué. Par cette simple phrase, Jeremiah le sourire de Jeremiah s’étira naturellement jusqu’aux oreilles, faisant ainsi plisser le coin de ses yeux. Il était heureux et il se sentait prêt à détruire le monde. Il pensa alors à s’enfuir avec elle, loin de ce lieu pourtant si calme. Il voulait l’avoir rien que pour lui, faire le tour du monde, aller d’hôtel en hôtel.

Oubliant alors la réaction d’Alycia au lac quand il avait essayé, il ferma les yeux, pencha sa tête et l’embrassa. Elle n’avait pas eu le temps de bouger, et leurs lèvres se touchèrent. Un bref instant. Elles étaient si douces et si chaudes. Il voulait les gouter plus longtemps, ils voulaient sentir cette chaleur qu’elles lui procuraient. Mais il se retira et recula. Il devait résister maintenant à l’envie d’y retourner, il se devait de ne pas aller trop vite, trop loin. Il plongea alors son regard dans celui d’Alycia, afin d’y voir un signe de plaisir. Car le sien devait être magnifique, pétillant de joie et d’envie.

- Alycia… Je te veux.

Ce n’était pas que des simples mots. Le ton de son murmure, la gestuelle de sa main sur la joue de la jeune fille, son autre main au niveau de sa hanche. Tout son comportement montrait une envie, mais aussi une promesse. La promesse qu’il avait jeté son dévolu sur elle. Et que quoi qu’il arrive, il serait toujours là. Du moins, si elle l’acceptait…

21/11/2015

Le temps d'un rien, des mots de trop. Je suis idiote. Je le vois approcher, je dois reculer, esquiver mais mon corps refuse de bouger et je reçois poliment les lèvres de Jeremiah en fermant les yeux, profitant de ce léger baiser. Je ne sais pas si j'ai raison... Je ne sais pas si je dois mais pour une fois qu'un baiser est sincère, m'est entièrement destiné.
La culpabilité me vrille le ventre, je repense à Anton que je jure d'aimer fidèlement... Malgré le secret, malgré notre accord... Mais c'est à Drago que je pense le plus. C'est lui que je dois trouver, lui que je dois avoir...
Ma haine viscérale pour les Gryffondors est telle que je ne peux pas accepter un baiser de plus... Si ?
Je ne lui réponds pas, je ne le veux pas... Je l'ai déjà, apparemment. Mais je me joue de lui sans m'en rendre compte, je profite de ses sentiments naïfs pour me sentir plus aimer encore. Je n'ai pas le droit de faire cela n'est-ce pas. Je me sers de son cœur, je suis prête l'écraser juste parce que je suis perdue... Juste parce que j'ai peur de l'avenir... Parce que je suis faible.

Alors quitte à être faible, autant ne pas y aller avec le dos de la cuillère. Je l'embrasse à mon tour, pressant mes lèvres contre les siennes oubliant, si je le peux, ce sentiment de culpabilité. Mais rien n'y fait. Je m'en veux... Alors je dois au moins lui dire une parcelle de vérité. Je me détache doucement de ses lèvres, appréciant les derniers instants complices avant de souffler mon dégoût, pour moi, non pour ce baiser que j'aurais aimé plein de promesses.

« J'en aime un autre. »

Ce n'est pas un mensonge. Je ne mens pas, c'est vrai que je me crois être amoureuse d'Anton, je ne veux aucunement le perdre même si je sais que personne n'en saura jamais rien. Je ne sais même pas si notre relation est officielle, officieuse, inexistante... Mais je ne veux pas lui faire du tord. Je n'ai pas le droit...

« Drago Malefoy. »

Ce n'est pas un mensonge. Je veux et j'ai toujours voulu être avec Drago Malefoy, et ce, depuis que je suis arrivée à Poudlard. La puissance, le pouvoir, le statut... Tout chez lui m'appelle et m'obsède. Ce côté noirceur que j'aime par dessus tout... Jeremiah n'est qu'un pion dont je me sers, et c'est mal. Je le sais... Il ne sera jamais heureux avec moi, il est enfant de moldu... Sang-Mêlé... Oui, comme moi, mais je ne le revendique pas comme il le fait. Je me sens sale et souillée alors que lui, il ne s'intéresse aucunement à l'aristocratie sorcière.

Je me lève doucement avant de me prendre la slave de colère de Jeremiah. Je prends mon livre sur les plumes et je le sers contre moi, priant qu'il n'y ait pas lu le nom de mon père à l'intérieur. Je le regarde, les yeux éteints, la fatigue tirant sur mes traits, la pâleur de ma peau me rappelle que je n'ai pas mangé depuis bien longtemps...

« Je suis désolée, Jeremiah. Je ne t'apporterai jamais ce que tu veux. Je ne peux pas. »

Jeremiah était obsédé par Alycia. En temps normal, et pour n’importe quelle autre fille, il aurait déjà abandonné. Mais leurs baisers avaient donné raison à son obsession, car elle venait vers lui les chercher. Il était heureux, satisfait.

Cet état ne fut que de courte durée. La Serpentarde venait, une énième fois, de le repousser. Et ce fut la goutte de trop. Son regard se noircit de tristesse, son sourire devint inexistant. Et il se perdit dans ses pensées Ses jambes, de nouveaux libres, portèrent tant bien que mal un Jeremiah d’apparence vide jusqu'au cadre de pierre séparant la volière des escaliers. D’apparence vide, parce qu’à l’intérieur un vrai conflit se déroulait.

Il avait envie de pleurer, de gifler Alycia, d’aller écraser le nez de Malefoy. Comment pouvait-elle dire qu’elle ne pouvait rien lui apporter ? Elle qui avait été le rayon de soleil perçant ses nuages, elle qui avait réussi à lui faire oublier son mal-être. Il se tourna alors vers la Serpentarde sans vraiment la regarder. Il s'en voulait d'être aussi gentil. Il était loin d'être naïf, mais il avait aimé espérer quelque chose avec cette vert et argent. Car, c'était avec elle qu'il se sentait le mieux.

- Tu ne sais pas ce que je veux, tu ne sais rien de moi. Et tu ne veux pas savoir. Tu es une égoïste, Alycia McWood.

Car oui, Jeremiah avait ouvert le livre pour y voir son nom de famille. Ce dernier ne lui disait rien, mais apparemment la jeune fille faisant tout pour le cacher, ou du moins ne voulait pas que le rouge et or le sache. C’est pourquoi, il avait insisté sur ce dernier en le prononçant. Puis, il se tourna de nouveau vers l’extérieur et planta son regard dans le vide.

- Tu ne sais rien de moi, mais cependant tu crois tout connaître.

Un murmure. Elle était comme beaucoup d’étudiant ici. Trop préoccupé par les conventions, par les études et par les évènements pour en oublier l’humain. Car, en réalité, qui avait pris le temps de le connaître ? Qui avait vu le mal qui le ronge, doucement ? Qui avait pris le temps d’aller au-delà du masque chaleureux que Jeremiah s’était construit depuis le début de la semaine ?

Il avait des amis aux châteaux, mais pourtant il était seul. Il n’y avait personne à qui il pouvait en parler. Et il pensa alors à son père. Et pour la première fois depuis presque 17 ans, il lui manquait. Un être qui n’avait jamais vu lui manquait. Mais cet être était également le seul qui aurait pu l’idée. Il leva alors les yeux au ciel, laissant perler une larme qui roula le long de sa joue. Il retint les suivantes, et ses lèvres commencèrent à trembler sous la pression de ses yeux.

- Réfléchis bien Alycia. Ne te mens pas. Pourquoi es-tu venue, au lieu de me dire de te rendre ton fichu livre par hibou ?

Sa voix était triste et tremblotante. Il s’en rendit compte et, sans attendre la réponse de la jeune fille, fit le premier pas pour franchir le cadre de pierre.

21/11/2015

Je ne suis pas surprise de le voir en colère, en réalité, c'est exactement ce que je voulais, qu'il s'énerve. Comprenne enfin que je ne suis pas une bonne personne. Je n'ignore pas les lettres qu'il envoie à Harmony pour les avoir trouvé dans sa chambre, mais je n'y ai jamais vraiment songé. Et puis, j'ai d'autres projets... N'est-ce pas que cela ne me fait rien de savoir que je lui fais du mal ?
Je le regarde et quand il se retourne, je recule d'un pas. Je n'aimerais pas qu'il m'abîme, j'ai ma baguette dans la poche et je ne voudrais pas être obligée de lâcher mon livre juste pour la récupérer et balancer Jeremiah à l'autre bout de la pièce pour sortir avant d'être à mon tour attaquée.
Mais il n'est pas agressif, ce sont les mots qu'il emploie qui me torturent.

Je fronce les sourcils, comment ose-t-il me parler de la sorte ? Ai-je fait quoi que ce soit pour que ce moment soit embarrassant ? Depuis que je l'ai rencontré, il n'y avait que des soucis, partout. Il mêlait sa synergie à mon esprit, me faisant douter sur beaucoup trop de choses... Il était plus difficile à comprendre qu'un bouquin d’arithmancie. Cependant, je n'apprécie guère que l'on me parle sur un ton de condescendance, je conçois qu'il soit blessé. Mais il ne faut pas oublier à qui il parle.
Quand il insiste sur mon nom de famille, un léger frisson me remonte le dos jusqu'à se figer dans ma nuque.
J'ai eu tort de venir ici. Je resserre le livre de mon défunt père avant de lui lancer un regard foudroyant. Il suffit, qu'il se taise. La colère me submerge, j'ai envie de lui sauter à la gorge, de l'étrangler, de passer ma frustration en voyant son visage rougir sous le manque de souffle, sortir ma baguette... Endoloris que je murmurais pour qu'il s'excuse d'avoir insulter mon intellect. Mais je laisse ça dans mes pensées, je le regarde simplement. Le visage entièrement fermé, je n'ai même pas mon sourire en coin, j'ai juste les yeux assombris par la colère... La haine ? Non, je l'aime toujours. Mais il outrepasse ses droits envers moi. Je ne suis rien pour lui, il n'a rien à me dire, rien à m'apprendre.

Il s'éloigne, il s'en va, je vais pouvoir remettre mes idées en place. Mais je reste de glace, figée à le regarder s'éloigner. Je suis venue parce que... parce que quoi d'ailleurs ? Je ne sais pas pourquoi je suis venue. Je fronce les sourcils, j'en ai plus que marre de toutes ces histoires, de ces suspicions... de ses doutes. Ma fierté est plus forte que tout, et ma colère est infinie. Je suis une Serpentard, et rien ne m'arrête... Mais j'aurais peut-être du retenir mes mots.

« Tu es idiot, mon pauvre Jeremiah. Je ne crois pas tout connaître, je connais tout. Je ne sais rien de toi parce que je ne veux pas savoir. Je suis égoïste, c'est un fait, ce n'est pas nouveau... Toute l'école est au courant ! Quant au hibou, c'est TOI qui m'a demandée de venir, triple andouille ! »

Je cris, je le retiens presque, j'ai besoin de parler. Même si c'est pour lui cracher ma haine. Les larmes montent doucement au bord de mes yeux, alors que je les retiens avec toute la volonté du monde, malgré la fatigue. Une dame ne pleure pas. Et je ne lui donnerai pas cette satisfaction, tandis qu'il laisse ses larmes couler. Je n'ai jamais vu un homme pleurer... Mon père ne pleurait que de joie... Il n'était qu'amour. Berk. C'est répugnant.

« Et je te prierai de me parler autrement, Jeremiah. Je ne suis pas ta copine. »

Et oui, bien sûr, rajoutons-en une couche.
Je lui tourne le dos pour me laisser aller à une larme pour me libérer de la colère, un tant soit peu. Un instant. Qu'il se taise... Pourquoi cela partait-il en sucette ? L'honnêteté ne primait donc pas ? Je ne voulais pas me servir de lui pour assouvir des désirs charnels. Et voilà ma récompense.
Anton... Je voulais tellement le retrouver.
Jeremiah me déteste.

Allons bon, voila qu'il commençait à pleurer, et qu'il commençait également à regretter d'avoir jeté son dévolu sur Alycia. C'était maintenant la deuxième fois qu'elle s'ouvrait un peu avant de se refermer, a être vexante. Jeremiah, qui ne découvrait que vraiment le concept d'être amoureux, voulait partir. Cette fille n'était clairement pas pour lui. Mais pourquoi donc ne s'en était-il pas rendu compte à la Saint-Valentin, quand il l'avait vu avec Drago tout en ayant Anton qui avait eu l'air de tourner temporairement autour d'elle ? Ou alors même après le lac, quand elle s'était enfoui ?

« Le cœur à ses raisons que la raison ignore », ce proverbe était totalement vrai et Jeremiah détestait son cœur. Cette peine qu'il ressentait, logique pour un adolescent, était trop forte. Et la Serpentarde continua de l'enfoncer.

- Et c'est qui qui m'a sauté dessus en arrivant ? Qui est-ce qui est arrivé en tombant ? Oui, tu es une égoïste, et si ça te plaît que toute l'école soit au courant, alors tant mieux pour toi. Maintenant que tu as ton si précieux livre, on plus de raison de se voir. Ça devrait te plaire ça, non ? Alors, tu m'excuse, mais j'ai d'autres chats à fouetter.

Son ton n'avait pas était des plus calme, mais il avait été étouffé par la brise que commençait à se lever. Il ne s'était pas retourné, il ne remarqua donc pas qu'Alycia était dans la même position et état que lui. Et, même s'il l'aurait vu, cela ne l'aurait pas affecté. Il était énervé, déçu et surtout, il la détestait. Et il l'aimait. Avant de craquer de nouveau, il ne demanda pas son reste et partit.

En descendant les escaliers, il se promit une chose. Plus jamais il n'écouterait son cœur.