Oh you bite your friend like chocolate ♢ Anton & Mia

« Oh you bite your friend like chocolate »

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Les jours passaient à Haveirson et ne se ressemblaient pas, Mia s’en était rendu compte très vite et elle n’échangerait cette vie très animée pour rien au monde. Elle se sentait bien au château, les gens étaient accueillants et chaleureux, les professeurs à l’écoute et passionnés, ses parents lui manquaient un peu mais elle avait peu de temps pour réellement y penser… et puis il y avait Anton Costello… son acolyte de toujours et de tous les jours.

Ils étaient installés tous les deux dans le grand salon d’Haveirson, près de la grande cheminée qui était bien appréciée en ce mois de février. La pièce était plutôt bondée à cette heure-ci, c’était un des lieux du château où l’on pouvait laisser un peu les couleurs de sa confrérie de côté pour passer du bon temps entre étudiants. Les pics entre maisons allaient bon train mais c’était dans une atmosphère plutôt légère de camaraderie et de plaisanterie.
Mia avait rapporté des confiseries de chez Honeydukes ainsi que de quoi se désaltérer, c’était un peu l’encas de fin de journée pour se détendre après leur journée de cours intensifs. La semaine était longue surtout après le bal de Saint-Valentin qui les avait fait veiller jusqu’au petit matin : débriefing de soirée oblige ! La douce chaleur du feu léchait leur visage et l’ambiance était à la détente.

La conversation fut interrompue par des piaillements sonores en provenance de la fenêtre, une élève s’acharnait actuellement sur la poignée s’irritant qu’elle était rouillée ou gelée. Un hibou voletait gaiement à derrière la vitre, apparemment heureux de voir une fille s’écheveler pour lui ou seulement à l’idée de pouvoir se mettre au chaud. Les deux abraxans la laissèrent s’acharner quelques secondes en riant avant que le jeune homme se lève pour s’occuper de cette fenêtre réfractaire.
Mia pensa que n’importe qui aurait pu résoudre la situation en un coup de baguette, mais ça lui faisait plaisir de voir son beau colocataire surgir tel un héro plein de muscles. Le rapace s’engouffra à l’intérieur à peine la fenêtre entrebâillée, il voltigeait désormais dans le salon au-dessus des élèves, semblant à la fois chercher quelque chose à se mettre sous le bec et le destinataire du gros paquet ficelé à sa patte. C’est finalement sur la table basse, en face de l’abraxane que le hibou se posa : « Oh c’est pour toi Anton ! », elle s’appliqua alors à défaire le nœud qui retenait le petit colis afin de délivrer l’animal de ce fardeau.

« Oh you bite your friend like chocolate »

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Ils avaient enfin finit leur journée de cours. Bien que ceux-ci soient passionnants, Anton n'avait jamais été très scolaire. Certes, il aimait les avantages de l'Académie, le cadre, avoir ses amis à proximité, la possibilité de profiter de ses belles années ici. Les vieux bouquins et les professeurs tyranniques, beaucoup moins.

Ce fut donc dans un soupir à peine retenu que l'Abraxan se laissa aller dans un fauteuil près de la cheminée du salon commun. Il était toujours étrange de laisser son blason de côté lorsque l'on entrait dans cette pièce, bien que l'on reste toujours, au fond de soi, d'une certaine couleur. Le grand brun balança son sac au sol, offrant un sourire satisfait à sa colocataire. Ces derniers jours, il avait eu l'occasion de la voir un peu plus, ce qui le ravissait. Il aimait passer du temps avec la jolie blonde pour comploter, ou juste discuter de leurs journées respectives. La chaleur des flammes vint le réchauffer doucement. Les couloirs de l'Académie étaient un nid de courants d'air ce qui, en cette froide journée de février, n'était pas peu dire.

Mais à peine eut-il le temps de commencer à se détendre réellement qu'une jeune femme semblait se bagarrer - bruyamment - avec la poignée de la fenêtre. Il poussa un léger soupir, lança un regard évocateur à Mia et se leva en direction de la source du problème. Un petit hibou, portant un assez gros paquet, semblait luter pour garder l'équilibre au dehors. Il ouvrit donc rapidement la fenêtre pour laisser entrer le petit animal ébouriffé. Ce dernier le suivit et, alors qu'Anton retrouvait sa place au coin du feu, vint déposer le paquet sur la table devant lui. Mia, toujours là pour rendre service, commença à déballer le colis qui lui était adressé.

- Il n'y a pas d'expéditeur...

Il n'aimait pas réellement recevoir des paquets inconnus mais, devant lui, se tenait la boîte de ses chocolats préférés. Et le creux dans son estomac se transforma en cratère. Avec un grand sourire, il ouvrit la boîte avec précaution, la posant sur ses genoux. Il porta ce délicieux chocolat à sa bouche, croquant avec plaisir la petite sphère chocolatée. Celle-ci vint se rompre sous ses dents, libérant un arôme divin. Son cerveau s'embruma. Tout était toujours plus beau avec ces confiseries. Il leva les yeux vers Mia, pour lui tendre la boite, mais fut stopper dans son geste. Comment n'avait-il jamais pu remarquer la finesse des traits de son visage, les fossettes creusées dans ses joues lorsqu'elle souriait... La finesse de ses courbes...

Il se recula dans son fauteuil, admirant plus aisément la jeune femme devant lui. La plus belle qu'il n'ait jamais pu voir.

Mia finit de décrocher le paquet de la patte de l’animal et lui fit apparaitre des biscuits revigorants pour hibou car le rapace semblait affamé. Il profita de cet instant d’inattention pour pincer le doigt de la jeune fille comme pour lui signifier qu’elle n’allait pas assez vite. La douleur fut fulgurante ce qui détourna l’attention de l’étudiante. Elle n’eut ainsi pas le temps de réagir à la remarque d’Anton et ne put exprimer sa méfiance vis-à-vis du contenu du paquet… L’estomac du jeune homme avait déjà pris la main sur la raison et il croquait alors avec passion dans un chocolat…

Elle s’attendit à le voir recracher tout ce qu’il avait dans la bouche, à la tête du hibou suite à une mauvaise plaisanterie d’un étudiants d’une confrérie rivale ou à s’écrouler au sol sous l’effet d’un poison… Mais il n’en fit rien. Elle vit sa mâchoire se carrer et ses grands yeux bruns se fermèrent preuve inéluctable qu’il appréciait la confiserie… la satisfaction et la béatitude envahirent petit à petit le visage de son colocataire et la lucidité quitta petit à petit son regard.
Mia savait que l’abraxan affectionnait par-dessus tout cette marque de chocolat mais là c’était au-delà de l’adoration… il restait ainsi, le regard dans le vague, comme si on l’avait mis en pause, mais ce n’était pas sur la boîte de chocolat, ni sur le chocolat lui-même qu’il bloquait, mais sur elle…

Des sensations étranges envahirent la jeune fille, d’abord l’appréhension : mais que se passait-il ? Puis de la crainte : est-ce qu’il va bien ? Et de l’embarras : qu’est-ce qu’il lui arrive pourquoi il me dévisage comme ça ? Et enfin de la confusion : ce regard ardent braqué sur elle comme s’ils n’étaient plus que tous les deux dans le salon, comme si elle était la seule dans cette pièce.

D’ailleurs elle en avait oublié tout le monde, de l’étudiante piailleuse près de la fenêtre, au hibou qui l’avait pincé quelques secondes auparavant, tout était allé très vite, et maintenant ils semblaient flotter dans une atmosphère à la fois cotonneuse mais tout autant électrique et chargée en sensations, qui les coupait du reste du monde.
Mia sentit son ventre se nouer se qui la ramena un peu à l’a réalité. Elle semblait cependant paralysée, mais il fallait qu’elle rompe ce silence, cet échange visuel si intense…. Si d’autres étudiants les regardaient actuellement ? Les rumeurs s’emballeraient plus que jamais. La jeune fille déglutit et prit une grande inspiration pour tenter de reprendre contenance : « Anton, ça va ? ». Le jeune homme restait-là clignant des yeux un sourire ravageur au coin des lèvres.  

Anton ne pouvait s'empêcher de braquer son regard dans celui de Mia, rieur et tout aussi embarrassée lui semblait-il. Mais peu lui importait. Son cerveau semblait avoir fait ses bagages pour se retirer dans un coin sombre de son esprit. Il avait l'impression - s'il était encore capable de ressentir quoi que ce soit - que le salon commun avait été flouté. Ne laissant pour seule mise au point que le visage délicat et rosit de Mia Johnson.
L'Abraxan posa la boîte de chocolats sur la table, en se penchant vers l'avant. Il avait soudain extrêmement chaud auprès de l'âtre qui diffusait sa chaleur plus intensément que jamais. Le jeune homme enleva alors son pull, qui posa négligemment sur l'accoudoir de son fauteuil. La pièce semblait s'être vidée de toute activité, de toute personne.

Son regard toujours vissé sur sa colocataire, Anton se leva souplement. La distance qui le séparait de Mia devenait, à chaque seconde qui passait, plus difficile à supporter. Il la connaissait si bien, par coeur presque. Il avait cet irrépressible besoin de sentir son parfum, d'apprécier sa chaleur corporelle. Après avoir contourné la table entre leur deux fauteuils, l'étudiant en médicomagie s'approcha  encore plus, jusqu'à venir poser ses mains sur chacun des accoudoirs, encadrant la belle blonde dans son assise. Il se pencha encore un peu plus, leurs visages à quelques centimètres de celui de sa comparse. Il pouvait voir la petite ridule naitre au milieu de son front, signe de son incertitude. Mais il n'était, à présent, plus en capacité d'avoir des états d'âmes. De savoir si, en quelque sorte que ce soit, son attitude importerait leur amitié, la chose la plus précieuse pour lui ici.

Il n'était plus en état de quoi que ce soit, si ce n'était d'aimer, au plus profond de lui cette magnifique jeune femme se tenant devant lui. Comment avait-il pu ne pas se rendre compte plus tôt de tous ces sentiments qu'il avait si longtemps refoulé. Biensur qu'il étaient faits pour être ensemble. Les rumeurs comprenaient toujours une part de réalité non ? Sa voix douce, et cristalline vint retentir à ses oreilles. Sensation si agréable.

- Parfaitement...

S'il avançait un peu plus, ses lèvres toucheraient celles de Mia. Mais il plongea une nouvelle fois son regard dans le siens, voulant profiter de cette vue inégalable. Un panel d'émotions enserrant son coeur qui, lui semblait-il, aurait pu exploser de sentiments pour elle.

« Parfaitement... » La voix du jeune homme résonna au plus profond de la jeune fille, s’en était assourdissant. Tous ses sens étaient en éveil, cela l’étourdissait. Elle aurait été incapable de décrire tout ce qui lui passait par la tête, son cerveau tournait à mille à l’heure elle aurait voulu l’arrêter de fonctionner ou tout simplement comprendre ce qui lui arrivait. C’était tout nouveau pour elle, ou alors se voilait-elle la face depuis si longtemps ? Ces sentiments-là étaient-ils présents depuis des années attendant juste de surgir lorsque le moment serait le bon, lorsqu'elle s'y attendrait le moins ? En tout cas elle les ignorait mais ne trouvait pas spécialement toute cette déroute d’émotions désagréable.

Son cœur battait la chamade, sa respiration était saccadée, il était si proche, si ardent, si décidé... Mia avait l’impression qu’on l’avait désormais jetée toute entière dans le feu de la cheminée, elle suffoquait, s’embrasait. Est-ce qu’elle était morte et était arrivée en enfer ? Non tout lui semblait étrangement réel et tout avait si soudainement basculé après une boite de chocolat.
Ils n’étaient sans doute pas si innocents ceux-là songea-t-elle, mais finalement peut-être était-ce un mal pour un bien ? Il y avait sûrement beaucoup trop de témoin dans ce salon mais elle était incapable de voir autre chose que lui, son regard, ses lèvres, son souffle chaud sur son visage et cette douce odeur de chocolat qui lui donnait le tournis. Après tout, ils étaient Anton et Mia ils trouveraient toujours une façon de se sortir d'affaire, ils y étaient toujours arrivés, ils n’en étaient pas à une fois de trop.

Mia resta là pantelante, plongea ses yeux dans les siens, elle avait l’impression de jouer avec le feu et la chaleur envahissante n’arrangeait rien, elle sautait dans le vide sans balai, ni parachute et elle ne savait pas encore si la chute serait douloureuse ou exquise.
L’abraxane ferma les yeux et franchit les quelques centimètres qui la séparait auparavant du jeune homme. Leurs lèvres se touchèrent, pressantes, intenses.
L’étudiante était transie, fiévreuse, parcourue de délicieux frissons, elle entremêla ses doigts autour du poignet d’Anton. Elle le découvrait sous un angle nouveau à présent et cela ne lui déplaisait pas.

Sentir les doigts fins et délicats de Mia s'accrocher à ses poignets, donnait à Anton l'impression qu'elle souhaitait s'aimer à lui, comme un voyageur à la dérive s'accrochant à une embarcation de dernière chance. Si son cerveau avait été en mesure de fonctionner correctement, il aurait remercier Quiconque régnait sur ce monde pour lui avoir envoyé ces chocolats. Car c'était bien une intervention d'autrui qui avait poussé Mia à briser la dernière séparation entre eux. Si son cerveau avait fonctionné correctement, il se serait également dit qu'ils allaient probablement faire les gros titres des potins de l'école.

Mais son esprit était ailleurs, il était avec la belle Mia. Celle qui partageait sa vie depuis des années avait aujourd'hui épousé un nouveau rôle à ses yeux. L'Abraxan lui rendit le baiser qu'elle venait de lui offrir, pressante mais toujours aussi douce et délicate. L'une de ses mains se détacha du fauteuil sur lequel il avait pris appui, pour venir lentement encadrer le visage somptueux de la belle blonde. Il ne voulait perdre aucune occasion de la toucher, de caresser sa joue délicate, de passer doucement ses doigts sur ces traits d'une finesse exquise.
Il laissa ses lèvres parcourir suavement la ligne de la mâchoire de Mia, avant de revenir vers sa bouche et de l'embrasser à nouveau.

Il aurait été incapable de dire ce qu'il l'avait empêcher de faire ça toutes ces années. Comment ce feu qui le ravageait à présent de l'intérieur, ne l'avait pas entièrement consumé toutes ces années durant. Il reposa sa main sur l'accoudoir, cherchant à nouveau ce contact chaud et réconfortant de la main de sa colocataire contre sa peau. Il avait toujours plus chaud, mais n'était plus sur de savoir si cela émanait toujours de la cheminée ou bien de lui à présent.
Il détacha ses lèvres des siennes, douces et avenantes pour croiser son regard. Il afficha un sourire, qui semblait ne plus vouloir le quitter.

- Sorry, I'm not sorry... lui souffla t'il doucement. Presque dans un murmure, qui n'était destiné qu'à eux.

Anton était là caressant son visage, l’embrassant, l’aimant. La conscience de Mia avait disparue en fumée au contact des lèvres du jeune homme et semblait avoir pris ses quartiers d’hiver dans une autre galaxie. C’était intense, profond, chacun de ses gestes la faisait vibrer, le temps semblait lui aussi lui jouer des tours. Elle ne savait pas si tout allait trop vite ou au contraire si les secondes duraient des années. Le bras du jeune homme quittait son visage pour retomber sur l’accoudoir, la jeune femme ne voulait pas perdre le contact, CE contact, elle riva ses yeux dans les siens.

Il détachait à présent ses lèvres des siennes et un sourire s’y dessina : mélange de ce qu’on pourrait apparenter à de la satisfaction, du plaisir…  L’abraxane se sentait comme après son quatrième shooters de rhum, elle ne répondait plus de ses actes. « Sorry, I'm not sorry... » souffla-t-il, elle n’était désolée de rien, elle non plus… du moins pour le moment.

Elle remonta sa main le long de son bras, jusqu’à le poser délicatement autour de son cou, tout en se relevant. Si elle avait été en état, elle n’aurait absolument pas parié sur la capacité de ses jambes à la tenir debout à cet instant précis et encore moins sur les hauts-talons qu’elle avait enfilés le matin même. Mia, paraissait moins minuscule à présent, elle pouvait le sentir contre elle désormais, il était là, bien là, c’était réel. Elle posa son autre main contre son torse, elle pouvait sentir son cœur battre au creux de sa paume. Ses doigts se frayèrent un chemin jusqu’à sa nuque et se glissèrent entre les boucles du jeune homme. Ses lèvres trouvèrent les siennes de nouveau. Leur étreinte fut douce, savoureuse,…

L’abraxane fut tirée de son duveteux écrin par un toussotement extérieur, la ramenant brusquement à la réalité. Un calme impérial régnait dans le salon commun, on n’entendait plus que le crépitement du bois se consumant dans la cheminée, elle espéra pendant quelques secondes que tout le monde avait déserté les lieux pour aller dormir, manger, étudier, loin d’ici... Mia était haletante et l’incompréhension filtrait sur le visage du jeune homme, elle aurait voulu disparaitre, avec lui : « Merde Anton qu’est-ce qu’on a fait ? » chuchota-t-elle.

Un nouveau sourire vint s'ancrer aux lèvres de l'Abraxan. Il pouvait voir et ressentir le contact de Mia se déplacer sur sa peau. La vague de chaleur, elle aussi, s'insinuait dans chaque espace de son épiderme ayant été en contact avec elle. Il ne la quittait plus des yeux, détaillant chaque aspect de son corps. Chaque expression de son visage. Tout chez elle était attrayante. Le fait que, derrière ce masque de confiance et d'attitude se cachait de l'intimidation et de l'insécurité de se retrouver dans cette position. Le doute dessinait de douces ridules d'expression sur ce visage pâle et élégant, ce qui le confortait dans ses actions.

Ce fut elle qui vint se lever pour l'embrasser à nouveau. Elle qui posa une main sur son buste pour ne pas briser leur contact, leur étreinte. Lui, avait déposer une main dans son cou, sentant son pouls contre sa paume. L'autre, parcours sa hanche, la pressant contre lui pour l'avoir toujours plus près. Il savoura cet instant qui n'appartiendrait qu'à eux.

Sur cette pensée un toussotement vint briser le charme de l'ambiance. Car si Anton avait choisi de l'ignorer, Mia semblait troublée, presque désolée de ce qui venait de se passer. Ce qu'elle lui dit par la suite ne fit cependant pas chavirer les sentiments nouveaux qui se développaient toujours plus vite pour la belle blonde.

Le grand brun jeta un regard noir à celle qui avait osé ruiner ce moment. Ce n'était probablement pas la première fois que des étudiants s'embrassaient dans le salon commun, et probablement pas la dernière... Mais il n'avait pas envie de réfléchir à ce genre de futilités. Il glissa sa main dans celle de Mia, et attrapa son sac à dos et le reste de ses affaires.
Ce faisant, il fit basculer la boite de chocolats qui vint atterrir sur le sol, à côté d'une note manuscrite et de la photo d'une jeune femme, inconnue de l'étudiant. Il attira sa colocataire dans le couloir, à l'abris des regards de potentielles mijaurées.

- Ce qu'on aurait dû faire depuis longtemps...

Il l'embrassa de nouveau. Ses lèvres se faisant plus pressantes, plus demandeuses. Posant sa main sur le mur au-dessus de la tête de la superbe blonde, il l'attira à lui de l'autre. Ce contact, qu'elle lui avait offert quelques secondes auparavant, avait eu un gout de trop peu. Il souhaitait que leur étreinte soit toujours plus intense, plus prononcée. Il la voulait elle, pour lui seul. A jamais.

Non loin de le stopper la phrase de la jeune femme semblait avoir suscité encore plus d’intérêt de la part d’Anton. Il était fébrile, hâtif dans ses mouvements. En ramassant ses affaires, il renversa la boîte de chocolats. Les petites sphères chocolatées s’éparpillèrent aux pieds de l’abraxane et une photo ainsi qu’un message s’échappèrent de la boite…
La vérité, la dure réalité, qu’elle avait voulu ignorer les minutes auparavant, vinrent la frapper comme une gifle sur un visage gelé, la tirant du nuage sur lequel elle s’était perchée.  

Toutes ces émotions avaient été provoquées par cette boite de chocolat, par cette inconnue qui méticuleusement avait empoisonné chacun de ces petits chocolats. Elle devait être verte de jalousie à l’heure qu’il était et elle avait fait redescendre la belle blonde de son piédestal sentimental en un quart de seconde. L’étudiante sentit ses entrailles se tordre, elle était déboussolée. L’abraxan la tira en dehors du salon commun, la sortant de la torpeur dans laquelle elle s’était plongée. Elle se laissa entrainée, assommée.

Dans le couloir il se fit plus insistant, plus intense, comme si l’obscurité du lieu, laissait s’évaporer les derniers grains de poussières de pudeur. Il était partout autour d’elle et sa grande taille n’y était pour rien.
Il fallait que cela cesse, cela ne pouvait pas se poursuivre, pas dans cet état, pas dans ces conditions. Il fallait qu’elle fuit, qu’elle trouve une solution, un antidote, qu’elle le sorte de là. Mia se dégagea de cette vive étreinte, posa sa main sur son torse pour le tenir un peu à distance et murmura : « Anton, non arrête, ça ne peut pas continuer – elle déglutit – pas comme ça… » sa voix se brisa dans le grand couloir glacial en cette période de l’année, ses mots résonnèrent dans sa tête et son cœur battait à tout rompre à ses tempes. Elle avait réussi à soutenir son regard, et ses yeux dans le vague justifièrent un peu plus, tout ce qui venait de se passer. Toutes les preuves étaient là depuis le début…  

Elle en avait oublié son sac dans le salon de l’autre côté du mur, il allait falloir qu’elle y entre pour le récupérer et affronter les regards accusateurs des autres étudiants. Elle espérait que les discussions avaient repris leur cours et qu’elle pourrait se glisser jusqu’au fauteuil sans réflexion. Elle le laissa là, abasourdi et l’incompréhension se lisait sur son visage. Il chercha à la retenir mais titubant Mia parvint jusqu’à la porte du salon où elle s’engouffra. Elle se sentait affreusement mal et tentait de rassembler ses esprits pour trouver une solution.

Il fut incapable d'ingurgiter les mots qu'elle venait de lui lâcher. Mia s'éloigna doucement. Il pouvait la sentir dresser une barrière entre eux. Il essaye de la retenir alors qu'elle retournait vers le salon, en vain. C'était comme d'essayer d'attraper une volute de fumée entre ses doigts, celle-ci finissait toujours à s'échapper d'une manière ou d'une autre, laissant l'attrapeur témoin incapable de l'action en cours. Le cerveau d'Anton semblait coincé. Comme si celui-ci avait été déplacé dans un lieu inconnu, empli de brouillard et dont la route n'était que peu praticable.

Pourquoi fuyait-elle ainsi ? Avait-elle envie de fuir sa personne ou bien ses propre sentiments ? Car de ce qu'il avait pu voir, Mia n'avait pas repoussé l'Abraxan. Pas réellement en tous cas avant ces dernières secondes. Il ne savait pas ce qui avait provoqué ce changement mais, il en était persuadé, sa magnifique colocataire reviendrait vite à ses esprits et, sans nul doute, à ses sentiments pour lui.

Il s'appuya sur le mur, le dos toujours lacéré par cette vague de chaleur qui semblait diminuer au fur et à mesure que Mia mettait de la distance entre eux. La pierre fraiche vint alors racler un papier dans sa poche arrière. C'était une lettre. Il la déplia et la lu brièvement, fronçant un peu plus les sourcils à chaque nouveau mot. "Alycia"Il était, en cet instant, incapable de se souvenir qu'il avait déjà répondu à cette lettre un peu plus tôt dans la journée. Il sortit un bout de parchemin de son sac, écrivit quelques mots - sans presque aucun filtre -, traduisant de son état d'esprit actuel. Il plia le bout de papier lacéré de mots violents et blessants et l'attacha à la patte du petit hibou qui était arrivé dans le salon commun pour lui délivrer son paquet. La missive en route et le coeur plus léger de n'avoir plus à se préoccuper de ce problème, Anton revint vers Mia, sous les yeux attentifs et scrutateurs des autres étudiants.

- On y va ?

Il lui offrit un petit sourire ainsi que sa main pour qu'elle y glisse ses doigts fin et délicats. la pièce était devenue étouffante et les discussions à voix basse des autres élèves de l'Académie mettaient sa patience à rude épreuve.

Les regards se tournèrent vers Mia quand elle entra dans le salon, c’était un peu une tradition dans les pièces communes d’Haveirson. Tout le monde dévisageait chaque nouvel arrivant des pieds à la tête, afin d’y aller de ses petits compliments, remarques et critiques. Et elle n’était jamais en reste habituellement, lorsqu’il s’agissait de ce genre d’activité. L’abraxane lut dans les yeux de certain qu’ils étaient contents de la revoir ici, mais ce n’était pas une joie amicale et prévenante, mais plutôt un bonheur sadique : cela alimenterait sûrement certaines conversations déjà en cours.
En temps normal la jeune femme aurait pris le temps de lancer des regards noirs et des petits maléfices par-ci par-là afin de rappeler aux étudiants à qui ils avaient affaire et de leur faire passer l’envie de cancaner dans son dos. Mais elle n’en avait pas la force, elle avait besoin d’être seule, de réfléchir. Elle attrapa rapidement son sac, y fourra, avec la même rapidité, les petits chocolats, la boite, la lettre et la photo afin que tout ceci ne tombe pas entre de mauvaises mains… Cela pouvait causer tant de dégâts, faire basculer tant de choses…

Elle s’apprêtait à ressortir lorsque l’abraxan apparut par l’embrasure de la porte, son beau sourire toujours ancré sur son visage et sa démarche assuré : « On y va ? ». Mia, fut stoppée net, elle ne pouvait pas le rejeter de nouveau, pas devant tous ces étudiants avides, pas près de toutes ces oreilles sorties qui n’attendait que d’en savoir plus… « Oui, oui je suis là - murmura-t-elle en le poussant délicatement dans le couloir. – Écoute Anton… – Elle prit une profonde inspiration – J’ai beaucoup de travail et des recherches à faire, il faut que j’y aille, rentre au dortoir, je t’y rejoindrai, j’essaye de faire vite… - Elle riva ses yeux dans les siens - Promis... » Elle lui déposa un léger baiser sur la joue et parti rapidement en direction des escaliers. Il fallait absolument que le jeune homme aille au dortoir et qu’il ne cherche pas à la trouver. Elle avait laissé planer le doute en partant, précisément dans cette optique-là.
Ses pas résonnaient dans les hauts couloirs et elle avait subitement atrocement froid. Elle se sentait vide et avait le tournis, elle marchait pour fuir, pour s’éloigner de ce salon commun et de ce qu’il s’y était passé.

« Mia... reste avec moi. » La jeune femme ne put se résigner à l’envoyer sur les roses, il semblait si fragile. Cet Anton-là n’avait rien à voir avec celui qu’elle connaissait, elle ne pouvait le laisser déambuler seul ainsi… pas dans cet état. Elle le laissa donc faire lorsqu’il lui prit la main, et enroula sensuellement ses doigts autour des siens. Ils traversèrent ainsi le château, main dans la main jusqu’à la salle commune d’Abraxan.

L’étudiante, adoucit par l’agréable chaleur qui émanait de la main d’Anton contre la sienne, aurait presque baissé la garde. Mais elle se ressaisit en pensant aux chocolats philtrés cause de tout cela, dans son sac. Elle prit le temps de rassembler ses pensées afin de réfléchir à un plan. Elle ne pouvait pas attendre que les effets du philtre s’estompent, qui sait combien de temps cela pouvait-il durer ? Il lui fallait un antidote pour que tout cela cesse, ou du moins pour que cette relation, ces sentiments, ces émotions existent sans euphorisant… Naturellement.
Heureusement pour Mia (et pour lui), elle avait toujours été une élève très curieuse et studieuse, aussi avait-elle souvent lu et relu des livres de potions. Elle savait donc approximativement comment fabriquer un antidote au philtre d’amour. Il lui faudrait récupérer son carnet de notes au dortoir. Elle essaya de lister mentalement les ingrédients nécessaires et songea qu’elle pourrait sûrement facilement s’introduire dans une salle de potion pour se les procurer et fabriquer le remède.

Mia n’y pensa pas tout de suite, mais elle avait entre les mains, son premier patient à « guérir ». Anton lui jetait régulièrement des regards amoureux par-dessus son épaule, comme pour s’assurer qu’elle suivait toujours. Elle ne pouvait pas le quitter et il n’était visiblement pas décidé à la laisser aujourd’hui. L’abraxane médita sur les possibilités qui s’offraient à elle afin de se défaire de lui le temps de préparer la panacée, cela lui nouait le ventre mais elle devrait sans doute utiliser la méthode forte afin de le maintenir en place le temps de la fabrication.
La belle blonde pria au fond d’elle pour qu’à cette heure la salle commune ne soit pas trop pleine de monde, elle ne tenait pas à ce que son Anton soit exposé, si vulnérable aux yeux de tous. Elle savait que le jeune homme se détesterait dans cet état là et serait sûrement très gêné de tout ce qu’il avait pu arriver. Elle ne savait pas vraiment comment elle arriverait à gérer cette situation elle aussi, cela avait déclenché en elle des choses qu’elle ne soupçonnait pas.

Ce monologue intérieur avait plongé Mia dans de profondes pensées, elle n’avait ainsi pas vu le temps passer. Ils se glissaient déjà dans la salle commune d’Abraxan, qui était, à son grand soulagement, désertée pendant le repas. Le jeune homme se tournait à présent vers elle pour la serrer contre lui, elle se laissa faire et profita du moment où elle était dans ses bras pour lui murmurer : « Anton, et si on allait plutôt s’installer dans notre dortoir ? – Elle lui adressa un sourire qui se voulait enjoleur – Nous y serons plus au calme. »

Ils gravirent les marches menant aux dortoirs, Anton la tenait toujours par le poignet, bientôt ils entreraient dans leur chambre, il faudrait qu’elle soit rapide pour éviter à la situation de partir plus loin que ce qu’elle ne l’était déjà. Le jeune homme ouvrit la porte et avança lentement dans la pièce.

Mia se baissa pour enlever ses escarpins tout en poussant la porte pour qu’elle se ferme derrière eux. Elle profita du fait que l’abraxan lui tourne le dos pour lui assener un gros coup d’escarpin sur l’arrière de la tête : « Désolée Anton, mais c’est pour ton bien. » murmura-t-elle. L’étudiante eu le temps de ralentir sa chute en utilisant le sortilège Aresto Momentum et le fit ensuite, doucement léviter jusqu’à son lit afin qu’il soit au moins, installé confortablement. La jeune femme remercia intimement son frère de lui avoir enseigné quelques rudiments d’arts martiaux et griffonna en hâte un mot, dans le cas où son colocataire se réveillerait avant qu’elle ne soit revenue :

La jeune femme récupéra son carnet de notes de potions, ainsi que le plan d’Haveirson et sorti précipitamment de la chambre en prenant soin de fermer correctement la porte. Tout en marchant à vive allure, l’étudiante déplia le plan de l’université à la recherche d’une réserve d’ingrédients de potions et d’une salle où elle pourrait fabriquer tranquillement son antidote. Elle trouva assez facilement ce qu’elle cherchait au rez-de-chaussée.
Cette potion ne nécessitait que trois ingrédients, qu’elle trouva sans trop de mal grâce au classement minutieux du matériel. Elle profita que tout le monde, professeurs et élèves se trouvent au réfectoire pour s’installer dans le laboratoire de potions juste à côté de la réserve. Après de nombreux mélanges, dans un sens puis dans l’autre, et maints changements de couleurs, Mia en comptabilisa dix-sept, l’antidote pris enfin la couleur rose souhaitée. L’étudiante ne put réprimer une exclamation de joie, elle en remplit deux petites fioles (on ne sait jamais cela pourrait servir un jour ou l’autre) et lança un sortilège de récurage à son chaudron. L’abraxane quitta la pièce sans s’y attarder plus longtemps.

En parcourant de nouveau les longs couloirs du château, elle senti l’appréhension l’envahir peu à peu. Et s’il ne se rappelait de rien ? Et si elle avait été la seule à ressentir quelque chose ? Et si leur amitié se terminait au réveil du jeune homme après ce qu’il s’était passé ?
C’est la peur au ventre que l’étudiante rouvrit la porte de son dortoir. Anton était toujours allongé, là où elle l’avait quitté quelques minutes ? quelques heures ? elle n’en savait rien, auparavant.
Quand elle s’approcha de lui, l’étudiant commença à bouger. Elle profita de ce moment de semi-réveil pour déboucher, les doigts tremblants, la petite fiole au liquide rosé : « Tiens Anton, bois, ça va aller,… à nous ! ». Et elle fit basculer l’antidote dans la bouche du jeune homme.