25 AOUT 1974« Quand tu auras fini de t'extasier devant ses yeux gris, peut-être qu'on pourra lui choisir un prénom ? » C'était dit avec beaucoup de second degré et un véritable soulagement de voir l'homme de sa vie tenir l'enfant que leur amour avait conçu. Sans même lâcher sa fille du regard, le jeune papa se vit répondre assez négligemment.
« Mais je l'ai déjà déclarée à la mairie... » Oh oh.
« Comment ça, tu l'as déjà déclarée à la mairie ? T'as donné un nom à mon bébé sans me demander ? » « Bah on avait convenu de Cliodna non ? » Ah que c'est beau d'être jeunes parents...
« Euh... Non. TU avais convenu de Cliodna, moi je voulais pas que mon bébé est un prénom aussi... Bizarre. » « T'inquiètes pas, j'ai mis Amara en deuxième prénom. » Le silence qui suivi cette déclaration aurait dû être préventif.
« MAIS C'EST PAS UNE EXCUSE ! » Le dit bébé en question sembla autant apprécier le cri que son papa et commença à pleurer de tout son soûl.
« Ah bravo madame, bravo, t'as fait pleuré ma princesse. » « Jusqu'à preuve du contraire, TA princesse est sortie de MON vagin alors je pense que je fais aussi parti de son entourage proche. » Non, elle ne boudait pas. C'est pas à trente-deux ans qu'elle allait se mettre à bouder...
« Tu boudes. » « Non. » « Si, tu boudes. » Un sourire enjôleur d'un bébé calmé et le tour était joué.
13 DECEMBRE 1980Une maison plutôt silencieuse qui cachait bien des secrets. Une jolie petite fille blonde était installée avec sa quantité astronomique de Playmobil pour passer le temps. Dans son costume de pirate, elle était la reine du monde.
Dring dring. C'était Papa, forcément que c'était Papa. Une femme à l'allure soignée, mais aux cernes révélatrices passa devant elle avant de répondre au téléphone, une petite fille devenue maintenant impatiente à ses pieds.
« Allo ?... Enfin tu appelles ! Ça fait des jours qu'on a pas eu de nouvelles de toi. Tu sais comment je me suis inquiétée ?... Oui... Oui, elle est à côté de moi... Très bien. » Sa maman se tourne vers elle avec le sourire le plus rassurant qu'elle puisse lui offrir.
« Ma chérie, tu peux aller jouer dans ta chambre quelques minutes ? » « Mais je veux parler à Papa ! » « Promis ma puce, mais d'abord, Papa et Maman doivent discuter, d'accord ? » Un hochement de tête déçue et en avant. Elle avait tellement envie de parler avec son Papa. Il était toujours loin parce qu'il faisait parti de l'armée américaine, comme les figurines des jouets des garçons. Et même qu'il sauvait tout le monde son père... Quelques minutes plus tard, ce ne sont que des cris et des pleurs qui parviennent aux oreilles de la petite fille.
« COMMENT CA TU NE RENTRES PAS POUR NOËL ? » 3 MARS 1983C'était très étrange comme situation. Elle était rentrée de l'école à pied comme toujours et en arrivant sur le perron de sa maison, la porte était entrouverte. Ce qu'elle analysa plus tard comme un terrible pressentiment lui vrilla les entrailles, mais elle continuait d'avancer. Toujours avancer. D'habitudes, quand elle rentrait, sa maman rangeait vite la bouteille qu'elle était en train de vider et faisait semblant de l'accueillir avec un grand sourire. Mais elle voyait toujours la tristesse dans le regard de sa mère, la tristesse qui ne la quittait jamais quand Papa partait en mission.
Mais ce jour-là, elle n'entendit aucun son de verre que l'on déplace.
Quelques pas plus tard, elle était face à sa maman. Elle était habillée d'un tailleur bleue marine et avait endossé une des vestes de son mari, ornées de décorations militaires en tout genre. Elle était toujours aussi maigre, toujours aussi blanche, peut-être encore plus pâle que d'habitude. Son regard était toujours aussi triste et vide de la femme pétillante qu'elle eut été dans un passé pas si lointain. Elle semblait être la même. Elle était juste beaucoup, beaucoup moins vivante.
Maman, elle n'aurait pas pu être dans l'armée. Elle n'avait pas gagné sa guerre contre le whisky.
ÉTÉ 1985Collège Poudlard, Ecole de sorcellerie
Directeur : Albus Dumbledore
Commandeur du Grand-ordre de Merlin Docteur ès sorcelleries, Enchanteur-en-chef, Manitou suprême de la confédération internationale des Mages et Sorciers
Cher Mlle Peasegood,
Nous avons le plaisir de vous annoncer que vous avez été acceptée au collège Poudlard, École de Sorcellerie. Vous trouverez ci-joint la liste des ouvrages et équipements nécessaires au bon déroulement de votre scolarité.
La rentrée étant fixée au 1 septembre, nous attendons votre hibou le 31 juillet au plus tard.
Veuillez croire, chère Mlle Peasegood, en l’expression de nos sentiments distingués.
Minerva Mc Gonagall
Directrice adjointe
1 SEPTEMBRE 1985Elle n'arrivait pas à y croire. C'était tout bonnement fou. Il y avait eu des signes avant coureur, bien sûr, les enfants de son école ne faisaient pas tous ces trucs... Bizarres. Mais jamais, ô grand jamais, elle n'aurait pensé se retrouver ici. Au milieu de tous ces enfants, qui comme elle, avait quelque chose de spécial. C'est ce que son Papa lui avait dit :
« Si tu as reçue cette lettre, petit monstre, c'est parce que tu n'es pas comme les autres. Tu es encore meilleure. » Depuis que sa mère était morte, son Papa avait pris une place encore plus importante dans sa vie. Et ces paroles étaient presque devenues paroles d'évangile. Tout était si grand, si magique à Poudlard. Car elle était bel et bien dans la grande salle du château, attendant patiemment d'être répartie dans une des quatre maisons légendaires. Oui, car dès l'instant où elle avait reçue sa lettre, elle s'était empressée de faire le plus de recherches possibles sur le monde qu'elle allait découvrir. Et elle avait très bien lue l'
Histoire de Poudlard, en long, en large et en travers.
Elle crevait d'envie d'aller à Serpentard. Son père, qui s'était informé tout autant qu'elle, si ce n'était plus, avait quelque peu discuté ce choix. D'après les racontars, Serpentard n'était pas la maison où elle serait accueillie le plus chaleureusement...
Mais c'était celle qu'elle voulait.
« Miss Peasegood, Cliodna. » Elle s'avança un peu moins timidement qu'elle ne l'aurait pensé vers Minerva McGonagall, appréhendant le sort que le choixpeau magique allait lui réservé. Mais à peine le vieil objet magique se posa sur sa tête que la sentence fut prononcée.
« Serpentard. »13 DÉCEMBRE 1988« Alors, Peasegood, encore en train d'écrire une lettre à ton cher père. » La jeune fille au début impressionnée par la bande de Serpentard sang-pur n'en avait aujourd'hui plus du tout peur. Se révélant être une excellente sorcière, elle n'allait pas se laisser faire par de pauvres imbéciles.
« Figure-toi, Flinster, qu'en vérité, je fais mon devoir de métamorphose, et que tu devrais aussi travailler si tu veux rattraper ta note lamentable de la dernière fois. » Sans même lever les yeux de son parchemin, elle sentit plus qu'elle ne vit les garçons se rapprocher dangereusement d'elle.
« Ta maman t'a pas appris à être polie avant de mourir Peasegood ? » Cela se voulait dissuasif mais c'était au contraire, la chose à ne pas dire. Car si la jeune fille avait une excellente répartie, elle avait aussi une droite d'enfer. Et sa mère, c'était la dernière personne à insulter. Le coup parti sans prévenir et même si elle ne put trop rivaliser avec les quatre autres garçons qui l'entouraient, elle fut immensément satisfaite d'avoir cassé le nez de ce petit con.
30 MAI 1990« T'es sûre que c'est une bonne idée Peasegood ? » C'était dangereux, interdit et foncièrement stupide. Mais voilà, on parlait de Clio alors... Ses pas continuaient de l'emmener doucement mais sûrement vers la forêt interdite. Les deux Serpentards qui la suivait étaient semble-t-il beaucoup moins confiants à l'idée de dépasser l'orée des bois.
« Vous êtes pas curieux, vous ? » « Eh bien... Non. Étant donné qu'on SAIT qu'on va pas en sortir de la forêt. » Elle roula des yeux, ses deux comparses se plaignant encore de son caractère parfois pas assez
vert, mais ne l'abandonnèrent pas pour autant. Elle était à quelques mètres d'enfin pouvoir pénétrer dans le cœur de la forêt quand un tonitruant
« MLLE PEASEGOOD » se fit entendre. Et merde. McGo les avait chopé.
« Mlle Peasegood, combien de fois devrais-je vous rappeler que le règlement est rédigé pour être respecté ? » Elle allait encore avoir droit à deux heures de colles avec la harpie des Gryffon juste parce qu'elle avait été un peu trop curieuse... Et dire qu'elle était à deux doigts... A deux doigts de voir de ses propres yeux ce qui...
« MLLE PEASEGOOD, veuillez au moins m'écouter quand je vous parle. » Elle se retint de soupirer de lassitude avant de croiser le regard de son directeur qui malgré les circonstances, ne put s'empêcher de sourire comme s'il avait une longueur d'avance sur la jeune fille. Pff... Jamais le droit de rien faire dans cette école.
3 JUILLET 1991Merde. Merde, merde et re-merde. Penchée au-dessus du lavabo de la salle de bain familiale, elle ne put empêcher la crise d'angoisse d'arriver. Respirer, il fallait respirer. Un dernier coup d'oeil, juste pour voir si elle ne l'avait pas rêvée...
Non. Elle n'avait pas rêvé. Elle était enceinte.
La suite ne fut que larmes et cris, consolé par les bras rassurant d'un père qui sera tout aussi perdu qu'elle face à la nouvelle.
Mais son Papa c'était le plus fort, pas vrai ?
18 NOVEMBRE 1992Elle l'avait gardé. Son ventre légèrement rond en été la preuve tangible. Le père lui était pratiquement inconnu (sa dépravation la perdra un jour) mais qu'importe, c'était plus fort qu'elle. Son père n'avait pas forcément été aussi enchanté, mais il respectait son choix et aimerait ce bébé autant qu'elle.
Gentiment assis à une terrasse de l'Upper East Side, la jeune fille sirotait son Coca avec plaisir, bien pelotonné dans son manteau. Son sourire était rayonnant et comme toutes les femmes enceintes, elle avait ce petit truc en plus qui faisait la différence. Réglant l'addition, elle se leva et pris son sac, remerciant le garçon de service et s'élança vers la route.
Comme à son habitude, elle ne traversa pas au passage piéton.
Elle aurait dû.
7 MARS 1992Ses sens étaient quelque peu remit en question. Il faut dire que la quantité astronomique d'alcool et de drogue qu'elle avait ingérée ne pouvait décemment pas laisser intact. Elle ne savait pas vraiment non plus qui était le garçon qui semblait vouloir lui arracher le cou à coup de dents, mais qu'importe.
C'était assez pour oublier.
Assez pour ne plus penser au fait qu'elle avait perdu son bébé. Qu'il était mort. Parce qu'elle avait été inconsciente.
Assez pour ne plus penser qu'à cause de son accident, elle ne pourrait plus procréer. Dieu seul sait qu'elle avait tout tenté pourtant. Médecin moldu, guérisseurs sorciers... Son corps, ainsi que sa magie avaient été touchés. Rien à faire...
Assez pour ne plus penser qu'elle n'avait pas parler à son père depuis deux mois. Qu'il était probablement reparti en mission. Qu'il ne savait peut-être même pas si elle était vivante.
Oui, elle l'était.
Mais pour combien de temps ?
18 JUIN 1996Mmkfele... C'était à peu près ce que son cerveau était en train de produire. La rave de la veille avait peut-être été un peu violente. Elle se savait à chaque fois si proche de l'overdose... Mais jamais assez près de toute évidence. Son esprit avait donc été éveillé de son semi-coma par des coups violents portés à sa porte. Très difficilement, elle s'extirpa de l'enchevêtrement de membres que son corps et celui de maintes autres personnes formaient. Elle tituba quelque peu jusqu'à... En fait, ce fut un miracle qu'elle arrive jusqu'à la porte d'entrée. En ouvrant cette dernière, elle mit beaucoup de temps à réaliser qui était derrière la porte.
Un militaire.
Un militaire haut gradé.
Et elle savait très bien ce que cela voulait dire.
« Mlle Peasegood ? » Elle hocha la tête fermement, son apparence semblant totalement stoïque. Mais à l'intérieur... A l'intérieur, elle était anéantie. Son père était mort. Son père était mort après six ans de silence radio de la part de la jeune fille. Il était mort seul. Il était mort seul, sans qu'elle puisse le voir.
« Je suis désolé, Mlle. »Pas autant qu'elle.
7 JUILLET 1996« Voici donc ce que stipule le testament de votre père. Tout vous reviens de droit évidemment. Ses biens, ses fonds, l'entièreté de son assurance vie, ainsi que l'héritage de votre mère. » Elle était riche ? Et alors ? Elle était orpheline aussi.
« La seule volonté que qu'il m'ait exigé lors de son dernier séjour à l'hôpital fut de vous remettre cette lettre. » Il avait souffert. Souffert pendant des jours et elle n'avait pas été à ses côtés.
C'était une fille lamentable.
Elle reçue la lettre de manière automatique et se leva de la même façon. Elle était morte à l'intérieur, voilà tout. A peine dehors, sa curiosité maladive repris le dessus et elle ouvra le dernier présent d'un père défunt. S'attendant à un roman de huit pages, elle fut très étonnée du peu de mots que son père lui avait légué.
« Promets-moi de rendre au monde notre fille. Promets-moi de redevenir la talentueuse sorcière qui a brillamment réussie ses études. Promets-moi de redevenir la personne que tu es vraiment, celle dont je suis fière et dont j'emporte l'image dans ma tombe.
Promets-moi de nous aimer ta mère et moi, en réapprenant à t'aimer toi-même.
Et plus que tout, Clio, promets-moi de me survivre très longtemps.
Je t'aime, petit monstre. »
1 SEPTEMBRE 1996Elle l'avait fait. Elle avait tenu ses promesses. Elle s'était remise au sport et avait perdu le poids que ses années de débauches luiavaient fait gagner. Elle avait réutilisé sa baguette et cela avait fait un bien fou. Elle avait redécoré la maison de son enfance, même si elle n'allait plus y habiter pendant un petit moment. Et elle s'était inscrite à Haveirson. Son père ne lui avait pas demandé explicitement mais elle savait que c'était le message principale de sa lettre :
réalises tes rêves. Alors, elle avait pris ses billets pour l'Europe. Et elle allait le faire. Elle n'était pas du tout guérie de son passé, mais elle avait fait le choix de ne plus le faire compter dans son présent et encore moins pour son avenir. Elle allait essayer de se faire des amis (c'était pas gagné...) et oublier. Tout faire pour que ça n'est jamais existé.
Pour son père, pour sa mère...
Mais surtout pour elle.