As blue as the blood [Libre]

Sujet: As blue as the blood [Libre] Dim 3 Jan 2016 - 1:19

HRP:

Samedi 8 mars 1997

Penchée sur un grimoire de Défense contre les forces du mal, Daphné recopiait avec soin les informations sur les Détraqueurs qu’elle pouvait y trouver, sa plume grattant consciencieusement le parchemin. Travailler l’empêchait de trop se disperser – de penser à des choses douloureuses sur lesquelles elle n’avait pas de prise, de contrôle, qui étaient inextricables pour le moment. Les Détraqueurs et le sortilège du Patronus étaient bien plus abordables, disciplinant son esprit sans qu’elle n’y prête véritablement garde ; car elle était studieuse et acharnée, depuis la cinquième année – bien décidée à s’offrir l’opportunité de choisir.

Opportunité terrifiante, comparable à un saut dans le vide sans aucune garantie de s’en sortir, mais il semblerait que les plongeons sans assurances étaient sa spécialité, ces temps-ci. Cette pensée lui arracha un sourire, et elle arrangea machinalement sa cravate d’uniforme pour penser à autre chose, promenant un regard paresseux sur la bibliothèque, avant de s’arrêter sur les cheveux blonds de Drago, assis en face d’elle. Ils se connaissaient depuis si longtemps maintenant, et ils avaient partagé des choses inédites à l’époque – les prémisses d’un mariage dont ils n’auraient fait que s’accommoder. Et les évènements avaient beau avoir été déstabilisants et presque cruels, ils lui avait offert quelqu’un, à Poudlard, qui la comprenait – portait les mêmes pressions qu’elle sur ses épaules, le même fardeau d’être l’héritier d’une famille si grande et si ancienne que s’y faire un prénom était presque impossible.

« Tu travailles sur quoi ? » murmura-t-elle, avisant curieusement la table de Drago.

Détaillant son apparence frêle et maladive d’un œil inquiet, presque maternel. S’abstenant de commenter les cernes violacés qui boursouflaient son regard pourtant si clair, la maigreur qu’elle devinait à travers l’entrebâillement de sa chemise toutefois, attendant le bon moment pour le faire. La seule hypothèse qu’elle parvenait à formuler était dangereuse, à manier avec une précaution infinie pour ne pas s’y brûler – car son désir d’aider Drago avait beau être sincère, elle n’était pas certaine qu’elle parviendrait à le faire ; qu’elle avait les ressources pour le faire.

Ou, plus important encore – qu’il la laisserait faire. Car Drago avait perdu cette attitude fière qu’il affichait au tout début de l’année, qui l’avait toujours habité depuis qu’ils se connaissaient tous deux ; et c’était une constatation qui, ajoutée à toutes les autres, ne faisaient qu’accroître son inquiétude à son propos. Sans qu’elle ne parvienne pourtant à se décider à la partager, se contentant de regards inquisiteurs lorsqu’il ne la voyait pas, jaugeant comment il se portait. Elle observait.

Sujet: Re: As blue as the blood [Libre] Dim 3 Jan 2016 - 14:16

Travailler était une façon d’oublier. Se noyer dans les exercices académiques et bien trop théoriques au goût de Drago l’empêchait de penser trop à ce qui se passait en dehors de Poudlard, de penser à sa famille et axu feux qui embrasaient l’Angleterre. Alors il passait de plus en plus de temps dans la bibliothèque, à réviser pour des ASPICs qu’il n’était même pas sûr de pouvoir passer un jour. Il avait beaucoup appris cette année, finalement, que ce soit sur certaines créatures magiques sans intérêt, ou sur des sorts si difficiles à lancer et si spécifiques que dans la vraie vie, personne ne les utilisait.

Quand Daphné leva le regard vers lui et lui demanda sur quoi il travaillait, le premier réflexe de Drago fut de hausser les épaules. Il ne travaillait pas vraiment, en réalité. Il prenait des notes au hasard sur des pans de la magie qui lui paraissaient un peu délaissées à Poudlard, comme la médicomagie. Ils apprenaient bien à se défendre, mais pas à se soigner. Pour s’occuper des hippogriffes, là il y avait du monde, mais pour les humains, on pouvait repasser. Drago ne comprenait pas pourquoi il existait une telle option alors que la médicomagie n’était pas enseignée, même à un niveau très basique. Il ignorait pourquoi, mais il avait terriblement envie de l’étudier un jour, pour peu qu’il en ait le loisir. Ou l’autorisation.

— Un traité de médicomagie.

Le grimoire parlait des différentes formes de dragoncelle et comment les soigner : évidemment c’était encore hors de portée pour l’amateur qu’était Drago, mais cela avait attisé sa curiosité. Il se souvenait de son grand-père. Peut-être aussi que de s’intéresser à ce domaine était une façon pour lui d’essayer de se guérir, même si c’était déjà quelque chose d’impossible.

— En fait, j’ai déjà fini mes devoirs pour Slug et Rogue. Je sais pas vraiment quoi faire, alors…

Il haussa les épaules à nouveau. Drago n’avait jamais été un mauvais élève, du point de vue de ses résultats. C’était souvent la motivation qui péchait, ou alors le comportement. Et bien sûr le fait qu’il avait eu le malheur d’avoir le même âge que cet idiot de Potter et de sa fangirl moldue. Parce qu’il ne fallait pas se leurrer : mis à part cette cicatrice en forme d’éclair qui lui barrait le front, Harry n’avait absolument rien de spécial.

— Et toi ?

Après tout, elle aussi souffrait de l’ombre que lui faisait Potter et sa clique, et peut-être qu’elle aurait aimé qu’ils travaillent ensemble. Se noyer dans le travail à deux, plutôt qu’en solo. Avec ce qu’elle venait de traverser, ça lui ferait sûrement du bien. Drago s’essaya même à un petit sourire bienveillant, qui sur son visage fatigué, n’arrivait pas à exprimer autre chose qu’une lassitude proche du désespoir.

Sujet: Re: As blue as the blood [Libre] Sam 9 Jan 2016 - 20:21

La mention de la médicomagie lui fit immédiatement diriger son regard vers l’ouvrage, surprise – elle évitait toujours cette section de la bibliothèque, de peur qu’on la surprenne, qu’on lui pose des questions gênantes auxquelles elle n’avait pas envie de devoir inventer un mensonge en guise de réponse ; un écran de fumée difficile à manier. Car tout ceci était dangereux pour elle, pour Astoria – quelque chose dont elle ne pouvait parler à presque personne. Drago ne semblait pas ressentir cette résistance, cette interdiction tacite de s’intéresser à des sujets qui s’éloignaient de ce qui était nécessaire – mais après tout, s’il était inconvenant qu’une épouse paraisse plus intelligente et cultivée que son mari, l’inverse était loin d’être aussi tragique de l’avis des Greengrass.

« Je travaille sur les Détraqueurs » répondit-elle, arrachant son attention au traité. « J’ai fini mes devoirs aussi, alors je m’avance un peu. »

La défense avait toujours été son point faible, la matière qu’elle peinait à maîtriser, sans vraiment savoir pourquoi – celle qui lui demandait le plus d’efforts et de travail, contrebalançant les sortilèges et enchantements qu’elle avait toujours maîtrisés avec aisance. Et aujourd’hui, c’était précisément ce dont elle avait besoin ; que quelque chose occupe son esprit, l’empêchant de se perdre dans ses souvenirs douloureux.

« Ça m’occupe. »

Elle aurait pu se laisser distraire par les tentatives répétées de Blaise de l’extirper de ses manuels pour l’emmener à l’abri des regards indiscrets, ou suivre Charlie dans ses innombrables explorations du parc, mais se fixer un but était beaucoup plus libérateur. C’était comme nourrir un espoir sans vraiment le faire ; sans véritablement s’abreuver de fausses idées ou de rêves inatteignables. Et cela lui permettait de veiller sur Drago de façon discrète, alors qu’elle ignorait encore ce qu’elle comptait faire à ce sujet ; car agir était risqué, et l’inaction était loin d’être sans conséquences.

C’était… compliqué.

Elle réajusta machinalement la bague des Greengrass à son annulaire, et ce même si l’enchantement l’empêchait de glisser autour de son doigt ; conscience que, même si elle l’avait vue briller à la main gauche de sa mère toute sa vie, elle ne pourrait pas la garder éternellement.

« Comment vas-tu ? » demanda-t-elle brusquement, désireuse d’éviter les questions sur comment elle se portait.

Car elle était loin de connaître la réponse, et il était plus que temps de tenter de voir un peu plus clair dans cet enchevêtrement évanescent qui entourait Drago, et qu'elle sentait parfois tenter de s'accrocher à elle lorsqu'elle se surprenait à évaluer ses options.

Sujet: Re: As blue as the blood [Libre] Dim 10 Jan 2016 - 17:36

Quelle drôle d’ironie que celle de voir que tout comme lui, Daphné se noyait dans les études pour oublier son quotidien. Les Détraqueurs, hein ? Drago esquissa un petit sourire. Avait-elle peur de finir à Azkaban ? Ce ne serait pas étonnant. C’était une peur bien légitime pour la plupart d’entre eux. Souriant un peu plus franchement et bien moins sincèrement, Drago se força à oublier que son père y était toujours enfermé, à la merci des créatures horribles qu’étaient les Détraqueurs. Si ses lèvres étaient étirées en un fin rictus, ses pupilles ne souriaient pas. Elles étaient éteintes, comme mortes. Voilà ce qu’il était devenu : une coquille vide.

— Les profs devraient nous donner plus de travail, tellement il y a de choses à oublier dernièrement…

S’occuper l’esprit pour fuir la réalité. C’était d’un lâche… Mais en même temps, ça avait le mérite d’être productif. Drago profitait de son temps à Poudlard, peut-être même ses derniers instants dans l’enceinte de cette école, pour s’instruire à propos de choses dont il n’aurait peut-être plus l’accès ensuite. Il y avait du fatalisme dans cette démarche, comme s’il pouvait entendre le tic tac oppressant de la grande horloge du temps venir faire trembler son cœur. Tic. Tac.

Il pensait avoir conscience de l’apparence qu’il avait, de l’image qu’il donnait, mais quand Daphné lui demanda comment il allait, Drago se demanda s’il n’en avait pas sous-estimé l’impact. Perdant son rictus, il fronça les sourcils et planta ses deux yeux bleus dans ceux de son amie. Blaise, et maintenant elle… Il faisait si peur que ça, vraiment ?

— Tu me poses vraiment la question, ou c’est juste pour faire la conversation ?

Toute forme d’amusement, même cynique et légèrement masochiste sur les bords, avait quitté ses traits. Drago ne plaisantait pas. Il ne voulait pas parler de lui à quelqu’un qui n’en aurait rien à faire, d’autant plus que ça pouvait être extrêmement dangereux pour lui de le faire. Pourtant, il se rendait compte qu’il en mourait d’envie. Parler avec Blaise n’était pas toujours facile : c’était aussi délicat que de marcher sur des œufs de dragon… Avec Daphné, ce serait sûrement beaucoup plus reposant. Plus naturel. Seulement, il voulait savoir si c’était vraiment ça qu’elle était venue chercher.

— Je pourrais te retourner la question, tu sais.

La meilleure défense, ça reste l’attaque, d’autant plus que la vie de Daphné n’avait pas été de tout repos non plus ces dernières semaines. Entre Rowan et la mort de sa mère… Astoria… Une ombre passa dans le regard de Drago qui soupira doucement. Son expression se fit moins dure, moins fière, et pendant quelques instants, il eut juste l’air de ce qu’il était : un adolescent brisé.

— Je suis vraiment désolé pour ce qu’il s’est passé, Daphné.

Tout partait tellement en cacahuète, il avait de quoi devenir fou. Soudainement las, Drago posa son front dans sa main, le laissant reposer là un instant, avant de se redresser. Il ne voulait pas donner l’impression qu’il était en train de chialer au beau milieu de la bibliothèque. Ça l’aurait pas trop fait.

Sujet: Re: As blue as the blood [Libre] Dim 10 Jan 2016 - 18:59

Le plus drôle dans tout ça, c’était que Steven n’avait pas d’avis politique. Pour l’instant, alors il voyait les gens autour de lui manifester, se lancer des regards pleins de sous-entendus. Mais, lui. Lui, il ne comprenait rien. Il était là pour apprendre, et c’est tout. Le seul moyen qui pourrait lui faire balancer d’un côté ou d’un autre était l’atteinte à ses proches, mais pour l’instant, il préférait rester dans son coin. Respirer un bon coup. Et profiter du moment présent. Parce qu’il savait. Il savait qu’il devrait rejoindre un camp très prochainement. Mais, il n’en avait pas envie. Enfin bon, il était déjà bien occupé avec ses problèmes d’élèves. Un devoir, encore. Contrairement aux deux élèves Serpentards, lui, trouvait qu’il y avait bien trop de devoirs. Trop d’études. Et, il paraît que c’était pire dans les autres écoles de sorciers, alors… Il était bien content d’être ici. Il savait que cette Daphné se trouvait dans sa classe, et qu'elle était la meilleure amie de sa soeur, mais c'est tout. Le reste, il ne voulait même pas le savoir à vrai dire. Il savait qu’elle était la soi-disant sœur d’une jeune fille qui se prénommait Astoria. Il se balança jusqu’à leur table, leurs visages fermés, blafards, décoloré, fit comprendre à Steven qu’il n’était pas spécialement le bienvenu. Alors il chancela. « De toute manière, en ce moment, on est le bienvenu nulle part. Donc foutu pour foutu. ». Il reprit sa route vers les deux blonds, à croire que c’était un caractéristique d’être blond pour entrer à Serpentard. Il claqua son livre sur le bureau sur lequel se trouvait les jeunes gens.

« Ah toi aussi, tu travailles sur les Détraqueurs ? Parce que, c’est pas que j’ai besoin d’un peu d’aide, mais si un peu… »

Il s’en fichait complètement d’interrompre une conversation entre eux. Peut-être parce qu’il était comme ça Steven. Je m’en foutiste. Et puis, merde hein, s’ils n’étaient pas contents, ils avaient qu’à déblatérer dans un endroit plus personnel que la bibliothèque. D’un geste rapide, il ouvrit son livre et pointa du doigt une phrase.

« Tu vois, ici, on dit que les Détraqueurs sont capables d’enlever l’âme humaine d’une personne, mais ils préviennent pas si ça tue la victime ou pas, tu vois ? Alors moi, je me posais une question… Voilà. Si tu pouvais me dire ce que t’en penses. »

Ces temps-ci, le petite touffe blonde se donnait un genre simplet. Il ne voulait pas qu’on l’emmerde avec ces conneries de choix à prendre. Alors être simplet repoussait les gens. Même si au fond, il possédait un caractère très bien trempé. Il se tourna vers Drago, un large sourire dévoilant des dents bien alignées sûrement grâce à cet appareil dentaire qu’il avait porté plus jeune.

« Drago ! Tu bronzes pas, toi dis donc, enfin tu vois ce que je veux dire, t'es vachement blanc ! Tu devrais peut-être bouffer quelque chose, tu penses pas ? »

Steven, tu es pénible, tu devrais le savoir. Sa conscience lui disait. Mais ce n’est pas comme s’il voulait qu’on l’apprécie. Il ne le voulait pas, il voulait juste finir ce foutu devoir, et ensuite il s’en irait gaillardement, tout heureux d’avoir encore un petit temps à lui avant de reprendre les cours le lendemain matin.

Sujet: Re: As blue as the blood [Libre] Sam 16 Jan 2016 - 23:28

Acquiesçant sombrement à sa proposition, Daphné reposa sa plume avec précaution pour ne pas l’abîmer. Le travail était sans doute une échappatoire moins dangereuse que le déni dont elle s’était drapée jusque-là, allant si loin que sa baguette en avait refusé de la suivre ; cela restait pourtant une forme de fuite en avant, la seule forme de thérapie à laquelle elle avait accès.

La question de Drago aurait pu être tragique s’il l’avait posée à quelqu’un d’autre – reflet de leur monde d’apparences poussées à l’extrême, jusqu’en devenir distordues et grotesques aux yeux des autres. Car c’était bien toute la question ; cette séparation entre eux, nés dans un milieu où les racines pourrissaient d’années en années, gâtées par la consanguinité qui exhalait un peu plus de leur sang à chaque génération, et ceux qui avaient échappé à cette mascarade sinistre. Mais elle n’était pas tragique, car Daphné ne se serait pas abaissée à glisser ces questions de courtoisie à son ami d’enfance ; elle le respectait bien trop pour cela.

« Je te pose vraiment la question. »

Hésitant quelques instants de plus avant de franchir définitivement le pas, elle considéra une nouvelle fois la situation. Elle avait déjà tant de problèmes qui ne semblaient attendre qu’un souffle de vent pour s’embraser de nouveau qu’il était délicat de rajouter des braises dans le foyer déjà rempli. Seulement – Drago n’était pas un problème. Il était son ami depuis des années ; quelqu’un qu’elle appréciait véritablement. Et le voir dans cet état était trop douloureux pour qu’elle le laisse s’enfoncer dans ce qui semblait l’étrangler un peu plus chaque jour à la manière d’un Filet du Diable, pernicieux et violent, sans lui offrir une main secourable.

« Tu m’inquiètes, Drago. »

L’attaque qui suivit, sa façon de lui retourner la question dans un réflexe défensif qu’elle pratiquait avec bien trop d’assiduité lorsqu’elle était acculée pour ne pas le reconnaître ne firent que la conforter dans son idée – il avait besoin d’aide. Quant à son expression… Daphné détourna le regard, gênée par son honnêteté. Elle avait accepté tant de condoléances lisses et hypocrites, tout juste assez dissonantes pour qu’elles lui vrillent l’oreille, comme un miroir délicatement craquelé empêchait de voir la réalité, que sa sincérité n’en paraissait que plus douloureuse encore. Plus vive et acide que toutes les platitudes dont on l’avait abreuvée jusque-là.

« Merci. »

Quelques secondes filèrent, le temps qu’ils se recomposent tous deux – qu’ils ignorent l’expression lancinante qui s’affichait sur leurs deux visages, si semblable et troublante. Daphné rapporta finalement son regard sur son ami, tentant de lui rendre le soutien qu’il lui avait offert ; mais l’interruption grossière de Grant lui enleva toute possibilité de le faire.

« Mais je t’en prie, je serais ravie de t’aider. »

Sans même la saluer – car, après tout, il aurait été tout à fait inutile de le faire, étant donné qu’il venait quérir son aide et qu’elle était obligée de la lui offrir – et sans même lui offrir une question digne d’intérêt, il laissa tomber son livre sur sa table dans un bruit aussi désagréable que parfaitement inutile. Tout comme sa question.

« Ôter l’âme ne tue pas véritablement quelqu’un. Le corps reste fonctionnel et vivant, mais la personne n’est plus présente » expliqua-t-elle, jugulant son agacement. « Cependant, il existe toujours un débat pour savoir si l’on peut qualifier cela d’existence. »

Sa façon de s’adresser à Drago fut encore plus désagréable et impolie que celle qu’il avait utilisée pour l’interpeller, si cela était possible, et ne fit que raviver un peu plus sa contrariété, bien sagement muselée derrière le masque neutre qu'elle arborait continuellement depuis la mort de sa mère – ce n’était vraiment pas le bon jour pour que Grant vienne semer le désordre qui semblait toujours le suivre.

Sujet: Re: As blue as the blood [Libre] Dim 17 Jan 2016 - 16:32

La discussion ne s’annonçait pas des plus plaisantes, comme souvent ces derniers temps. Daphné s’enquit de la santé de Drago, qui lui demanda par réflexe s’il s’agissait d’une véritable interrogation. Ça l’arrangerait bien que ça ne soit pas le cas, comme ça il pourrait juste mettre la poussière sous le tapis et passer à autre chose. Seulement… C’était peut-être un peu trop en demander à Murphy et à sa loi. Daphné était réellement inquiète pour lui, et il ne put répondre que par un petit regard peiné et vaguement désolé. Mais il ne dit rien. Il ne voyait pas quoi dire, ni par quoi commencer. Toute sa vie partait à vau-l’eau, tant et si bien que ce serait drôlement difficile de savoir quelle chose dire en premier. D’autant plus qu’ils étaient en public : que pouvait-il dire et surtout, que ne pouvait-il pas dire ? Pourquoi fallait-il que sa vie soit aussi désespérément compliquée ?

Sur le coup, l’intervention inopinée du frère Grant lui parut plutôt salutaire. Bon, c’était sans compter sur sa manière franchement impolie de s’adresser à Daphné et à lui… Des remarques désobligeantes, Drago en avait soupé, et il n’avait pas besoin qu’on lui fasse une piqûre de rappel, merci bien.

Stoïque, Drago attendit que Daphné remette Steven à sa place — franchement, sa question sur les Détraqueurs était d’une stupidité crasse, ne les avait-il jamais réellement étudié ? Bon, il n’était pas aussi sujet que Malefoy pour ce qui était de les croiser dans la vraie vie mais quand même ! — et se permit de lui répondre quant à la qualité de son teint.

— J’ai une maladie rare, Steven. Je me transforme en Détraqueur et si tu continues à me parler sur ce ton, c’est ton âme que je vais bouffer.

Il le gratifia d’un large sourire qui se voulait carnassier, qu’il maintint pendant quelques secondes avant de l’abandonner pour un roulement d’yeux vertigineux. Steven était vraiment une plaie. Drago soupira, et se tourna de nouveau vers Daphné.

— Quand j’aurais accompli mon méfait, tu pourras écrire un essai sur la définition de l’existence et de la vie quand on est dépourvu d’âme. Parce que soyons d’accord, les Weasleys ne comptent pas.

Plaisanter, même aux dépens des autres — que diable ! Surtout aux dépens des autres — lui remontait un peu le moral. Il avait un tel besoin de se changer les idées que sur le coup, il se dit qu’il sortirait bien boire un verre ce soir-là. Oui, boire un verre, ou deux, trois… jusqu’à noyer son cerveau dans l’alcool. Remarquez, il avait toujours un fond d’herbe.