Avons-nous le choix ? | Maxwell Crowley

Le vide. Voilà ce qui caractérisait son crâne depuis plusieurs jours. Le vide. Et un putain de bout de papier. Rien de plus. Mais vraiment rien de rien. De A à Z, il n'avait que le néant pour avancer et comprendre ce qu'il avait foutu depuis le 31 mars. C'était comme si quelqu'un était entré dans sa tête et avait volé plus d'un mois de souvenirs.

Comment dire ça simplement. C'était une sensation désagréable et inquiétante, qui lui faisait froid dans le dos. Sans compter que son corps avait salement encaissé des coups. Enfin. Pas des frappes et des poings, hein. Mais des trucs vachement plus vicieux. Genre. La fatigue – oh bordel il avait des cernes de fou – et la faim – hors de question de se peser, ce serait flippant – ou encore la misère. Bref.

Au moins, il pouvait être certain d'une chose : il avait pas passé des vacances aux caraïbes dans un hôtel de luxe. En vrai, il avait plutôt l'impression d'avoir dormi sous des ponts et mangé du poisson dégueulasse. Franchement, pour une fois, il était pas sûr de vouloir découvrir la vérité.

Bon. Les notes disaient quoi, déjà ? Se rendre chez mémé. D'accord. Le septième année soupira puis transplana en direction de la maisonnée familiale. Lorsqu'il se matérialisa dans les environs tant connus, quelque chose se crispa en lui. La fatigue. L'abattement. Une mélancolie soudaine et imprévisible.

Ses doigts massèrent brièvement ses paupières pour réveiller un minimum son visage. Déjà qu'il ressemblait à un mort-vivant crevant la dalle... S'il pouvait éviter de ficher la trouille à sa parenté, ce serait chouette quoi. Quelques secondes s'écoulèrent ainsi, jusqu'à ce qu'il se décida à frapper contre la porte de la demeure. « Hé, c'est Yvain ! Vous m'ouvrez ? » OK. Y'avait mieux comme entrée en matière... Mais là, il voulait juste des câlins, une bonne chaise et une boisson chaude.

Lorsque la porte toqua Maxwell était occupé à se disputer avec le gros chien familial. Apparemment la peluche avait dépassé les bornes et tandis que l'humain râlait le chien vautré dans sa bannette couinait pour faire entendre sa voix. Maxwell l'avait puni à la bannette depuis dix heures du matin et prenait un malin plaisir à obliger le chien à rester assit pour le frustré. Cela lui apprendrait à lui piquer ses œufs au lard du matin !

Il ne savait guère pourquoi il était nécessaire qu'il soit là ce matin puisque les deux vieilles n'attendaient personne mais sa mère avait insister alors il avait obtempérer sans ronchonner de trop. C'était le désavantage d'être dans la divination, vous faites attention à tous les instincts de vos proches. La porte toqua et intérieurement il s'excusa auprès de la vieille pour ne pas avoir cru sa dernière impression. Il se leva, chercha sur la route cuisine-porte de quoi couvrir son torse mais ne le fit point. C'est donc vêtu d'un sarouel uniquement qu'il ouvrit la porte. Si il fallait qu'il ait l'air normal c'était perdu, le corbeau sur son flanc semblait noircir une bonne partie de son corps dans la lumière tamisée de l'entrée. Le cicatrices semblaient s’harmoniser dans les plis de son corps et les dessins qu'elles formaient semblaient plus frais que jamais vu qu'il n'avait pas encore reprit son bronzage halée.

Le gros patapouf familial avait suivit le mouvement et contrairement à Maxwell il savait parfaitement qui était le jeune homme face à eux. Le Crowley sentit le mouvement du "je-te-sautes-dessus-pour-t'embrasser" et c'est avec fluidité qu'il rattrapa le collier du chien avant cela.

Un instant le regard vert de l’héritier mâle Crowley se pausa sur celui de l’héritier Gallant. Il eu un instant de réflexion intense avant de reconnaître la bouille du fils de sa sœur. Enfin c'est surtout ce qu'il percevait de sa sœur chez l'enfant qu'il reconnut parce qu'on ne pouvait guère dire qu'il ressemblait encore à quelques chose celui là. A croire qu'il sortait d'un cimetière. Son regard semblait sombre, froid, il fronça un instant les sourcils sur la conduite à adopter. Une lueur de douceur réussi tout de même à percée tandis qu'il ouvrait grand la porte.

"Salut Yvain, va y rentre, j'peux le lâcher ou tu tiendras pas l'assaut du baveux ?"

Melant geste et parole en se dégageant de la porte pour laisser l'autre entrer il lâcha le chien. Les animaux c'est vital en magie ça sait distinguer mieux que toi le bien du mal. Il n'avait jamais vu son neveu aussi était-il légèrement mal à l'aise. Il n'avait jamais été à l'aise avec les enfants, cela faisait des années qu'il n'avait pas vu sa sœur alors son neveu...

Chien laché, Porte ouverte. Il attendit qu'Yvain rentre avant de prendre la direction de la cuisine sans ajouter grand chose, peut être attendant que l'autre finisse avec le chien, ferme la porte, reprenne ses esprits et lui parle. Après tout ce n'est certainement pas lui qu'il s'attendait à voir ici.

"T'veux un Kawa ? T'as faim ?"

Déjà il avait rejoins la cuisine et parlait à travers la maison ou tout un tas de babioles s'étalait. Il avait ramené pas mal de choses de ses voyages et les stockait dans le lieu le plus naturel du monde : Chez sa mère. Il servit une tasse du café fumant qu'il avait fait un peu plus tôt et la mis face à la sienne sur la table de la cuisine.

Et il se tenait, là, les bras le long du corps. Droit – enfin, pas vraiment, mais il tentait de se tenir de la sorte – et attentif. Tout son être semblait même tendre vers cette fichue porte close, contre laquelle son poing avait précédemment porté quelques coups. Étrange, cette sensation ; une réminiscence un brin instinctive et lointaine. Typiquement le genre de truc auquel il avait du mal à se raccrocher.

Avant. Maintenant, c'était une autre histoire. Quoi que ça lui semblait toujours à côté, à distance ; poussé dans sa chair par la survie plus que par une réelle volonté.

Oh, ça ne remettait pas en cause qu'il aimait sa famille. Que c'était eux qu'il voulait voir en cet instant. Mais les choses changeaient. Elles évoluaient depuis Margaret. Bordel. La passoire qui lui servait désormais de cerveau n'allait clairement pas arranger les choses. L'incertitude coulait dans ses décisions depuis des mois, en continue. Creusant des trous. Des béances. Il ne savait plus vraiment ce qu'il devait faire – ou ce qu'il voulait faire.

Manger et se reposer, c'était déjà un bon début. Non ?

Merde. La porte.

Elle s'ouvrit sur la silhouette tranquille et détendue d'un homme facilement identifiable. En tout cas, par son air de famille. Son oncle. Et d'un chien. Oh. Oui. Une bestiole pleine de poils, de bave et d'amour. Oh, hé, ça ne lui ferait pas de mal.

Face à l'hésitation de son aîné, Yvain esquissa un sourire – celui qui hurle un merci silencieux sans parvenir à le sortir pour autant. « Salut ! Vas-y, c'est jouable. » Quelque part, il ne voulait pas croire que ce corps malingre et douloureux soit le sien. Pas possible. Pas cohérent. Fichu néant dans sa mémoire. Le septième année tendit ses bras vers le poilu à oreilles dressées, bousculé plus qu'il ne l'aurait voulu une fois rentré dans la bâtisse.

À dire vrai, les petits diamants mandarins de chez son père lui manquaient. Ils bavaient moins que le chien, mais ils chantaient tellement bien.

Les doigts fins et osseux du jeune homme glissèrent sur la tête du compagnon de son parent, frottèrent son front et ses oreilles ; brave bête. Même si se pencher lui tirait une grimace – hé, il avait vraiment mal au dos – le Serpentard s'exécuta un moment avant de rejoindre la table de la cuisine. « Je prends tout ce que tu veux bien me donner, je crois que j'ai un peu la dalle. Un peu. » Son regard se perdit un moment sur les innombrables objets entassés ici et là. « C'est ouf tout ça, c'est à toi ? » Il n'osait pas pointer du doigt, parce que ça ne faisait pas, mais surtout parce qu'il avait peur de s'y griller un bras.

Les trucs bizarres, Yvain commençait doucement à en avoir marre.

Un sourire. Un jouable. Une cuisine pleine de vapeurs fumante. Grimaces. Le Serpentard annonça qu'il avait faim. Maxwell s'étira, les deux mains lié au dessus de sa tête, il fit craquer l'une de ses vertèbres. Un Okey de la tête et le voici qui se dirigeait vers un coin de la cuisine. Il mit une poêle sur le feu, cassa trois œufs. Il ouvrit un placard réfrigéré et ajouta quelques grosse tranches de lard dans la gamelle. Le pétillement du gras, le crissement du eu qui lèche la poêle.

Son Neveu s'émerveilla de tout ce qui l'entourait. Un sursaut. Maxwell se retourna pour regarder le garçon. Il suivit son regard et le laissa errer sur la pièce. Un fin sourire vint sur ses lèvres. Le bouclier de médecin, les mandellas, les masques de cérémonies. Puis le coffret pleins de plumes pour faire éventails, un hochet de cérémonie. Flûtes, colliers, nécessaire à fumigation et autres plantes. Une vieille coiffe de cérémonie.

« Ouais j'ai ramené beaucoup de bordel, y'a les fumigations et les plantes cérémoniales que tu peux utiliser, les flûtes et hochets aussi tant que tu en prends soin. »

Il fit un pas en direction d'une étagère et ses doigts fin effleurent la boite dans lequel il avait rangé les fumigations. Il fit un signe de menton en direction d'une grosse malle en bois qui contenait sa réserve de plantes sauvage, équatoriale, inconnus, interdite, hallucinogène, deisogène...

« Euh, les plantes fais gaffe, si tu restes coller t'as mère va m'étrangler. »

Il lança un regard au garçonnet. Il ne se rendait pas encore trop compte de l'étrangeté de la scène mais cela venait. Le regard qu'il lui lança était celui d'un ado qui dit à son cadet de se méfier. Il retourna les tranches de lards. Un mouvement souple, un se déplaça chercher la miche de pain qu'il pausa ensuite sur la table.

Il avait au passage claquer des doigts pour envoyer le chien au panier. L'animal se léchait les babines depuis sa place. Max pausa une assiette sur la table, y fit glisser le contenu de la poêle. Il poussa l'assiette, les cour verts vers son neveu. Il se servit une tasse de café noir et entreprit de se bourrer une pipe. Contrairement à ça petite pipe habituelle celle ci était plus longue, avec une aura bien plus vieille.

Le devin sentait que son neveu en avait vu des vertes et des pas mures. Il n'y avait qu'à voir la tête d'Yvain pour le savoir. Il sentait presque la douleur, la souffrance qui hurlait à travers son aspect décharné.

« Faut pas qu'elle te voit avec cette gueule là d'ailleurs, une fois l'étape te remplir la pense achevé j'te filerais des fringues propres »

Finalement non. Il allait laissé l'autre lui parler si il le désirait et non forcer la chance.

Maintenant qu'il était debout au milieu de la pièce, un grand nombre de choses venaient mordiller sa conscience. Des sensations – fichtrement lointaines pour le coup – et des souvenirs. Un amas d'images, de sons et d'odeurs qui s’emmêlaient les uns aux autres. Bourdonnant. Presque perpétuel.

Les innombrables objets – des babioles, plus exactement – entassés attirèrent encore et encore son regard. Piqué à la fois par la curiosité et l'inquiétude ; un instinct pour le moins bienvenu compte tenu de la diversité du bordel ambiant. Finir, par inadvertance, comme la Belle au bois dormant n'était clairement pas dans ses projets.

Ni quoi que ce soit, d'ailleurs. Manger. Se reposer. Retourner à Poudlard ; oui, sûrement. Le néant au creux de la tête et du cœur. Chouette perspective.

Les propos avancés par son aîné lui tirèrent un sourire. « Ah, ouais. Y'a vraiment pas mal de trucs, c'est complètement fou ! En plus ça a l'air de venir d'un peu partout... » Yvain s'immobilisa un instant pour réfléchir ; l'Amérique Latine ? Peut être. Enfin. Il n'en savait rien. « Ça vient d'où, à peu près ? » Brièvement, ses yeux se portèrent sur la malle interdite.

Rester coller. Oh. OH. Information retenue. « On va éviter. J'ai... Pas spécialement envie de provoquer une guerre dans la famille. » Il se mit à sourire, visiblement amusé par sa propre bêtise. Oui. Bon. Humour douteux quoi. « Elles servent à quoi, en fait, ces plantes ? » Néanmoins toujours contrebalancé par l'intérêt. Comprendre.

Et éviter de finir comme un troll écrasé contre le fond de sa grotte.

Alors que le septième année se perdait dans l'admiration des trouvailles de son oncle, une odeur délicieuse vint chatouiller ses narines. De la nourriture. Bordel, il crevait vraiment de faim. Ni une, ni deux, il s'installa à table pour attirer à lui l'assiette et la tasse précédemment poussées dans sa direction. « Merci ! » Et manger. Une bouchée. Pas très proprement.

Encore une autre. S'arrêter un instant ; mâcher et écouter la réflexion de son aîné. « Ouich. Ch'est une bonne idée... » Distraitement, il pencha le visage sur le côté et renifla sa tenue. Il avala presque de travers sous la surprise. « Merde, je pue grave en fait !  Tu crois qu'un peu d'eau c'est suffisant ? »