Sticks and Stones may break my bones... [ LIBRE | PREMIER POST LILIANOR

Poudlard s’assombrissait en même temps que mon humeur. Cloîtrées, enchaînées, mes pensées me donnaient l’impression de n’être que l’ombre de ce qu’elles étaient. J’me sentais prise au piège de ce château qui était pourtant une aubaine pour nous tous, prisonnière de la magie, d’événements que j’voulais pas. Même si le printemps passait par la fenêtre ses rayons de soleils naissants, les nuages grondaient dans tout le château. Rien le droit de faire et pas le droit de gueuler, j’étais condamnée au silence, à devoir me tenir tranquille le temps que les choses se tassent : je l’avais promis à Daphné. 


Les sorciers qui rigolaient dans le château me démoralisaient, il me manquait de cette joie ou de cette innocence que je percevais chez eux, peut-être malgré eux. Ils n’étaient pas nés Greengrass, assurément.

Mon soleil réapparaîtrait quand je pourrais serrer Daphné dans mes bras.
J’avais envie de faire des conneries, de briser des vitres, des miroirs, casser quelque chose. Seule ma soeur, son visage que j’entrevoyais à chaque fois que mes paupières se fermaient, m’empêchait de faire une bêtise, de fuir loin de cette prison quitte à en subir les conséquences.

Les conséquences. Si y a bien un mot dont j’me foutais éperdument c’est celui-ci. Là-dessus j’avais p’têtre un côté Serpy.


Ayant une pause de deux heures entre deux cours, mes livres étaient redéposés sur ma table de chevet et j’en profitais pour arpenter les couloirs, à vociférer intérieurement sur ces interdictions et espérais que, où qu’elle soit, tout se passe bien pour Daphné. Indirectement mes pensées allaient vers les Westminbrook et leur prévenance, cette famille dont je m’étais toujours sentie proche et qui devait, j’en étais sûre, continuer d’une manière ou d’une autre à veiller sur les Greengrass.


Au milieu d’un couloir, j’entendis des éclats de voix devant moi. Une fille, un garçon, puis une autre file qui ressemblait à… Hope ?

J’arrivais pour entendre une blonde qui venait de se relever cracher son venin sur un Serdaigle. Hope était bien là, prenant parti pour sa camarade de Serpentard. Je ne mettais pas de nom sur son visage mais elle se présenta avec une prétention incroyable au Serdaigle face à elle. Mon regard analytique les scruta un à un et je comprenais que la blonde aux yeux bleus, qui me rappelait quelque peu Daphné, avait dû percuter par hasard le Serdaigle qui se retrouvait en position de présumé coupable.



Je disais rien, mon regard alternant entre chacun à anticiper la tournure que prenait ce qui me paraissait être un événement anecdotique. Freya, la jolie boule de poils blanche de Hope, avait pris une position défensive, jugeant d’un regard mauvais son congénère juché sur l’épaule de son maître qui donnait l’air d’être … perdu, presque terrorisé par la situation. Mon regard restait fixé sur lui alors que je passais dans le dos de Hope et que mon bras se resserrait autour de sa poitrine. Je déposais un baiser sur sa joue, comme une marque d’amitié rare que seules deux personnes pouvaient espérer de moi.

Je la lâchais aussitôt, me baissant au sol et attrapant Freya d’une main, déclenchant un miaulement timide de la chatte qui se lova pourtant sur mon avant-bras au moment je la serrais contre moi. Des ronronnements suivirent et elle resta bien installée alors que j’allais gratifier le chat perché sur le Serdaigle d’une grattouille derrière les oreilles. Comme son maitre, il se bloqua et resta sur la défensive, ma caresse ne déclenchant sur lui que la sortie lourde de menaces de ses griffes.


- Calme, mon ami, dis-je avant de m’en détourner, et de m’installer à côté de Hope.


Zyskowski. Je m’aventurais dans ma mémoire mais peinais à me rappeler si Daphné en était proche. Je l’écoutais parler sûrement autant qu’elle-même s’écoutait parler et me rendais compte que tout me débectait en elle, sa prétention, sa supériorité, son dédain pour le Serdaigle. En deux minutes Lilianor parvint à me faire la détester, à la ranger dans le catalogue des Serpentard que je méprisais et qui s’agrandissait de nombreuses pages avec le temps. Quelle conne, pensais-je. Je choisissais de ne rien dire, puisque Hope semblait être son amie et que la jolie poupée brune aux yeux bleus avait une valeur inestimable à mes yeux. Jamais je l’aurais froissée, encore que, si Lilianor venait vraiment à se ranger du côté de la médisance absolue, je risquais d’exploser. Seule les emmerdes dans lesquels étaient plongés les Greengrass et la demande de Daphné de me faire petite me retenaient de rembarrer la blonde.


Et puis… le Sedaigle y était pour quelque chose aussi. À se victimiser, Il me donnait l’envie de lui foutre mon pied au cul. " Tu as bien quelque chose entre les jambes, défends-toi ! " avais-je envie de lui hurler pour qu’il se ressaisisse.


Mais il était la victime toute désigné de la Serpentard modèle que semblait être Lilianor. Elle n’en ferait qu’une bouchée, c’était certain. L’envie de défendre le Serdaigle ne me plaisais guère, pour trois-mille raisons différentes. Sa tête à claque me revenais pas, même si le qualifier de rat de bibliothèque était vraiment de l’idiotie pure.
Quand Lilianor le compara aux moldus et lui proposa un os, j’inclinais la tête sur le côté, geste que j'faisais par habitude quand quelque chose me sortait vraiment par les yeux et que mon tempérament de médiatrice foutait le camp pour celui d’une justice que j’rendais à ma façon. Ma mâchoire s’était resserrée, le sourire que je m’efforçais d’arborer s’était rétréci et forcé, et mon regard, d’ordinaire pétillant, s’était teinté d’un voile noir annonciateur de tempête. Qualifier de « médiocres » les moldus était la chose à ne pas faire en ma présence.

Le sourire de ma soeur passa dans mon esprit, malheureusement pour sa camarade Serpy, il se dissipa presque aussitôt.



L’abruti de Serdaigle perdait de sa parole et était incapable de se défendre, j’avais envie de lui en coller une alors que je ne tenais déjà plus en place et que j’étais proche de répliquer très froidement à Lilianor, menaçant de faire quelque chose de très violent sur un coup de tête.

« Astoria promets-moi de rester tranquille quelques temps… » La voix de Daphné s’était matérialisée dans ma tête alors que mon regard ombreux voyait Lilianor foncer vers le Serdaigle qui paraissait perdu dans un nuage de faiblesse… et… elle en profita pour le faire tomber par terre.



Je déposais instamment Freya au sol qui gambada de ses pattes satinés pour rejoindre les jambes de sa maitresse, et, nonobstant ma conscience et ma promesse, j’avançais vers les affaires de la Serpentard et shootais dedans du pied, étalant ses livres plus loin dans le couloir et déversant le reste de son flacon d'encre.
Froide, raidie, je me tins devant elle, bien droite, le regard imperturbable, prête à faire barrage à n’importe quelle réaction.
- Oops, je n’ai pas fait exprès, dis-je d’une voix enfantine qui n’était pas la mienne.



Je n’accordais aucun regard au Serdaigle qui avait mérité de se retrouver à terre selon moi. Mais le comportement de la Zyskowski m’insupportais trop pour que je reste calme. J’regrettais déjà mon geste et de m’être mise devant elle pour la défier, mais c’était trop tard, mon habitude à placer les faibles devant les forts l’avait emporté sur ma raison, et ma haine des Serpentard pédants avait pris le dessus sur la fille modèle que je devais être dans une vie idéale. J’étais partagée entre l’envie que la Serpentard m’en colle une et me donne une bonne occasion de répliquer, de lui arracher une mèche de ses beaux cheveux blonds et peut-être de poser sur la peau blanche de son visage les marques écarlates d’une gifle bien méritée dont elle se souviendrait.

Et d’un autre côté, j’espérais qu’elle me connaisse et que le nom de Greengrass lui impose une certaine forme de respect, pour qu’elle s’écrase et fasse comme si j’avais rien fait.