These Lyrics, Though

Ouais bon hein, si on pouvait pas s’amuser un peu aussi…! Lawrence était un étudiant avec des besoins, manger, boire, s’amuser, chanter, boire encore un peu derrière, se défouler, tout ça. Il avait besoin de lâcher du lest face à cette vie ô combien stressante qu’est celle d’un étudiant, doublée de la difficulté de se retrouver dans un pays qui n’est pas le sien, avec seulement son meilleur pote et sa baguette. Le tout pour aller dans une direction qui n’allait nulle part : qui avait besoin de devins alors que le troisième millénaire approchait à grands pas !? Qui prenait encore cette prestigieuse profession au sérieux ? Lawrence aurait pu être une rockstar à l’ancienne, qui surfe entre drogue, sexe et musique, mais faut se réveiller, mon petit ! C’est fini les années 70 ! Il était né trop tard, dans un monde qui lui allait aussi bien qu’un pantalon en cuir à une nonne. Et en plus… EN PLUS ! Il n’avait pas réussi à serrer ce soir.

Zack était rentré, tout comme les autres fêtards qui avaient accompagné Lawrence, le laissant seul dans Avalon. Grossière erreur ! Ses pas le menèrent vers l’hôtel Moonlight — vraiment, il n’était jamais allé dans ce coin là d’Avalon et il n’avait même pas capté qu’il y avait un hôtel tout près — et il se mit subitement à chanter. Il avait besoin d’extérioriser ce sentiment aigu de solitude, cette frustration extrême de ne pas avoir été remarqué pendant cette soirée, et la déception amère de devoir rentrer à Haveirson non-accompagné. Bon, le détail, c’était que vu l’heure, il rentrerait à Haveirson au petit matin de toute façon, donc autant se poser et laisser sa muse parler. Ou hurler, en l’occurrence.

Sa voix s’éleva dans les airs, juste sous les fenêtres du Moonlight, dans une mélodie simple mais quelque peu lunatique dans ses hauteurs. Lawrence chantait bien, même quand il chantait des conneries. Il avait envie de se défouler, de hurler sa rage et sa peine, comme si c’était son seul moyen pour évacuer, ce qui n’était pas loin de la vérité. Les paroles — ou les non-paroles, plutôt — lui venaient naturellement, sans qu’il y réfléchisse (avec quel cerveau, de toute façon ?) jusqu’à ce qu’il se lève, bouteille à main, et boive un coup.

Se tournant vers les fenêtres, il remarqua alors une lumière allumée et une silhouette. Avec l’alcool et ses fantasmes, il vit un magnifique jeune homme, le prince charmant idéal avec les paillettes et les pétales de rose en fond. Et il le regardait. Waouh. Regardant vaguement dans sa direction, Lawrence reprit en hurlant encore plus fort, allant piocher dans ce qu’il avait déjà chanté comme un refrain. Et cette fois, il le pensait.

Ce soudain éclat de voix fit rire le Prince Eric (cherche pas, t’es le Prince Eric & j’suis la Petite Sirène) et se propagea jusqu’à la rue puisque Lawrence s’effondra aussi de rire.

— Hey, tu veux une chanson ? Je peux te chanter n’importe quoi ! Tu peux demander ! Je chante ce que tu veux pour d’aussi beaux yeux !

Conneries. De là où il était et avec la quantité d’alcool qui lui brûlait le sang, Lawrence était infoutu de voir les yeux de Jude correctement, même si effectivement, ils étaient magnifiques.

HRP:

Lawrence ne s’était pas attendu à avoir un public ce soir, mais ce n’était pas grave que Jude soit présent. Au contraire. Law était le genre d’homme qui dépérissait rapidement s’il n’avait pas son quota d’applaudissements journaliers. Avec un grand sourire qui ne cachait rien de son état d’ébriété, il héla le jeune homme à sa fenêtre, se proposant de lui chanter une sérénade. Bon, soit, il ne l’avait pas dit avec ces mots là. Mais n’empêche.

La réponse amusée du jeune homme surprit Lawrence, qui releva le défi sans aucune hésitation. Il connaissait la chanson, bien sûr, puisqu’il avait chauffé des salles de casinos avec d’autres choses que ses propres compositions. On n’allait pas se mentir : bien souvent, c’étaient ses reprises qui étaient les plus populaires. Cela dit… Lui demander d’improviser un truc alors qu’il n’était plus très frais, ce n’était pas bien malin. Que Jude ne s’attende pas à de la poésie, car ça n’en serait pas.

Bang bang bang bang bang me now !
I can stay here under your window all night long
If you could only make me want more
Bang bang bang bang bang me now !

On vous avait prévenus, non ? Et pourtant Lawrence se tenait là, debout dans la rue, souriant de toutes ses dents. Il avait bien mérité son poème non ? Même si déclamé comme ça d’une fenêtre…

— Hey Juliette, tu crois que je peux grimper pour venir te rejoindre sur ton balcon ? Je serais sage comme une image, promis !

Il fallait être un peu fou pour laisser un inconnu aviné escalader un mur en pleine nuit, même Lawrence en avait conscience. Mais il brûlait d’envie de voir ce charmant jeune homme d’un peu plus près, ce qui n’était pas sans lien avec ce qu’il chantait depuis tout à l’heure. Oh, il ne lui ferait rien de bien méchant si l’autre ne voulait pas mais ça… Jude l’ignorait, non ?

C’est bien parce qu’il était bourré, sinon Lawrence aurait rapidement calculé que non, ce n’était pas une bonne idée de s’amuser à grimper au mur pour aller rejoindre son Julien. Mais voilà, l’alcool avait embrumé ses sens, et mis à part chanter des conneries et draguer, il ne savait plus vraiment faire le reste. Il en avait même oublié que la contrepartie, c’était un poème ! Et pourtant son Julien le lui récita, faisant rimer ce qu’il pouvait tout en lui parlant presque normalement. Enfin quelqu’un qui pouvait faire comme lui ou presque ! Ça faisait du bien ! Lawrence éclata de rire, consumé par la joie, et il lui répondit rapidement, toujours sur l’air de Barbara Ann :

Come come come, come with me now !
We’re gonna walk… around the toooown !!!

Pas de doute, Jude venait de se faire un nouvel ami. Jude… C’était plutôt classe comme nom. Ça rappelait de mauvais souvenirs à Lawrence, mais d’une façon qui les rendait moins pénibles. Une fois que le jeune homme fut descendu, Law s’approcha et balança tout de go :

— Jude, comme Judas ? Ça ferait hurler mes vieux tu sais, des connards de no-maj qui ne jurent que par un Dieu dont ils ne respectent même pas la parole… Tsss. Je te jure.

Mais du coup, il ne s’était pas présenté non plus. Écarquillant les yeux, l’Américain essaya de s’incliner — mais il bascula en avant et dut se retenir aux épaules de Jude. C’est donc les yeux dans les yeux et très, très proche de lui qu’il lui annonçant son prénom en riant :

— Moi c’est Lawrence. Appelle-moi Law ou… Ce que tu veux.

Hmm, pas de doutes, ça sentait assez le whisky pour qu’une étincelle foute le feu à l’air ambiant, mais le sourire de Lawrence était sincère et puis il n’avait pas l’air d’avoir envie de vomir. C’était toujours ça de pris.

— On va où ?

Évidemment, Lawrence était trop fait pour capter le moment d’hésitation de Judas quand il évoqua ses parents. L’alcool rendait les choses plus simples et caricaturales, il grossissait les traits jusqu’à rendre la vérité mensongère. Lawrence ne détestait pas les no-maj, mais il avait grandi dans un environnement qui ne rendait pas les rapprochements entre sorciers et no-maj faciles. Ce qu’il se passait en ce moment en Angleterre était tout nouveau pour lui, totalement étrange et alien pour lui qui avait grandi aux États-Unis.

De toute façon, Law est trop ivre pour parler de ça clairement, et expliquer son point de vue à Judas. Il n’avait même pas remarqué que quelque chose clochait, de toute façon ! Non, à la place il manque de tomber, et se rattrape aux épaules de son chevalier blanc de la nuit. Qui en perd son latin au passage. Law ne put s’empêcher de rire face à l’embarras de Jude, et ne se gêne pas pour passer un bras autour de ses épaules. Principalement pour ne pas trébucher une seconde fois.

Et c’est là que Judas lui propose de le raccompagner chez lui. Oooooh, Law en ferait presque une hémorragie nasale subite… Avec un grand sourire, il se tourna vers lui :

— J’suis à Haveirson, j’ai mon colooooc et tout. Tu le verrais, ce mec est magnifique ! Bref, c’est pas juste à côté. Mais de toute façon, tu peux pas venir. T’es pas étudiant, hein ?

Lawrence marqua une courte pause, comme s’il réfléchissait. Enfin, qu’il essayait. Difficile de réfléchir correctement quand notre sang baignait dans autant d’alcool, en fait. Levant un doigt comme si ce qu’il allait dire était de la plus haute importance, il éleva la voix.

— Ou alors je peux dormir chez toi. Fin, dans ton hôtel. Doit bien y avoir des chambres dispo, non ? Avalon, c’pas comme si c’était Cannes en plein festival, non ? Et puis j’aime bien les hôtels, j’suis habitué, j’viens d’Vegas tu vois…

Et il se mit à fredonner un air d’Elvis Presley, en se mélangeant un peu dans les paroles, mais toujours de façon aussi juste.