Bulletproof.

« Comme il est facile de se laisser submerger par la haine ! »
Bernard Werber

Deux longues heures de cours de Défense contre les forces du mal venaient tout juste de se terminer, au soulagement de bon nombre d'élèves ; ce n'était pas trop tôt. Oh, la matière en elle-même était des plus intéressantes, c'était un fait, mais la dureté et la sévérité excessives du Professeur Rogue étaient éreintantes. Sa matière était essentielle toutefois, et les thèmes abordés regorgeaient de détails captivants et de précisions tout aussi intéressantes, ce qui impliquait qu'il fallait travailler avec une rigueur et un sérieux sans faille pour pouvoir obtenir de bons résultats. Ajoutons à cela l'austérité du professeur et nous obtenions un cours à l'atmosphère lourde et pesante, voire même stressante. Ainsi, lorsque Severus Rogue avait mis un terme à son cours ce jour-là, autorisant alors les élèves de quatrième année à quitter la salle, ce fut comme un soulagement pour la totalité d'entre eux.

Comme dans chaque matière, Hope était une élève douée et assidue, et par chance, elle semblait être dans les bonnes grâces du professeur. S'il ne paraissait pas spécialement accueillant ni agréable, et qu'il arrivait souvent que le Professeur Rogue fasse peur, il semblait tolérer Hope, dans le sens où elle n'avait jamais eu de remarque réellement désobligeante de sa part. Peut-être était-ce dû au fait qu'elle s'était toujours efforcée d'avoir d'excellents résultats dans sa matière ou encore parce qu'elle appartenait à la maison Serpentard. Aussi, il fallait prendre en considération que son sang-pur et le nom qu'elle portait devaient certainement y être pour beaucoup. Quoi qu'il en soit, peu importe la raison, elle redoublait toujours d'efforts pour qu'elle reste toujours parmi les élèves qu'il détestait le moins, au risque, souvent, de paraître un peu trop lèche botte. Mais malgré que la matière lui plaisait et qu'elle voulait plaire à son professeur, elle quitta cette fois encore la salle de classe avec une joie non dissimulée, bien que fatiguée par ces deux dernières heures. Elle ramassa rapidement ses affaires, regroupa ses livres et rangea sa baguette dans son uniforme, puis elle quitta la pièce avec politesse et courtoisie.

Mais la journée était bien loin d'être terminée. Au contraire, elle commençait tout juste ! Il était à peine dix heures du matin et inutile de dire qu'un cours de Défense contre les forces du mal n'était pas le plus motivant pour amorcer une longue journée de cours. Quoi qu'il en soit, elle avait à présent une heure de pause avant de devoir rejoindre les serres pour son cours de Botanique. Ce serait l'occasion pour elle de monter jusqu'à la bibliothèque pour rendre un livre de Métamorphoses qu'elle avait emprunté un peu plus tôt. Elle se dirigea alors vers le les escaliers, mais ceux-ci n'en faisaient évidemment qu'à leur tête, et les élèves se bousculaient tous pour pouvoir passer et rejoindre leur salle de cours le plus vite possible. Si elle restait là, elle risquait de perdre bien trop de temps, surtout qu'il lui faudrait ensuite redescendre et quitter le château pour se rendre dans les serres. Zut ! Bon, cela ne faisait rien. Hope partit alors dans la direction opposée, et voulu faire un détour. Ce serait un tout petit peu plus long, mais en passant par ces couloirs isolés, elle évitait la foule.

En ce moment, c'était le rush au château. Tout les élèves, petits et grands, bons et mauvais, travaillaient d'arrache-pied pour les examens. Ou pas, d'ailleurs. Mais l'effusion était bien présente dans l'air. Le parc était vide, malgré le ciel bleu pétant. Y faisait pas des chaleurs torrides, mais c'était quand même plus agréable. On sentait l'été approcher timidement. Mais personne pouvait s'en soucier, pour l'instant. Sinon, adieu les bonnes notes. Bof, la Kvelgen était pas inquiète. Elle connaissait son point faible, et ses points forts. De toute façon, son non niveau en magie était connu de tous. Avec un peu de chance, les profs auraient pitié, et lui mettraient la moyenne. Bah quoi, on pouvait bien espérer !

Mine de rien, elle était fatiguée. C'est qu'elle en ingurgitait, des informations. Contrairement à ce qu'on pouvait croire, Mara était studieuse. Disons plutôt qu'elle se donnait dans les matières où elle était à l'aise. C'était tout ou rien, y avait pas de demi-mesure. Ces derniers jours, elle avait du passer plus de temps à la bibliothèque qu'en salle de classe. C'était une façon de dire qu'elle se donnait, justement. La Botanique, les Potions, les Soins aux créatures magiques et l'Histoire de la Magie étaient ses terrains de jeux favoris. Pour les autres matières, on repassera. Circulez, y a rien à voir.

Les paupières lourdes, elle traînait dans les couloirs. Dans trente minutes, ça repartait. La journée se profilait à peine, elle en avait déjà marre. Vous me direz, elle aurait du aller réviser. Faire un truc productif et constructif. Que nenni. En fait, elle avait la flemme de tout. Son cerveau devait ressembler à un tas de viande en décomposition. C'était comme si il avait été malaxé, retourné dans tous les sens. Une bouillie informe, dégoulinante. Bref ; l'Aigle n'avait pas la tête au boulot, c'était le cas de le dire. Elle ressemblait aux fantômes de Poudlard, à errer, le regard vide. Sauf qu'elle était pas translucide. Et pas morte, non plus.

D'un coup, la blonde s'était retrouvée au beau milieu d'une foule de collégiens. Ça grouillait comme des insectes. Elle aurait clairement pas la patience de traverser tout ce bordel. Ni de se faire bousculer dans tous les sens. Sinon, y allait avoir des morts. Au moins un, en tout cas. Ses yeux vifs avaient repérés un couloir désert sur le côté. Mais de là à s'extirper du courant humain, y avait du boulot. Lentement, ballottée comme un sac, elle y arriva. L'espace d'un quart de secondes, elle avait hurlé sur une Serpentard plus jeune qu'elle. Fallait se bouger, et pas rester en plein milieu du passage, si elle voulait pas se faire écraser le pied ! Non mais quelle conne.

Bougonne, elle alla se mettre à l'écart, dans ledit couloir. Fiou. En marchant, elle se demandait si le fait d'être insupportable était un trait commun à tous les vert et argent. En parlant de malheur, elle en voyait un se pointer à quelques mètres. Hope Westminbrook. Tiens, pour une fois qu'elle était pas flanquée de sa grande copine Lilianor. A croire qu'il leur était possible de vivre l'une sans l'autre. Mara les voyait comme des siamoises. Deux vipères qui sortaient davantage les crocs qu'elles ne mordaient. Un sourire, que dis-je, un rictus releva sa lèvre. L'occasion était trop belle pour la manquer. Accélérant le pas, elle arriva à sa hauteur pour se camper devant elle. Littéralement, elle lui barrait la route. Sa voix prit un ton doucereux qu'elle ne se connaissait pas.

« - Alors Westminbrook, on se ballade sans escorte ? L'Irlandaise s'appuya nonchalamment contre le mur de pierres. Grave erreur... » conclut-elle en secouant la tête d'un air faussement désolé. Ses mains balayèrent les livres qu'elle tenait. Les ouvrages valsèrent, suspendus un moment. Puis tombèrent aussi lourdement que des pierres. Car tout ce qui monte, doit forcément redescendre. Précisément, Mara comptait bien faire redescendre Hope. Et par Merlin, elle s'en rappellerait. L'Aigle lui jeta un regard glacial, plein de défi. Ose seulement.

« Comme il est facile de se laisser submerger par la haine ! »
Bernard Werber

Pressée d'arriver à la bibliothèque, Hope ne regardait pas spécialement où elle allait. Les élèves avaient tous décidé de s'agglutiner dans les escaliers et, pour ne pas être en retard, Hope avait choisi de prendre un chemin détourné. Avançant d'un pas déterminé, elle se dépêchait de parcourir les couloirs aussi vite qu'elle le pouvait. Mais elle dû cependant s'arrêter lorsqu'elle s'aperçu qu'un élève apparemment assez courageux pour lui bloquer le passage l'empêchait volontairement d'avancer. Elle releva la tête, machinalement et, d'instinct, ses traits se durcirent. L'odieuse et détestable Mara. C'était épidermique ; le simple fait de la voir lui donnait de l'urticaire. « Et dire que, jusqu'à présent, je passais une journée agréable... », dit Hope tout doucement, entre ses dents, et pleine de sarcasmes, alors que Mara se trouvait devant elle. « Que me vaut le déplaisir, Mara ? » Elle lui fit un sourire faux, irritée. En comparaison, un cour de Défense Contre les Forces du Mal, dispensé par ce cher Professeur Rogue était un véritable plaisir. Mais cette Mara Kvelgen n'avait-elle rien de plus intéressant à faire ? Hope soupira et, bien décidée à s'éloigner le plus possible d'elle, elle tenta de l'ignorer et de la contourner ; c'était toutefois impossible.

Hope soupira une fois de plus, las, et elle s'apprêta à ajouter quelque chose - une nouvelle remarque aussi agréable qu'elle en avait l'habitude, sans doute - mais Mara ne lui en laissa pas l'occasion. D'un geste vif et si rapide que la Vert et Argent ne pu l'anticiper, Mara fit valser les livres que la jeune fille tenait dans ses mains. Hope tenta alors du mieux qu'elle le pouvait d'éviter à ses affaires de tomber, mais elle ne parvint évidemment pas à rattraper ses livres, qui s'écrasèrent au sol, tandis que les feuilles de parchemin volèrent et s'éparpillèrent dans le couloir. Le regard qu'elle lança à la Serdaigle était aussi sombre que froid, et il montrait alors tout à fait à quel point elle pouvait détester la Bleu et Bronze. « Pitoyable », lança-t-elle à cette dernière, sans même sourcilier. Elle croisa les bras sur sa poitrine, gardant alors son dos bien droit et sa tête haute, et elle fixa son regard sur cette odieuse jeune fille, avant de reprendre. « De toute évidence, ton manque d'éducation semble encore plus accentué par ta stupidité affligeante. J'en aurais presque de la peine pour toi ». Presque, évidemment. Car cela serait lui faire trop d'honneur.

Une chose était certaine. Si Mara espérait que Hope allait se laisser faire, elle se trompait lourdement. Cette dernière fixa une nouvelle fois son regard si froid sur la septième année, avant de reprendre, lui lançant presque un ordre : « Ramasse ça immédiatement, Kvelgen », siffla-t-elle entre ses dents. Elle avait fait tomber ses affaires, c'était à elle de les ramasser. Elle ne pensait tout de même pas que Hope se pencherait devant elle ? Cela ne risquait certainement pas d'arriver. Mais peut-être que Hope était également un peu inconsciente, aussi...

Merlin ce que ça avait été jouissif. Bon, c’était sans doute pas très mature comme comportement. Mais l’Aigle s’en foutait totalement. C’était œil pour œil, dent pour dent. Et gare à ceux contre qui elle avait une dent, justement. La vengeance d’un Kvelgen est un plat qui se mange congelé. Mais l’arrière goût restait longtemps sur le palais. Peu importe le nombre de fois où vous vous brossiez les dents. Et plus vous voulez vous en débarrasser, plus il persiste. C’était un foutu cercle vicieux, mais c’était le but aussi. Morale de l’histoire ; on cherche pas des noises à un Kvelgen sans en faire les frais.

Un ordre. Hope venait de lui balancer un ordre. Le visage dur comme la pierre de Mara se détendit. Et sa bouche se fendit d’un rire nerveux. Murmure d’abord, il s’amplifia jusqu’à remplir le couloir entier de ses échos rauques. Elle savait pas ce qui était le plus fort dans son hilarité ; la moquerie ou l’amusement sincère. Dans les deux cas, elle se tenait les côtes. Sérieux, elle l’avait prise pour qui ? P’t’être bien qu’elle l’avait confondue avec son elfe de maison. Quoiqu’elle était quand même plus jolie que ces créatures serviles. Reprenant son calme, la blonde la transperça de son regard froid.

« - Si j’avais su que je me marrais autant, je serais venue te voir avant, Westminbrook. Sans la quitter des yeux, elle avança de deux pas. Piétinant exprès ses livres et ses cours. Voilà ce que j’en faisais, de ton ordre débile. D’un ton mauvais, elle ajouta : Tu devrais demander à un de tes larbins de Serpentard de le faire. Parce que moi, jamais j’le ferai, t’entends ? Jamais. »

Là, elle aurait du se casser. En mode sortie théâtrale magistrale. Mais non ; la tentation de voir la réaction de cette petite pimbêche était trop grande. Oh, elle avait déjà entendu ce qu’on chuchotait à son sujet dans la maison des verts. Reine des Serpents. C’est ça, et puis quoi encore ? En tout cas, elle avait bon dos, la prétendue reine. Il avait suffi d’un simple geste pour la faire basculer de son trône. Ploie devant moi. Elle n’était rien de plus que les autres, c’était ça, la leçon qu’elle voulait lui donner. Où donc sont tes gardes en armures d’argent ? Tu étais toute seule, face à toi-même. Alors, ça avait quel goût, cette fois-ci ?

« Comme il est facile de se laisser submerger par la haine ! »
Bernard Werber

Le destin avait voulu que Hope ait le déplaisir de croiser Mara Kvelgen, au détour d'un couloir. Evidemment, la petite Westminbrook aurait préféré être tranquille et ne pas croiser cette Serdaigle. Mais tant pis. Le rire tonitruant de la jeune Kvelgen se fit entendre. Il raisonna dans le couloir et en l'entendant, Hope grimaça. Elle attendit qu'elle se calme un peu, réellement ennuyée de devoir assister à une chose aussi triste. « Pauvre petite Mara Kvelgen. Tu es d'un pathétique affligeant. Tu dois bien t'ennuyer chez les Serdaigles pour n'avoir rien de mieux à faire que perdre ton temps dans les couloirs ! ». Hope secoua la tête de droite à gauche, affligée. « Et par pitié, arrête donc de rire, ça devient crispant ! ». Elle parlait avec sarcasme. En vérité, elle dédaignait complètement la jeune fille. Du haut de son mètre quatre vingt, Hope la regardait, soulevant un sourcil et les bras croisés sur sa poitrine. Elle était bien grande pour une jeune fille de son âge, héritage de sa famille, mais sa taille était parfois un avantage, comme ce jour-là. Ainsi, il était bien difficile pour un autre élève de chercher à l'intimider.

Hope était las ; las et énervée. Evidemment, elle se doutait bien que la Serdaigle ne ramasserait pas ses affaires. Si elle le lui avait demandé, c'était plus par défi qu'autre chose, elle n'espérait pas réellement qu'elle s'exécuterait. Mais s'il y avait bien une chose qu'elle ne supportait pas, c'était que l'on s'en prenne à ses amis. Elle avança d'un pas, tout en essayant de se trouver un air menaçant. Elle essayait, seulement, car Hope ne faisait pas vraiment peur, pas du tout même. « Et que dire de ta pitoyable petite bande d'incompétents ? Tes sous-fifres. Comment dit-on, à Poudlard ? La " Bande à Mara ", c'est bien ça ? Morange Tiller et Andrew Coyti... C'était tellement triste de les voir dans les couloirs, l'autre jour ! Tu étais où, Mara, ce jour-là, pour les soutenir ? Tu te penses mieux que moi ? Car ce n'est pas le cas ». Elle marqua une courte pause avant de reprendre. « Et sache que je n'ai pas de " larbins ". Alors je ne te permets pas de parler de mes amis de la sorte. Je te prierais de leur témoigner plus de respect ». Hope lui lança un regard sévère. Qu'elle s'attaque à elle, passe encore, mais qu'elle cherche ses amis, ça, ça lui était tout simplement inconcevable !

Suite à cela, Mara sembla trouver un intérêt tout particulier à piétiner les livres de Hope, qu'elle avait elle-même prit soin de faire tomber quelques minutes plus tôt. Hope la regarda alors faire, impassible, jusqu'à ce qu'elle ait finit de jouer. « Au lieu de piétiner ces beaux ouvrages prêtés par Poudlard, peut-être devrais-tu songer à faire un détours par la bibliothèque un de ces jours. Vu ton niveau en sortilèges, cela ne pourra t'être que bénéfique ». Mara n'était pas connue pour ses talents de sorcière. Il était évident qu'elle devrait s'appliquer à travailler un peu plus. « La bibliothèque se trouve au quatrième étage. Comme tu ne dois pas être assidue, je préfère te filer un coup de main ». Par pure bonté d'âme, évidemment.

04/03/2016

Mai 2017.

Le cours d'Histoire de la Magie avait semblé durer une éternité. Cela n'était guère nouveau. La voix monotone ainsi que le ton qu'employait le professeur Binns a toujours été des plus ennuyeux. Pourquoi est-ce que la direction permet à un fantôme d'enseigner ? Même Trelawney devait être mieux. Non, je n'avais pas la divination mais d'après ce que me disaient plusieurs Serpentards, ses cours étaient absolument ridicules tout comme son apparence. C'est ennuyée que je sortis de ce cours. Au moins, la journée était terminée. J'avais quitté Alycia qui était partie de son côté afin de faire un tour aux salles de bain du premier étage.

Après que cela fut fait, j'ai quitté la pièce, livre d'histoire à la main, en me dirigeant vers les escaliers. Je voulais retourner dans la salle commune et c'est exactement ce que je fis jusqu'à ce que j'entende des voix familières au détour d'un couloir. L'une était très familière et l'autre, détestable. M'approchant de la source de ce vacarme, j'ai tourné le coin pour y apercevoir nulle autre que Kvelgen qui intimidait Hope. Je n'avais pas vraiment capté les paroles hormis celles que mon amie Westminbrook avait lancées, alors que je marchais vers Hope. Avec la Serdaigle dans les parages, rien d'étonnant à ce qu'il y a des perturbations. Elle n'est qu'une idiote inutile au même titre que des personnes comme Tiller alias le minable de la réunion.

Étant désormais arrivée à côté de la brune, ses choses sur le sol, j'ai fixé Kvelgen avant de lui dire, de mon ton malicieux : « Partout où tu passes, tu crées la merde. Il serait peut-être temps que tu ailles te noyer dans le lac au lieu de nous démontrer ton inutile et ridicule présence. » Dis-je, de mon sourire narquois, regardant Hope par la suite. « Elle a osé te faire quoi, cette vermine ? » Lui demandais-je, regardant ses bouquins sur le sol, ayant une soudaine envie de sortir ma baguette et lui lancer un bon petit sortilège qui fait bien souffrir. Un de ceux avec lesquels je me pratique avec Stanislas. Je fixais Kvelgen d'un mauvais oeil. Même si elle était plus âgée, je n'en avais nullement peur. Je n'avais peur de presque rien... sauf les arachnides mais cela était une toute autre histoire.

Spoiler:

Bulletproof.
Fin mai~début juin 1997

S

eigneur, faites que la fin des cours arrive, et vite. Les révisons allaient rendre Aldabella complètement folle ; entre l’étude intensive des potions, celle de la métamorphose et de l’histoire de la magie, la jeune fille ne savait plus où donner de la tête. Heureusement pour elle, au moins, les rumeurs qu'avaient propagés la Gazette semblaient avoir été oubliées, du moins pour l’instant, et la Rouge pouvait maintenant se consacrer corps et âme à la préparation des examens, rien qu’à ça.

Ah, si seulement

Quittant en douce le bureau du professeur Underwood, la blonde referma la porte derrière elle et poussa un long soupir en closant les paupières. Toute cette histoire la fatiguait ; être manipulée, utilisée comme un vulgaire pantin était une chose. En être consciente, cependant, en était une autre. Humiliée, brisée, elle n’avait eu d’autres choix que de se soumettre aux exigences de son professeur. Elle était à sa merci, tant et aussi longtemps qu’il le désirerait, et cette situation la rendait malade, dégoûtée d’elle-même.

Serrant les bras contre la poitrine, Aldabella prit le chemin vers son dortoir, longeant les couloirs du premier étage, lorsqu’elle entendit des voix s’élever. S’approchant un peu de la source des argumentations, elle se cacha derrière un mur et analysa la situation. Une Serpentard et une Serdaigle se lançaient des attaques verbales à tour de rôle ; Hope et Mara. Nouveau soupire.

Elle songea à rebrousser chemin, à faire comme si elle n’avait rien vu ; la Bleue était assez grande pour se défendre toute seule face à une cinquième année. Puis, une nouvelle élève vint se joindre au spectacle et la blonde frotta sa paume contre son front. Elle n’avait aucune envie d’intervenir, mais son insigne de préfète qui brillait sur sa poitrine la forçait à agir. Bordel, j’ai pas signé pour ça.

Sortant de sa cachette, elle s’approcha des étudiantes, s’adressant à elles de son ton fort et sévère.

« Kvelgen ! Westminbrook ! Zyskowski ! Mais qu’est-ce que vous fabriquez, dites-moi ? Vous n’avez donc rien de mieux à faire de vos journées que de jouer à Mon père est plus fort que le tien ? Sérieusement, les examens approchent et vous voilà, les trois, à vous insulter comme des enfants dans une cour de récréation. » Elle les fusilla du regard une à une, Mara inclusivement. « Je me fiche de savoir qui a commencé. Vous vous êtes manquez de respect mutuellement, toutes les trois. Vous avez de la chance de ne pas être chez Gryffondor, ou vous auriez eu droit à une heure de colle pour de tels propos. »

Elles pinça des lèvres, réfléchissant à la suite. Elle avait deux choix ; rapporter les faits à un professeur qui agirait en conséquences, ou les laisser partir. Sa conscience, sa logique et son insigne votaient pour la première option, mais son coeur penchait pour la seconde. Elle n’avait aucune envie d’attirer des ennuis à Mara, même si elle s’était mise dans le pétrin toute seule.

« Vous avez de la chance, je me sens clémente, aujourd’hui, alors je ne parlerai pas de cet accrochage à personne. C’est ce que font les personnes respectueuses, voyez-vous. Vivre et laisser vivre. Je ne vous demande pas de vous aimer, ni même de vous apprécier, mais par pitié ; tolérez-vous. Vous croyez vraiment que vous bosserez qu’avec des gens que vous portez dans votre coeur plus tard ? Non. Bienvenue dans la vraie vie, les filles ; un monde où il n’y a pas de place pour les enfantillages. Maintenant, ouste, avant que je ne change d’avis. »

Elle posa ses mains contre sa taille, espérant de tout coeur que les adolescentes partiraient et qu’aucune n’aurait l’audace de riposter.

Évidemment, c’était au tour de Westminbrook de lui servir des gentillesses. Même si les deux élèves étaient en guerre l’une contre l’autre, elles étaient fair-play. Les piques acides s’enchaînaient, mais elles s’écoutaient, au moins. C’était à qui aurait le dernier mot. Ou bien le mot le plus heurtant. A ce jeu-là, Mara n’était vraiment pas mauvaise. Elle avait la colère facile, mais ça concernait la majorité des sorciers et autres formes de vie. La vexer, voilà un défi de taille à relever. Et Hope prétendait au titre, apparemment. Come and get it, girl.

La Serpente s’était muée plus près d’elle. La blonde sentait son espace vital envahit ; par la bêtise, les sifflements et la hargne. La hargne, c’était bien la seule chose qu’elles avaient en commun. Du moins, c’était la seule chose que l’Aigle leur reconnaissait. Mais plus Hope déblatérait, plus Mara se sentait mal à l’aise. Elle supportait pas la proximité physique, rien qu’avec ses proches. Alors vous imaginez avec une présence indésirée ? Et indésirable. Les mâchoires contractées, elle écoutait même pas son petit discours venimeux. A quoi bon ?

Son regard était fixé sur l’autre, immobile ; comme l’oiseau jaugeant sa proie. Merlin, voilà qu’elle repartait de plus belle. Mais cette fille était un moulin à conneries, c’était pas croyable. Avec exaspération, la demoiselle croisa les bras sur sa poitrine. Malheureusement, la deuxième partie du monologue fielleux de Westminbrook tomba dans ses tympans. Ses sourcils s’arquèrent, ses poings se serrèrent, et ses yeux lancèrent des éclairs. Grave erreur, d’évoquer ce handicap, ma fille.

« - Ecoute moi bien, Westminbrook. Sa voix tremblait de colère, mais elle était bizarrement calme. Une colère froide. Que j’t’entende plus jamais parler de ça. Parce que moi, tu vois, sans baguette, je peux te refaire le portrait façon hachis. Mais toi, sans la magie, t’es rien. Rien du tout. »

Sa dernière phrase était à peine audible. Les mots durs et violents étaient dix fois plus saisissants dans un murmure que dans les cris. C’était comme faire une promesse, comme rendre la violence intime et exclusive entre deux personnes. C’était leur duel personnel à huis-clos, cachées dans les couloirs du château. Mara venait de la menacer le plus clairement du monde. Elle savait que cette confidence serait sans doute répétée, déformée, amplifiée. Mais qu’importe ; ils feraient quoi ? Elle était curieuse de voir.

Tiens, voilà Charybde qui se joint à Scylla. La Kvelgen se disait bien qu’il manquait un truc ; un larbin de Miss Hope, justement. Voilà, on avait là un superbe spécimen de Serpent à sornettes. Elle esquissa un sourire à ce jeu de mot débile. La nouvelle venue ajouta sa dose de bave toxique ; comme si on avait besoin d’elle. Elle voyait pas qu’elle gênait, sérieux ? C’était un duel, ce qui impliquait qu’il fallait être deux. Uniquement deux. Dégage, Zyskowski.

Mais quelqu’un d’autre débarqua dans cette prise de bec privée. Sans déconner, on pouvait même plus s’engueuler tranquillement. La Norvégienne se tourna vers l’importune, tout en la mitraillant du regard. Il ne lui fallut pas plus d’une demi seconde pour reconnaître sa préfète d’amie, Alda. Qui leur offrit un sermon digne d’une mère à des enfants désobéissants. Malgré son sale caractère, sa colère, son indifférence pour les règles ; elle se sentait honteuse. Alors, elle ne répondit pas à la Lionne ; y avait aucune justification valable. Certes, Hope et Lilianor étaient des nanas insupportables. N’empêche qu’objectivement, autant Mara qu’elles, avaient eu un comportement débile. C’était jamais très agréable d’être pris sur le fait. Surtout par une amie.

La présence de la Prendergast avait aspiré la rage de la blonde. Comme si elle voulait faire bonne figure devant elle, quelque part. Inconsciemment, ça devait être ça. Elle s’écarta des bouquins, avant d’en ramasser un, de s’avancer vers la brune et de lui rendre. Alors qu’elle le récupérait, méfiante, l’Aigle lui attrapa le poignet. Elle resta muette, mais ses yeux bleus voulaient tout dire. La rancune était quelque chose de délicieux. C’était loin d’être finit, Westminbrook.

« - Désolée Alda, j’me suis laissée emporter. Ça se reproduira pas. J’ai mieux à faire t’façon. » lâcha-t-elle en passant à son niveau. Elle adressa un sourire sincère à la Gryffone ; merci.

Puis la jeune fille partit d’un côté du couloir, plantant là les deux vertes. Par Morgane, ça faisait un bien fou de se défouler comme ça. Quoique, elle en serait bien venue aux mains. Mais là, ça aurait pu prendre des proportions… Importantes. Bwarf, plus la peine de s’prendre la tête ; c’était passé. Par contre, elle avait pas trop aimé la tirade moralisatrice d’Alda. Enfin bon, pas comme si elle avait le choix. Fallait bien qu’elle fasse son boulot ; c’était à ça que lui servait son insigne d’argent. Ah, les aléas de la vie.