Holidays, Oh, Holidays...

21/05/2016

Maison des Saunterton, Birmingham.
14 juillet 1997, en milieu de matinée.

Birmingham. Ses quartiers résidentiels. Ses maisons en enfilade que rien ne distinguent de ses voisines, si ce n’est la petite plaque du numéro sur le portail et la voiture garée dans l’allée. C’est justement des fenêtres d’une de ces maisons si caractéristique de cette ville ouvrière de l’ouest de l’Angleterre que s’échappent les signes d’une grande agitation. Des bruits de pas précipités, des éclats de voix, qui troublent la quiétude de ce début de matinée. « M’an ! T’es sûre que tout va être prêt, hein ? » Depuis qu’il avait ouvert les yeux ce matin-là, bien trop tôt selon l’avis unanime de ses parents, le petit Nathan Saunterton était une véritable tornade. Enfin, encore plus qu’à l’accoutumée, ce qui n’était pas peu dire.

Sitôt son petit déjeuner englouti, il tourbillonnait dans les différentes pièces de la maison, rangeant un objet qui n’était pas à sa place, essuyant la poussière du rebord d’un meuble, s’enquérant de l’avancée des préparatifs du déjeuner toutes les cinq minutes, à tel point que sa mère dut user de son autorité pour l’envoyer prendre sa douche afin d’avoir cinq minutes tranquille pour continuer sa cuisine. Malheureusement, à peine fut-il sorti de la salle de bain que le ballet incessant des interrogations en tout genre reprenait, comme si de rien était. « Calme-toi, Nathan. Tout sera prêt. La maison est rangée, les préparatifs du repas avancent. Même ton père est lavé et habillé, c’est dire si on est dans les temps. »

Pas complètement rassuré, le petit lion jeta un coup d’œil en direction du salon où son père lisait tranquillement le journal du matin. Effectivement, il avait l’air on ne peut plus présentable, avec sa chemise impeccable et ses bretelles qui maintenaient son pantalon en velours. Il ferait un parfait cas d’école d’accoutrement moldu chez les classes moyennes britanniques, Orion serait ravi. Sentant le regard de son fils posé sur lui, Winston Saunterton leva les yeux de son canard, pour s’adresser à sa progéniture, un petit sourire en coin sur le visage. « Dites donc, jeune homme, j’espère que votre chambre est dans un état aussi impeccable que le reste de cette maison. Hmm ? » Zut ! Sa chambre, il l’avait complètement oubliée ! Avec toutes les vérifications qu’il avait eu à faire pour s’assurer que tout serait fin prêt pour l’arrivée de Camille et d’Orion, il n’avait pas eu une seconde à lui.

C’est donc quatre à quatre qu’il grimpa les escaliers qui montaient à son domaine, ouvrant la porte à la volée et constatant immédiatement l’étendue des dégâts. C’était officiel, il ne pouvait décemment pas montrer un tel carnage à ses invités ! Son premier réflexe, certainement salvateur et conditionné par les nombreuses remarques de Mme Saunterton, fut d’ouvrir en grand la fenêtre, pour aérer l’endroit. Puis, en un rien de temps, les vêtements sales qui jonchaient le sol furent rassemblés et bourrés à l’intérieur de la panière de linge sale. Quelques sacs par-dessus pour lester le tout, et ça fermait parfaitement.

Une fois que son lit fut fait et l’aspirateur passé à la hâte, il admira le travail et décréta que sa chambre avait vraiment fière allure, avec ses posters de l’équipe de football d’Aston Villa qui en tapissaient les murs (Go Villains !), ses trophées brillamment remportés avec l’équipe de foot de son quartier et sa console de jeu flambant neuve bien en évidence sur son bureau (une Playstation première du nom, un vrai bijou !) avec les quelques jeux possédés par Nathan (de foot et d’aventures, principalement, en attendant la sortie de Final Fantasy VII dans quelques mois). Le seul détail qui trahissait son appartenance au monde des sorciers était la cage d’Hans Cristiansen, posée sur sur rebord de son armoire. A l’intérieur, le petit hibou regardait Nathan s’agiter d’un œil interrogateur. Finalement, c’était une bonne chose qu’il n’ait pas pris la peine d’accessoiriser sa chambre avec ses affaires de Poudlard. Comme ça, Orion pourrait voir à quoi ressemblait une vraie maison moldue ! Tout était fin prêt, et il était seulement… Quoi ? Déjà ?

Les escaliers furent descendus aussi vite qu’ils avaient été montés, et la chute ne fut évitée que d’extrême justesse. S’il voulait être à l’heure pour récupérer Camille et Orion à la gare, il ne fallait pas traîner. Mais avant ça… « M’an ! P’pa ! Vous m’mettez pas la honte devant mes amis, hein ? Vous avez promis ! » Le ton était presque implorant. Le regard, sévère. Son père eut un petit rire, tandis qu’il repliait son journal, s’adressant à sa femme. « Tu entends ça ? Si j’avais su qu’un jour Nathan nous demanderait de ne pas lui faire honte avant qu’on soit devenus séniles, je pense bien que je ne l’aurais jamais cru... » Puis, se tournant vers son fils. « On va essayer, fiston. Et promis, je ferai de mon mieux pour éviter de t’appeler Nathounet devant Castille et Orson. » Les yeux du jeune Saunterton s’écarquillèrent de terreur suite à cette révélation. Heureusement, sa mère vint les rejoindre et posa sa main sur l’épaule de son fils pour le calmer. « Ne t’inquiète pas, mon chéri. Ton père plaisante, et il connaît très bien les prénoms de tes amis. Allez, file les chercher, sinon tu vas être en retard. »
Tandis que Nathan quittait le salon en grommelant pour aller mettre ses chaussures, gratifiant au passage son paternel d’un regard noir parfaitement mérité, sa mère le rattrapa au moment où il s’apprêtait à sortir. « Au fait, tu te rappelles ce que je t’ai dit ? Tu évites de leur parler de Gabrielle à tout bout de champ, d’accord ? Ça ne se fait pas. » Nathan approuva de la tête, avant que Mme Saunterton ne dépose un baiser sur le front de son fils. L’instant d’après, il quittait la maison en direction de la gare, muni de son sac à dos, non sans entendre la voix de son père lui lancer un « A tout à l’heure, Nathachounet ! » moqueur depuis le salon.

Sa mauvaise humeur suite à la dernière remarque paternelle l’accompagna pendant l’intégralité de son trajet jusqu’à la gare, où elle fut bien vite remplacée par l’excitation à l’idée de voir ses amis arriver. Un coup d’œil rapide à l’écran d’arrivée des trains lui indiqua que celui qui l’intéressait aurait trente minutes de retard. Bougonnant et trépignant, Nathan attendit le plus patiemment qu’il put, jusqu’à finalement apercevoir au loin la fumée annonciatrice de la locomotive en approche. Dès qu’elle l’eut doublée, il se mit à courir le long du quai en sens inverse, cherchant les visages de Camille et d’Orion à travers les vitres relativement sales du train. Une fois le train à l’arrêt, les voyageurs descendirent des wagons, tandis que le petit Gryffondor levait bien haut au-dessus de sa tête une pancarte où il avait écrit les prénoms de ses invités. Et au cas où ils auraient été frappés de cécité momentanée, il les appelait à pleins poumons, tout à sa joie de les retrouver. On n’était jamais trop prudent…

Finalement, il les aperçut parmi la foule des passagers. Il accourut aussitôt dans leur direction, et les salua chaleureusement. « Alors, vous avez fait bon voyage ? Comment vous avez trouvé le trajet en train moldu ? » Il remit sa magnifique pancarte dans son sac, et tous trois se mirent en route en direction de la maison familiale, guidé par le petit lion qui était enchanté de faire découvrir sa ville à ses amis.