Un temps pour tout. {Clemens}

UN TEMPS POUR TOUT

Personne ne finit dans l'oubli,
Si quelqu'un l'attend encore ici.
Un ami manque toujours,
On pense toujours à son retour.

J’ai fini les cours il y a une heure. J’ai donné rendez-vous à Clemens au Parker’s Coffee. Ce que j’ai lu dans sa lettre est loin de me plaire, et même si je compatis à ce qui est arrivé à Quinlan, je n’oublie pas le but principal de cette rencontre. Je veux savoir si Clemens savait que Rowan était mangemort. Si c’est le cas, Clemens ma délibérément mis en danger pendant des mois, et ça dernière lettre ne laisse que très peu de doute.

Je suis vêtu d’un jean délavé et d’un pull noir caché par mon blouson et un plaid sur mes jambes pour limiter le froid qui me glace un peu trop. Je pousse mon fauteuil avec plus ou moins de difficulté, à la moldue. Je pourrais utiliser la magie, mais je l’utilise déjà suffisamment pour gravir les étages à Haveirson alors autant faire simple quand je le peux. Je finis par arriver et je pousse la grosse porte en bois avec difficulté. Je constate que pour les personnes à mobilité réduite, les aménagements de l’espace sont particulièrement peu pratique. J’arrive quand même à me faufiler entre les tables avec mon fauteuil, jet je vais dans un coin du Parker, près des grandes fenêtres arrière. Il y a un renfoncement avec deux canapés et c’est le coin le plus calme pour discuter.

Par chance, les gens qui s’y trouvait se sont lever alors que je m’y dirige. Je prends donc possession, et j’attends Clemens. Je reste dans mon fauteuil, parce que je sens que cette conversation ne va pas me plaire et je risque de partir rapidement. Je réalise que Clemens n’est pas au courant pour mon état. J’aurai peut-être du le prevenir ? Oh et puis, il le verra bien en arrivant. D’ailleurs je me questionne pas plus car je le vois qui arrive.

« -Salut Clemens » dis-je sur un ton qui se veut amical, mais qui est malgré moi, plus sur un ton neutre. « Tu me vois navré de ne pas me lever pour t’accueillir, disons que c’est pas trop possible en ce moment. » je tente un peu d’humour pour détendre un peu l’atmosphère, enfin surtout pour moi en fait… Je me fais peut-être des illusions. «  Tu bois quelque chose ? » Demandai-je ensuite pour couper court aux blagues.

Le courrier de Megan l'avait surpris. Pas tant par son contenu, mais plutôt par son arrivée tardive. Il aurait également dû écrire, mais tous ses amis semblaient s'être disséminés à travers la Grande-Bretagne, et être tombés dans toutes sortes d'embûches. La plupart avait fini par répondre à ses courriers – ou à prendre l'initiative d'écrire, lorsque les pauvres hiboux en leur étaient jamais parvenus – et naïvement, probablement à cause de son état de déprime, avait-il cru que c'étaient là tous ceux pour qui il comptait encore. Malgré leur amitié forte durant quelques mois, Megan ne faisait pas partie de ses amis de longue date, ainsi, Clemens avait pensé qu'elle avait d'autres chats à fouetter, et il ne s'était pas senti le courage de souffler sur les cendres d'une affection peut-être déjà éteinte.

Néanmoins, il était content de la voir. La jeune femme était particulière, brutale même, mais son caractère farouche lui avait souvent maintenu la tête hors de l'eau durant sa terrible année universitaire. Elle ne se rendait probablement pas compte du soutien qu'elle lui avait apporté – surtout, parce qu'il y avait nombre de ses problèmes dont elle n'était pas au courant – mais il n'en éprouvait pas moins une grande reconnaissance à son regard.

Son service à peine terminé, il passa rapidement à l'arrière du Parker's, jetant par la même un œil au bureau de paris, toujours très calme. Il enfila un pull et se rinça le visage, étape nécessaire pour le faire sortir de son rythme de travail et lui permettre de se glisser dans le rôle du simple client. A 17h03, il revint dans le brouhaha ronronnant du salon de thé, et couvrit Megan du regard, butant une seconde sur son état. Leurs regards ne s'étaient pas encore croisés, et il fut content qu'elle ne soit pas témoin de l'émotion qui avait du se marquer sur ses traits. Elle portait, de toute évidence, toujours les séquelles de la Bataille de Poudlard. Clemens s'était douté qu'elle devait être présente, de part son rôle de stagiaire particulièrement demandé en période d'examens, mais la confirmation était brutale.

« Salut Megan. Promis, je te ferai me revaloir ça un de ces quatre. »

Il s'était approché rapidement, se collant sur le visage un sourire bienveillant et détendu. Il posa une main affectueuse sur son épaule, et exerça une pression douce avant de s'asseoir en face d'elle.

« Un café, j'en ai bien besoin. J'ai fait l'ouverture à 8 heures ce matin, les petits déjeuners, etc. Même à Haveirson, je commençais pas mes journées si tôt. J'ai un peu de mal. »

L'Allemand sourit à nouveau, un peu embêté. Il était délicat de lui demander comment elle se portait, le mois de juin n'était pas vraiment un sujet qu'il avait envie d'aborder, pas plus que les dernières nouvelles de l'académie, qu'il comptait laisser un peu derrière lui pendant encore quelques jours.

« Je… J'ai envie de te demander si tu vas bien, mais je suppose que c'est un peu bête comme question, non ? »

Personne ne finit dans l'oubli,
Si quelqu'un l'attend encore ici.
Un ami manque toujours,
On pense toujours à son retour.

Damien Sargue – Un jour

Clemens est enfin là. Il n’a pas vraiment changé, rien de bien étonnant en trois-quatre mois. Par contre, il semble fatigué et à les traits tirés. Le travail ne semble pas vraiment lui réussir, mais je ne lui en fais pas la remarque. Je pense qu’il n’a pas besoin de ça actuellement. Je fais un signe au serveur et donc collègue de Clemens afin qu’il vienne prendre notre commande. Il arrive d’ailleurs aussitôt et nous commandons deux cafés. Aussitôt parti, nous commençons la conversation et son constat m’agace un peu en fait. Je ne me plains pas de mon état, du moins je ne me suis plainte à personne. Je surmonte cette épreuve comme je le fais pour toutes les épreuves qui se présentent sur mon chemin.

« - Pourtant, ça va et je dirais que c’est une question comme une autre en fait. C’est plutôt à moi de te demander ça. » Dis-je sur un ton calme et neutre.

Je regarde Clemens, hésitante à parler directement de Rowan. J’ai besoin de savoir, mais je préfère aborder le sujet de Quin d’abord, après tout, c’est lui qui a perdu un proche dans tout ça. Je n’ai jamais été très douce dans ma façon d’aborder des sujets délicats, mais j’aimerai pour autant ne pas choqué Clemens, même si je me doute que raviver ses souvenirs doivent être douloureux à l’heure actuelle. Sinon pourquoi serait-il à Avalon plutôt qu’à Haveirson ?

« - J’ai appris tardivement pour Fitzsimmons. Après la rentrée en fait. Disons que je n’étais pas au fait de plein de chose depuis juin. Je suis partie dans ma famille aux Etats-Unis lorsque je suis sorti du coma… Je te présente mes condoléances. Tu tiens le coup ? Je… J’ai un peu de mal à croire que Fitzsimmons ait fait ça en fait… Tu sais… ce qui s’est passé ? » demandais-je d’une voix hésitante.

Le serveur nous amène nos cafés, et nous laisse après nous avoir regardé tout les deux quelques secondes. J’attends un peu avant de boire, la tasse est tellement fumante que je ne doute pas que le liquide est brulant. Je regarde donc Clemens, compatissante et j’ajoute.

« - Avalon a du te plaire pour que tu restes dans les parages… Tu as trouvé facilement un boulot non ? Je ne m’attendais pas à ce que tu renonces à tes études en fait.» constatais-je en m’intéressant à ce qui l’avait mené ici.

« - Parait-il que la vie active, c’est plus fatiguant qu’être étudiant, je pense que c’est surtout la fin des grasses mat’ qui rends la vie active plus éreintante du coup ! » Plaisantai-je en souriant doucement.

Il garda le silence pendant quelques secondes, un peu perplexe, avant d'oser un sourire sincère. Megan n'était pas du genre à se laisser abattre, et sa réponse n'en était qu'une preuve supplémentaire. Il avait été bien bête de penser qu'elle aurait pu s’apitoyer sur son sort et ne pas faire preuve de son mental d'acier, comme toujours depuis qu'il la connaissait. C'était, après tout, grâce à elle qu'il avait retrouvé une forme de dureté et de motivation qui lui avait permis de dominer ses idées négatives pendant un certain temps. Sans elle, il n'aurait pas repris le Quidditch, il en était bien conscient.

« C'est vrai, j'avais oublié à qui je m'adressais » fit-il avec un regard espiègle. « Ca va pas mal de mon côté, l'été a été … mouvementé. Mais je retrouve le chemin vers une vie normale. »

Il haussa les épaules. Clemens n'avait toujours pas suffisamment accepté son besoin de retraite pour pouvoir parler de son changement de vie avec légèreté. Il espérait que Megan aurait assez de tact pour le comprendre et ne pas questionner plus avant ses motivations pour quitter Haveirson et reprendre une vie beaucoup plus banale. L'Abraxan était bien placée pour savoir quel effet l'académie pouvait avoir sur ses étudiants, mais elle était également mieux armée que la plupart d'entre eux pour en affronter les mystères.

Il ne se serait cependant pas douté du sujet qu'elle choisirait pour entamer leurs retrouvailles, et il perdit contenance. Sa relation avec Quinlan avait été trop passionnelle, fusionnelle et destructrice pour que son suicide soit attendu ou acceptable ; mais comme d'habitude, Clemens l'avait géré par la fuite. Il s'était jeté corps et âme dans ses études, son stage, sa loyauté envers ses amis. Il avait, comme nombre d'autres traumatismes, relégué la gestion de ce deuil au second plan, dans un coin de son esprit depuis soigneusement mis sous clé.

« Je… Il a fait ça dans la baignoire, je… je crois. » La baignoire avait eu une signification étrange pour eux deux. Pour lui tout particulièrement. Depuis leur virée dans le labyrinthe, l'Allemand n'avait plus osé prendre un bain, encore une autre faille qu'il avait naturellement évitée comme s'il s'était agit d'un choix de vie. Il s'était demandé si Quinlan avait choisi ce moyen pour être sur que Clemens soit dans l'incapacité de venir à son secours. Son regard,un peu vide, se posa alors sur sa tasse de café, apparue devant lui sans même qu'il ait perçu l'arrivée de son collègue. Il rajouta du lait et du sucre dans la tasse, lui qui buvait pourtant le café noir, et touilla nerveusement.

« Oui, serveur c'était facile. » Sa voix était hachée, mais il se reprit doucement, alors que l'expression de Megan redevenait plus familière. « Haveirson a été trop de choses à encaisser pour moi. Revenir aurait été… trop difficile. »

Il but une gorgée de café, et fit la grimace en découvrant le goût trop sucré et trop doux.

« C'est différent. Puis faut se faire à manger. » Son sourire revint. « Mais le bon côté, c'est que y a pas de travaux à rendre, et pas d'événements bizarres dans mon apart. Jusqu'à présent, en tous cas. » Il soupira. « Et toi, du coup, toujours la médicomagie ? Ca ira pour avancer dans ta thèse avec un nouveau prof ? »

C'était banal, mais il luttait toujours pour revenir à une indifférence travaillée. Ses mains tremblaient légèrement, ses doigts étaient serrés sur la anse de ta tasse, malgré une expression du visage qui se voulait à nouveau passablement détendue.

Personne ne finit dans l'oubli,
Si quelqu'un l'attend encore ici.
Un ami manque toujours,
On pense toujours à son retour.

J’étais fatiguée d’être dans ce fauteuil roulant, mais j’évitais de me plaindre. Non seulement c’était temporaire, mais j’avais eu de la chance de survivre à la bataille. Une chance qui n’avait pas été donnée à tout le monde, j’en étais bien consciente. Je lui souris malgré moi, ne souhaitant pas vraiment laissé paraître mon malaise dés qu’on abordait mon état de santé. Je préférais me préoccuper de Clemens qui avait du avoir de durs moments à passer, et même s’il allait bien physiquement, je m’inquiétais pour son état psychologique.

« - Le principal, c’est que tu ailles bien. J’ai cru comprendre que tu étais à la bataille de Poudlard, je savais que tu avais survécu, mais j’ignorais comment tu allais. » Avouais-je en laissant paraître mon inquiétude pour lui.

Je n’avais eu qu’un compte rendu rapide par Severus qui était venu me voir à Sainte Mangouste une seule fois. Une fois de trop puisque nous avions étés surpris par une élève de Poudlard. Après quoi, nous avions convenu qu’il ne reviendrait pas afin de sauver les apparences, de toute façon, j’étais rapidement partie pour les Etats-Unis.

Je retenais ma respiration sans m’en rendre compte, celle-ci devenant presque saccadée lorsque Clemens me parla de Quinlan. Je voulais savoir, même si je redoutais les détails. Je savais juste qu’il s’était donné la mort et je n’avais pas osé demander à Magnus Alexandersson quelques détails supplémentaires sur la façon dont il l’avait trouvé. J’avais de la peine pour Clemens et je sentais ma colère envers Fitzsimmons remontait en puissance. Comment avait-il pu faire ça ? N’avait-il donc rien à faire de ceux qu’il laissait derrière ? Une chance qu’il était mort, sinon je l’aurai achevé de mes mains. Enfin même si ses pensées me traversèrent l’esprit, j’étais bien consciente qu’il s’agissait de la colère sourde qui grondait en moi qui guidait mes pulsions.

« -Je suis sincèrement désolé Clemens. » Lui dis-je doucement en m'en voulant de lui faire remonter de douloureux souvenirs.

Ce n’était pas franchement un secret que Quinlan et moi avions du mal à nous supporter. Durant longtemps ce fut le cas, même si sur la fin, nous avions finis par presque nous apprivoiser, passant de longues soirées ensemble à nous entraîner communement.

« -Je comprends ton besoin d’éloignement, j’espère que tu trouveras ta voie sans l’aide de l’académie ! » lui-dis-je en lui souriant avec affection.

J’attrape ma tasse de café pour la tenir entre mes mains, les réchauffant par la même occasion alors qu’il me décrit le rythme de sa vie et le fait qu’il n’a pas de mauvaises surprises comme il a pu en avoir à Haveirson. Je souris, me rappelant que fort bien notre aventure dans le labyrinthe.

« - Ce que tu me décris, c’est presque un rêve quoi ! » riais-je doucement, « Et oui, je suis toujours en médicomagie » repris-je plus sérieusement. « Ma thèse avance bien, je pense. C’est toujours délicat de statuer alors qu’on ignore le résultat final que ça aura, je ne sais pas trop ce qu’il en est pour le nouveau prof, je pense que je lui parlerai de ma thèse prochainement, j’ai disons… pu parler un peu avec lui… Visiblement, c’était un ami de Fitz…Quinlan. » lui avouais-je doucement.

Je porte ma tasse à mes lèvres et bois une petite gorgée de son contenu, cherchant un peu de courage pour amener le sujet sur la table. Le sujet. Celui que j’appréhende en fait.

« Clemens, » commençais-je doucement mais très sérieusement « Est-ce que tu le savais ? Est-ce que tu savais que Westminbrook était un mangemort ? » lui demandais-je en plantant mon regard azuré dans le sien, accentuant la gravité de la situation telle qu’elle paraissait à mes yeux.

Je n'avais pas été capable de prononcé le prénom du mangemort. J'avais suffisamment du mal à me remettre de cette découverte, et je me sentais toujours autant trahie. J'avais fais confiance à Rowan. Mais il avait la marque. Et ça changeait tout.

Clemens haussa les épaules, mal à l’aise. Il avait survécu à la Bataille de Poudlard, certes, mais sans trop savoir comment il s’en était sorti avec un simple maléfice cuisant au visage. Son attitude avait été stupide, pour ne pas dire carrément suicidaire. Défendre Freya était une attitude raisonnablement logique sous l’adrénaline, même si lui venir directement en aide aurait été plus pertinent au vu de ses capacités de duelliste. Cependant, le coup de sang qui l’avait poussé, sans réflexion, à défier frontalement le Seigneur des Ténèbres afin de détourner son attention de celle qui, après tout, l’avait trahie, restait une des nombreuses énigmes qu’il avait à résoudre à propos de lui-même. Il laissa donc la conversation dévier sur un autre sujet.

Et il continua à se murer dans une forme de silence. Il répondait de manière laconique, tendu à l’idée – pourtant inconsciente – que Megan finisse par poser la question qui ferait trop mal et qui briserait le masque de porcelaine derrière lequel il se camouflait depuis presque quatre mois. L’Allemand avait établi un mur entre lui et ses douleurs et il tenait farouchement à le garder intact tant qu’il n’aurait pas récupéré un rythme de vie stable et serein, avec des buts simples et une routine rassurante. Il fallait des fondations pour pouvoir se reconstruire, et s’il était une chose dont il était convaincu, c’était qu’il se trouvait en funambule sur un fil de soie qui n’attendait qu’un tressautement de trop pour se rompre et l’entraîner dans un gouffre sans fond.

Il sourit étrangement, crispé, en réponse à l’affection de Megan, jusqu’à ce que son enthousiasme ne finisse doucement par traverser la couche transie de résistance qu’il lui avait offert jusqu’à lors. Le retour à une conversation du quotidien, légère et routinière commença à dénouer le nœud qui s’était enserré dans ses entrailles et il retrouva assez de contenance pour boire une gorge de café.

« Oui, je comprends. L’essentiel c’est que tu aies quelqu’un pour t’accompagner, et que tu aies une idée de la prochaine étape. Les résultats ne sont jamais trop ceux que l’on attend, mais à force de travail, tu finiras bien par obtenir quelque chose d’intéressant. »

Clemens ne réagit pas au lien d’amitié qui liait le nouveau professeur et Quinlan. Il n’avait jamais rencontré aucun de ses amis, n’avait eu connaissance que de peu de détails sur sa vie, glané au hasard et souvent, lors de leurs disputes. Il avait toujours eu conscience que le médicomage était un homme tourmenté et marqué par la vie, mais jamais il n’avait imaginé l’étendue de ses blessures. D’eux deux, il avait toujours cru que Quinlan était le plus fort, le plus flamboyant, le plus solide. Jamais il n’aurait imaginé qu’il puisse se briser dans l’irréparable.

Il sursauta presque, dans le changement de sujet était abrupt et inattendu. Son regard s’alarma un peu, sans pour autant fuir le regard lourd de Megan, mais il fronça les sourcils, fâché par l’accentuation qu’elle avait posé sur le patronyme de son meilleur ami. Elle ne l’avait jamais porté dans son cœur, il en avait conscience, mais il ne tolérerait pas qu’elle fasse peser dans de sous-entendus dans son simple nom.

« Rowan n’a jamais été un mangemort, Megan. Jamais au sens où tu peux l’entendre ou le comprendre. Oui, j’ai fini par apprendre qu’il portait la marque, mais ça ne fait pas de lui un criminel. »

Sa voix s’était soudainement faite dure et froide. Malgré toute l’affection qu’il portait à l’Abraxan, Rowan restait son frère de coeur à défaut d’être son frère de sang, et jamais il ne tolérerait de quiconque des calomnies sur le nom Westminbrook.

« Ton passé est au moins aussi trouble que le sien, si je me rappelle bien. » Reprit-il sans chaleur, évoquant leur première discussion brutale un an auparavant, alors qu’ils étaient enfermés dans une salle de Haveirson. « Si tu comptes te lancer dans une vendetta contre lui, je te préviens que je ne le tolérerai pas. Il a rendu ses comptes à la société, tu n’as pas à être son juge. »

L’Allemand se redressa, appuyant son dos contre le dossier de sa chaise. A aucun moment n’avait-il cédé devant le regard inquisiteur de son amie, qu’il lui renvoyait avec tout autant de hauteur.

Je restais silencieuse un moment. En réalité, j’étais à présent seule dans mes recherches. J’avais perdu l’appui et les conseils de Quinlan depuis sa disparition, et depuis notre conversation houleuse de cet été, j’évitais soigneusement Severus, mon conseiller et mentor en potions. J’étais donc isolé dans mes recherches, mais ce n’était pas pour autant que j’allais laisser tomber. J’étais bien décidé à mener mes recherches à termes, même sans savoir ou je mettais les pieds. Je ne fis donc aucun commentaire, me contentant de lui sourire affectueusement.

J’avalais une gorgée de café, reposant la tasse sur la table juste après avoir posé la fatidique question. J’appréhendais la réponse parce que j’avais des doutes sur les connaissances de Clemens vis-à-vis de Rowan, mais je ne m’étais pas du tout attendu à ce qu’il réponde avec autant de virulence. Au fur et a mesure qu’il crachait ses paroles comme un serpent pouvait cracher son venin, mon regard se durcissait afin que tout sentiment devienne transparent et que Clemens ne puisse se douter du mal être qui m’animait.

Je ne lui en veux pas d’avoir voulu protéger Westminbrook. Je lui en veux de m’avoir délibérément mis en danger et par conséquent avoir risqué la vie de mes enfants. Certes Westminbrook est son ami et je n’ai jamais eu la prétention de lui prendre sa place. Mais Clemens savait. Il savait que les mangemorts en avaient après moi, et il m’avait demandé de faire confiance à Rowan. Je m’étais aventuré dans ce foutu labyrinthe avec un mangemort et Clemens savait ?!

« Je vois… tu étais au courant… » Constatais-je en faisant pivoter mon fauteuil.

Je commence par pousser mon fauteuil vers la sortie, songeant que la conversation est fini, mais les paroles de Clemens me tombe à nouveau dessus, me faisant me raidir comme jamais. Il osait me parler de mon passé ? Pire encore… il parlait de vendetta et de sa tolérance zéro que j’interprétais comme une menace. Aussitôt je fis pivoter mon fauteuil et en deux violents gestes, je le fis rouler jusqu’à la table ou Clemens était attablé. Je frappais cette dernière de mon poing, faisant trembler les deux tasses qui s’y passait.

« -Tu ne sais rien ! Ni de mes intentions, ni de ma vie ! » grognais-je violemment « Garde tes menaces pour toi Clemens, tu as suffisamment mis en danger ma famille et moi-même pour que j’accepte ne serait-ce qu’encore une menace venant de toi ! » fis-je d’une voix étonnement glaciale. « Si j’avais voulu me venger, je n’aurai pas témoigné en faveur de Westminbrook et de Nightingale. Mais si c’est cela que tu penses de moi soit, je crois qu’on a plus rien à se dire. » terminai-je d’une voix polaire.

Je tournais alors mon fauteuil et me diriger à présent vers la sortie. Peut-être que l’amitié n’était pas fait pour moi ? arrivée devant l’entrée, je rêvetu avec plus ou moins de difficulté mon blouson pour sortir dans le froid d’octobre.