De boue et d'os

24/02/2007

[HRP : petit topic fun en hommage à celui-ci , 15-20 lignes de réponses !

L’idée leur était venue un peu hasard, pour des retrouvailles pas tout à fait comme les autres. Le rythme effréné de leurs vies les avaient tenus bien loin l’un de l’autre durant l’été 1997 et il avait fait écho, de bien étrange manière, à l’été 1996, pourtant si loin. Rowan et Clemens s’étaient donnés rendez-vous à l’entrée du cimetière d’Avalon, lieu de la première de leurs mésaventures au Pays de Galles. Leur amitié, déjà robuste, s’était considérablement consolidée depuis ce dérapage boueux d’octobre 1996 et était devenue un véritable lien fraternel. Le lieu était symbolique, mais également bardé de souvenirs pesants et de visages diffus.

Un sourire crispé aux lèvres, l’Allemand se tourna vers son ancien colocataire, inquiet de savoir quels tourments le berçaient ces jours-ci. Il ne doutait pas que, comme lui, l’aristocrate devait peiner à trouver un véritable repos ces dernières semaines, et venir au pied de l’église en ruine remuer dans certains des événements les plus tumultueux de leur passé n’était peut-être pas la meilleure des catharsis. Mais, quelque part, n’était-ce pas comme une phobie, qu’il fallait affronter afin de pouvoir la vaincre ?

« Je ne me souviens même plus vraiment comment tout ça a démarré… Et toi ? »

Le pas peu assuré, il s’avança sur le sentier aussi boueux que dans son souvenir. La nuit était déjà tombée, bien qu’il ne soit que dix-huit heures et les embruns leur fouettait le visage, présage d’un hiver rude à venir. C’était la même sensation que la pluie fine un an plus tôt, à l’exception près du visage rieur de Isolde. Et soudain, il se souvint. Il aurait voulu le cacher, mais le souvenir élargit son sourire et fit naître une lueur espiègle dans ses yeux. Celle, qui toujours apparaissait, lorsqu’il avait une idée trop précise derrière la tête.

Sujet: Re: De boue et d'os Mar 1 Nov 2016 - 19:45

À revenir de la sorte en un lieu qu’ils s’étaient efforcés d’oublier – pour des raisons cohérentes, logiques et justifiées, n’est-ce pas ? – au fil de l’année passée, Rowan éprouva un entrelacs d’émotions vacillantes. Des sentiments divergents dans l’essence effervescente qu’ils amenaient en son cœur, tant l’esclandre brutale et destructrice de ce jour d’octobre oublié était à l’origine de beaucoup.

Des égarements de son âme ; des affres de ses décisions les plus saugrenues ; des affrontements menés sottement au-devant de leurs opposants.

Quelques secondes, les iris pâles et céruléennes se perdirent vers l’église celtique. Pandore n’était plus. Voldemort également. Comme toutes ces choses désormais effondrées et futiles – il ne lui restait plus qu’à faire preuve de pardon à l’égard de lui-même. Des autres. Il inspira profondément. Assuré, néanmoins, qu’ils faisaient le bon choix en revenant ici.

Évoquer les démons pour parvenir à les dépasser. Une bonne fois pour toutes. Les invoquer, même, peut-être. Un moyen d’assourdir les tourments plus récents de leurs existences : la voix de Novenka, les fiançailles de Hope et les aveux chuchotés à quelques portes ouvertes.

« Je me souviens avoir eu l’audace d’accompagner Anna, pour quelques infimes promenades, avant de me retrouver mêlé à la bataille. » Et la nommer, elle plus que toutes les autres – la première reconnue – était un excellent moyen d’affronter les déchéances révolues. « Il me semble que tu étais également en bonne compagnie... »

Le jeune aristocrate se tourna dans la direction de son camarade ; et il y nota cette expression qui présageait de nouvelles facéties. « Peut être, que ... » Loin du regard des impertinents, il se mit à sourire. À partager ce souvenir qui lui revenait peu à peu. « Grand dieu, étais-je réellement si indécent ? » Oh. En effet.

Ses doigts vinrent se mêler à leurs jumeaux dans une conspiration évidente.

30/03/2015

Les pas tranquilles d’Isolde résonnaient à peine sur le pavé. Elle traînait toujours un peu sur le chemin du retour à Haveirson, faisait un détour par le jardin pour rajouter une plante dans son carnet, allait admirer le bord de mer, ou jouait avec Endymion. Tout était bon pour retarder le moment où elle passerait les portes du château. Ce soir-là, l’obscurité tombante n’accélérait pas plus son pas que d’habitude, alors qu'elle revenait de la plage où elle avait déniché une nouvelle espèce à ajouter à son carnet. Mais l’heure du repas approchait et son estomac gargouillait avec force, de concert avec celui d'un Endymion trottinant à ses côtés. Alors qu’elle atteignait le cimetière, deux silhouettes familières attirèrent son attention. Elle imaginait facilement les pensées que faisaient naître dans leurs esprits les silhouettes tordues des tombes, l’église défoncée dont les entrailles gisaient sur la terre noire. Elle n’avait rien oublié. Cela faisait… un an. Déjà… En voyant Clemens et Rowan debout côte à côté, elle eut presque l’impression que rien n’avait changé. Un fin sourire éclaira son visage. Elle préférait se souvenir de la soirée qui avait suivi. Un élan de nostalgie et de tendresse la submergea et, pour un peu, elle aurait serré les deux hommes dans ses bras ; mais d’un, ils n’auraient sûrement pas aimé se faire saisir dans le dos dans le noir, et elle aimait autant éviter de se prendre un sort en pleine tête pour ça (surtout avant le repas, il y avait du pudding au menu) ; et de deux, Endymion s’en était chargée avant elle. Ronronnant comme un moteur, il se glissa entre les jambes de Clemens et se frotta à lui en tapissant son pantalon de poils clairs. Son entreprise de redécoration de bas de pantalon achevée, il s’en prit derechef à sa deuxième victime, en la personne de Rowan. Isolde s’avança d’un pas plus vif vers eux.

- Bonsoir vous deux, dit-elle en serrant Clemens dans ses bras, et en adressant un regard sympathique à Rowan. Elle ne parvenait pas - encore - à chasser la méfiance sourde qu’elle éprouvait en le voyant. Mais le temps n’était pas aux reproches. Tournant à son tour le regard vers le cimetière, elle fut parcourue d’un frisson ; mais elle se reprit bien vite, resserrant tout de même son manteau autour d’elle.

- C’est moi la bonne compagnie ? Tu me vois flattée Rowan ! Ca doit être le pouvoir charmeur de mes bouclettes qui fait effet, ajouta-t-elle avec un sourire espiègle. Indécent, je ne pense pas. Je crois que nos cerveaux avaient décidé d’aller boire un verre au Parker’s ensemble lorsqu’on a eu cette splendide idée.

La lueur espiègle qui dansait dans ses yeux faisait écho à celle qu’elle voyait dans les yeux de Clemens. Beaucoup trop écho. Et rien de très raisonnable ne sortait jamais dudit cerveau derrière ce regard. Son sourire s’élargit. Être raisonnable, c’était so 1996.

27/10/2016

La botanique était-elle réellement la matière qui lui convenait ? Sans doute pas. Mais pour dire vrai, aucune ne lui convenait vraiment. Alors elle tenterait de faire de son mieux pour avoir un niveau... acceptable tout de même ( ce qui, de toute évidence, n'était pas chose aisée ). Aussi était-elle partie en début d'après-midi non loin d'Avalon, afin d'observer la flore environnante. Elle avait prit avec elle un carnet de croquis pour dessiner quelques esquisses mais... le coeur n'y était pas. Quel ennuie ! La seule chose positive dans tout cela était sans doute le fait d'être toute seule et perdue dans la nature, sans personne pour se moquer d'elle ou - pire ! - pour la regarder étrangement. Personne n'était réellement au courant qu'elle était à moitié vélane - elle s'était bien gardée d'en parler ! - mais les réactions des autres étaient néanmoins bien visibles.

Et, tandis qu'elle continuait sa promenade, la nuit commença doucement à tomber ; il était temps de rentrer à Haveirson. Mais elle n'était malheureusement pas dotée d'un très bon sens de l'orientation. Pas du tout, même. Et malgré tous ses efforts, elle ne parvenait pas à revenir sur ses pas. Et cela la rendait atrocement anxieuse ; et tout le monde savait ce qui se produisait lorsqu'elle était anxieuse : des catastrophes. Et, finalement, courant à travers champs, elle vit enfin les lumières d'Avalon... jusqu'à ce qu'elle se rende compte de ce qui se trouvait sur sa route. Un cimetière ! Et, pire que tout, des personnes semblaient venir dans sa direction ! De sa démarche élégante, elle sautilla plus qu'elle ne courut, jusqu'à se cacher derrière un arbre. Pas très efficace de se cacher là. Mais elle était tellement peureuse...

Sujet: Re: De boue et d'os Ven 11 Nov 2016 - 3:45

De boue et d'os

Ruben leva le nez vers le ciel. Un camaïeu de gris et de bleus profonds mangeait largement les dernières touches résistantes d'azur, qui étaient pourtant encore dominantes quelques instants plus tôt. De petits nuages étiolés paressaient en glissades nonchalantes : ce n’était pas la fin des vacances estivales pour tout le monde. Le halo orangé de la ville – pourtant tout juste naissant - lançait ses reflets par dessus les toits de lauzes jusqu'aux touches blanchâtres du ciel et coloraient ces formes nébuleuses d'un ocre léger. La nuit tombait de plus en plus tôt et le fond de l'air se faisait frais mais c’était spécialement pour cette luminosité si délicate que le photographe mettait un point d'honneur à rentrer à pied depuis l'imprimerie, a l'autre bout d'Avalon.
Il remontât la glissière de son gilet jusqu'au menton tandis qu'il tournait au coin d'une rue, l'appareil argentique tressautant au bout de sa lanière, contre son torse. Son regard balaya le trottoir : vide. Il aimait l'aspect très minéral de cette partie un peu plus ancienne d'Avalon. La vieille ville, les vieilles pierres, la vieille plag.. Non, la plage, tout court. Dont il pouvait déjà sentir les embruns, d'ailleurs. Il traversa la place pavée après l'avoir immortalisé dans cette soirée de Novembre et poursuivit son chemin jusqu'au rivage. L'odeur caractéristique du bord de mer lui saisit d'abord le nez avant d'emplir tout son corps : la bouche grande ouverte comme un enfant émerveillé, il prit une profonde inspiration. Le gout du sel resta sur sa langue et il se perdit l'espace d'un instant dans la contemplation presque mélancolique de l’étendue d'eau. A l'instar du ciel, celle ci s’était changée en un miroir bleu pétrole, sporadiquement striée des ridules dorées que s'attachait à dessiner la luminosité déclinante sur les crêtes des vaguelettes, agitées.
Il prit un autre cliché machinalement, sans même s'en rendre compte. Il y avait de ces moments ou l'homme ne pouvait se contenter de simplement laisser les choses s'imprimer sur sa rétine. Il avait besoin de les consommer. De les scruter et de se repaître de ce qu'ils avaient de fortuit jusqu’à s'en abîmer les pupilles. Alors ce n’était plus seulement la surface d'argent que brûlaient les rayons lumineux : ces clichés étaient aux instants ce que les résidus visuels douloureux sur sa rétine seraient à la contemplation. Une trace orpheline, mal aimée, mais une trace quand même.
Il longea l’étendue de sable qui remontait vers la foret. Arrivé a sa lisière, il tourna a gauche. Ruben avait passé suffisamment de sa vie à Avalon pour savoir sur quoi déboucherai la prochaine rue. Il sourit devant le curieux tour que prenait cette balade. Bien qu'il n'eut aucune raison de s'y rendre en temps normal, le prétexte photographique qui le poussait semblait l'y mener cette fois: Un peu plus loin, les ruines de l’église et le cimetières attendaient dans leur poses éternelles.

(c) AMIANTE

Spoiler:

24/02/2007

Il éclata de rire. Rowan n’était jamais indécent, sauf peut-être dans cette situation unique où, même s’il avait souhaité le rester, cela aurait été impossible. Une stupide manœuvre de la part de l’Allemand avait fait déraper toute une soirée, il s’en souvenait à présent. Et, comme si c’était le destin, la voix joyeuse de Isolde vient troubler ses souvenirs.

« Tu es définitivement de la bonne compagnie Isolde, mais tes bouclettes ne la rendent que meilleure » la salua-t-elle avec un regard espiègle, laissant son idée en suspens pour quelques secondes. « Par contre, je tiens à insister, Rowan a vraiment fini par être indécent, mais c’était peut-être un peu de ma faute » continua-t-il avec un sourire à l’intention de son meilleur ami.

Mine de rien, il s’écarta ensuite de quelques pas, le regard perdu sur le clocher de l’église jamais reconstruit. Les rumeurs avaient été bon train avant que les derniers moldus ne désertent le village, et Clemens s’était étonné que personne ne vienne jamais enquêter sur la raison de sa chute. Peut-être était-ce mieux comme cela, néanmoins. Il s’arracha de sa nostalgie d’un moment vif, pour se tourner à nouveau vers ses deux meilleurs mais, sursautant au passage tandis que dans le coin de son champ de vision, il aurait juré apercevoir un mouvement vif.

« Alors je veux pas vous inquiéter, mais je viens de voir un truc… Une ombre, près des arbres là. »

Il désigna la direction d’un geste du bras, soudainement concerné par le parallèle ésagréable qui se jetait sur la scène.