Copies & Bières

Quinlan avait compris depuis longtemps que très souvent, son jeu du chat et de la souris finissait par avoir raison de lui. Il voulait toujours être celui qui cède en dernier, tout en montrant bien qu’il connaissait et acceptait les règles du jeu. Restait à voir si Max allait le suivre. Vu sa réponse — ou plutôt sa question — il semblait avoir déjà signé. Parfait.

— Oh mais ça, c’est au victorieux de décider. C’est pas le boulot des vaincus de décider de leur sort.

Totalement faux quand on était dans leur situation mais c’était là toute la beauté du jeu : faire croire que le pouvoir était dans les mains de l’autre alors qu’en réalité, il ne nous avait jamais quitté. Si Quinlan était dans une position qui, de l’extérieur, semblait soumise, il gardait les rênes. Il savait très bien ce qu’il faisait. Il ne perdait pas le contrôle, tout au plus le confiait-il momentanément et selon ses conditions, à quelqu’un d’autre. Donner le contrôle tout en gardant le contrôle de cette personne, est-ce que c’était vraiment donner le contrôle ? Vous avez quatre heures.

Quinn était trop crevé pour ces conneries, et puis ça tombait bien, l’alcool le distrayait de ce genre de choses. Il préférait observer Maxwell, histoire de deviner son prochain mouvement. Ce dernier soutenait son regard, avant de poser pipe et bière pour aller trifouiller dans ses sachets. Hmm… Qu’est-ce qu’il pouvait bien avoir en tête ? Oh… Oh.

Le guérisseur le laissa venir sur lui, l’enfermer de ses bras, et poser ses lèvres sur les siennes. Bon, pas que, puisque Quinn avait bien remarqué le cacheton et qu’il était peu probable qu’il reste sagement sur la langue de Max. Autant lui ouvrir directement le passage… De toute façon, c’était pas comme si Quinlan rechignait. Il répondit au baiser pour venir le ralentir encore un peu plus, se délectant de toute cette tension accumulée à Poudlard qui lui revenait dans les tripes.

Max, c’était son pote à l’époque. Un peu trop renfermé à son goût, si bien que Quinn avait toujours hésité. Il avait été con, il s’était soucié de ce que les gens diraient. Après l’affaire Peter, il lui avait fallu pas mal de temps pour se réapproprier cette partie de son identité, pour l’accepter et pour l’affirmer. Ça ne voulait pas dire qu’il n’avait pas été blessé, ou que ça n’avait pas été compliqué ou difficile. Alors, c’était débile, mais Quinn n’avait pas voulu risquer que ça retombe sur la gueule de Max. Mais franchement, c’était pas l’envie qui manquait. Il avait parfois tenté, dans des moments un peu désespérés, mais il s’était saboté lui-même, inconsciemment, en partie en se persuadant que Max était hétéro. C’est fou ça, un jour on se réveille, et on se rend compte qu’on est entouré d’hétéros.

Quinlan pouvait se chercher toutes les excuses du monde, c’était pas bien grave. On n’allait pas disserter sur le temps soit-disant perdu avec ce qui ne resterait qu’un plan cul. Cerveau, fous-toi en veille et profite. Passant une main dans la nuque de Max, Quinn approfondit le baiser avant d’y mettre fin. Et d’avaler.

— Si tu savais combien de fois je me suis vu te rouler une pelle quand on était à Poudlard…

26/03/2016

Il est vrais que les vaincus ne décidaient pas de leurs sorts... On pouvait raisonnablement se demander qui des deux étaient vaincus ? Max sur Quinlan ou Quinlan sur Max ? Les deux si on se contentait de suivre leurs respirations saccadé.

Les corps se frôlent, se cherchent, jouent chacun leurs rôles. Des images d'une réalité douloureuse se succèdent tandis que leurs lèvres s'entrechoquent. Maxwell n'a pas besoin de fermer les yeux pour revoir certaines scènes de leurs jeunesse. Elle sont présente, tangible entre eux. Crowley y repense. Lui qui à Poudlard fut d'une discrétion parfaite sait que l'autre n'a jamais sut qu'il était bi. D'ailleurs il a toujours été le petit rejeton, celui qu'on oublie auquel on ne fait aucune espèce d'allusion. Sinon tous auraient su qu'à Poudlard il tenta le diable. Un homme ne l'attire pas plus qu'une femme, les deux se valent. Encore maintenant il est ainsi. Dans un coin de sa tête il revoit les bouilles qui lui ont été présentés ces derniers mois. Puis de nouveau le regard de l'enseignant le pénètre et il retourne à Poudlard.

Il se souvient de Poudlard. Cette tension entre eux. Il était très secret à l'époque et personne ne s'est douté que le Crowley était de la race des testeurs. Enfin c'est bien loin tout cela et il serait tend d'oublier... Oublier ces manquement à l'honneur, c'est disparition suspect, sa solitude si confortable...

Un baiser qui s’endort, le médicomage reprend la parole. Maxwell sourit, un petit rire monte le long de sa gorge. Il rejette une mèche de cheveux en arrière sans bouger beaucoup plus. Toujours sur Quinlan il pousse légèrement la jambe de l'autre pour y installer la sienne. Il approche ses lèvres de l'oreille de Quinlan est c'est dans un murmure qu'il répond.

« Je sais. »

L'une de ses mains s'égare sur le torse de Quinlan, lui étreignant doucement les hanches. Elle passe sous son haut... Elle est sous Quinlan, Maxwell l'attire à lui. Maxwell tandis que ses deux mains s'occupent ici et là sur le corps de Quinlan il dépose délicatement un baiser dans la nuque de l'autre. Il l'a là, sous lui, pour lui, quelques heures, le temps de leurs défoncent. Crowley sans déjà son propre cachet qui monte, il sent la chaleur sourde envahir les muscles de son dos. Sa respiration semble s’accélérer, il mordille alors le lobe d'oreille du médicomage comme pour le pousser à plus de tissus froisser, de rauques de plaisirs. Il a le frisson au bout des doigts, le frisson d'entamer l'effeuillage ? Oh peut être mais il a déjà commencer sans même sans rendre compte... Quinlan va sûrement sursauter lorsqu'il sentira que Maxwell est parti pour s'amuser sans honte ni pudeur. Qu'au contraire de la pucelle il a l’entreprenante du vieil étalon.

Poudlard était tellement loin maintenant. Quinlan y repensait et se disait que vraiment, il avait été sage. Prude, même. Ouais, il se trouvait prude pour ses seize ans. Beaucoup de paroles, et pas tant d’actes. Pas tant que ça. Du charisme, ouais, et assez de confiance pour aller draguer celles et ceux qui l’intéressaient assez. Mais il n’avait pas toujours été bien loin. Dans le fond, Quinlan était quelqu’un mû par les sentiments. S’il jetait son corps en pâture aussi facilement, c’est peut-être à cause de… d’elle. Avant de la connaître, il avait déjà évolué dans certains milieux plutôt fermés, il avait goûté à certaines choses que la morale réprouve. Cet aspect de sa vie, avec ou sans elle, aurait été le même. Ce qui avait changé, c’était les proportions. Les doses. L’objectif derrière tout ça. Brisé, il avait voulu oublier, se concentrer sur un plaisir purement physique pour combler le vide. Se réapproprier un corps qu’elle avait marqué au fer rouge.

Ça aurait dû être loin tout ça. Aussi loin que le garçon presque innocent de Poudlard. Mais il fallait se rendre à l’évidence : quelques mois avec Clemens n’avaient pas suffi à effacer toutes les traces d’une certaine forme de dépendance. Le gouffre était toujours là, il lui tendait toujours les bras avec un sourire bienveillant. Quelque part, Quinlan savait qu’il faisait une connerie, il en avait l’intuition mais le contact de Maxwell était trop bon et l’alcool décuplait cette sensation de chaleur qui se répandait en lui. Il en avait envie, comme on a envie de quelque chose qui nous pourrit la santé mais qui est si bon au goût qu’on ne peut pas y résister.

Sa chemise alla rejoindre son veston et les cadavres : qu’est-ce qu’on en avait à foutre après tout ? Les images devenaient floues dans l’esprit de Quinlan, floues et nettes à la fois. Ça manquait de musique, putain. De la musique. Quelque chose ! Alors il se mit à penser à un air qu’il aimait particulièrement et dansa dans le silence. Il se pencha ensuite pour embrasser Maxwell, encore une fois, goûtant de nouveau à ce qui aurait dû lui être interdit. Ce qu’il aurait voulu qu’on lui interdise. Sauf qu’il n’y avait personne, plus de bureau, plus de copies, plus d’Haveirson, que dalle. Que dalle. Juste un corps brûlant, animé par un esprit malade.

26/03/2016

Souffles rauques. Chaleurs. Un gémissement. Une respiration saccadé. Les sens de Maxwell s'activaient les uns après les autres. Des lèvres qui se rencontrent, une brutalité toute naturelle. Vraiment ? Non, une fébrilité de la pars de Maxwell puis une violente prise de position.

L'enseignant se laissa entraîner dans ce mouvement. Un rire échappa d'entre ses lèvres tandis qu'il se retrouva sur le dos Quinlan sur lui. Loin d'être blanc comme neige Maxwell se retrouvait avec tant d'idées en tête qu'il lui fallut en choisir une. L'empressement de Quinlan lui arracha un sourire. Il mit les mains derrière sa tête et se mit à reluquer avec attention celui qui déjà se mettait à moitié nu. Cette fièvre qui gagnait son compagnon était plaisante à voir, presque trop aisé.

Qui d'eux deux étaient en train de faire la plus grosse connerie ? Quinlan qui répondait avec fièvre aux avances de Maxwell ou ce dernier qui avaient commencé en sachant qu'il était la pomme du jardin d’Éden. Loin d'être le petit enfant qu'on voyait dans son regard il savait qu'il tenait l'autre. Crowley avait apprit à tenir ses pulsions, à faire tenir le désir. Le regard qu'il lançait à Quinlan en disait bien long sur le désir qu'il avait en ce moment. Son anatomie toute entière donnait raison à cette situation.

Tu sais quoi ? Oh oui je sais … Quinlan... Un tas d'image se mirent à se superposé. Les images qu'il avait gardé de Quinlan. A cela ? Celle d'un homme, d'un autre, d'une ombre. Des baisers. Il eu l'impression de sentir sur lui les milliers de baisers et caresses que Quinlan avait déjà donné. Il lui semblait sentir comme une ombre, celle indéniable de ses remords, de sa conscience. Elle se frayait un chemin au milieu des méandres alcooliques du drogués. Crowley dans sa tentative de paix intérieur avait toujours accorder à son intuition la meilleure des places. Ce jour là elle s'éveilla tandis que son torse frissonnait du plaisir des yeux.

« Franchement, tu te rend compte que je sais ? »

Hum ? Une telle réflexion le mains toujours derrière la nuque, Quinlan toujours au dessus de lui c'était assez étrange.

Il se redressa sur les coudes. Un coude. Il pausa une main sur le nombril de l'autre. Il sentait les battement de l'autres. Le sang qui circulent, le corps et ses réactions primaire. Son regard pénétrant Quinlan.

« On va anéantir un fantasme. »

Vérité dérangeante. Une fois qu'ils aurons fait cela, cela vaudra-t-il le coup ? Déception et souffrance... Maxwell le sentait plus qu'il ne le savait. La drogue enveloppait ses synapses. Son âme ressentait. Évidemment pour chaman cela ne pouvait en être autrement...

Qui faisait la plus grosse connerie ? Vraiment, il était si simple de répondre à cette question que Quinlan ne se l’était même pas posée. Il avait tout à perdre, pour un coup de tête, une envie irrépressible qu’il avait longtemps pensé domptée. En prenant la main de Maxwell — et il n’avait pas eu besoin de faire beaucoup d’efforts pour le convaincre — Quinn avait misé gros. Son boulot, son compagnon, sa santé mentale. Celle là, autant dire qu’il l’avait déjà perdue, au moins en partie. Et la drogue qui se répandait dans ses veines n’y était pour rien.

Il se laissa attiré par Max, répondit à son baiser en se lovant davantage contre lui. Tout son corps brûlait, devenait incontrôlable. Il n’était plus qu’un corps et tout ce qu’il voyait c’était l’autre corps sous lui. Dans cette nébuleuse de couleurs et de sons — est-ce qu’il n’y avait pas de la musique ou est-ce qu’il était en train de rêver ? — plus rien d’autre n’existait. Il aurait voulu se pencher pour boire l’âme de celui qui se trouvait sous lui, quand il l’arrêta pour lui parler.

— Tu sais… Tu sais quoi ? Tu ne sais rien. Comment tu pourrais seulement savoir ?

Max était bon en divination, mais ça ne voulait pas dire qu’il pouvait lire le regard de Quinlan comme un livre ouvert. Ou alors pas sans que celui-ci ne lui ouvre la porte. Le fixant du regard, il hésita longuement. Assez pour que le devin enchaîne sur autre chose. Sur les fantasmes, celui qu’ils allaient massacrer en le réalisant. Le choix de mot était intéressant, surtout pour quelqu’un qui avait fait de la ‘petite mort’ une façon de s’approcher de la grande. Tout le plaisir qu’il pourrait tirer de cette séance de jambes en l’air ne serait qu’éphémère & illusoire. Quinlan le savait mais il ne voulait pas qu’on le lui rappelle.

— Ta gueule.

Embrassant de nouveau Maxwell, il laissa son esprit se vider de tout ce qui était gênant, de tout ce qui constituait son être, sa personnalité. Il voulait se laisser bouffer par la bête qu’il avait si longtemps tenue enchaînée, que ce soit par respect, par volonté de s’améliorer, par conviction qu’il pouvait s’en sortir, ou simplement par amour. Un junkie reste toujours un junkie. Et un junkie n’est pas fiable, parce que c’est un junkie.*

Spoiler:

26/03/2016

Les doigts filiformes de Maxwell courraient sur le corps quasi nu de son ami. Il le sentait contre lui, leurs cœurs battant la chamade. Il y avait dans ce rythme effréné une certaine cohérence, un son produit à l'unisson.

Quinlan reprit la parole. Une voix d'enfant perdue, venue du fond de son être. Avait-il conscience de dévoiler toute sa fragilité ? Il devait avoir une confiance absolu en lui car Maxwell savait qu'il tenait l'autre d'une main de fer. Il était le seul à être habitué à se mettre dans les veines autant si ce n'est plus que ce qu'ils venaient d’ingérer. Il aurait du savoir se tenir mais au fond de lui il savait. Il valait mieux que cet acte de duperie soit effectuer par lui que par un autre. Il avait la capacité nécessaire pour ne point ce souvenir de ce qui allait avoir lieux. Il sentait l'odeur de sa peau, s’enivrait de cette chaleur qui l'englobait. Un nuage, la tête cotonneuse. Oubliait-il qui était l'autre ?

Une intonation sourde. Il vit l'idée, sentit qu'il était bon d'y céder. Dans la tête de Maxwell une musique sourde prenait tout l'espace. Celle de deux corps qui s'enlace. Maxwell laissa ses doigts glisser sur la ceinture de son compagnon. Il ouvrit la boucle, se redressa un peu. Ils étaient face à face. Ses lèvres rencontrèrent la nuque de Quinlan, elle descendirent jusqu'à la naissance de ses pectoraux avant de remonter avec sensualité.

Crowley laissa un petit sourire naître sur ses lèvres. Les muscles qui se tendent, les peaux qui s'échauffe, les souffles qui s'entrelacent. Maxwell retira ton haut avec un empressement tout personnel. Une fébrilité d'amant qui se laisse gagner par la fièvre. Reprenant le dessus il repoussa le guérisseur d'un geste, se rejeta hors du canapés. Sa baguette tomber au sol regagna aisément sa main juste le temps d'un murmure. Une musique tout à fait au goût du devin, une de celle qui rythme votre cœur. [ Ici ]. Il savait qu'avec ce qui circulaient dans leurs sang cela provoquerait une perception tout à fait différente du réel.

Hrp:

La musique fit son entrée, même si Quinlan était incapable de savoir si elle était réelle ou seulement dans sa tête. Quelle différence, de toute façon ? Elle imprimait imperceptiblement un rythme à leurs jeux, dangereusement peu privés. N’importe qui aurait pu entrer pour tomber sur… ça. Pas que ce soit la première fois que Quinlan fasse un truc fou, potentiellement répréhensible, le tout sans vraiment s’en cacher. Mais cette fois, c’était un peu différent. Il n’arrivait pas encore à savoir en quoi, mais quelque chose au fond de lui en était convaincu.

Se laissant porter par les sons qui dansaient devant ses yeux et un corps qui agissait selon son propre chef, il continua de s’occuper de Maxwell. Nous sommes connectés. Tu m’étonnes, ils l’étaient de milliers de façons différentes, peut-être même de façon plus sincère et honnête que Quinlan n’avait jamais été connecté à quelqu’un. Ce qu’ils faisaient exactement, dans quel ordre, et dans quel rôle, tout ça importait peu. Leurs corps fusionnaient autant que leurs esprits, poussant leurs sens à leur paroxysme. Tant et si bien que Quinlan finit totalement insensibilisé.

***

Il se réveilla plusieurs heures plus tard, incapable de bouger pendant de longues minutes. Il avait l’habitude de faire de la paralysie du sommeil mais là, c’était inquiétant. Il paniqua presque, quand enfin, il put ouvrir les yeux. Ce qu’il vit lui fila une migraine direct : des cadavres de bouteille à ne plus savoir qu’en faire, des fringues jonchant un sol sur lequel il avait dormi. Au prix de nombreux efforts, il se redressa et chercha sa baguette. Le cerveau embrumé, il réussit tout de même à lancer un sort pour nettoyer un peu son bureau, qu’il s’agisse de la pièce ou du meuble. Les bouteilles vides allèrent se ranger sagement dans un coin, attendant d’être jetées à la poubelle.

C’est seulement quand il eut fini de mettre un peu d’ordre dans ce bordel que Quinlan réalisa ce qu’il venait de se passer. Il avait baisé avec un collègue, dans son bureau. Il savait qu’il pouvait tout dire à son frère ou son compagnon mais là, il avait la nette impression que ça ne passerait pas. Trop de passif entre lui et Maxwell, trop de frustration, d’attente… Et puis Quinlan avait déjà trop tiré sur la corde. S’il parlait, c’était fini.

Il y avait autre chose aussi. La sourde impression qu’il n’y avait pas que Max et Quinn dans cette pièce, mais une troisième force, un démon implacable qui venaient se repaître de leurs excès. Quelque chose contre laquelle Quinlan avait toujours essayé de lutter, qu’il avait pensé maîtriser pendant de longues années, et qui prenait soudainement le pas. Habitué à nager, Quinlan ne s’attendait pas à se noyer. Et pourtant, c’était peut-être ce qui allait arriver.

Une grande vague d’abattement le frappa alors qu’il posait ses yeux sur Maxwell. Qu’il soit encore endormi ou non importait peu : le guérisseur culpabilisait à mort. Il s’en voulait d’avoir entraîné son vieil ami dans ses vices — même si ce n’était pas vraiment ce qu’il s’était passé, n’est-ce pas ? — et il regrettait de lui avoir montré cette facette de lui. Nu, Quinlan n’avait plus rien à cacher. Pas même son tatouage magique, son dragon sans ailes : Maxwell l’avait sûrement vu ramper le long de la jambe gauche de Quinlan, grandissant à vue d’œil, prenant des couleurs chatoyantes. Il était désormais instable, oscillant entre une épaisseur démesurée et une longueur qui l’étirait. Il s’était lové en un immense Ouroboros d’un violet rougeoyant, enchaînant toute la partie gauche de son être, passant par sa poitrine, son cou, son dos, et descendant jusqu’à enserrer sa cheville. Quinlan ne savait pas ce que ça pouvait bien vouloir dire, et il n’était pas sûr de le vouloir. Il se prit le front dans les mains, avant d’entreprendre de se rhabiller. Il avait sévèrement déconné, et le pire c’est qu’il avait aimé ça. Il serait prêt à recommencer n’importe quand. Il serait incapable de ne pas le faire, d’ailleurs.

Laissant Max derrière lui, il quitta le bureau pour rejoindre ses appartements. Il ne pouvait pas continuer comme ça, mais il ne savait pas vers qui se tourner. Subitement, il n’y avait plus personne pour lui à Haveirson. Personne capable de comprendre, ou du moins, personne dont il ne craignait pas les réactions. La honte et un profond dégoût de soi venaient étouffer sa poitrine, noyant les battements de son cœur dans une boue noire et traîtresse, de laquelle on ne pouvait se sortir qu’en étant sauvé par un bras extérieur.

Le Docteur l’accueillit chez lui avec un miaulement inquiet, que Quinlan ignora. Le chat le suivit alors qu’il cherchait frénétiquement du parchemin et une plume. Il devait au moins faire ça. Au moins.

Citation :

Le 3 juin 1997

Hej Magnus,

Je crois bien que c’est tout ce qu’il me reste du suédois que tu m’as enseigné. Cela fait des années que je n’ai pas eu de tes nouvelles, mais en même temps je n’ai rien envoyé non plus. J’espère que ta vie est moins mouvementée que la mienne. J’ai entendu dire que tu avais décidé de te spécialiser dans la médicomagie légale, c’est glauque mais sûrement intéressant. Faudrait que tu m’en parles à l’occasion.

Je ne sais pas si c’est parvenu jusqu’à Stockholm, mais une université à ouvert ses portes au Pays de Galles, et j’ai décidé l’année passée de faire un break pour y enseigner. C’est différent, pas forcément plus facile que de prendre en charge un patient à qui il manque des bouts et qui panique en foutant du sang partout, mais ça va. Mes étudiants sont plutôt sympas, investis, et même si c’est pas la fête tous les jours, ça va.

Tu dois sûrement te demander pourquoi je t’écris une lettre maintenant. J’aurais pu le faire il y a de ça des années, mais je n’en avais pas la force. J’ai préféré m’appuyer sur des gens et j’ai peur qu’ils soient tous désormais au bord de la rupture. Je me demandais si ça te dirait pas de passer quelques jours à Londres, histoire de se revoir, de rattraper un peu le temps qui a passé. C’est comme tu veux. Je sais pas si vous prenez beaucoup de vacances là-haut, mais si tu n’as changé, tu dois toujours être du genre à bosser d’arrache-pied. J’espère quand même que ça ne t’as pas empêché de trouver quelqu’un — et le bon. Singulier ou pluriel.

À ce propos, est-ce que tu as des nouvelles de Søren et Vera ? Et puis toi, ta famille, comment ça va ? Toujours en froid avec Regnus ? Passe-lui quand même le bonjour de ma part ! Il m’avait fait une impression… mémorable, je dois dire. Un peu comme toi qui a débarqué devant mes parents en caleçon… C’était marrant. Salue tout le monde de ma part en fait.

Quinlan

Il aurait pu attendre une nuit pour relire sa lettre avant de courir à la volière, mais il savait que s’il faisait ça, il ne l’enverrait pas. Alors, il se précipita pour l’attacher à la patte d’un robuste hibou et la regarda partir loin à l’horizon. Il espérait seulement qu’elle ne lui reviendrait pas avec une petite mention ‘Décédé’. Ça faisait plus de dix ans qu’ils ne s’étaient pas parlé… Tout était possible.