[Event] Le banquet du maître des lieux

Oui. Elle aussi aurait préféré avoir affaire à un idiot qui pense avec ses muscles. Tout en dansant, elles se déplaçaient dans la pièce pour couvrir une plus grande surface dans leurs surveillance attentive, Siobhan guidant sa coéquipière dans la plus grande des douceurs. Cela avait beau être une mission, elle n'en restait pas moins elle, pas moins soucieuse du bien d'être de Cliodna... et de l'apparence qu'elles donnaient. Son habillement était assez suspect comme cela sans qu'en plus elle ai l'air d'une planche de bois ne sachant pas danser. L'Irlandaise laissa son homologue expliquer son point de vue et lui répondre puis ce fut le coup de tonnerre et les deux cessèrent leur danse. Le Comte s'était exclamé "Silence !" suite aux propos de Ghrystal qu'elle n'avait pas entendu, et cela jeta un froid sur toute l'assemblée.

La belle fit signe à la blonde de la suivre et elle s'avança jusqu'à Ghrystal et Chauncey, se plaçant juste derrière, presque à son niveau, pour lui signifier qu'elles étaient là et qu'elles le soutiendraient quoi qu'il arrive. La valkyrie garda une mine relativement dure et froide, la posture droite; elle s'imposait d'une manière détournée, fixant le Comte, restant à la limite du respect sans jamais la dépasser. Elle avait aussi plusieurs choses à lui dire mais cela attendrait, dans l'immédiat elle n'analysait tandis qu'il s'exprimait face aux étudiants. Le sens de ses mots l'importaient peu, mais son regard... son attitude, toutes ces choses inutiles pour tous. Finalement, il fit sonner une clochette et annonça le début du repas. L'apprentie Auror resta campée à côté de Ghrystal, sans un mot, restant vigilante quant à leur mécène et le repas qu'il venait de faire apparaître.

Elle ne le sentait pas, c'était louche encore une fois, "Mangez à votre faim, buvez jusqu'à plus soif et dansez à votre goût !" sonnait étrangement dans la bouche de cet aristocrate sibyllin, la blonde savait on ne peut mieux comment il exagérait chaque chose que l'on pouvait lui dire pour nous le faire payer au prix fort, et elle avait entendu des rumeurs concernant une jeune femme qui avait eu le malheur de lui demander d'avantage de gâteau dans la salle commune. Son pouls s'accéléra, ses sourcils se froncèrent, et puis ce fut le choc électrique d'une demie-seconde. Crac. Le bruit significatif. Tout s'accélère encore et elle empoigne le bras de Ghrystal tandis que Chaun disparaît, ayant visiblement eu la même idée. Elle tire alors sa baguette, réagissant au quart de tour, et la pointe vers l'endroit du transplanage et informule un sortilège de traçage, emmenant Ghrystal qui n'a rien demandé avec elle. Comment as-t-elle pu faire ça ? Elle l'ignore elle même mais ne s'y attarde pas.

Jessica sentit la main de son amie se refermer tendrement sur la sienne. Elle se voulait rassurante et elle était très forte pour cela. Elle se fit violence pour retenir ses larmes. Ama lui dit que ce n’était qu’une danse, mais Jess savait que non. Elle sentait que là ce n’était pas une énième dispute, non elle savait que c’était bien plus que cela.

- Non Ama, il y a, partager une danse en tout bien tout honneur avec un ami, et … et ça. J’ai vu comment il l’a regardait, et ça n’a rien à avoir à un regard que l’on porte à une sœur ! Mais ce n’est pas grave …

Jessica préféra ensuite changer de sujet, et elle demanda à sa confidente, comment elle allait elle, suite aux évènements tragiques qu’elle avait subis. Elle haussa les épaules, geste qui voulait tout dire. Elle finit, elle aussi par changer de sujet, l’orientant sur le Maitre des lieux. Jessica regarda de nouveau le Conte et répondit à la belle rousse

- Et bien je trouve qu’il est …. Jeune et très séduisant… En fait c’est très déroutant, car je m’attendais à voir quelqu’un de très âgé, un peu comme le professeur Dumbledore tu vois… A mon avis, ce n’est pas aussi simple que ça… il nous cache des choses … Ou alors c’est son physique de quand il était jeune et qu’il n’a jamais vieilli … physiquement ? Enfin je ne sais pas si c’est possible …

Elle avait réussi à oublier Dean pour quelques minutes et c’est mieux ainsi. Au même moment une altercation éclata entre le comte et un étudiant que Jess ne connaissait pas. Ceci fit perdre patience au maitre des lieux, qui finit par crier sur le jeune homme. Jess n’avait pas les informations nécessaires pour connaitre le sujet de la discorde, mais tout cela ne présageait rien de bon. Et la soirée avait déjà été bien mouvementée pour la belle Mexicaine. Elle en avait marre de ce foutu banquet, elle se demandait même pourquoi elle était venue ! Grossière erreur.

- Excusez-moi Ama, Aaron, mais je vais y aller. Je n’ai pas faim du tout et je t’avoue que je suis fatiguée. Ama, je veux vraiment qu’on se revoit, dans un endroit plus calme ok ? j’attends ton courrier ma belle.. Aaron on se reverra forcement dans la salle commune.

Elle leur fit une étreinte amicale avant de se diriger vers la sortie. Elle avait besoin de calme pour digérer la nouvelle de cette soirée : elle et Dean c’était bel et bien terminé

Alors que l'air de Vivaldi se transformait doucement en une nouvelle mélodie, inconnue à sa douce oreille. Novenka se laissa guider par Chauncey jusqu'à la table où ils étaient précédemment assis. Toute l'impatience résidait en un seul être, elle le crut en tous les cas. L'invincible et douloureuse attente d'en apprendre davantage sur son compagnon de mésaventure mais rien ne se passait comme prévu.
Chaun se détacha doucement de son étreinte et c'est sans son pilier que la jeune yougoslave se retrouva. Elle regardait autour d'elle pour s'assurer que tout le monde allait bien. Anton et Mia étaient toujours sur le balcon à discuter alors qu'Azphel et Elena tournoyaient encore sur la piste de danse à papoter. Un jeune sourire naquit sur ses lèvres quand elle se retourna pour vérifier où se dirigeait Chauncey.

Novenka suivit du regard le petit attroupement d'Aurors qui s'avançait doucement vers le Comte. Elle reconnut très vite Ghrystal et Siobhan avec qui la jeune femme avait déjà tant vécu d'aventures. Peut-être même trop. La main sur le dossier de sa chaise, Novenka se tendit à chaque mots de Ghrystal. Que se passait-il ? Pourquoi la bombe fut-elle lâchée ainsi en plein milieu d'une réception ? Le souffle quasiment coupé, c'est avec un sursaut qu'elle le retrouva. La puissante voix du Comte fit lever la jeune femme qui s'approcha avec précaution de ses amis, elle voulait récupérer Chauncey, l'éloigner d'un danger qu'elle sentait imminent.
C'est pourtant au milieu de la salle que Novenka stoppa son avancé, le Comte parlait fort, d'une voix assurée demandant à profiter de la soirée et de victuailles proposées. Et après un court moment, le même moment où elle hésita encore à bouger, le Comte s'évapora dans un transplanage. Mais le stresse de la jeune femme s'accentua quand elle vit Chaun disparaître, avec à la suite Siobhan et Ghrystal sur les talons.

« Non ! Revenez ! »

Trop tard. La main suspendue vers le vide, elle resta un moment silencieuse ; bête de se retrouver seule au milieu de la salle où tout le monde pouvait s'offrir à loisir le moyen de s'en moquer. Peu lui importait, la sécurité de son ami valait bien plus que ce prix là. Elle retourna, en fixant le plafond, à sa table.
Anton et Mia repassèrent par la salle du bal, et Novenka, résignée, s'attarda à la table vide. Elle gratifia son amie d'un doux baiser, plein de sollicitude, cachant son angoisse.
Une fois son amie partie, elle vérifia les offertes. L'exaspération s'éprit d'elle et ne la quitta qu'une fois qu'elle eut posé les yeux sur Rowan qui lui-même la regardait. Par précaution, elle vérifia qu'il ne regardait pas derrière elle. Puis elle prit son courage à deux mains et se leva. Elle remit en place le chapeau haut de forme et lissa le tulle de sa robe avant d'avancer, décidée jusqu'à la table où il bavardait gentiment avec une douce Abraxan au caractère bien trempé qui la caractérisait dans les bruits de couloir.
Elle s'arrêta à côté d'elle, basculant du talon à la pointe de ses pieds, visiblement mal à l'aise. Elle retira son chapeau qu'elle laissa pendre au bout de son bras.

« Pardonnez mon intrusion. » Elle reprit encore plus doucement. « J'aimerais t'enlever Rowan. »

Rouge de confusion, Novenka d'habitude si sûre d'elle perdait manifestement ses moyens. La timidité, oui, la confusion, très peu.
Elle posa alors ses yeux bleus sur ceux céruléens de son compagnon d'aventure, et le courage naquit à nouveau au creux de ses seins.

« Bien que je ne veuille nullement couper une conversation importante, je me posterai à cette table - elle pointa du doigt la table plus loin - quand le moment me sera dédié. » Elle sourit avec chaleur et bonté. « Megan, au plaisir de te revoir dans nos couloirs. »

Elle remit son long chapeau et s'aventura jusqu'à sa table vide. Perturbée de se retrouver seule, inquiète et fatiguée. Cette soirée était pourtant magnifique...

Spoiler:

Silence pesant. Boom. La Comte jette un grand froid sur toute l'assemblée dès lors stoïque, soumise en quelques décibels savamment employées. Enfin, "Silence" n'est pas bien compliqué à formuler pour peu que l'on ne soit pas bourré. Néanmoins, il s'agissait là d'avantage du charisme que le personnage dégageait que du mot en lui même. Pour qui se prenait-t-il ce pseudo bourgeois ? Pour un Comte ayant tout pouvoir sur ses brebis dociles ? Ah... En effet. Benji vient de pousser discrètement les portes, en silence, et s'est glissé avec tout autant de discrétion parmi ses camarades qui ne font que peu attention à lui. Tous les regards sont rivés sur le maître de cérémonie qui ne tarde pas à annoncer le début du repas. Parfait. Le Sinistros passe négligemment une main dans ses cheveux pour se redonner une coiffure potable, le dos encore humide de sa séance d'étreinte intensive.

Il prend alors place non sans offrir un petit clin d’œil charmeur à une Miss à l'opposé de sa table ainsi que son sourire angélique n°5, puis il se détourne d'elle pour porter son attention sur les victuailles qui venaient d'apparaître dans les assiettes. Il tombait pile poil ! Tout en ébauchant un sourire satisfait il ajusta le col de sa chemise, jusqu'à ce qu'un craquement significatif suivi d'une exclamation n'attire son attention et ne lui fasse froncer les sourcils. « Il a la fibre hôtelière lui. » pensa le français. Son regard se porta alors sur la jeune femme qui devait bien se taper la honte, il allait se lever lorsque la belle brune retourne à sa table et va discuter avec ce qui semble être ses amis. Il observe, commençant à remplir son estomac. Il en a besoin, il n'a rien avalé depuis ce matin.

Des secondes, des minutes passent, et Novenka se lève puis se dirige vers lui... Ah, non. Elle se dirige vers un brun ténébreux trop dark qui semble être en pleine conversation avec une autre nana. Ben' patiente alors encore un peu, s'essuyant la bouche sans perdre le contact visuel avec son amie. Que peuvent-t-ils bien se dire ? C'est vrai que ça ne le regarde pas, et il n'est pas plus jaloux que ça, mais ça l'intrigue. La tête du gars ne lui revient pas... Wessmindbroke, ou Westminbrook, qu'importe son nom, il s'en est toujours relativement méfié. Il est de ceux qui te serrent la main pour bien te tenir lorsque il te plante leur dague dans le cœur à plusieurs reprises. Le jeune homme fronce légèrement les sourcils, quelque peu voûté au dessus de la table, détendu, et vient mordiller l'intérieur de sa joue sous l'effet de l'attente un peu trop longue pour lui.

La yougoslave se détache alors de lui et va prendre place sur un table non loin, et le beau brun en profite pour se lever, laissant négligemment sa chaise mal rangée pour ensuite en tirer une de la table de son amie. « Je peux m'asseoir ? » lui dit le Sinistros en Français tout en tournant la chaise pour s'y asseoir à l'envers et croiser les bras sur le haut du montant, n'attendant pas vraiment de réponse. Il pose ensuite la tête sur ses avant-bras et la fixe de ses prunelles kaki, une esquisse de sourire fendant ses lèvres. Il reste égal à lui même, sympathique même dans son audacieuse insolence. « Ca fait des mois que nous ne nous sommes pas vus et tu tire une de ces tête. Comment vas-tu ma belle ? »

Il n'en prend conscience que maintenant. Ca fait bien plus de huit mois qu'ils ne se sont pas vus, au bas mot. Son manque d'assiduité y avait sans doute été pour beaucoup. Les cours l'emmerdaient pour la plupart, et les sécher ne lui posait aucun problème. C'était peut-être ça le problème au final. Mais qu'en avait-t-il à carrer ? Il avait un but en tête. Il savait ce qu'il voulait; ce qu'il ne voulait pas. Et dans l'immédiat ce qu'il voulait c'était aller prendre un bon bain, écouter Novenka raconter son malheur, et éventuellement aller mettre un bourre-pif au type guindé. Pas nécessairement dans cet ordre là. Ses yeux se plantent dans ceux de son amie de longue date et il vient distraitement et discrètement tapoter du pied sur le sol.

Le suspense était à son comble. Chauncey avait eu la bêtise de partir à la suite du Comte accompagné de ces deux aventuriers ambulants qui ne cherchaient que les aventures extraordinaires, quitte à mettre leur vie en danger. Et si tout ce que l'on racontait était vrai. Et si le Comte leur faisait du mal. Novenka ne pourrait se le pardonner... Aurait-elle du les suivre à son tour ? Elle n'avait pas leurs forces ni leurs caractères bien trempés malgré un courage représentatif. Novenka était inutile, dans l'instant. Sur sa chaise, à attendre bêtement le réconfort de Rowan. Allait-il seulement venir la quérir ?
Si elle n'était pas aussi tenaillée par l'angoisse et la nervosité, elle se laisserait volontiers aller aux larmes. Elle décida d'attendre un minimum puis de retourner dans son ailes, chez les Abraxans, elle irait retrouver Mia et Anton dans leur chambre pour leur raconter l'ignoble spectacle et l'indescriptible douleur qui la tenait en chaîne. Chauncey était son pilier, sa façon de vivre et de penser étaient régies par ce même homme pouvant canaliser les excès de nervosité de la douce yougoslave. S'il lui arrivait malheur, si Chauncey ne revenait pas... Elle ne survivrait pas à une telle épreuve. Si drôlement lié à son meilleur ami. Le courage de poursuivre ses études était relié également à lui.

Un long soupire suivit ses pensées, et elle jeta un rapide coup d'oeil à Rowan. Elle ne voulait pas non plus abuser de sa générosité, et il n'avait rien à lui devoir. Pas plus qu'elle, mais c'était bien plus fort qu'un sentiment simple basé sur une curiosité. C'en était presque maladif, comme si le savoir dans une même pièce l'attirait à lui, elle ne pouvait pas se passer de le regarder et si lui parler était possible, pourquoi s'en priver ?
Flirter dans de pareilles circonstances était sûrement la pire idée qu'elle ait pu avoir, partagé entre son angoisse et sa folle envie de dormir, Novenka préférait se réfugier auprès d'un homme qui avait fait ses preuves à ses côtés, qui l'avait aidé et soutenue. Mise en sécurité. Rowan semblait jouer un rôle capital dans la vie de la jeune yougoslave, sorti de nul part, pris chacun dans le délit. Rowan ne pouvait pas être qu'une rencontre banale.
L'assiette face à elle l'appelait doucement, elle avait faim, cela était sans dire, mais son ventre se tordait dans d'affreuses et étranges douleurs. Elle finit tout de même par avaler un toast qu'elle ne finit pas. Elle le reposa lourdement dans son assiette mastiquant, en regardant toujours dans la direction de son compagnon d'aventure.

Ce fut le bruit d'une chaise qui la tira de sa léthargique pensée. Elle se retourna en reconnaissant cette accent français très prononcé, elle l'entendait, l'enregistrait et le comprenait. Doucement, elle tourna la tête vers un convive dont la silhouette était toute familière, mais cette voix bien plus encore. Cette sonorité étrangère et ce son unique et suave étaient la particularité même de Benjamin Corvin. Ce fut avec un sourire éclatant qu'elle l'accueillit et de son accent anglais aux connotations de l'est, elle se mit à lui parler français.

« Je te prie. Longtemps cela fait qu'on s'est pas voir. »

Elle se mit à rire, s'apercevant de l'horrible accent qu'elle avait, de ses "r" bien roulés et de sa prononciation exagérée. Décidément la langue de Molière et Novenka n'étaient pas faites pour s'entendre. Elle reprit sa jolie langue natale en désignant la table face à elle. Shakespeare son indicible allié.

« Comme tu le constates, je suis seule et j'attends ... un ami. »

Elle rougit à la mention de l'ami, et donna un nouveau coup d’œil à Rowan avant de reprendre. Elle se leva, posa son chapeau sur la table et face à Benjamin, elle lui colla deux bises. Elle retourna s'assoir, haussant les sourcils et sourit délicatement, avec toute la chaleur du monde malgré l'inquiétude qui ne quittait le creux de ses seins.

« C'est ainsi que l'on fait à Bordeaux, c'est deux en commençant sur la gauche ? J'ai bien retenu. » Elle se tourna à nouveau vers Rowan un petit instant, attendant impatiemment sa venue, puis se concentra sur Benjamin. « Combien de temps dis-tu ? Des mois ? Cela doit bientôt faire une année, heureusement que je savais que tu étais à Haveirson. » Elle lui tapa gentiment le bras. « Et tu n'as pas pris la peine de venir me voir avant, goujat, tu ne changes pas ! »

Elle se mit à rire, et elle s'octroya même le plaisir de gouter le poulet en sauce. Une bouchée suffit et elle prit son verre de vin qu'elle leva à l'attention de Benjamin, puis son sourire s'effaça.

« Mon meilleur ami est peut-être mort. »

Elle stoppa ses gestes et la pensée que Chauncey risquait fort lui étreignit le cœur.
Le vague à l'âme, elle se retourne une énième fois vers Rowan, l'espoir s'envolant doucement.

Spoiler:

Le banquet se poursuivait dans de bonnes conditions, le comte se rendait disponible pour les élèves qui avaient le plus de questions et quelques danses essayaient de détendre l’atmosphère de tension. Elena paraissait moins sûre d’elle que sa soeur, du moins s’estimait-elle moins méritante. Pourtant à la voir, le sorcier présumait de peu de différences entre les deux soeurs. Elles dégageaient toutes deux quelque chose de propre à la famille McWood.



- Ta compagnie est tout aussi plaisante, lui assura-t-il dans un sourire. Je ne me rends pas compte que je parle de manière recherchée… enfin, ça me semble naturel, mais merci pour le compliment.



Leur danse fut interrompue par la prise de parole du comte, revenu devant sa table unique. Il annonçait le festin pour suite des festivités et très bientôt de nombreux plats apparurent sur les tables, invitant les étudiants à se régaler de nombreux mets qui avaient l’air réellement appétissants. Les secondes flottèrent rapidement alors que quelques sorciers prenaient place, mais la stupeur les frappa lorsque le comte se volatilisa dans un transplanage inattendu. Azphel s’en fichait éperdument et décida de continuer sa soirée, invitant Elena à aller profiter des plats mis à leur disposition.



Ce que faisait réellement le comte, et si c’était réellement lui, n’avait pas d’importance pour l’Abraxan. S’il venait à subir les foudres de leur hôte un jour, il changerait peut-être d’avis, mais en attendant, il préférait ne pas perdre de temps à poursuivre une chimère ou des réponses qui ne viendraient pas. 
Azphel resta donc à profiter de la salle de bal, se délectant de la musique, faisant abstraction des étudiants qui partaient et de ceux qui pestaient contre un mirage dissipé.

L e sorcier mangea à sa faim, laissa ses oreilles se dégourdir sur la musique et congédia visuellement la salle de bal. Il y resta cependant un moment, mais le goût de la fête quittait sa bouche alors que les amis avec qui il avaient conversé plus tôt étaient pour la plupart déjà partis, ou ailleurs dans la salle.



- Tu m’excuseras, dit-il à Elena en se levant de table, mais cette soirée va s’arrêter là pour moi. On se reverra bientôt, je pense.



Il la salua d’un sourire et jeta un regard vers Novenka pour lui adresser un léger signe de tête. Il chercha des yeux Isia qui avait joué son rôle d’apprentie Auror, pour l’embrasser du regard, la gratifiant d’une étincelle flamboyante, la promesse qu’il retrouverait ses bras bien assez tôt ; puis il quitta la salle pour regagner sa chambre.


« En toute franchise, Megan, je me méfie diablement des coïncidences que nous rencontrons ici-bas. » Les lèvres du jeune aristocrate s’étaient de nouveau pincées en une fine ligne anxieuse, alors que leurs regards liés par l’intérêt mutuel de se protéger se portaient vers l’intérieur de la grande salle. Sur la silhouette de la supposée Deirdre. « Je ne l’ai jamais croisé au sein de Poudlard. » Ses iris pâles et inquisitrices se posèrent sur la tignasse aisément identifiable de son colocataire. « Selon Clemens, elle serait originaire de Durmstrang. C’est pourquoi, avant le début de l’année scolaire, nous n’avons pas eu le loisir de la fréquenter entre les murs de notre précédente école. »

Ils comptaient poursuivre davantage leur échange, pour le moins brûlant de curiosité, lorsque le Comte invita l’ensemble de ses disciples à rejoindre leurs tables. À en croire les mots proférés par leur bienfaiteur, il escomptait sincèrement convier les étudiants à des réjouissances gorgées d’allégresses et de festins démentiels. Difficile à démêler le vrai du faux dans de tels propos, à moins de se montrer devin. Et encore.

Une fois bien installés, Rowan croisa les mains au niveau de son menton, les traits tendus sous l’effet d’une réflexion acérée. « Je ne peux pas l’affirmer, mais il me semble l’avoir vu toucher les épaules d’Isolde. » D’une turbulence interne et anxieuse. « Compte tenu des informations que nous possédons actuellement, il m’apparaît difficile de la qualifier de fantôme. »

Ses doigts cessèrent progressivement d’apporter un quelconque soutien à son visage, préférant se perdre en des lieux moins visibles pour se crisper. De frustration. D’excitation. D’un semblant d’intérêt froissé par la diligence toute obligée du Comte. Et de sa disparition. « Il est un mystère difficilement appréciable, je te le concède amplement. » En vérité, de toutes les énigmes qu’il avait jusqu’ici affronté en compagnie de ses alliés, le propriétaire de Haveirson était simplement la plus redoutable à résoudre. « Si cela peut te rassurer, le peu que j’ai eu l’occasion d’échanger avec lui... Se cristallisait autour de sujets mondains plus qu’autre chose. Rien de très attrayant ni d’indicatif. »

Et cette révélation, d’une futilité grandiloquente, sonna pourtant singulièrement à ses oreilles. « Si je peux me permettre, Megan, j’ai l’impression que nous n’avons rien tiré d’instructif de cette soirée. » En dehors de deux-trois éléments négligeables. « Tout du moins, en ce qui concerne le Comte. Quant à Deirdre... »

Les iris pâles du jeune aristocrate s’étaient alors posées sur la silhouette gracile de Novenka. « … Nous avons davantage de raisons d’aller mener notre petite enquête sur elle. N’est-ce pas ? » Cette dernière, après un temps d’hésitation – du moins il l’avait perçu ainsi – vint gagner leur proximité. Pour l’enlever. Lui. Bon sang.

Pour toute réponse, il acquiesça sereinement. Quoi qu’un peu décontenancé par cette demande impromptue et troublante. À la limite d’être gêné, également, par le soudain rapprochement qui se tissait entre leurs deux existences depuis cette sombre nuit de mars. Du bout des lèvres, le regard inlassablement fixé sur le déplacement de l’exquise brune, l’ancien Serpentard s’efforça de revenir à ses pensées. « Il faudrait que Clemens nous mène auprès de cette tombe. Nous pourrions ainsi trouver des indices suffisants à nous conduire vers une théorie plus concrète que abstraite. » Au loin, un étudiant de Sinistros s’invitait à la table précédemment désignée par l’innocente yougoslave. « Je vais quérir des précisions auprès de Novenka. Si tu as le temps, je pense que tu peux rejoindre notre ami commun ; et détailler avec lui nos... Prochains objectifs. »

L’ombre d’un sourire glissa sur ses lèvres tandis qu’il se levait. « J’espère que tu ne me tiendras pas rigueur de cet abandon. » Ses doigts se posèrent brièvement sur l’épaule de Megan ; tel qu’il le ferait avec n’importe quel ami. « Reste vigilante. » Tel qu’il le ferait avec n’importe quel camarade bénéficiant de sa confiance ou de son respect.

L’instant suivant, d’un pas lent et maîtrisé, il quittait son  interlocutrice privilégiée pour une autre, à la chevelure auburn. Une fois arrivé dans la proximité de cette dernière et de son partenaire, Rowan s’inclina sobrement en guise de salutation. « Je suis tout disposé à t’écouter, Novenka. »

« Je te prie. Longtemps cela fait qu'on s'est pas voir. » eu l'effet d'une bombe de bonne humeur et parvint à tirer un large sourire au jeune homme. Cet accent lui avait manqué, et il l'appréciait toujours autant qu'à l'époque où les deux comparses s'étaient connus. Il la laissa poursuivre, son rire l'empêchant de rester d'avantage sérieux, et il en laissa échapper un petit, ne disant mot. Le mot "ami" le fit lentement acquiescer et il ne manqua pas la jolie teinte que prit son amie avant que celle-ci ne zieute le gars dont elle parlait. Il s'en doutait un peu, oui, mais resta surpris qu'elle puisse s'intéresser à lui d'une quelconque manière; elle, la baroudeuse, la sans-chaîne un peu naïve et choupinnocente, et lui l'aristocrate hautain dont l'aversion pour les moldus était célèbre. Qu'importe après tout. Sans bouger, il relèva les yeux vers elle et lui tendit tour à tour se joues pour lui faire la bise, un sourire indélébile aux lèvres, profitant, malgré lui, pour humer la délicate fragrance qu'elle dégageait. Toujours sans dire un mot il acquiesca à ses dires et glissa, un court instant, un regard à Rowan.

Une année qu'ils ne s'étaient pas vus... ? Le français plissa imperceptiblement le nez et se redressa avant de légèrement rouler de l'épaule gauche pour se la détendre, son regard venant se poser sur l'assiette de son amie puis rapidement revint sur Novenka. Il est vrai qu'il aurait au moins pu faire l'effort de contacter ses amis les plus proches, mais après tout il s'en fichait un brin. Eux n'avaient pas cherché à le recontacter, alors pourquoi ferait-t-il le premier cas ? Néanmoins il sentait qu'avec la yougoslave c'était différent, et il s'en voulait un peu de ne pas avoir donné signe de vie plus tôt. La petite tape le fit doucement rire, de ces léger rire suave exprimant la conscience de notre culpabilité mêlée d'un amusement certain. « Oui, excuse-moi Nov', je n'ai... pas vraiment été assidu cette année. fit-t-il et étirant un léger sourire contrit au coin de ses lèvres, penses-tu pouvoir un jour me pardonner ? » conclut Benjamin en affichant un sourire plus malicieux.

Tandis qu'elle levait son verre il la contempla, songeur une petite seconde. Elle non plus n'avait pas changée, toujours aussi belle, toujours aussi vivante... Il fut alors ramené à la réalité par la brutalité de sa révélation et fronça les sourcils. « Peut-être mort tu dis. Comment ça ? Enfin qu'est-c'qui te fait penser ça ? » la soirée n'allait peut-être pas se dérouler comme il l'espérait, voir Novenka ainsi sombrer dans des émotions négatives, qu'importe leurs natures, le touchait. C'était sans doute la seule capable d'influencer son humeur aussi vite et aussi sincèrement... Une dizaine de secondes s'écoulèrent avant que d'autres ennuis ne pointent le bout de leurs nez. Westminbrook s'était levé et venait se s'incliner, puis sans fioriture dont raffolaient les gens de son rang annonça à la yougoslave qu'il était enfin prêt à l'écouter. « Quel agréable personnage... » pensa le Sinistros. Il lui offrit un simple, large et bref sourire d'apparat en guise de réponse et revint croiser les bras sur le montant de sa chaise, fixant son homologue d'un oeil neutre et cillant quelquefois. Il attendait que Novenka le congédie pour bouger, restant muet, placide, ne perdant pas la jeune femme du regard malgré que ce dernier soit planté dans la personne de Rowan Westminbrook.

Toute l'inquiétude se mêlait à mon sang, brouillant peu à peu ma vue. Des larmes naissantes auraient aimé s'échapper de ces douces cavités mais elle les retint avec force. Novenka était fragile mais pas faible. Elle avait confiance en son ami, mais de ce qui vivait dans ce château elle ignorait encore si la solution de suivre le Comte, énervé par le comportement de Ghrystal, était la meilleure idée qu'il ait eu.
Cette soirée s'en allait à vau-l'eau. Alors qu'elle avait si doucement commencé, près de sa meilleure amie, entourée de son groupe habituel avec qui elle faisait les quatre cents coups. Elena s'était attroupé avec eux, elle d'habitude si discrète. La soirée avait eu l'air d'être adorable, douce et pleine de promesses malgré la stupeur de Mia et les angoisses concernant Anton.
Alors qu'à cet instant, son meilleur ami était loin d'elle et de sa surveillance. Ses amis étaient tour à tour partis du banquet, déçus par leur hôte. Et elle était assise ici, toute seule. Oh oui, elle était très heureuse de retrouver son ami Benjamin, mais le destin voulut qu'elle soit paniquée, nerveuse à l'idée de savoir son ami dans une position de dangerosité.
Novenka aurait aimé faire un meilleur accueil à son ami français, être le rayon de soleil qu'elle était habituellement avec ce sourire ravageur dont elle était départie. Triste constatation.

Le regard triste et inquiet coula doucement dans les prunelles kaki de Benjamin. Elle reposa lentement le verre sur la table sans avoir pu y tremper les lèvres. Elle cligna des yeux plusieurs fois pour faire fuir les larmes naissantes, et son cœur tenta de calmer sa course enivrante. Ce n'était pas chose aisée que de devoir partager ses inquiétudes.
Elle ouvrit doucement la bouche, ne trouvant de mots pour expliquer son mal être.

« Je... »

Mais Rowan arriva. Coupant net ses pensées inquiètes. Peut-être a-t-il des réponses concernant le Comte et les risques qu'encourent les trois idiots qui malheureusement étaient étroitement liés à l'Abraxan. Elle se leva doucement, ses joues se tintèrent de rouge et elle posa avec délicatesse son bras sur celui de Rowan. Dans un regard toujours aussi troublé, elle le posa sur le visage rigide de son compagnon d'aventure, elle sourit chaleureusement et laissa glisser sa main le long de son bras jusqu'à la lever pour présenter Benjamin.

« Rowan, laisse moi te présenter Benjamin Corvin. Un ami français. Benjamin, voici Rowan... Rowan... Quel est ton nom ? »

Elle haussa un sourcil, étonnée d'avoir si d'étranges pensées à son sujet et de ne pas connaître son nom. Bizarrement l'école entière semblait le connaître, le reconnaître, l'aimer ou s'en éloigner. Une personne dont le gris est une couleur inconnue. Celle que l'on aime ou que l'on déteste.
Puis la grossièreté de sa question l'eut mise à mal, si bien qu'elle s'empressa de poursuivre.

« Je suis contente que tu m'accordes de ton temps. Cela fait quelques jours, je me demandais si tu allais bien. Et s'il était possible que tu répondes à une de mes questions concernant notre hôte, notre bienfaiteur. » Toujours debout, elle désigna une chaise à côté de la sienne. « Asseyons-nous. »

Le jeune aristocrate s’était à peine introduit dans la proximité de la délicate Abraxan, que ses iris pâles et inquisitrices se trouvèrent obligées de se porter brièvement vers le camarade de cette dernière. Un étudiant de la confrérie au Sinistros, dont le visage ne lui semblait pas inconnu : et pour cause, en tant que président, il s’échinait à retenir les individus qui partageaient un tant soi peu son quotidien.

Ne serait-ce que pour être capable de repérer les fauteurs de trouble autant que les alliés substantiels. Un gain de temps aisément justifiable par les tourments qui guettaient le moindre de leurs actes dans cette bâtisse surannée et énigmatique. Irrémédiablement menaçante pour tous ceux qui sous-estimaient avec dédain l’opulence d’une telle magie.

À la fois constante, telle que la perpétuation de l’air et de la terre, et épisodique, somme toute virulente lors d’un débordement avéré de la part de ses risibles occupants. Et c’était peu dire qu’il avait déjà eu l’occasion de voir des remontrances semblables à l’œuvre. Parfois sans aucune raison logique ; seulement une présence latente et désagréable, apte à piquer sa nuque d’un avertissement abscons.

L’ancien Serpentard n’eut pas le temps de se perdre davantage en élucubrations ; l’innocente Novenka venait quérir auprès de lui un contact dans tout ce qu’il avait de plus humain. Chaleureux et réel. Mené du bout des doigts avec une douceur exempte de méfiance et prompte à lui apporter un brin de réconfort ; à éloigner les débris de bois et d’or mêlés d’une Pandore déplaisante.

Durant cet infime interstice du monde, Rowan s’était uniquement concentré sur elle. À la fois piqué et fasciné par ce regard de velours affable, et par la façon singulière dont elle le détaillait – à la limite de la convenance qu’il s’autorisait lui-même à prendre d’ordinaire vis-à-vis de la gente féminine. Au point d’en oublier les intérêts extatiques aux alentours ; la souffrance imbibant sa chair ; le départ en grande discrétion du Comte.

Dès que la contiguïté de leurs gestes se rompit, il cessa de divaguer dans des eaux pâles et ingénues pour se concentrer sur ce que l’on attendait de lui. « Messire Corvin. » Son visage s’inclina une nouvelle fois, empreint d’un protocole rigoureux et d’un respect définitivement propre aux aristocrates. Sûrement de trop pour une jeunesse qui ne partageait avec lui que son âge. « Enchanté de vous rencontrer officiellement. » Un Français ? Intéressant.

À l’interrogation inopinée de la jeune femme, il se décida à répondre avec douceur. « Westminbrook. » Autant un nom qu’un héritage à ses yeux sereins. Porteur d’un poids millénaire ; difficile à extraire de sa personne tant il semblait lié à son existence depuis ces vingt dernières années. « Tout va pour le mieux, ne te tracasse pas. » En dépit du déchirement de ses entrailles ; du soufre et de la rage contenue dans son sang ; des obligations décriées à venir... Ces derniers jours avaient été assurément quiets. « Je vais essayer de répondre au mieux à tes questions. »

Il ne se fit pas prier pour se poser nonchalamment sur la chaise indiquée. « Je t’écoute. »

Rowan se rapprochait, et Benji humait déjà l'être famélique et filiforme. Il puait le sépulcre poussiéreux à des lieux à la ronde, ou peut-être n'était-ce que ses fantasmes de pouvoir faire son devoir et purger la Terre d'une vermine hématophage qui n'aurait jamais dû la quitter. « Tout le plaisir est pour moi. » répond-t-il, souriant dans cette parade de l'apparat, la mascarade et les façades étaient l'apanage de l'homme politique qu'était, même si, de son côté, il n'était pas en reste quand à ses talents de faussaire sentimental. Le Sinistros reprit alors la parole mais Benjamin n'écoutait pas, il l'examinait à la recherche de traces indiquant qu'il ne respirait pas lorsque il ne parlait pas, et quelle occasion aurait pu être plus belle que celle-ci, puisque Novenka s'apprêtait surement à prendre la parole. Il prêta donc une oreille attentive à ce qu'ils allaient se dire, le Comte ayant piquée sa curiosité... maladive.

Le français était alerte, l'ignescence de son esprit torturé; de sa colère qui gangrenait son cœur... Oh l'ignescence était éthérée, si peu palpable que le Westminbrook n'aurait pu la remarquer s'il accordait toute son attention à la yougoslave. Il calquait l'expression diaphane du sibyllin personnage; s'il ne savait pas ce qu'il pouvait penser, il ferait au moins en sorte qu'on ne puisse pas non plus lire ses pensées. Ses motivations et ressentis quant à l'aristocrate resteraient secrète. Benjamin se rendit alors compte qu'il avait un brin oubliée la jeune femme, et dans un geste parfaitement innocent vint porter la main sur le haut de la bretelle turquoise de la belle Abraxan et fit mine de retirer un minuscule mouton de poussière, ou des cheveux tombés et entachant sa grâce; qu'importe. Le but de la manœuvre était de signifier autant à l'un et à l'autre qu'il était là, en fond, mais pas moins impliqué. Ce soir, il ne s'en prendrait pas à elle.

Dans sa paranoïa justifiée, le brun songea à un moyen de précipiter la possible chute de l'ex Serpentard, jusqu'à ce que le kaki de ses yeux croise la luisance d'un couvert affûté, sur la table. Faisant mine de se détacher de la conversation qui avait débutée par manque d'intérêt, il vint doucement saisir la plume qui viendrait signer de son propre sang le bas du formulaire de décès du Westminbrook; c'était un couteau banal, argenté, mais le français semblait lui trouver un quelconque intérêt puisque il vint doucement passer le pouce sur le fil stoïque de la lame. Connaisseur et surtout fanatique du tranchant et de l'acier sous ses formes les plus létale, il se rendit compte que sa tâche n'allait pas être facile. Il ébaucha l'esquisse d'un sourire, et une poignée de secondes filèrent avant que, maladroitement, il ne vienne s'entailler la chair.

Fronçant les sourcils, le Sinistros lâcha le couteau sous l'effet de la surprise et de la douleur qui lançait à présent son pouce comme quelque pulsation désagréable au rythme de celles qui faisaient perler son sang sur la table, goutte par goutte. Il vint immédiatement presser son doigt pour faire cesser l'hémorragie, se retenant de jurer en Français. Son jeu d'acteur était parfait; l'expression de douleur et de colère dominée ne semblaient pas factices. Un brin agacé par ce qu'il venait de s'infliger, et pour se calmer, il inspira et soupira longuement comme pour faire redescendre la pression... Ce geste, loin d'être anodin, avait pour but de porter l'odeur de son liquide un peu plus loin, cherchant à lui faire atteindre les narines du prédateur nocturne présumé. « C'est plus tranchant que je ne le pensait... »

La douce et mélodique musique résonnait en fond mais le mal de crâne de la jeune yougoslave s'intensifia sur chaque note aigu. Cela attaquait son esprit et sa faculté à réfléchir correctement et avec lucidité. Son meilleur ami avait eu la folie de fuir après le Comte. Novenka ne put s'empêcher de se demander ce qui avait bien pu lui passer dans l'esprit pour avoir une idée aussi saugrenue que dangereuse.
Ses yeux bleus azurs ne quittaient plus le visage, peint d'une expression sibylline, de son compagnon d'aventure. Puisant une force nouvelle dans sa simple présence auprès d'elle. Un instant où le monde avait cessé de tourner pour la perdre dans un espace-temps inconnu.
Elle lui attrapa doucement la main pour se rassurer, comme elle avait l'habitude de se rassurer auprès de ses amis, bien qu'elle ignorait si l'outrage ou la familiarité serait apprécié de Westminbrook. Bien sûr, nombreux furent les bruits de couloir murmurant doucement ce nom. Elle retira doucement sa main feignant de remettre une mèche de cheveux derrière son oreille. Elle avait été familière avec un grand aristocrate, de grande renommée... Famille réputée, sang pur... Et la pauvre fille de moldus se trouvait torturer par bien des sentiments étranges à son égard. La soirée était définitivement étrange.
Mais à quoi bon les inepties, les protocoles et les titres qui ne sont que des mots de noblesse ancienne. De nos jours, il n'y a presque pas un sorcier qui n'ait du sang de moldu dans les veines.

Elle finit par virer ses pensées idiotes de sa petite caboche, pour se concentrer sur le véritable problème de la soirée. Le Comte avait disparu avec à sa suite ses trois idiots d'amis. Elle se pencha légèrement pour ne pas étendre leur conversation aux oreilles indiscrètes.

« Et bien, que sais-tu du Comte ? Est-il si dangereux que ce que l'on peut prétendre ? Chaun... Chauncey est parti à sa suite, suivit de Siobhan et Ghrystal. J'ai peur pour eux. »

Une légère pression sur son épaule la fit se détourner de sa bulle confortable encadrée par cette atmosphère qu'elle installait quand elle se retrouvait avec Rowan. La main de Benjamin lui frôla doucement l'épaule pour y enlever quelque chose. Machinalement et très naïvement, Novenka leva les yeux vers le plafond pour y voir tomber des moutons de poussières, mais il n'y eut rien d'autre que de magnifiques lumières sur un plafond immaculé. Elle posa de nouveau ses yeux sur Benjamin qui feignit l'innocence. Tout cela ne présageait rien de bon, Benjamin avait quelque chose en tête, et cela ne la rassurait pas au point qu'elle se mit à plisser des yeux un moment pour sonder l'innocent français. Rien. Il reste calme, ne fait que sourire. Écouter.
Elle reporta son attention sur Rowan.

« Est-ce qu'il a le pouvoir de les... tuer... »

Le sursaut qui suivit la fin de sa phrase rendit sa voix bien plus aiguë. Elle regarda horrifiée le doigt de Benjamin, et attrapa une serviette en coton posée négligemment devant elle et se précipita pour le lui couvrir.
Dans une français approximatif :

« Que t'arrive-t-il dans ta tête ? Tu êtes malade ou tu vouloir mourir devant le peuple ? »

Elle appuya sur la plaie sanguinolente, se rappelant sa propre plaie, sa fine et très discrète cicatrice cachée par le tulle de sa robe. Elle lui prit la main pour l'obliger à faire pression sur son pouce. Définitivement, Benjamin était imprévisible. Elle recula en gardant ses yeux rivés sur le visage de Benjamin qui lui ne quittait pas des yeux Rowan. Novenka trébucha et finit par tomber sur les fesses juste aux pieds de Rowan. Elle resta un moment sans bouger, quelques secondes. Prenant le temps de se dire que cette soirée était horrible, alors qu'elle avait tout fait pour qu'elle se passe bien.
Résignée.

Dès lors qu’il s’était positionné sur la chaise gracieusement indiquée par sa camarade, l’ancien Serpentard avait porté ses iris céruléennes sur les traits éreintés et singulièrement éprouvés de cette dernière. Il craignait d’y lire des détails indélicats – comparables à ceux vécus pendant une nuit éprouvante et cathartique – et des souffrances incertaines.

L’équilibre précaire de leur situation – tous trois installés dans une salle à la merci du bon vouloir du Comte – rendait sa vigilance pointilleuse et féroce. Sans toutefois qu’elle soit capable de se parer des atours d’un augure ; ni assez lucide ni assez mystique pour défier les lois de la magie. Quoi qu’il se savait paranoïaque – un coup d’œil dans la direction de Clemens le rassura sur la vitalité des siens – et définitivement prompte à réagir en cas de discordance apocalyptique.

Nul doute que sa plus grande erreur, grandiloquente et frissonnante, était toujours d’envisager les choses dans les pires détours possibles. Et non pas dans les moindres interstices du temps ; réels ; opportunistes ; infimes et menaçants.

Brièvement, ses doigts avaient enserré ceux de Novenka, bercé par l’empathie impérieuse qui se manifestait habituellement à lui en de telles occasions. Celles qui échappait à la dureté des convenances et de sa propre contenance ; luisante d’une faiblesse insidieuse sous l’armature implacablement déployée autour de sa chair. Pourtant étouffée, d’une main ou d’un mot, loin des regards avisés et percutants qui aimaient à se tourner dans sa direction ; surtout lorsqu’il se portait dans la proximité d’une femme.

La fragilité de son âme se devait d’être soigneusement camouflée ; en dépit des hurlements éthérés et de leurs tremblements exécrables quand, par devoir, sa volonté en venait à briser son humanité. Outrepassant les droits licites de la vie pour mener à bien ses ambitions. Des décisions gorgées de regrets. Des souffles à peine tangibles dans leur intégralité ; persistants ; lancinants.

Face à l’attente, l’ancien Serpentard s’était décidé à croiser ses mains sur le bois épais et stable de la table. « Et bien, je suis au fait des connaissances usuelles à son sujet. » Ce que tous, théoriquement, possédaient. « En plus des éléments propres aux tourments ayant affecté les étudiants. » Ceux, notamment, à l’origine d’exactions grossières. « De ce que je sais, le Comte n’apprécie pas particulièrement les offenses menées à l’encontre de sa personne et de ses propriétés. » Une once d’anxiété s’anima au fond de ses yeux. « Pour punir les contrevenants, il use de sortilèges assez divers... Sauf si nous considérons leur nature : ils témoignent tous d’un humour pour le moins douteux. »

À croire que la dérision légère et volatile de leur bienfaiteur était un facteur non négligeable de problèmes. « Toutefois, si cela peut te rassurer, il n’a jamais tué personne. » Concrètement, du moins. Le labyrinthe devait-il être considéré comme une exception ? « De ce fait, j’imagine que tes camarades... » Chauncey. « … Vont s’en sortir avec une remontrance acidulée plus que meurtrière. » Bon sang. Son cousin s’était-il vraiment engagé dans une voie aussi saugrenue... Que celle de partir à la chasse de leur supérieur ?

Une angoisse nouvelle s’immisçait désormais en lui ; l’obligeant à pincer les lèvres dans une réflexion ciselée et distante. Imprévue. Suffisante à le dispenser des formalités coutumières ; et de la main portée avec prévenance sur l’épaule de Novenka. « En toute franchise, je ne pense pas qu’il puisse les... »

L’élévation aiguë de sa compagne le rappela brutalement à la réalité. Tel un coup de fouet incisif et impromptu ; claqué avec violence contre sa propre joue. Les premières secondes embrasèrent son inquiétude vis-à-vis de l’étudiante, jusqu’à ce qu’elle se lança auprès de leur confrère de Sinistros. Le doigt vraisemblablement en sang. Dès que cette information s’imprégna dans ses veines – Elle ne risquait rien – il se détendit et prêta un intérêt médiocre à l’affaire.

Tout au plus, le jeune aristocrate s’égaya de comprendre l’apanage du français – une langue qu’il maîtrisait à la perfection – au rendu abrupt entre les lèvres de leur brune camarade. Quant à la coupure en elle-même, entre dépit et lassitude, il attendit que ses deux interlocuteurs daignent s’en occuper. Seule la chute de l’innocente persévérante le poussa à intervenir ; se relever et la redresser, elle, en silence.