Fête de la Saint-Valentin 1997

Alors que Megan dévisageait Azphel, attendant de voir s'il oserait ou pas, une personne inattendue vint se poster devant elle, lui présentant sa main. Elle le regarda surprise, les yeux chargés d'incompréhension. Que lui arrivait-il? Le regard qu'il adressa à l'Abraxan avait de quoi effrayé n'importe qui ici. Ne voulant pas provoquer un dérapage, Megan fit un sourire d'excuse à Azphel avant de saisir la main de son ancien professeur. Les deux adultes s'éloignèrent du buffet pour se poster sur la piste de danse. Megan sourit doucement à Severus alors qu'ils commencèrent à danser se foutant bien des quand dira-t-on. Megan n'était pas une experte en danse, mais lorsqu'elle le voulait, elle savait se débrouiller, et là, Severus guiderait ses pas.

Son regard bleu azuré plongé dans celui de Severus, leur corps suivant le rythme de la musique, une valse.

-Nous ne devrions pas, tu prends de gros risques Severus... lui dit-elle doucement, en suivant le rythme de la musique.

Elle était inquiète que des apprentis mangemorts en herbes puissent parler après. Bien que sa raison lui crier de cesser la danse, elle ne l'écoutait pas. Emporter par la valse, elle se laissa guider par le maître des potions sans quitter son regard onyx une seule fois.

Cela avait commencé à brûler alors que Rowan et elle s’étaient retrouvés sur le chemin de Pré-au-Lard. Une colère lente et sourde, qui avait pris vie au fur et à mesure de leur discussion – dirigée contre tous ces évènements qui semblaient être décidés à les abattre, à les faire plonger ; à les attirer vers les profondeurs alors qu’ils tentaient désespérément de rester à la surface. Une colère si différente de celle que Blaise lui faisait parfois ressentir ; elle n’était ni vive, ni acide dans ses veines. Elle était froide et latente, attendant l’opportunité parfaite pour s’exposer.

Et un nom s’y lia alors qu’elle ajustait le costume de son fiancé, avec des gestes d’autant plus précautionneux et affectueux qu’il se crispait. L’oreille attentive à ses confidences, le silence de celle qui comprenait et n’en révèlerait jamais un mot. Son regard, lorsqu’il croisait celui de son frère, suffisait ; elle comprenait. Et ne l’acceptait pas.

Comment aurait-elle pu tolérer un instant qu’il soit aussi affaibli et défait ? Il avait toujours été un repère pour elle, un modèle, un rocher sur lequel s’ancrer ; il était de ceux qui ne sombraient pour aucune raison, et pourtant quelque chose l’avait fait sombrer. Quelqu’un.

Alors Daphné souriait au bras de son promis, veillait à ce que la soirée se déroule bien, resplendissait dans cette robe que Blaise lui avait offerte – mais Daphné était en colère, palpitante de ressentiment et d’amertume. Le besoin de dissimuler cette rage silencieuse dans le coffre ne se fit pas ressentir, car elle était déjà lovée contre elle, indissociable de sa profonde affection pour Rowan. Elle ne la paralyserait pas, bien au contraire.

« J’en suis ravie » répondit-elle avec gaieté. Elle l’était véritablement.

Mais les prunelles de Rowan l’empêchait de pleinement goûter à cette fierté d’avoir organisé quelque chose d’aussi grand avec Isolde.

« Je ne suis pas censée aider, mais… la demoiselle aux cheveux colorés qui parle au professeur Fitzsimmons est préfète, ainsi qu’une de celles aux côtés de Drago et Blaise. »

Ses yeux, scrutant la foule, s’arrêtèrent brièvement sur une chevelure brune, mais l’arrivée d’Harmony l’empêcha de trop se perdre en conjectures.

« Harmony » salua-t-elle avec chaleur. « Je t’en remercie. »

Elle profita de la question qu’adressa Harmony a Rowan pour détailler la tenue de la jeune Serpentard, et les chaussettes lui attirèrent un sourire – elle appréciait finalement beaucoup plus sa cadette qu’elle ne l’aurait cru.

Le regard insistant de Blaise finit par attirer son attention, et elle ne put manquer l’insolence débordante qui exsudait de son sourire. Elle lui répondit par une légère moue, peu convaincue par l’or qui brillait sur ses dents – mais sa fierté manifeste lorsqu’il s’attardait sur la robe l’égaya, la poussa à esquisser un sourire amusé. Elle ne l’avait choisie qu’en espérant qu’il se tiendrait tranquille après cet acte de bonne foi, et ne s’était visiblement pas trompée. En revanche, la présence d’Alycia à ses côtés…

Pour le moment, songea-t-elle en offrant de nouveau toute son attention à son cavalier, Rowan se devait d’être le centre de son monde. Harmony ne serait sans doute pas celle qui risquait de le faire vaciller, mais elle se devait de demeurer attentive au moindre signe. Car la douleur de Rowan la rendait plus forte ; il avait été son rempart au banquet de Noël, et elle serait donc le sien, à présent.

C'était sans doute pour cela qu'elle était persuadée, plus que jamais, que rien ne pourrait jamais leur arriver, que personne ne pourrait les attirer vers le fond tant qu'ils seraient ensembles.

Les phrases de Clemens ne furent pas froides, mais ses yeux et son ton si. Cela aurait pu échapper à la jeune française si justement elle n’avait pas pour habitude de remarquer ce genre de changement. Elle fut blessée mais ne dit rien. Elle était lasse. Sûrement que ses histoires avec Rowan n’étaient pas étrangères à tout cela. Elle n’ajouta rien. Le compliment du Professeur Fitzsimmons fut néanmoins salvateur. Cela lui parut étrange que l’aide dont elle avait besoin pour tenir encore un peu et ne pas éclater en sanglot lui vienne d’une personne qui avait si peu d’estime pour elle. D’un regard profond elle le remercia. Elle observa ensuite s’éloigner le sinistros avec tristesse et déception, et seulement lorsqu’il fut hors de portée elle murmura un « bonne soirée, Clemens ».

Puis elle se tourna vers la jeune étudiante de Poudlard. Elle s’obligea à afficher un sourire de rigueur, la pire des choses aurait été de lui faire subir son mal-être. Il n’existait rien de pire que ces gens qui vous imposaient leurs tracas.

- Eh bien je ne suis pas sûre d’être adorable ou que mes lèvres soient gourmandes, mais j’ai effectivement les yeux marrons et je crains que la dernière phrase ne soit écrite par quelqu’un qui me connaît trop bien.

Elle s’arrêta quelques secondes de parler, juste le temps de relire une dernière fois son carton. Quinlan Fitzsimmons avait filé, sûrement parti retrouvé lui aussi la personne cachée sous les vers.

- Alors Rachel, c’est bien ça ? Sur le mien est écrit « Sa tête est rouge, son cœur est bleu, plus rien ne bouge, quand elle vous veut ». J’ai supposé que la première phrase te correspondait bien. Le reste aussi ?

Une nouvelle fois elle porta son punch à ses lèvres, se maudissant d’en abuser autant. Elle n’était pas en état, mais en réalité elle avait besoin de trouver cet état où la vie semblait prendre une couleur moins importante. Elle en avait diablement besoin, avant elle avait pu se contenter de s’enfermer dans ses rêves d’enfant, mais elle avait passé l’âge de cela et ses techniques ne marchaient plus. Elle avait donc dû en trouver d’autres. Tandis qu’elle buvait elle aperçut Isolde au loin, discutant joyeusement avec Neal. Une légère étincelle intérieure eut lieu, le monde pouvait être joli parfois. Il ne l’était pas pour elle, voilà tout.

Mon verre de punch est vide. J'avais soif, on dirait. Je sens déjà l'alcool ramollir mes jambes. La Saint-Valentin ne me fait pas un bon effet. Tout ce que j'ai en tête, ce sont toutes ces soirées que j'ai passées avec mon premier véritable amour, mon seul amour, dans des salles semblables avec des invités semblables. Il faut vraiment que je me change les idées. Je décide de laisser tomber le punch pour le moment, parce que je sens que j'ai trop soif.   La fête bat son plein et j'essaie de me distraire en détaillant les convives. Plusieurs magnifiques tenues (celle de Jessica, une Phénix que je connais de vue, est à couper le souffle), quelques accessoires géniaux (les chaussures roses à tête de licornes d'Isolde sont sublimes, le haut-de-forme de Neal aussi, la guitare de Clemens, cet espèce de collier qu'un jeune porte autour du cou...) et beaucoup d'insouciance, de légèreté. Avec tout ce qui se passe en ce moment dans le monde, j'ai du mal à croire que les gens soient aussi détendus. Ah et puis merde, je veux du punch.

Alors que je dépose mon verre vide sur la table, un étudiant me salue. J'arrive pas à me rappeler son nom, mais son visage est difficile à oublier. Tiens, peut-être que la soirée ne sera pas si moche que ça, finalement. Un peu de flirt en cette soirée hommage à l'amour, c'est peut-être tout à fait ce qu'il me faut.

- Bonsoir.

Je lui offre un sourire ravissant avant de m'apprêter à faire un commentaire quelconque sur la soirée, pour créer la complicité entre nous. J'ai pas le temps qu'il remplit un deuxième verre et me plante là pour retourner vers... Megan. Manquait plus que ça. La dernière personne que j'ai envie de voir ici, celle qui se promène avec tellement de fantômes autour, les fantômes de mon passé, ceux qui me hantent encore.

Meh. Je me détourne, révulsée. Pourquoi pas me concentrer sur ce fameux poème qu'on m'a remis... Peut-être trouverai-je mon âme soeur? Je relis les vers, ça me dit rien. Enfin si, ça parle de fleurs. C'est déjà un indice. Et y a cette phrase qui laisse entendre que le coeur de la personne n'est jamais vieux. Un coeur d'enfant ? Un vieux qui garde son coeur d'enfant? Un vieux qui aime les fleurs, les sourires et qui a un coeur d'enfant? Avec quel genre de nounours on m'a matchée ?! Si on appuie sur son ventre est-ce qu'il nous fait des câlins?

Mon regard découragé balaie l'assemblée. J'ai aucune idée de qui ça peut être. En même temps, les énigmes, ça a le don de raviver ma motivation. J'aime les énigmes. Et je veux relever le défi. Je fais marcher mes neurones à toute vitesse, me prenant finalement au jeu. Isolde? Je sais qu'Isolde aime les fleurs. Enfin la botanique... c'pas tout à fait pareil. Hm... Professeur Chourave? Non quand même ce serait bizarre. Quoi que ça pourrait bien convenir. Sauf le vers qui dit que la personne cache tout ça sur un air sérieux... Chourave est pas si sérieuse. OH. Neal? Neal le jardinier? Neal le ténébreux aux yeux rieurs sous un air sérieux?

Je traverse la salle pour aller le rejoindre en mode vérification d'hypothèse 2.0, mais je me rends compte qu'il est déjà occupé sur la piste de danse avec Isolde. Je les regarde danser, un sourire sur les lèvres, enfin détendue. Ils ont l'air de beaucoup s'amuser et leur charisme débordant se répand jusqu'à moi. J'attendrai la fin de la danse.  

Jessica était en compagnie de son meilleur ami ainsi que d’un élève de Poudlard, et bientôt rejointe par Alex un Sinistros de Haveirson. Après avoir étudié son carton, elle était convaincue que celui ou celle qu’elle cherchait était de la maison des Verts et Argents. Ça c’était la première étape. Maintenant la deuxième, était de savoir, qui des convives, appartenaient à cette maison justement. Et c’est là qu’elle avait demandé de l’aide à ceux qui l’entouraient. La première réponse venait de ‘Ron, il lui indiqua que le seul Serpentard qu’il connaissait était Drago, le désignant du regard. Regard que Jess suivi. Et effectivement elle vit le petit blondinet entouré par plusieurs jeunes filles et un garçon… D’ailleurs ce garçon, pouvait correspondre à la description de son poème… Elle remarqua aussi Clemens qui venait de rejoindre le petit groupe. Que faisait-il parmi eux ? Surement, était-il à la recherche de son ou sa valentin(e) aussi ? Elle sourit à cette pensée en repensant à la nouvelle qu’il lui avait annoncée quelques semaines plus tôt.

Tout comme elle, Clemens avait déjà trouvé son vrai Valentin. Mais Jess n’en avait parlé à personne, même pas à Dean, pour honorer la promesse qu’elle avait faite à Clem. Bon, en même temps, ce n’était pas compliqué pour ça. Entre deux disputes, ce n’était certainement pas de Clem, qu’ils allaient parler ! En repensant à Dean, elle ne l’avait pas encore vu… Etait-il venu finalement ? Elle avait reçu sa carte, mais elle n’avait pas eu le temps de lui répondre. Avait-il pris cela pour un refus et avait-il décidé de ne pas venir finalement. Elle espérait que non. Elle voulait le voir. Ce soir spécialement…

Et alors qu’elle cherchait des yeux le jeune Français, ‘Ron, pour ne pas changer avait décidé de faire le mariole. Il s’était mis debout sur la table la plus proche, et avait crié qui était Rupert. Il avait de ses idées parfois ! Et Jess en avait juste ras le bol de le rappeler à l’ordre… D’ailleurs le professeur Mac Gonagall s’en était chargée pour le coup. Avec un sourire désespéré elle se reconcentra sur Cyril, c’était ainsi qu’il s’appelait, l’élevé de Poudlard, qui était venu à sa rencontre, et il était de Gryffondor.

- Je ne sais plus quoi faire de lui…

Dit-elle à Cyril en levant les yeux au ciel. Puis elle se rappela qu’il avait demandé s’il y avait un signe pour reconnaitre les maisons de Haveirson.

- Malheureusement non, on n’a pas de signes distincts, par contre si tu cherches des Abraxans, attends…

Elle regarda autour d’elle et vit Megan, près du bar avec un jeune homme que Jessica ne connaissait pas, et Juliet un peu plus loin assise

- Tu vois la fille blonde, près du bar ? Et celle assise un peu plus loin ? Elles sont toutes les deux de la confrérie d’Abraxan… Si ça peut t’aider.

Puis Cyril l’aida en retour en répertoriant les Serpentards qui se trouvaient dans la pièce. Il désigna tout d’abord la blondinette qui avait fait le discours en compagnie d’Isou. Puis il avait montré le petit groupe formé autour de Malefoy. Apparemment ils étaient tous de la maison de Salazar. Mis à part Clemens évidemment… Du coup elle était maintenant quasi sure d’avoir trouvé celui qu’elle devait chercher. Enfin, si c’était un ami à Malefoy, elle risquait de ne pas tellement l’apprécier, mais le jeu était ainsi fait ! Elle décida d’attendre 23 heures pour aller se présenter…

- Il s’appelle Clemens, et merci pour ton aide je pense avoir trouvé celui que je dois chercher !

Alors que Cyril semblait reparti dans ses recherches, Jessica se retrouva seule avec Alex. Tout en discutant avec le jeune homme qu’elle ne connaissait pas plus que ça, au final, son regard s’arrêta sur un jeune homme un peu plus loin. Elle ne le voyait que de dos, mais elle savait que c’était lui. Aussi, après s’être excusé auprès d’Alex, elle se dirigea vers le jeune blond

- Salut …

Dit-elle à Dean qui semblait lui aussi chercher quelqu’un, comme la majorité des convives, direz-vous…

- … Alors t’as trouvé ta Valentine ?

Dit-elle. La dernière fois qu’ils s’étaient vus, elle était partie en le laissant planté là où ils étaient après une énième dispute. Alors autant dire, qu’elle ne savait pas encore comme elle devait se comporter avec lui ce soir…

Evidement que Monsieur Zabini, ne pouvait s’empêcher d’ajouter une petite phrase toujours avec son air railleur qui l’énervait au plus haut point. Et apparemment elle n’était pas la seule à trouver son attitude hautaine et énervante. Alycia était du même avis qu’elle, tout comme la majorité des élèves de Poudlard d’ailleurs...

Bref en guise de réponse à sa remarque non énoncée, il se contente de lui adresser son plus beau (horrible) sourire encore plus embelli par ce dentier indescriptible. Bref, elle plaignait sa Valentine du soir. Et alors qu’Angel avait essayé de les rebooster, Blaise avait répondu que pour faire la fête, ils savaient très bien la faire… Et comment ! Vu comment s’était terminée la dernière… Angel s’était réveillée le lendemain avec une belle gueule de bois, dans le canapé de la salle commune. Et ce n’était pas mieux pour les autres participants.

- Ouais si on veut …

Au même instant, une autre serpentard vint les rejoindre. Il s’agissait de Charlie, une petite blondinette, d’un an son ainée, qu’Angel avait croisé plusieurs fois dans la salle commune mais avec qui elle n’avait jamais eu l’occasion de parler. D’ailleurs après un bref salut par politesse, elle s’était directement adresse au jeune Malefoy…

Quelques instants plus tard, ce fut au tour d’un jeune adulte, surement un étudiant d’Hav qui devait aussi être un stagiaire ou quelque chose de ce genre, à Poudlard, vu qu’elle l’y avait croisée, de les rejoindre. Il les salua respectueusement avant de s’adresser à la belle brune. D’après ces dires, elle pouvait correspondre à la description qu’il venait de faire. D’ailleurs elle trouvait cela très flatteur, mais avant qu’elle ne puisse lui répondre, EVIDEMENT, Monsieur Malefoy se permit de le faire à sa place. Et cerise sur le gâteau, c’était pour dire qu’Angel ne pouvait être cette fille là… Merci Malefoy !!! Elle se tourna vers le blondinet les mains sur ses hanches, essayant de prendre un air sévère

- Et pourquoi pas Malefoy !!! Tu ne me trouves pas assez bien cultivée et studieuse pour être érudite ?!! Et puis ce n’est pas à toi qu’il s’adresse a ce que je sache !!

Se tournant ensuite, vers Clemens, elle sortit son carton pour relire son poème et regarder à nouveau le jeune homme

- Hum, en fait ça peut carrément être vous !! Enfin vous êtes bien de la confrérie de Sinistros ? Parce que d’après mon texte, la signification du « le grand chien hurle », c’est forcément un Sinistros… à moins que je fasse complètement fausse route !

Elle relit pour une énième fois ce foutu poème, et releva la tête vers Clemens

- Est-ce que vous connaissez un autre Sinistros brun aux yeux clairs ?

Toutes ses pensées avaient été cernées avec une justesse macabre, en un mouvement mental qui lui coûtait de ses forces retrouvées et qui n’autorisait aucun vacillement possible. Certes, aux yeux de ses collègues et de ses camarades, sa contenance guindée semblait luire d’une cuirasse de glace et de fierté difficilement atteignable. Toutefois, la cruelle vérité, celle s’exténuant à étouffer le grondement de ses entrailles loin des perceptions humaines, était toute autre. Il était fragile.

Et sa promise l’avait compris sans en souffler mot dès les premiers regards du jour.

Derrière les apparences, le jeune aristocrate s’accrochait à la présence affirmée et rayonnante de sa fiancée. Sa sœur de cœur, presque de sang, qui parvenait discrètement à le soutenir. Il ne pouvait que l’en remercier du regard, avec une affection qui ne prêtait attention à rien d’autre dans leur environnement.

Il ne toucherait pas la boîte de Pandore. Ni maintenant, ni plus tard. C’était la condition de sa survie psychique pour la soirée.

« Et bien... » Usant d’une précaution nonchalante, il porta brièvement son regard sur la susnommée préfète aux cheveux de feu. Puis sur l’autre, à proximité de l’héritier Malefoy. « Selon mon carton, il est indiqué que la préfète en question est une ‘déesse aux cheveux châtains’. Je ne pense guère me tromper en estimant que la jeune femme aux côtés de Drago soit ma valentine. » Le dernier terme prononcé lui écorcha presque les lèvres. Non pas qu’il se trouva gêné de prêter son bras à pareille divinité – elle ne lui semblait d’ailleurs pas inconnue maintenant qu’il portait ses iris céruléennes dans sa direction -  mais ce mot lui en rappelait d’autres auxquels il n’avait aucune envie de songer. « Je te remercie de ton aide, mon amie. »

À cet instant, une frêle silhouette se manifesta à leur proximité. « Bonsoir à vous, mademoiselle Sharen. » Rowan inclina respectueusement le visage, toujours ancré dans une posture noble et droite. Assurément sérieuse. Empreinte inaliénable de son lignage et de son éducation. « Tout va pour le mieux, cette soirée à de quoi réchauffer bien des cœurs. Il est plaisant de voir nos proches et nos confrères oublier la noirceur des derniers jours au profit d’un bal. »

Un soupçon infime d’égayement glissa sur ses traits. « Si je peux me permettre, un oiseau de feu  doit certainement faire référence au mystique phénix. Il est, d’ailleurs, l’emblème de la confrérie portant son nom à Haveirson. » Maîtrisé jusqu’à la perfection, le coup, imprévu et douloureux, se déchira en silence au fond de son âme. Rien ne vint trahir cet autre souvenir. Englouti. Démantelé. Rien ne vint le bousculer, lui. Sa contenance tenait. Nourrie de la puissance et de la protection de Daphné. « Malheureusement, je ne connais aucun des jeunes hommes affiliés à ladite confrérie. J’en suis navré. »

Il ne détacha pas son regard de la quatrième année, s’autorisant une expression d’excuse et de compassion mêlées. Lui permettant de ne pas remarquer la valse impromptue d’un directeur de maison célèbre pour sa froideur et d’une blonde choixpeau floue. Ni l’insolence latente du jeune Zabini. « Quant à ma recherche... Je ne crains pas me tromper en disant que j’ai trouvé la muse dont les vers portent l’ode. Il ne me reste qu’à la rejoindre.... En temps voulu. » Ses yeux se tournèrent alors vers sa compagne, s’assurant de son soutien.

J'étais à deux doigts de sauter au cou de Blaise pour l'asséner de coups, qu'il se taise. Personne ne se rappelait ce dérapage d'il y a plusieurs mois, et personne n'aurait besoin de s'en souvenir... Même pas moi. A croire que Blaise me faisait quelque chose, c'était insultant pour ma personne. Je ne suis pas amoureuse de ce bougre ! Jamais. Et même si je l'étais, je ne l'accepterai pas ! Sa réflexion était absolument tendancieuse et il ne fallait pas être bête pour comprendre que les deux compagnons de maison avaient déjà eu un moment d'égarement et laisser leurs langues se découvrir. Berk, stop, je ne veux plus jamais y penser.
Je suis prête à lui en coller une, et oui, avec Zabini, des fois les mots ne suffisent pas. Mais Malefoy me fait taire et arrêter mes pulsions d'un simple regard. Je foudroie Blaise du regard, insistant pour lui faire comprendre qu'il a de la chance et je m'en vais chercher rapidement quelque chose à boire... Pour Drago, pour moi... Et malgré tout pour Blaise.
Je leur tends leur verre quand Angel arrive. Bah tant pis, si elle a soif, elle ira toute seule.

Je souris pour la remercier silencieusement, je ne suis pas très à l'aise pour faire des compliments. Je suis assez égoïste et narcissique, je suis meilleure que tout le monde, et même si Angel est magnifique, je ne peux pas admettre qu'elle est bien plus jolie que moi. Alors je me tais et je bois mon verre en silence, prenant soin de pas croiser le regard hagard de Blaise. Alors que les échanges banals se font entre eux, je regarde un peu plus loin un jeune homme, plus âgé que moi, monter sur la table. Il beugle qu'il cherche Rupert, la moitié de la salle l'ignore, et je ne peux m'empêcher de sourire en coin. Je termine mon verre que je pose sur une chaise vide. Et le spectacle est hilarant, bien que je ne rigole pas vraiment, juste mon petit sourire en coin satisfait. McGonagall le prie de descendre et s'évertue à lui passer un savon. Cette fête est incroyablement cocasse.
Je me surprends à regarder Blaise presqu'avec douceur avant de froncer les sourcils et être prête à attaquer de nouveau pour cacher mon malaise quand Charlie rejoint le groupe des Serpentard.
Sa remarque provoque la même chose chez tout le monde, on regarde tous le curieux collier de Drago mais je m'en détourne assez rapidement, je ne suis pas assez intéressée pour m'y attarder puis cela embête Malefoy.
Je ne connais pas bien Charlie, je l'ai croisé quelques fois dans les couloirs mais sans plus. Elle était belle et mystérieuse. Un peu un exemple pour moi, on ne savait jamais ce qu'elle pensait. Elle était dans un monde à part, et ses cheveux étaient juste magnifique. Alors qu'Angel était ma copine de dortoir, je la connaissais bien... Trop bien même pour ne faire qu'échanger des banalités avec elle, malheureusement. Et elle était pipelette la brunette !

L’assistant de McGonagall s'approcha alors de leur groupe, et je lui fis un signe de tête pour répondre à son salut. Il était exactement comme décrit sur mon carton. Des boucles sombres qui reflétaient une couleur dorée avec des yeux céruléens, un homme au grand chien, on n'est pas sans savoir que Mr Neubach était de la confrérie des Sinistros, qui ne manquera pas de vous faire valser... Il me semble qu'il aime la musique.
C'est amusant de voir les deux protagonistes se perdre dans des suppositions absurdes. Il est évident que Mr Neubach est l'homme de mon carton mais je ne dis rien encore. Non, c'est Drago qui parle, et qui parle durement d'ailleurs. Je n'étais pas allée parler au professeur parce que d'une: je voulais rester avec Drago, et de deux: parce que c'était une évidence incroyable qu'il était l'homme de mon carton,  je n'avais pas besoin de chercher. Mais c'est l'ambition d'Angel qui m'amuse le plus, l'espoir qu'elle ait elle-même trouvé un homme qui corresponde, et elle pourrait sans doute me faire douter, mais je suis Alycia, je ne doute pas !

Je ne suis pas méchante, mais il faut que j'intervienne.

« Euh. Angel, sans vouloir te couper, je pense que Mr Neubach est le valentin de mon carton. Si je lis mon carton, il parle de boucles sombres aux reflets dorés, de yeux céruléens et d'un grand chien. Il est clair, qu'on y voit l'assistant du professeur de métamorphose quand on le lit. Tu dois sûrement avoir quelqu'un d'autre. »

Je me tourne vers le professeur Neubach, et je penche la tête sur le côté, comme j'ai l'habitude de faire quand je réfléchis.

« Je ne suis pas venue vous voir, non pas parce que vous étiez occupé, mais parce que c'était une évidence. Je ne suis pas assez présomptueuse pour me considérer comme érudite... Quoi que si. J'espère que je ne fais pas fausse route comme Angel, mais ce n'est pas mon genre. »

Je souris légèrement en coin, de façon hautaine comme à mon habitude quand je suis sûre de moi. Et pour une raison qui m'échappe, encore une fois, mon sourire s'adresse à Blaise. Ça commence à bien faire. Je me rapproche à nouveau de Drago pour ne pas avoir à supporter davantage la présence de Blaise, qu'ils soient amis cela m'est égal, mais si Drago est présent, je serai plus apte à tenir Zabini éloigné de moi.

« Maintenant que nous sommes fixés, si nous allions danser ? »

Voilà, comme ça je m'éloigne un peu de Blaise. Je balaie la foule du regard et je remarque Cyril, je souris en coin et je rosis comme si personne ne devait savoir qu'on se connaissait... Alors que nous sommes dans la même classe, mais que voulez-vous, on est reste jeunes et cons.

 

Isolde éclata de rire en voyant Neal faire des grands gestes théatraux, complètement crédibles bien sûr. Elle le laissa prendre sa main et la serra un peu alors qu'il la remerciait.

Le chapeau qu'elle avait choisi et préparé n'était pas très extravagant, mais elle ignorait quel degré d'excentricité Neal accepterait de porter. Le côté classique du couvre-chef était néanmoins compensé par le fait qu'il jurait complètement avec le beige et le bleu de son costume. Les remerciements du professeur et la proposition de danse étirèrent encore un peu le sourire sur les joues d'Isolde.

- Je veux bien valser, mais je te préviens, je ne sais pas du tout danser ça ! J'espère que tu n'as pas trop peur pour tes chaussures.

Après tout, elle avait bien dansé le swing sur de l'électro au Dark Night, avec Clemens. La valse sur du rock, c'était un cran en-dessous dans le domaine du farfelu. Même si le rythme était beaucoup trop rapide pour ses pas hésitants de débutante. Le pauvre Neal vit ses pieds écrasés une ou deux fois avant que le groupe n'entame une véritable valse, au rythme plus lent. Un peu plus adroite mais les yeux toujours fixés sur ses pieds, Isolde laissa le botaniste mener la danse, laissant un éclat de rire s'échapper quand elle manqua de tomber sur le couple voisin. Le morceau fini, elle fit une profonde révérence devant le professeur.

- Merci de m'avoir accordé cette valse, monsieur Fitzsimmons, dit-elle avec un grand sourire coloré d'une touche espiègle.

Alors qu'elle se redressait, son regard croisa celui de Lanalia, debout un peu plus loin, qui observait la scène d'un air attendri. Isolde sentit ses joues s'empourprer légèrement. La jeune femme voulait visiblement leur parler, et elle l'invita de la main à les rejoindre alors qu'il quittaient le cercle des danseurs.

- Bonsoir Lanalia, tu vas bien ? La fête te plaît ? Tes chaussures sont magnifiques ! Et franchement décalées, tu t'es donné du mal !

Le punch avait l'air de lui plaire également, mais Isolde avait décidé qu'elle en resterait éloignée. Elle faisait partie de l'organisation, elle se devait de rester sobre. Un minimum en tout cas.

- T'as déjà trouvé ton ou ta Valentin.e ? demanda-t-elle à la jeune femme. Le mien est à Gryffondor, mais la description est assez floue pour que j'hésite un peu.

Elle devrait sûrement déjà être en train de chercher, mais elle n'avait pas envie de quitter la compagnie de Neal aussi vite. Comme Clemens, elle avait l'avantage d'être stagiaire à Poudlard et donc de connaître la plupart des têtes présentes, mais elle voyait déjà plusieurs garçons qui correspondaient à son poème. En espérant que son Valentin soit plus perspicace qu'elle...

Le petit comité d’organisation de cette fête, mené par deux jeunes femmes exceptionnelles, comprenait également Rupert et Quinlan. Cela dit, ces deux derniers avaient suivi la préparation de loin, se contentant de leur domaine propre. Pour le professeur de sciences politiques, cela consistait en l’invitation d’un groupe de musique. Pour cela, il n’avait pas cherché bien loin. Cela faisait un bail qu’il n’avait plus vu Antoine et c’était le prétexte idéal pour former à nouveau le Hansa Ton Band. A force de harceler son ami, celui-ci avait daigné lui accorder l’honneur de sa présence.
Après tout, il était célibataire, il ne devait pas avoir d’autre plan pour la Saint Valentin ! Bref, Rupert lui avait demandé de contacter son batteur, sa pianiste et il convierait son amie saxophoniste. Avec cet ensemble, ils pourraient couvrir un répertoire large autour du thème rock’n roll de la soirée avec une touche de jazz. Cela promettait une expérience musicale intéressante. Ils allaient bien se marrer.

Bien entendu, lorsque le glas du 6 février tomba, l’atmosphère, soudainement lourde, entrava l’enthousiasme du musicien. Antoine, très vite mis au courant, lui indiqua qu’il viendrait plus tôt, histoire de pouvoir assister aux funérailles. Il avait toujours suivi les histoires alambiquées des amoureux transis et avait connu Rupert au plus mal, quatre ans auparavant, alors que le divorce passait pour la seule issue possible. Il serait donc là.

Ainsi, Rupert put tenir bon. Ne pas s’effondrer. Se focaliser sur la principale conséquence de l’horreur : il devenait le seul parent légal de sa fille. Toutefois, personne ne pouvait ignorer son mal-être. Il errait comme un fantôme dans le château. Silencieux. Ses cours étaient menés avec un professionnalisme accru, d’autant plus sensible aux erreurs et imprécisions. Il relevait les interventions intéressantes avec froideur.
Du moment qu’il tenait debout.

Il avait hésité à venir à la fête et avait été dispensé de la recherche de l’âme soeur. Le cynisme de ce jeu eut été trop cruel. Les répétitions avaient fini par ragaillardir l’Irlandais, qui enfouissait la vacuité de son être dans une musique qui, même quand elle suivait un air guilleret, était trahie par l’émotion à fleur de peau. Une thérapie sans en être.
Son meilleur ami se donnait du mal pour lui faire oublier l’espace d’une soirée toute la signification de ce crime. Et dans un sourire large, Rupert signait un accord tacite. Ok, ce soir, je laisse tout de côté.

Heureusement, il n’y avait que du punch à boire. Ça éviterait les dommages collatéraux.

Bref, le groupe s’était installé sur scène et, après le spectacle donné par Isolde et un élève de Serpentard, ils lancèrent une forme de medley. Le but étant de créer une transition entre Queen et un swing. Toutefois, on leur fit comprendre que certains attendaient au début du bal, une danse plus traditionnelle. Les deux amis se lancèrent un regard amusé. Ils avaient dans leur répertoire berlinois une polka sortie de derrière les fagots, bien épicée. Mais bon, on éviterait de brusquer les convives. Même si nombre d’entre eux étaient fascinés par leurs cartons pour l’heure, le but était de leur donner envie de danser. Pas de fuir.

Et puis, après consultation, ils optèrent pour une valse. Mais pas n’importe laquelle. Ça allait être drôle. Et Rupert reprenait du poil de la bête. Il chercha sa contrebasse à l’arrière de la scène. La pianiste et lui lancèrent une mélodie ternaire classique. Bien vite ce fut ennuyeux. C’était là que la guitare s’insérait et après le fameux cri, Antoine se mit à chanter la Rebel Waltz. Ils accélérèrent le rythme, Rupert repassant à la guitare basse électrique. C’était suffisamment décaler pour perturber les danseurs habitués à la rigidité de la valse viennoise. On était pas là pour manger des Mozart Kugeln après tout.

C’était bon, ils étaient lancés et l’Irlandais secondait même son ami sur une seconde voix. Allez, encore plus de bizarrerie ! C’était bien le thème, non ? Rock n’Choc ?
Suivraient quelques morceaux rock, puis un swing où Antoine excellerait. Il semblait y avoir des amateurs sur la piste. D’ailleurs, un jeune homme montait sur une table et hurlait le nom du bassiste. Antoine se tournait vers lui, hilare, l’air de dire qu’il avait déjà des fans. A la moquerie, le professeur de droit salua l’étudiant en riant.

Le réel était loin, le temps de quelques accords.

La musique (trololol):